La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/12/2024 | FRANCE | N°23MA01734

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre, 18 décembre 2024, 23MA01734


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2002752 du 4 mai 2023, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et un m

émoire, enregistrés le 4 juillet 2023 et le 1er décembre 2024, M. B..., représenté par Me Poussard, demande à la Cour :



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2002752 du 4 mai 2023, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 juillet 2023 et le 1er décembre 2024, M. B..., représenté par Me Poussard, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 4 mai 2023 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration n'était pas fondée à faire application de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales ;

- le procès-verbal d'opposition à contrôle fiscal est irrégulier ;

- l'administration, en refusant de lui communiquer la copie de son dossier, a porté atteinte à ses droits de la défense et a méconnu le caractère contradictoire de la procédure ;

- l'administration ne lui a pas communiqué l'ensemble des actes liés à la mise en œuvre de son droit de communication malgré sa demande ;

- l'article L. 52 du livre des procédures fiscales a été méconnu, dès lors que la durée de la vérification de comptabilité a excédé la durée de trois mois ;

- l'administration a ainsi méconnu la doctrine administrative référencée BOI-CF-PGR-20-30, § 210 et BOI-CF-PGR-20-50, §230 ;

- l'administration n'a pas informé le liquidateur judiciaire de l'existence de ses réclamations préalables ;

- il n'a pas été régulièrement informé de l'assignation en redressement judiciaire ;

- la créance fiscale est éteinte, en l'absence de déclaration de créance déposée dans les deux mois du jugement d'ouverture de la procédure collective ;

- l'administration a ainsi méconnu la doctrine administrative BOI-REC-EVTS-10-30 §10 ;

- c'est à tort que l'administration a refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux charges ;

- l'administration ne pouvait faire application de la majoration pour opposition à contrôle fiscal, dès lors qu'elle n'était pas fondée à mettre en œuvre la procédure pour opposition à contrôle fiscal.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 décembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui exerçait à titre individuel une activité de vente de quads, deux roues et accessoires moto, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale, faute de présentation de la comptabilité, a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires, et lui a notamment notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée selon la procédure d'évaluation d'office prévue par l'article L. 74 du livre des procédures fiscales. M B... relève appel du jugement du 4 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a ainsi été assujetti au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers (...) ".

3. Il résulte de l'instruction qu'un avis de vérification a été notifié le 10 octobre 2012 à M. B..., l'informant du contrôle de l'ensemble de ses déclarations fiscales au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, et prévoyant une première intervention le 23 octobre 2012 au bureau de l'intéressé. Le 22 octobre 2012, M. B... a sollicité le report de cette intervention au motif que son enfant était souffrant et en faisant état de la proximité des vacances scolaires. L'administration lui a alors proposé de repousser la première intervention au 8 novembre 2012. Par un courriel du 8 novembre 2012, M. B... a demandé au vérificateur un nouveau report, indiquant qu'il avait dû " partir ce jour dans le nord " pour des " raisons familiales ". Par une lettre de mise en garde du 8 novembre 2012, le service vérificateur a proposé un rendez-vous le 20 novembre 2012. Cette lettre a été adressée à M. B... par lettre simple et par lettre recommandée avec accusé de réception, et le pli recommandé, présenté le 14 novembre 2012, a été retourné au service avec la mention " pli avisé non réclamé ". M. B... ne s'est pas présenté au rendez-vous fixé le 20 novembre 2012 et n'a d'ailleurs pas repris contact avec l'administration avant qu'elle ne lui adresse, le 10 décembre 2012, un procès-verbal d'opposition à contrôle. Ce procès-verbal a été régulièrement notifié à M. B..., le pli envoyé en recommandé ayant été présenté le 15 décembre 2012 au domicile de l'intéressé et retourné au service, revêtu de la mention " pli avisé et non réclamé ". Il résulte de ces éléments que l'administration a tenté à plusieurs reprises de mettre M. B... en mesure de trouver une date pour débuter la vérification de comptabilité. Dans ces conditions, M. B..., par son inertie, a délibérément fait obstacle aux opérations de contrôle fiscal. Par suite, l'administration a pu légalement se fonder sur l'article L. 74 du livre des procédures fiscales pour constater l'existence d'une opposition à contrôle fiscal et, en conséquence, évaluer d'office les bases d'imposition de M. B.... Pour les mêmes motifs, doit en tout état de cause être écarté le moyen tiré de ce que le procès-verbal d'opposition à contrôle fiscal serait irrégulier.

