Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les arrêtés du 25 novembre 2019 par lesquels le maire de la commune d'Eguilles a refusé de lui délivrer deux permis de construire.
Par un jugement n° 1910448, 1910449 du 20 mars 2023, le tribunal administratif de Marseille a annulé ces arrêtés et a enjoint au maire de la commune d'Eguilles de délivrer à M. B... les permis de construire sollicités.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 mai 2023, la commune d'Eguilles, représentée par Me Gouard-Robert, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 mars 2023 ;
2°) de rejeter les demandes de M. B... ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 1 600 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a admis la recevabilité des requêtes de M. B... dès lors que les arrêtés attaqués étaient confirmatifs d'un précédent arrêté de refus de permis de construire du 5 août 2019 qui n'a fait l'objet d'aucun recours et est donc devenu définitif ;
- les projets méconnaissent les articles UD 3 et UD 11 du règlement de son plan local d'urbanisme ;
- ils méconnaissent également l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme et elle sollicite une substitution de motifs à ce titre.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2024, M. A... B..., représenté par Me Caviglioli, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 600 euros soit mise à la charge de la commune en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la requête de la commune est entachée de forclusion et dès lors est irrecevable ;
- aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Les parties ont été informées le 5 novembre 2024, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'illégalité des arrêtés attaqués, dès lors qu'ils sont fondés sur le plan local d'urbanisme de la commune d'Eguilles approuvé le 21 mars 2017, qui a été annulé par deux jugements n° 1706513 et n° 1706327 du tribunal administratif de Marseille du 26 octobre 2020 devenus définitifs.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la cour a désigné Mme Courbon, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement de la 1ère chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Claudé-Mougel,
- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,
- et les observations de Me Gouard-Robert, représentant la commune d'Eguilles, et celles de Me Caviglioli, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a sollicité du maire d'Eguilles, le 1er octobre 2019, la délivrance de deux permis de construire une maison individuelle avec garage sur chacun des lots A et B d'une parcelle cadastrée section BZ 129, située 21 chemin de Surville Nord, sur le territoire de la commune. Par deux arrêtés du 25 novembre 2019, le maire de la commune d'Eguilles a refusé de lui délivrer ces autorisations. Par un jugement du 20 mars 2023, le tribunal administratif de Marseille a annulé ces deux arrêtés et a enjoint au maire de la commune de d'Eguilles de lui délivrer les permis de construire sollicités. Cette dernière relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la recevabilité des requêtes de première instance :
2. La commune d'Eguilles soutient que les requêtes de première instance sont irrecevables dès lors que les arrêtés du 25 novembre 2019 sont purement confirmatifs d'un arrêté du 5 août 2019 opposant à M. B... un refus de permis de construire portant sur un projet similaire, lequel n'a fait l'objet d'aucun recours et est ainsi devenu définitif. Toutefois, la commune n'apporte pas de précisions suffisantes quant à l'identité des projets et il ressort des pièces du dossier que ceux objets des arrêtés en litige sont implantés sur les lots A et B, d'une surface respective de 628 et 671 m², de la parcelle cadastrée section BZ 129 issus d'une division de cette unité foncière autorisée par un arrêté du maire de la commune du 20 février 2018, alors que l'arrêté du 5 août 2019 portait sur un projet implanté sur la totalité de la surface de cette parcelle, de 1300 m². Dans ces conditions, les arrêtés du 25 novembre 2019 ne peuvent être regardés comme purement confirmatifs de celui du 5 août 2019 et le moyen tiré de l'irrecevabilité des requêtes de première instance doit être écarté.
En ce qui concerne la légalité des projets :
3. En premier lieu, pour refuser à M. B... ses permis de construire, le maire de la commune d'Eguilles s'est fondé sur l'article UD 11 relatif à l'aspect extérieur des constructions du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune approuvé le 21 mars 2017. Cependant, ce document d'urbanisme a été annulé en totalité par deux jugements n° 1706513 et n° 1706327 du tribunal administratif de Marseille du 26 octobre 2020, dont il n'a pas été interjeté appel et qui sont, dès lors, devenus définitifs. Le maire de la commune ne pouvait donc légalement se fonder sur ces dispositions pour prendre les arrêtés attaqués.
4. En deuxième lieu, pour le même motif que celui exposé au point précédent, la commune d'Eguilles ne peut davantage se prévaloir, à la faveur d'une substitution de base légale, de ce que le projet méconnaîtrait l'article UD 3 du PLU de la commune approuvé le 21 mars 2017.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme : " Sous réserve de l'application des articles L. 600-12-1 et L. 442-14, l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme, le document d'urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur. " Aux termes de l'article L. 600-12-1 de ce code : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un document d'urbanisme en tenant lieu ou d'une carte communale sont par elles-mêmes sans incidence sur les décisions relatives à l'utilisation du sol ou à l'occupation des sols régies par le présent code délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d'illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet. / Le présent article n'est pas applicable aux décisions de refus de permis ou d'opposition à déclaration préalable. Pour ces décisions, l'annulation ou l'illégalité du document d'urbanisme leur ayant servi de fondement entraîne l'annulation de ladite décision. " Par ailleurs, aux termes de l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme : " Le règlement national d'urbanisme est applicable aux constructions et aménagements faisant l'objet d'un permis de construire, d'un permis d'aménager ou d'une déclaration préalable ainsi qu'aux autres utilisations du sol régies par le présent code. / Toutefois les dispositions des articles R. 111-3, R. 111-5 à R. 111-19 et R. 111-28 à R. 111-30 ne sont pas applicables dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu. (...) ".
6. Il résulte des dispositions des articles L. 600-12 et L. 600-12-1 du code de l'urbanisme que l'annulation, par les jugements du tribunal administratif de Marseille mentionnés au point 3, du PLU de la commune d'Eguilles approuvé le 21 mars 2017 a eu pour effet de remettre en vigueur le plan d'occupation des sols de la commune approuvé le 27 janvier 1988, visé par les arrêtés attaqués, qui lui était immédiatement antérieur et, en outre, doit entraîner leur annulation. Par suite, en vertu du deuxième alinéa de l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme, la commune d'Eguilles ne peut davantage se prévaloir, à la faveur d'une substitution de base légale, des dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme pour fonder les refus de son maire de délivrer les permis de construire sollicités par M. B....
7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, la commune d'Eguilles n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé les arrêtés du 25 novembre 2019 par lesquels son maire a refusé de délivrer deux permis de construire à M. B....
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune d'Eguilles une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
D É C I D E
Article 1er : La requête de la commune d'Eguilles est rejetée.
Article 2 : La commune d'Eguilles versera à M. B... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Eguilles et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2024, où siégeaient :
- Mme Courbon, présidente,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller,
- Mme Dyèvre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 décembre 2024.
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N° 23MA01271
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