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24/04/2025 | FRANCE | N°24MA01792

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre, 24 avril 2025, 24MA01792


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de son entreprise individuelle " Le Bilboq " au titre de la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011, d'une part, et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012, d'autre part.



Par un jugement n° 19003

33 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.



Procédure...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de son entreprise individuelle " Le Bilboq " au titre de la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011, d'une part, et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012, d'autre part.

Par un jugement n° 1900333 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour avant renvoi :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 1er novembre 2020, 7 décembre 2020, 27 mai 2021 et 23 juillet 2021, l'entreprise individuelle Le Bilboq et M. A..., représentés par Me Albert, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia du 1er octobre 2020 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de l'entreprise individuelle Le Bilboq au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. A... a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 ;

3°) de prononcer le maintien du sursis de paiement des créances en litige ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision de rejet de la réclamation relative à l'impôt sur le revenu a été envoyée à l'entreprise individuelle et non à M. A... ;

- le paragraphe n° 190 de la doctrine administrative référencée BOI-CTX-PREA-10-80 a ainsi été méconnu ;

- ils n'ont pu se défendre utilement dès lors que l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas été notifié, en méconnaissance des articles L. 59-1 et R. 59-1 du livre des procédures fiscales ;

- la charge de la preuve incombe à l'administration, dès lors que l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas été notifié ;

- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires est radicalement viciée ou excessivement sommaire ;

- la méthode alternative de reconstitution des recettes de l'année 2011 fondée sur les langoustes est plus pertinente ;

- la majoration pour manquement délibéré dont l'administration a fait application est insuffisamment motivée ;

- l'administration n'était pas fondée à faire application de cette majoration.

Par des mémoires en défense enregistrés les 21 avril 2021 et 28 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le moyen tiré de l'irrégularité de la notification de la décision de rejet de la réclamation est inopérant ;

- les autres moyens invoqués par les appelants ne sont pas fondés.

Par un arrêt n° 20MA04057 du 25 novembre 2022, la Cour a rejeté la requête de l'entreprise individuelle Le Bilboq et de M. A....

Par une décision n° 470 817 du 10 juillet 2024, le Conseil d'Etat a, sur pourvoi de l'entreprise individuelle Le Bilboq et de M. A..., annulé l'arrêt du 25 novembre 2022 et renvoyé l'affaire à la Cour.

Procédure devant la Cour après renvoi :

Par des mémoires enregistrés le 10 septembre 2024, le 17 décembre 2024 et le 11 mars 2025, l'entreprise individuelle Le Bilboq et M. A... concluent aux mêmes fins que précédemment.

Par des mémoires, enregistrés le 18 novembre 2024, le 6 mars 2025 et le 21 mars 2025, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut aux mêmes fins que précédemment.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a exploité jusqu'au 8 juin 2012 une entreprise individuelle de restauration sous l'enseigne " Le Bilboq " à Ajaccio (Corse-du-Sud), laquelle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2011 au 8 juin 2012. A l'issue de cette vérification, l'administration a notifié à M. A..., par une proposition de rectification du 17 septembre 2014, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2011 et 2012. Par un jugement du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de M. A... tendant à la décharge de ces impositions. Par un arrêt du 25 novembre 2022, la Cour a rejeté l'appel que l'entreprise individuelle Le Bilboq et M. A... avaient formé contre ce jugement. Par une décision du 10 juillet 2024, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la Cour.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, l'irrégularité de la notification de la décision de rejet d'une réclamation par l'administration n'a d'incidence, le cas échéant, que sur le délai imparti au contribuable pour contester cette décision et reste sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition. Par suite, et en tout état de cause, la circonstance que la décision de rejet de la réclamation relative aux suppléments d'impôt sur le revenu ait été notifiée à l'adresse de l'entreprise individuelle Le Bilboq reste sans incidence sur la procédure d'imposition suivie à l'égard de M. A.... Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 59-1 du livre des procédures fiscales : " L'administration notifie l'avis de la commission ou du comité consultatif au contribuable et l'informe en même temps du chiffre qu'elle se propose de retenir comme base d'imposition ". Aux termes de l'article R. 60-3 de ce livre : " L'avis ou la décision de la commission départementale ou nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires doit être motivé. Il est notifié au contribuable par l'administration des impôts ".