4. En deuxième lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que l'évaluation d'office des bases d'imposition de M. B... résulte de ses seuls agissements, constitutifs d'une opposition à contrôle fiscal. Par conséquent, le requérant, qui s'est de lui-même placé en dehors des règles applicables à la procédure d'imposition, ne saurait utilement soutenir que la procédure d'imposition serait irrégulière en raison de la durée de la vérification de comptabilité.

5. En troisième lieu, M. B..., qui, ainsi qu'il a été dit au point précédent, s'est de lui-même placé en dehors des règles applicables à la procédure d'imposition, ne peut utilement faire valoir que l'administration aurait méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, qui obligent l'administration à communiquer avant la mise en recouvrement au contribuable qui en fait la demande la copie des documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition. Au surplus et en tout état de cause, il n'est pas démontré que M. B... aurait sollicité avant la mise en recouvrement des impositions en litige la communication des éléments obtenus par l'administration dans le cadre de l'exercice de son droit de communication.

6. En quatrième lieu, si M. B... fait valoir que l'administration a refusé de lui communiquer la copie de son dossier, il résulte de l'instruction que les pièces et documents saisis au cours des visites domiciliaires qui se sont déroulées le 23 mai 2013 lui ont été restitués le 22 juillet 2013, et que l'administration a joint à la décision du 23 juillet 2020 rejetant la réclamation de M. B... la copie de l'avis de vérification, des deux propositions de rectification du 11 octobre 2013, de la lettre de mise en garde du 8 novembre 2012 et du procès-verbal d'opposition à contrôle fiscal du 10 décembre 2012. Par conséquent, doivent en tout état de cause être écartés les moyens tirés de ce que l'administration aurait porté atteinte aux droits de la défense et méconnu le caractère contradictoire de la procédure.

7. En cinquième lieu, les circonstances que l'administration n'aurait pas informé le liquidateur judiciaire de l'existence des réclamations préalables de M. B..., et que ce dernier n'aurait pas été régulièrement informé de l'assignation en redressement judiciaire sont sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition.

8. En sixième lieu, si le requérant se prévaut des doctrines administratives référencées BOI-CF-PGR-20-30 et BOI-CF-PGR-20-50, ces doctrines, qui traitent de questions touchant à la procédure d'imposition, ne peuvent pas être regardées comme comportant une interprétation formelle de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

9. En premier lieu, la circonstance que la créance fiscale serait éteinte en l'absence de déclaration de créance déposée dans les deux mois du jugement d'ouverture de la procédure collective, à la supposer établie, serait sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition. M B... ne saurait se prévaloir à cet égard de la doctrine administrative référencée BOI-REC-EVTS-10-30, qui, relative au recouvrement, ne peut être invoquée dans un litige d'assiette.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". M. B..., dont les impositions ont été régulièrement établies selon la procédure d'évaluation d'office prévue par l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, supporte la charge de la preuve de l'exagération de ses bases d'imposition.

11. La méthode de reconstitution retenue par le vérificateur, en l'absence de comptabilité, a consisté à déterminer le chiffre d'affaires de M. B... à partir des facturiers saisis au cours des visites domiciliaires, dont il ressort que les chiffres d'affaires hors taxes facturés se sont élevés à 519'579 euros pour l'exercice 2010, et à 425'825 euros pour l'exercice 2011. M. B..., qui ne produit aucun élément de nature à justifier de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée afférentes à des charges afférentes à la période en litige, ne démontre pas que les bases d'imposition seraient excessives en se bornant à faire valoir que les procès-verbaux de saisie indiquent que des factures de charges ont été saisies. Dans ces conditions, il ne conteste pas sérieusement le bien fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés.

Sur les pénalités :

12. Aux termes de l'article 1732 du code général des impôts : " La mise en œuvre de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales entraîne : / a. L'application d'une majoration de 100 % aux droits rappelés ou aux créances de nature fiscale qui doivent être restituées à l'Etat (...) ".

13. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 du présent arrêt que la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales en cas d'opposition du contribuable au contrôle fiscal a été mise en œuvre à bon droit à l'encontre de M. B.... Par suite, le requérant n'est pas fondé à contester la majoration de 100 % qui a assorti, sur le fondement des dispositions de l'article 1732 précité du code général des impôts, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que demande M. B... au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre chargé du budget et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2024, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 décembre 2024.

2

N° 23MA01734


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01734
Date de la décision : 18/12/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité - Procédure.

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Rectification (ou redressement) - Généralités.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Déductions.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : POUSSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-18;23ma01734 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award