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14/03/2025 | FRANCE | N°24MA01194

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 14 mars 2025, 24MA01194


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur du centre hospitalier de la Dracénie a rejeté sa demande de paiement des heures supplémentaires et d'octroi de la nouvelle bonification indiciaire et de condamner le centre hospitalier de la Dracénie à lui payer la somme de 33 702,06 euros.



Par un jugement n° 2101869 du 14 mars 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la requête

de Mme B....





Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire com...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur du centre hospitalier de la Dracénie a rejeté sa demande de paiement des heures supplémentaires et d'octroi de la nouvelle bonification indiciaire et de condamner le centre hospitalier de la Dracénie à lui payer la somme de 33 702,06 euros.

Par un jugement n° 2101869 du 14 mars 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la requête de Mme B....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 et 23 mai 2024, Mme B..., représentée par la SELARL Abran-Durban et associés, agissant par Me Abran, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 14 mars 2024 ;

2°) de condamner le centre hospitalier de la Dracénie à lui payer la somme de 33 702,06 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de la Dracénie la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a effectué des heures supplémentaires qui n'ont pas été rémunérées ; les heures supplémentaires figurant sur les bulletins de salaire n'ont pas été prises en compte dans le calcul du revenu brut imposable ;

- elle a droit à bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire dès lors qu'elle est affectée à la conduite de véhicules d'urgence ;

- elle est fondée à obtenir une indemnité d'un montant total de 33 702,06 euros, correspondant à l'indemnisation des heures supplémentaires, de la nouvelle bonification indiciaire et de l'indemnité forfaitaire pour travail des dimanches et jours fériés non payées.

La requête a été transmise au centre hospitalier de la Dracénie qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 2019-40 du 24 janvier 2019 ;

- le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 ;

- le décret n° 92-7 du 2 janvier 1992 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau ;

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public ;

- les observations de Me Abran, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., fonctionnaire hospitalière relevant du corps des aides-soignants, exerce ses fonctions au centre hospitalier de la Dracénie et est affectée depuis le mois de novembre 2006 à la structure mobile d'urgence et de réanimation (SMUR). Par un courrier du 9 mars 2021, elle a présenté au directeur du centre hospitalier de la Dracénie une demande de paiement d'heures supplémentaires et d'octroi de la nouvelle bonification indiciaire, qui a donné lieu à une décision implicite de rejet. Celle-ci relève appel du jugement du 14 mars 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation du centre hospitalier de la Dracénie à lui payer la somme de 33 702,06 euros.

Sur le paiement des heures supplémentaires :

2. Aux termes de l'article 1er du décret du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 : " La durée du travail est fixée à 35 heures par semaine dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. / Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures maximum, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées. (...) ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " La durée du travail effectif s'entend comme le temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. (...) ". Aux termes de l'article 7 de ce décret, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) 2° Le travail de nuit comprend au moins la période comprise entre 21 heures et 6 heures, ou toute autre période de 9 heures consécutives entre 21 heures et 7 heures, sans préjudice de la protection appropriée prévue à l'article 3 et des mesures prises au titre de l'article 9. (...) ". Son article 9 dispose que " Le travail est organisé selon des périodes de référence dénommées cycles de travail définis par service ou par fonctions et arrêtés par le chef d'établissement après avis du comité technique d'établissement ou du comité technique. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 15 du décret : " Lorsque les besoins du service l'exigent, les agents peuvent être appelés à effectuer des heures supplémentaires en dépassement des bornes horaires définies par le cycle de travail (...). Les heures supplémentaires font l'objet soit d'une compensation horaire donnant lieu à une récupération au moins d'égale durée, soit d'une indemnisation. (...) ".

3. En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient, en premier lieu, à l'agent d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires qu'il estime avoir réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

4. Il résulte de l'instruction, notamment des bulletins de paie versés au dossier, que Mme B... a exercé durant la période litigieuse, en sa qualité d'aide-soignante affectée au sein du SMUR, une activité professionnelle à forte amplitude horaire, allant de quatorze heures à six heures du matin, et a effectué des heures supplémentaires. Il ressort des bulletins de salaire produits au titre de la période litigieuse, soit de mars 2017 à novembre 2020, que Mme B... a perçu une rémunération des heures supplémentaires qu'elle a effectuées, outre une majoration pour travail de nuit et une indemnité forfaitaire pour travail des dimanches et jours fériés. Ainsi, jusqu'au mois d'avril 2019, les revenus tirés de ces heures supplémentaires, libellés dans les bulletins de paie sous les codes paie " 150 ", " 153 M ", " 154 M " et " 454 " et les dénominations " Heures sup. de jour de 1-14 ", " HS Dim / Fériés inf. À 14 ", " HS Nuit inf. À 14 " et " Heures suppl. Nuit 1 fr ", ont été pris en compte dans le calcul du montant du revenu brut imposable, déterminé avant déduction des cotisations sociales et autres charges. A compter du mois de mai 2019 jusqu'au mois de novembre 2020, la rémunération de ces heures supplémentaires est mentionnée sous les codes paie " 451 ", " 453 " et " 454 " et les dénominations " Heures suppl. 1ère fract ", " Heures suppl. Dim/JF 1 fr " et " Heures suppl. Nuit 1 fr ". Si les sommes correspondantes n'ont pas été prises en compte dans le calcul du salaire brut imposable de Mme B... dès lors qu'elles bénéficiaient de l'exonération de cotisations salariales des heures supplémentaires en application du décret du 24 janvier 2019 visé ci-dessus, les fiches de paie produites montrent qu'elles ont été intégrées aux montants des salaires nets et ont donc été payées à l'agent.

