Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B..., Mme D... B... et M. C... B... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2019 par lequel le maire de la commune de Ceyreste a refusé de leur accorder un permis d'aménager un lotissement " Domaine de Mauregard " sur des parcelles cadastrées section AV n° 69, 71p, 74 et 75, situées 2259 voie romaine, sur le territoire de la commune, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux du 5 décembre 2019.
Par un jugement n° 2002313 du 18 septembre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 novembre 2023 et 1er novembre 2024, MM. B... et Mme B..., représentés par Me Constanza, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2019 du maire de Ceyreste, ensemble la décision implicite rejetant leur recours gracieux ;
3°) d'enjoindre à la commune de Ceyreste de réexaminer leur demande de permis d'aménager dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Ceyreste la somme de 7 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le terrain d'assiette du projet est situé dans une zone d'habitat dense à très dense, et non, comme l'a estimé le tribunal administratif, dans une zone d'habitat diffus ;
- la cartographie du porter en connaissance sur l'aléa de feux de forêts du 23 mai 2014 est imprécise et ne tient pas compte des permis de construire accordés en 2017 et 2019 et du caractère dense de l'urbanisation du secteur ; les caractéristiques de ce secteur, bâti et accessible aux engins de lutte contre l'incendie, conduit à requalifier l'aléa en moyen à fort ;
- le terrain d'assiette du projet est défendable ; il dispose de voiries de desserte de capacité suffisante et d'une voie interne comportant deux accès ; deux bornes incendie sont implantées à 80 m et 130 m de part et d'autre des deux entrées du lotissement ; le terrain d'assiette fait l'objet d'un défrichement autorisé par arrêté préfectoral du 16 décembre 2019 ;
- le permis d'aménager ne pouvait en conséquence être refusé sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en donnant une portée prescriptive à la note méthodologique du porter à connaissance ;
- la création du lotissement entrainerait la réduction du périmètre à défendre en comblant une dent creuse, ce que préconise la note méthodologique ;
- le tribunal a, à tort, refusé de prendre en compte les éléments de défense contre l'incendie dans l'appréciation du risque au regard de l'article R. 111-2 ;
- le maire aurait dû délivrer le permis en l'assortissant de prescriptions relatives aux moyens de défense contre l'incendie.
Par un mémoire, enregistré le 19 septembre 2024, la commune de Ceyreste, représentée par Me Pontier, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge des requérants la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon, présidente assesseure ;
- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public ;
- les observations de Me Constanza, représentant MM. et Mme B..., et celles de Me Badri, représentant la commune de Ceyreste.
Une note en délibéré enregistrée le 17 janvier 2025 a été présentée pour les consorts B... et n'a pas été communiquée.
Considérant ce qui suit :
1. MM. et Mme B... ont déposé le 27 mai 2019 une demande de permis d'aménager en vue de la création d'un lotissement de cinq lots sur les parcelles cadastrées section AV n° 69, 71p, 74 et 75 situées 2259 voie romaine à Ceyreste. Par un arrêté du 28 novembre 2019, le maire de Ceyreste a refusé de faire droit à leur demande. Les consorts B... relèvent appel du jugement du 18 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision implicite par laquelle le maire de Ceyreste a rejeté leur recours gracieux.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Il résulte des dispositions du code de l'urbanisme que les lotissements, qui constituent des opérations d'aménagement ayant pour but l'implantation de constructions, doivent respecter les règles tendant à la maîtrise de l'occupation des sols édictée par le code de l'urbanisme ou les documents locaux d'urbanisme, même s'ils n'ont pour objet ou pour effet, à un stade où il n'existe pas encore de projet concret de construction, que de permettre le détachement d'un lot d'une unité foncière. Il appartient, en conséquence, à l'autorité compétente de refuser le permis d'aménager sollicité ou de s'opposer à la déclaration préalable notamment lorsque, compte tenu de ses caractéristiques telles qu'elles ressortent des pièces du dossier qui lui est soumis, un projet de lotissement permet l'implantation de constructions dont la compatibilité avec les règles d'urbanisme ne pourra être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d'urbanisme requises.
3. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".
4. Lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant de présenter une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.
5. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, constitué de plusieurs parcelles d'une surface totale de 5 469 m², est situé en zone NB1rf du plan d'occupation des sols de la commune de Ceyreste alors applicable, exposée à des risques d'incendie de forêt. Ce terrain, bordé au sud par la voie romaine et de parcelles supportant des constructions individuelles à l'est et à l'ouest, qui s'ouvre au nord sur un vaste massif boisé, est implanté dans un secteur d'habitat diffus, disséminé de part et d'autre de la voie romaine, éloigné du centre du village de Ceyreste et entouré de massifs forestiers. Il ressort par ailleurs du porter à connaissance du 23 mai 2014, modifié le 19 avril 2016 et le 4 janvier 2017, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a informé, notamment, la commune de Ceyreste du risque incendie auquel est soumis son territoire, lequel, s'il n'est pas opposable aux autorisations d'urbanisme, constitue un élément que l'autorité administrative peut prendre en compte pour apprécier le risque, que le terrain d'assiette du futur lotissement est situé, ainsi que l'a relevé le maire de Ceyreste dans l'arrêté du 28 novembre 2019, en zone d'aléa subi de niveau fort à exceptionnel. Si, comme l'indiquent les requérants, l'absence de construction sur leurs parcelles est un des éléments ayant conduit à ce classement, et que de nouvelles constructions ont été autorisées dans le secteur entre 2017 et 2019, ces permis de construire portaient sur des terrains situés à distance du terrain d'assiette du projet, à l'exception de l'un d'eux, qui portait sur la seule extension d'une construction existante. Ce niveau d'aléa est d'ailleurs confirmé par le procès-verbal de reconnaissance des bois à défricher du 22 août 2019, qui indique que le terrain d'assiette du projet se situe en zone d'aléa subi fort à exceptionnel et d'aléa induit fort à très fort. Ce niveau de risque n'est remis en cause ni par l'avis favorable délivré en 2016 par le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) pour un projet de lotissement limité à deux lots sur le même terrain d'assiette, ni par l'étude technique réalisée en octobre 2024 par un bureau d'études, qui s'appuie essentiellement sur le respect de l'obligation de débroussaillement dans le secteur, ni par l'autorisation de défrichement accordée aux requérants le 16 décembre 2019. Alors que le porter à connaissance préconise, en zone d'aléa exceptionnel, l'interdiction de toute nouvelle construction à usage d'habitation et, en en zone d'aléa fort, la limitation de l'urbanisation aux zones d'habitation denses et sans contact direct avec l'espace boisé, le projet en litige porte sur la création de cinq lots comportant chacun une maison d'habitation pour une surface de plancher de 795 m² en bordure de massif, ce qui aura pour effet, outre l'accroissement sensible du nombre de personnes exposées au risque, d'augmenter, si ce n'est le périmètre, au moins la surface de la zone à défendre, le terrain d'assiette, eu égard à sa superficie, ne pouvant être qualifié de " dent creuse " dont le comblement serait de nature à limiter le risque. Enfin, si les consorts B... font valoir que les parcelles en litige sont défendables, compte tenu de la largeur de la voie romaine qui permet le passage des engins de secours, de la présence de deux accès au lotissement, d'une voie de bouclage interne d'une largeur de 5 mètres et de l'existence de deux points d'eau incendie à proximité, ils ne justifient ni de la distance séparant ces deux hydrants de chacun des lots à bâtir , ni de la suffisance de leur débit, alors que le projet ne prévoit pas davantage la création d'une voie périphérique sur le pourtour du lotissement, en particulier en bordure du massif forestier, tel que préconisé par le porter à connaissance afin de permettre aux services de secours d'assurer sa défense. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le maire de Ceyreste a considéré que le projet des requérants était, au regard de l'importance du risque d'incendie de forêt, de nature à porter atteinte à la sécurité publique. Compte tenu du niveau d'exposition au risque et des caractéristiques du lotissement projeté, il ne ressort pas des pièces du dossier que le permis d'aménager aurait pu être délivré en étant assorti de prescriptions permettant d'assurer sa conformité aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède, que MM. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2019 par lequel le maire de Ceyreste a refusé de leur délivrer un permis d'aménager et de la décision implicite de rejet de leur recours gracieux. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent également être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Ceyreste, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par les consorts B... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MM. et Mme B... une somme de 2 000 euros au titre des frais de même nature exposés par la commune de Ceyreste.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de MM. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : MM. et Mme B..., pris ensemble, verseront une somme de 2 000 euros à la commune de Ceyreste au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Mme D... B..., à M. C... B... et à la commune de Ceyreste.
Délibéré après l'audience du 16 janvier 2025, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- Mme Courbon, présidente assesseure,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.
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N° 23MA02696