4. Il résulte de l'instruction que M. A... s'est vu notifier par l'administration fiscale, le 17 juin 2017, soit antérieurement à la mise en recouvrement des impositions litigieuses, une lettre modèle n° 2230 datée du 1er juin 2017. Cette lettre, qui lui notifiait le montant des bases d'imposition retenues, l'informait également de l'avis rendu le 3 avril 2017 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires sur le désaccord dont elle avait été saisie et sur la composition de cette commission. Cette lettre reproduisait par ailleurs, dans son intégralité, l'avis motivé rendu par cette commission. Ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, aucune des dispositions précitées du livre des procédures fiscales n'imposait de notifier une ampliation de la minute de l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Il suit de là que les appelants, qui étaient au demeurant en mesure de solliciter la communication de ce document, n'ont été privés d'aucune des garanties de la procédure contradictoire. Par suite, le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition serait entachée d'irrégularité à défaut de notification régulière de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires doit être écarté.

5. En troisième lieu, les requérants ne peuvent se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOI-CTX-PREA-10-80, § 190 laquelle, traitant de questions relatives à la procédure d'imposition, ne peut être considérée comme comportant une interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

6. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions ou le comité mentionnés à l'article L. 59 (...) est saisi d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission ou le comité. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou du comité. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge (...) ".

7. Il résulte de l'instruction que la commission des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires a confirmé, dans l'avis rendu au cours de sa séance du 3 avril 2017, le bien-fondé de la méthode dite " des vins " employée par l'administration fiscale pour reconstituer les recettes de l'entreprise individuelle Le Bilboq et le montant du chiffre d'affaires reconstitué au titre de l'exercice clos en 2012. Elle a toutefois estimé que le montant du chiffre d'affaires reconstitué au titre de l'exercice clos en 2011 devait être réduit, en portant le taux d'abattement appliqué sur les achats revendus de vins au titre des pertes et offerts, de la consommation du personnel et de l'utilisation en cuisine de 10 % à 43 %. L'administration fiscale ayant établi les impositions en litige conformément à l'avis de la commission, la charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe à cette dernière tandis que la charge de la preuve de l'exagération des impositions appartient ensuite au contribuable dès lors que le rejet de la comptabilité est fondé.

En ce qui concerne la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires :

8. Il résulte de l'instruction que M. A..., qui ne conteste plus en appel le rejet de la comptabilité de son entreprise individuelle, n'a présenté aucune pièce justificative de recettes au titre des exercices 2011 et 2012 et s'est vu notifier un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité probante le 28 mai 2014. Le service a, en outre, relevé l'absence d'état détaillé des stocks. Par suite, c'est par une exacte appréciation des circonstances de l'affaire que les premiers juges ont estimé que l'administration établissait l'existence de graves irrégularités entachant la comptabilité de l'entreprise individuelle de M. A... et qu'elle était en droit de l'écarter et de procéder à la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise.

9. Il résulte également de l'instruction que le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires issu de l'activité de l'entreprise individuelle de restauration Le Bilboq en utilisant la méthode dite " des vins ", qui a consisté à déterminer le pourcentage des vins dans le chiffre d'affaires global à partir des doubles des notes de restaurant remises aux clients sur la période du 15 mai 2012 au 30 avril 2013, puis à reconstituer le chiffre d'affaires des ventes de vins à partir des factures d'achats de bouteilles de vins établies par les fournisseurs de l'établissement au cours des années 2011 et 2012 et d'un coefficient de marge, en tenant compte d'un taux de perte, d'offerts, de consommations du personnel et du gérant et d'utilisation en cuisine de 43 % en 2011 et de 10 % en 2012. Il a, enfin, reconstitué le chiffre d'affaires total de chacun des exercices en faisant application du pourcentage des vins dans le chiffre d'affaires global aux recettes reconstituées des ventes de vin.

