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11/03/2025 | FRANCE | N°24MA01146

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 4ème chambre, 11 mars 2025, 24MA01146


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2023 par lequel le préfet du Var a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.



Par un jugement n° 2303941 du 4 avril 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.





Procédure d

evant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 3 mai 2024, M. A... B..., représenté par Me Dhib, dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2023 par lequel le préfet du Var a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2303941 du 4 avril 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 mai 2024, M. A... B..., représenté par Me Dhib, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 4 avril 2024 ;

2°) d'annuler cet arrêté préfectoral du 30 octobre 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Var, à titre principal, et sur le fondement de l'article

L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification du l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, et sur le fondement de l'article L. 911-2 du même code, de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de cette notification et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en application de l'article L. 911-3 dudit code ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Il soutient que :

- l'arrêté préfectoral contesté est entaché d'une erreur de droit au regard des stipulations du c) de l'article 10 de l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié par l'accord du 28 avril 2008 ; le préfet du Var s'est abstenu d'examiner son droit au séjour au regard de ces stipulations ;

- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'appréciation faite tant par le préfet du Var que le juge de première instance est erronée, celle-ci n'ayant pas pris en compte sa situation de parent d'enfants français et sa présence quotidienne à leurs côtés ;

- cet arrêté préfectoral a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas présenté de mémoire.

Par une ordonnance du 3 décembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 janvier 2025, à 12 heures.

En application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, le préfet du Var et le conseil de M. A... B... ont été invités, les 20 janvier et 3 février 2025, à transmettre à la Cour toute précision utile sur les suites réservées au placement en garde à vue de M. A... B... pour des faits de violence sur mineur et agression sexuelle sur mineur que le représentant de l'Etat évoque dans son mémoire en défense produit devant le tribunal administratif de Toulon, ainsi que sur les faits de maltraitance familiale que ce dernier impute également à M. A... B... lorsqu'il se trouvait en Italie.

En réponse, des pièces ont été produites, le 28 janvier 2025, par le préfet du Var mais, s'agissant des mêmes pièces que celles déjà versées par le représentant de l'Etat aux débats de première instance et qui ont alors été soumises au contradictoire, elles n'ont pas été communiquées par la Cour.

Par des observations en réponse, enregistrées le 5 février 2025, M. A... B..., représenté par Me Dhib, indique :

. en ce qui concerne les faits de violences et agressions sexuelles sur mineurs évoqués par le préfet du Var, le tribunal correctionnel de Toulon a, par un jugement du 18 juillet 2024 dont il produit une copie, ordonné le renvoi de l'affaire à une audience du 5 mars 2025 afin de permettre la désignation d'un mandataire ad hoc, pour la victime mineure ; dans le cadre de cette affaire liée à la dénonciation de violences par sa belle-fille, il a toujours contesté les faits reprochés et entend maintenir cette position lors de cette audience ;

. en ce qui concerne les faits de maltraitance en Italie, la lecture de son casier judiciaire ne fait état d'aucune condamnation à ce titre.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lombart a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Né le 13 septembre 1983 et de nationalité tunisienne, M. A... B... déclare être entré sur le territoire français le 17 juillet 2015 et s'y être continuellement maintenu depuis.

Le 20 avril 2022, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en qualité de parent d'enfant français. Par un arrêté du 30 octobre 2023, le préfet du Var a refusé de faire droit à cette demande et il lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours avant de fixer le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné à l'expiration de ce délai. M. A... B... relève appel du jugement du 4 avril 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant principalement à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. M. A... B... soutient que, contrairement à ce qu'indique le préfet du Var dans son arrêté contesté du 30 octobre 2023, il démontre être le père d'enfants français et contribuer à leur éducation et à leur entretien alors qu'il vit en concubinage avec leur mère. Or, il ressort effectivement des pièces du dossier que M. A... B... est le père de deux enfants de nationalité française, respectivement nés les 10 janvier 2021 et 7 mars 2022, et qu'il a reconnus. Au regard des documents produits nouvellement en appel qui indiquent tous, à l'instar de ceux déjà versés aux débats de première instance, la même adresse, M. A... B... justifie également, à la date d'édiction de l'arrêté préfectoral contesté, d'une vie commune avec la mère de ses enfants, qui est également de nationalité française, et avec ces derniers, ce qui, au demeurant, fait présumer sa contribution à leur entretien et à leur éducation. Par suite, M. A... B... est fondé à soutenir que la décision portant refus de lui délivrer un titre de séjour est entachée d'erreurs de fait et à solliciter, pour ce motif, son annulation ainsi que, par voie de conséquence, celle des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement qui en procèdent.

3. Il résulte de ce qui précède, aucun des autres moyens de la requête n'étant mieux à même de régler le litige, que M. A... B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2023. Il y a donc lieu d'annuler tant ce jugement que cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". Selon l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. (...) ". Aux termes de l'article L. 911-3 dudit code : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " Le juge administratif, statuant sur des conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions, se prononce comme juge de pleine juridiction. Dès lors, il statue en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision.

5. Le présent arrêt implique nécessairement, compte tenu de son motif et au vu des circonstances particulières de l'espèce, non pas la délivrance à M. A... B... d'un titre de séjour, mais le réexamen de sa demande afin qu'il y soit de nouveau statué, et la délivrance, le temps de ce réexamen, d'une autorisation provisoire de séjour. Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet du Var de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour de M. A... B... et de prendre une nouvelle décision dans un délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt, et, durant ces trois mois, de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour. En revanche, il n'y a pas lieu, au cas d'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il n'y a pas davantage lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2303941 du tribunal administratif de Toulon du 4 avril 2024 et l'arrêté du 30 octobre 2023 par lequel le préfet du Var a refusé de délivrer à M. A... B... un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit à l'expiration de ce délai sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Var de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour de M. A... B... et de prendre une nouvelle décision dans un délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt, et, durant ces trois mois, de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Var et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Toulon.

Délibéré après l'audience du 25 février 2025, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mars 2025.

2

No 24MA01146


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01146
Date de la décision : 11/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Laurent LOMBART
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : DHIB

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-11;24ma01146 ?
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