En tout état de cause, Mme B... n'apporte pas d'éléments démontrant qu'elle aurait effectué des heures supplémentaires qui n'auraient pas été prises en compte par les fiches de paie précitées et qui n'auraient ainsi pas donné lieu à rémunération. A cet égard, la requérante ne produit qu'un planning annuel établi au titre de l'année 2020, dont la seule mention manuscrite de son prénom ne permet pas d'établir qu'il la concernerait, ainsi qu'un planning établi au titre du seul mois de novembre 2020. En outre, les autres plannings, états d'heures supplémentaires et l'extrait du logiciel " Equitime " versés au dossier intéressent d'autres agents et ne portent que sur l'année 2021 qui n'est pas en litige. Ces éléments, de même que le compte-rendu d'entretien professionnel d'août 2021 et les deux certificats médicaux produits, ne permettent ainsi pas de justifier l'existence d'heures supplémentaires demeurées impayées sur la période contestée de trois ans et huit mois, estimées à 1 848 heures, outre 2 464 heures de nuit. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande présentée par Mme B... tendant à l'indemnisation de ses heures supplémentaires.

Sur l'indemnité forfaitaire pour travail des dimanches et jours fériés :

5. Aux termes de l'article 1er du décret du 2 janvier 1992 instituant une indemnité forfaitaire pour travail des dimanches et jours fériés : " Les fonctionnaires et agents des établissements mentionnés à l'article 2 du titre IV du statut général des fonctionnaires susvisé perçoivent, lorsqu'ils exercent leurs fonctions un dimanche ou un jour férié, une indemnité forfaitaire sur la base de huit heures de travail effectif, dont le montant est fixé par arrêté conjoint du ministre du budget et du ministre chargé de la santé. ".

6. Si Mme B... demande le paiement de l'indemnité forfaitaire pour travail des dimanches et jours fériés à hauteur de la somme de 2 363,50 euros, elle n'apporte aucune précision permettant d'apprécier le bien-fondé de sa demande indemnitaire. Il ressort au demeurant des bulletins de paie produits au titre de la période litigieuse que celle-ci a perçu mensuellement une telle indemnité, à l'exception des seuls mois d'avril 2018 et d'août 2019. La requérante n'apporte pas davantage d'éléments établissant qu'une partie de cette indemnité n'aurait pas été payée au titre de la période en litige. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande présentée par Mme B... tendant au paiement de cette indemnité.

Sur la nouvelle bonification indiciaire :

7. D'une part, aux termes de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales : " I- La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires (...) instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret (...) ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que le bénéfice de la bonification indiciaire qu'elles instituent est lié aux seules caractéristiques des emplois occupés, mesurées au regard des responsabilités qu'ils impliquent ou de la technicité qu'ils requièrent. Le bénéfice de cette bonification, exclusivement attaché à l'exercice effectif des fonctions, ne peut ainsi être limité par la prise en considération du corps, du cadre d'emploi ou du grade du fonctionnaire qui occupe un emploi dont les fonctions ouvrent droit à ce bénéfice.

8. D'autre part, aux termes de l'article 4 du décret du 3 août 2007 portant statut particulier du corps des aides-soignants et des agents des services hospitaliers qualifiés de la fonction publique hospitalière, alors en vigueur : " Les aides-soignants (...) collaborent aux soins infirmiers (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 3 février 1992 relatif à la nouvelle bonification indiciaire attachée à des emplois occupés par certains personnels de la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction applicable au litige : " Une nouvelle bonification indiciaire (...) est attribuée mensuellement, à raison de leurs fonctions, aux fonctionnaires hospitaliers ci-dessous mentionnés : (...) / 11° Conducteurs ambulanciers affectés, à titre permanent, à la conduite des véhicules d'intervention des unités mobiles hospitalières agissant dans le cadre d'un service d'aide médicale urgente ou d'un service mobile d'urgence et de réanimation : 20 points majorés (...) ".

9. Mme B... soutient qu'elle a droit au bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire dès lors qu'elle exerce des fonctions de conductrice ambulancière. Toutefois, en se bornant à indiquer qu'elle exerce effectivement un emploi de conductrice ambulancière et à produire un courriel du directeur des ressources humaines du 8 janvier 2023 portant sur une réunion des " chauffeurs SMUR " qui ne lui était pas adressé, celle-ci, qui relève au demeurant du corps des aides-soignants, n'établit par aucune pièce versée au dossier être affectée à titre permanent sur de telles fonctions, conformément aux dispositions précitées de l'article 1er du décret du 3 février 1992. La seule mention sur ses bulletins de salaire de son affectation au SMUR ne saurait davantage établir l'exercice de ces fonctions. Par suite, en refusant d'octroyer à Mme B... la nouvelle bonification indiciaire, le directeur du centre hospitalier de la Dracénie n'a pas commis d'erreur d'appréciation ou d'erreur de droit.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'indemnisation doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de la Dracénie, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au centre hospitalier de la Dracénie.

Délibéré après l'audience du 27 février 2025, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente assesseure,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 mars 2025.

N° 24MA01194


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01194
Date de la décision : 14/03/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SELARL ABRAN DURBAN & ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-14;24ma01194 ?
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