10. En premier lieu, les appelants soutiennent que la méthode de reconstitution des chiffres d'affaires des exercices clos le 31 décembre 2011 et le 15 mai 2012 est radicalement viciée ou excessivement sommaire dès lors qu'elle ne serait pas fondée sur des éléments intrinsèques de l'entreprise individuelle mais reposerait sur les données comptables de la société à responsabilité limitée (SARL) Le Bilboq. Toutefois, l'entreprise individuelle Le Bilboq a cessé le 15 mai 2012 son activité de restauration qui s'est poursuivie sous la forme juridique d'une société, la SARL Le Bilboq, dont M. A... est le gérant et associé à hauteur de 50 %. Il n'est pas contesté que la SARL Le Bilboq a poursuivi l'exploitation de l'activité dans les mêmes locaux, à l'aide du même personnel et en proposant la même carte. La proposition de rectification du 17 septembre 2014 adressée à M. A... souligne que les conditions d'exploitation de la SARL Le Bilboq étaient identiques à celles de l'entreprise individuelle sur la période examinée, et mentionne que M. A... a confirmé cette information, retracée dans un procès-verbal daté du 2 juillet 2014, au cours des opérations de contrôle. En l'absence de pièces justificatives de recettes et d'inventaires des stocks présentés par M. A..., l'administration fiscale était ainsi fondée à appliquer la méthode dite " des vins " en tenant compte des achats de vins de l'entreprise individuelle au cours de la période du 1er janvier 2011 au 15 mai 2012, et des notes de restaurant fournies par la SARL Le Bilboq sur la période du 15 mai 2012 au 30 avril 2013, utilisées pour déterminer le ratio entre les ventes de vins et le chiffre d'affaires global, alors que l'utilisation des vins en cuisine a été prise en compte par l'application d'un abattement, ainsi qu'il a été dit précédemment. La circonstance que la SARL Le Bilboq clôture ses comptes et arrête ses stocks au 30 avril et non au 31 décembre est sans incidence sur la pertinence du ratio ainsi déterminé pour reconstituer le chiffre d'affaires de l'entreprise individuelle. De même, est sans incidence sur la pertinence de la méthode retenue la circonstance qu'en 2012, l'activité n'a été exploitée que jusqu'au 15 mai, dès lors que la reconstitution est fondée sur les achats réels de vins au cours de la période en cause et qu'il n'est pas établi que le ratio entre les ventes de vins et le chiffre d'affaires global, déterminé à partir du dépouillement exhaustif des notes fournies par la SARL Le Bilboq sur la période du 15 mai 2012 au 30 avril 2013, soit près d'une année complète, ne serait pas représentatif des ventes de l'entreprise individuelle au titre de la période du 1er janvier au 15 mai 2012. Enfin, si les appelants se prévalent par ailleurs d'un écart de 13 % entre le chiffre d'affaires de la SARL Le Bilboq au cours de l'exercice clos en 2013 et celui de l'entreprise individuelle reconstitué au titre de l'année 2011, cet élément, à le supposer même avéré, ne saurait faire regarder la méthode employée par l'administration fiscale comme exagérément sommaire ou radicalement viciée.

