Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la note de service n° 2019/JYL/SL/LT/54 du 10 octobre 2019 du directeur du centre hospitalier du pays salonais portant application des règles de gestion du temps de travail au centre hospitalier du pays salonais ainsi que son application dans le guide gestion du temps de travail, de reconnaître le temps de travail des agents postés soumis à relève, en repos variable, de jour en 7h40 et de nuit en 10h10 et d'enjoindre à la direction du centre hospitalier du pays salonais, d'une part, d'appliquer la règlementation en matière de jours de RTT à compter du 1er janvier 2020, avec notamment l'attribution de 20 jours de RTT pour 38h20 de travail hebdomadaire et, d'autre part, de maintenir les 30 heures de récupération dont bénéficient actuellement les agents de nuit ou à défaut, les heures réellement effectuées en plus des 1 456 heures légales annuelles, soit 24h16.
Par un jugement n° 2003132 du 11 avril 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes.
Par une ordonnance n° 22MA01659 du 23 juin 2022, le président de la 2e chambre de la cour a rejeté l'appel formé par l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône contre ce jugement.
Par une décision n° 466833 du 19 juillet 2023, le Conseil d'État a, sur pourvoi de l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône, annulé l'ordonnance du président de la 2e chambre de la cour et renvoyé l'affaire à la cour.
Procédure devant la cour après renvoi :
Par un mémoire, enregistré le 21 octobre 2023, le centre hospitalier du pays salonais, représenté par la SELARL DDM avocats, agissant par Me Michel, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable comme étant dirigée contre un acte ne faisant pas grief ;
- subsidiairement, les moyens soulevés par l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 27 janvier 2024, l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône, représentée par Me Lê, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 11 avril 2022 ;
2°) d'annuler la note de service n° 2019/JYL/SL/LT/54 du 10 octobre 2019 du directeur du centre hospitalier du pays salonais portant application des règles de gestion du temps de travail au sein de l'établissement, ainsi que son application dans le guide de gestion du temps de travail, de reconnaître le temps de travail des agents postés soumis à relève, en repos variable, de jour en 7h40 et de nuit en 10h10 ;
3°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier de reconnaître le temps de travail des agents postés soumis à relève, en repos variable, à 7h40 de jour et à 10h10 de nuit ;
4°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier, d'une part, d'appliquer la réglementation en matière de nombre de jours de RTT à compter du 1er janvier 2020 avec notamment l'attribution de 20 jours de RTT pour 38h20 de travail hebdomadaire et, d'autre part, de maintenir les 30 heures de récupération dont bénéficient les agents de nuit ;
5°) de mettre à la charge du centre hospitalier du pays salonais la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué, qui ne vise et n'analyse pas le moyen tiré du défaut de prise en compte du temps complémentaire de pause et de repas au titre du temps de travail effectif, est irrégulier ;
- la note de service du 10 octobre 2019 fait grief et que son recours est donc recevable ;
- la requête d'appel n'est pas tardive ;
- la note de service en litige méconnaît l'article 5 du décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 ;
- elle méconnaît également l'article 11 du décret n°2002-9 du 4 janvier 2002.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rigaud,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Lê, représentant l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône.
Une note en délibéré, présentée pour l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône, a été enregistrée le 9 janvier 2025.
Considérant ce qui suit :
1. Par une note de service du 10 octobre 2019, le directeur du centre hospitalier du pays salonais a notamment supprimé deux jours de repos compensateurs du temps d'habillage et de déshabillage pour tous les agents en repos variable, a donné l'instruction aux agents de prendre leur service à l'heure en étant déjà habillés et a, en contrepartie, augmenté le temps de pause et de repas de 30 à 40 minutes par jour. Par un jugement n° 2003132 du 11 avril 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône tendant à l'annulation de cette note de service. Par une ordonnance n° 22MA01659 du 23 juin 2022, le président de la 2ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône contre ce jugement. Par une décision n° 466833 du 19 juillet 2023, le Conseil d'État a annulé, sur le pourvoi de l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône, l'ordonnance du président de la 2ème chambre de la cour et a renvoyé à la cour le jugement de cette affaire.
Sur la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier du pays salonais :
2. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou de leur contrat ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent de perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination ou une sanction, est irrecevable.
3. La note de service du 10 octobre 2019 doit, en ce qu'elle supprime les deux jours de repos dont bénéficiaient les agents dits " en repos variable " en compensation du temps d'habillage et de déshabillage et ajoute 10 minutes de pause et de repas supplémentaires au même titre, être regardée comme portant atteinte aux droits que ceux-ci tiennent de leur statut. La fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier du pays salonais doit donc être écartée.