11. En deuxième lieu, les requérants proposent une méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de l'année 2011 fondée sur les achats de langoustes, consistant à déterminer un prix de vente moyen pondéré des langoustes, qui sont commercialisées par le restaurant sous la forme de deux plats, les langoustes spaghetti et les langoustes grillées, à partir du total des ventes de langoustes et du nombre de couverts, et d'un prix d'achat moyen. Toutefois, ils admettent eux-mêmes qu'une partie importante des achats de langoustes au cours de l'année 2011 a été réalisée directement auprès de pêcheurs, payés en argent liquide, et ne peut être justifiée, le montant total des factures du fournisseur Socomar ne s'élevant qu'à 23 780,52 euros pour l'année. Ainsi, en l'absence de justification du montant des achats de langoustes estimé par les requérants à 86 028 euros, la méthode alternative proposée doit être regardée comme trop sommaire et comme ne permettant pas de déterminer le chiffre d'affaires de l'année 2011 avec une meilleure approximation que celle de l'administration.

12. En troisième lieu, à supposer que les appelants ait entendu solliciter sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales le bénéfice d'une doctrine administrative selon laquelle " les reconstitutions du bénéfice brut doivent être effectuées à partir des conditions concrètes de fonctionnement de l'entreprise et non d'éléments prédéterminés ou étrangers à la gestion propre de celle-ci (...) ", ils ne donnent pas, en tout état de cause, avec une précision suffisante, les références de la doctrine qu'ils invoquent.

Sur les pénalités :

13. En premier lieu, aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens des articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. / Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations ".

14. Contrairement à ce qui est soutenu, la proposition de rectification du 17 septembre 2014, qui rappelle les termes de l'article 1729 du code général des impôts, mentionne précisément les raisons pour lesquelles la majoration de 40 % que les dispositions de cet article prévoient est applicable, et indique le montant des majorations dont ont été assortis les droits rappelés à l'impôt sur le revenu au titre des années 2011 et 2012, et à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011, est suffisamment motivée en ce qui concerne l'application de la majoration pour manquement délibéré.

15. En second lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

16. Pour justifier l'application des pénalités pour manquement délibéré, l'administration fiscale s'est fondée sur les graves irrégularités de la comptabilité de l'entreprise individuelle, tenant au défaut de conservation des pièces justificatives des recettes et à l'absence d'état détaillé des stocks, ainsi que sur l'importance et le caractère répété des minorations de recettes. Si le montant des rectifications a été diminué après l'émission de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires au titre de l'année 2011, les montants du résultat omis et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée demeurent significatifs. Il en va de même de la période du 1er janvier 2012 au 15 mai 2012, le résultat non déclaré s'élevant à 9 203 euros. La circonstance que les opérations de contrôle de la SARL Le Bilboq n'aient donné lieu à aucune rectification n'a aucune incidence sur le bien-fondé des pénalités mises à la charge de l'entreprise individuelle et de M. A... au titre de la période en litige. Dans ces conditions, eu égard à la nature de ces manquements, à leur importance et à leur répétition, l'administration a démontré l'intention délibérée de M. A... de minorer les impôts dus et a dès lors à bon droit appliqué la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts.

Sur les conclusions tendant au maintien d'un sursis de paiement :

17. Aux termes de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. / L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent (...) ".

18. Les dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, qui ont pour objet de permettre de surseoir au paiement des impositions lorsqu'il a été formé contre elles une réclamation contentieuse, n'ont de portée que pendant la durée de l'instance devant le tribunal administratif. Lorsque le tribunal s'est prononcé au fond, son jugement rend à nouveau exigibles les impositions dont il n'a pas prononcé la décharge. Hormis les procédures spécialement édictées en matière de référé, aucune disposition législative ou réglementaire n'a prévu une procédure de sursis de paiement des impositions contestées pendant la durée de l'instance devant la cour administrative d'appel. Par suite, les conclusions de la requête tendant au maintien du sursis de paiement et de la mise en recouvrement des impositions en litige doivent être rejetées.

19. Il résulte de tout ce qui précède que l'entreprise individuelle Le Bilboq et M. A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans le cadre de la présente instance, la somme demandée par l'entreprise individuelle Le Bilboq et M. A... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'entreprise individuelle Le Bilboq et de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise individuelle Le Bilboq, à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 24 avril 2025.

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N° 24MA01792


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