Sur la régularité du jugement :
4. Le tribunal administratif a expressément statué, au point 5 du jugement attaqué, sur le moyen tiré de ce que la note de service du 10 octobre 2019 aurait méconnu l'article 5 du décret du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, en relevant notamment que cette note prévoit la suppression de deux jours de repos compensateurs du temps d'habillage et de déshabillage pour tous les agents en repos variable, mais que celle-ci prévoit d'intégrer le temps d'habillage et de déshabillage des agents en tenue au temps de travail effectif, conformément aux dispositions de l'article 5 du décret du 4 janvier 2002, dans un forfait de 40 minutes correspondant au temps de pause et de repas des agents. Le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments présentés par la requérante, a ainsi répondu de manière suffisante au moyen invoqué. L'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône n'est dès lors pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer sur certains moyens soulevés en première instance.
Sur le bien-fondé du jugement :
5. Aux termes de l'article 5 du décret du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " La durée du travail effectif s'entend comme le temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. / Lorsque l'agent a l'obligation d'être joint à tout moment, par tout moyen approprié, pendant le temps de restauration et le temps de pause, afin d'intervenir immédiatement pour assurer son service, les critères de définition du temps de travail effectif sont réunis. / Lorsque le port d'une tenue de travail est rendu obligatoire par le chef d'établissement après avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le temps d'habillage et de déshabillage est considéré comme temps de travail effectif. ". Aux termes de l'article 7 de ce décret : " Les règles applicables à la durée quotidienne de travail, continue ou discontinue, sont les suivantes : (...) 4° Une pause d'une durée de 20 minutes est accordée lorsque le temps de travail quotidien est supérieur à 6 heures consécutives. Pour les agents soumis à un régime d'équivalence, les heures sont décomptées heure pour heure. ".
6. La note de service du 10 octobre 2019, édictée par le directeur du centre hospitalier du pays salonais, impose aux agents d'être en tenue dès leur prise de poste et modifie la gestion du temps de travail applicable à compter du 1er janvier 2020 en supprimant, comme il a été dit au point 3, les deux jours de repos dont bénéficiaient les agents dits " en repos variable " en compensation du temps d'habillage et de déshabillage et ajoute 10 minutes de pause et de repas supplémentaires quotidiennes au même titre. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du " guide de la gestion du temps de travail ", document " rassemblant l'ensemble des règles applicables en matière de temps de travail " auquel renvoie la note de service du 10 octobre 2019, que le temps d'habillage et de déshabillage est considéré comme temps de travail effectif, de même que le temps de pause et de restauration. Dès lors, les 10 minutes ajoutées au temps de pause en compensation du temps d'habillage et de déshabillage étant comptabilisées comme temps de travail effectif sur une journée de travail de 7h30 ou une nuit de 10h, l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône n'est pas fondée à soutenir que la note de service en litige méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article 5 du décret du 4 janvier 2002. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'amplitude quotidienne du temps de travail des agents astreints à une relève ne tiendrait pas compte du temps d'habillage et de déshabillage.
7. Aux termes de l'article 11 du décret du 4 janvier 2002 : " Le nombre de jours supplémentaires de repos prévus au titre de la réduction du temps de travail est calculé en proportion du travail effectif accompli dans le cycle de travail et avant prise en compte de ces jours. Il est, notamment, de : 18 jours ouvrés par an pour 38 heures hebdomadaires ; 12 jours ouvrés par an pour 37 heures hebdomadaires ; 6 jours ouvrés par an pour 36 heures hebdomadaires ; 3 jours ouvrés par an pour 35 h 30 hebdomadaires. Pour un travail effectif compris entre 38 h 20 et 39 heures, le nombre de jours supplémentaires de repos est limité à 20 jours ouvrés par an. Il ne peut être effectué plus de 39 heures hebdomadaires en moyenne sur le cycle, hors heures supplémentaires, ni plus de 44 heures par semaine, hors heures supplémentaires, en cas de cycle irrégulier. "
8. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 que le temps d'habillage et de déshabillage est déjà comptabilisé dans le temps de travail effectif des agents, de jour comme de nuit. La requérante n'est donc pas fondée à soutenir que la durée effective de travail des agents en cause génèrerait des jours supplémentaires de repos en application des dispositions précitées de l'article 11 du décret du 4 janvier 2002 et que la note de service en litige méconnaîtrait ces mêmes dispositions.
9. Il résulte de tout ce qui précède que l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône n'est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de la note de service du 10 octobre 2019 du centre hospitalier du pays salonais.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la note de service du 10 octobre 2019 n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction présentées par l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône doivent, dès lors, être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11. Le centre hospitalier du pays salonais n'étant pas, dans présente instance, partie perdante, les conclusions présentées par l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il y a lieu, en revanche, en application des dispositions de cet article, de mettre à la charge de l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône la somme de 2 000 euros à verser au centre hospitalier du pays salonais au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de l'Union syndicale départementale santé actions socialse CGT des Bouches-du-Rhône est rejetée.
Article 2 : L'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône versera au centre hospitalier du pays salonais la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à l'Union syndicale départementale santé actions sociales CGT des Bouches-du-Rhône et au centre hospitalier du pays salonais.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme C. Fedi, présidente de chambre,
- Mme L. Rigaud, présidente assesseure,
- M. J. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2025.
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N° 23MA01873