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06/12/2024 | FRANCE | N°24MA00347

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 06 décembre 2024, 24MA00347


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2023 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel cette obligation sera le cas échéant exécutée d'office.



Par un jugement n° 2400130 du 29 janvier 2024, la magistrate désignée près le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.


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Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 février et 10 mai 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2023 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel cette obligation sera le cas échéant exécutée d'office.

Par un jugement n° 2400130 du 29 janvier 2024, la magistrate désignée près le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 février et 10 mai 2024, M. A..., représenté par Me Bessis-Osty, demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du 29 janvier 2024 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2023 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de son conseil, une somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet a méconnu les dispositions des articles L. 541-1 et L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il a formé une demande d'aide juridictionnelle en vue de déposer un recours devant la Cour nationale du droit d'asile ; une demande de réexamen a en outre été formée en conséquence en avril 2024 et ce changement de circonstance doit être pris en compte par le juge afin de donner un effet utile à sa décision ;

- il a également méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 33 de la convention de Genève et l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il encourt des risques graves en cas de retour dans son pays d'origine où il a subi des pressions à la suite du décès de son père.

La procédure a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 avril 2024 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Poullain a été entendu en audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant turc né en 1997, relève appel du jugement du 29 janvier 2024 par lequel la magistrate désignée près le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2023 du préfet des Alpes-Maritimes l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel cette obligation sera le cas échéant exécutée d'office.

Sur les conclusions tendant à l'admission à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ".

3. Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille du 26 avril 2024, M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale. Dans ces conditions, il n'y a plus lieu de statuer sur sa demande tendant à ce qu'il soit admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une obligation de quitter le territoire français peut être prononcée lorsque " la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, (...) ". Aux termes de l'article L. 542-1 du même code, dans sa version alors applicable : " En l'absence de recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin à la notification de cette décision. / Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la notification de celle-ci ".

5. Si M. A... a entendu former un recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 19 octobre 2023, rejetant sa demande d'asile, il est constant que la demande d'aide juridictionnelle afférente n'est jamais parvenue au bureau d'aide juridictionnelle de la Cour nationale du droit d'asile apparemment du fait d'une défaillance du matériel de télécopie de l'association Forum réfugiés assistant M. A.... Dès lors, c'est sans commettre d'erreur de fait ou d'erreur de droit au regard des dispositions citées ci-dessus que le préfet des Alpes-Maritimes a estimé que M. A... n'avait pas formé de recours et que son droit de se maintenir sur le territoire avait pris fin à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 24 octobre 2023.

6. Aux termes de l'article L. 541-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sans préjudice des dispositions des articles L. 753-1 à L. 753-4 et L. 754-1 à L. 754-8, lorsque l'étranger sollicitant l'enregistrement d'une demande d'asile a fait l'objet, préalablement à la présentation de sa demande, d'une décision d'éloignement prise en application du livre VI, cette dernière ne peut être mise à exécution tant que l'étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français, dans les conditions prévues aux articles L. 542-1 et L. 542-2 ".

7. Si M. A... soutient qu'eu égard aux difficultés matérielles auxquelles l'association Forum réfugiés a été confrontée, il a, depuis l'intervention de l'arrêté en litige, pu présenter une demande de réexamen de sa demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, à raison de laquelle le préfet des Alpes-Maritimes lui a délivré, le 26 avril 2024, une attestation de demande d'asile, cette circonstance est de nature à empêcher la mise à exécution de la décision d'éloignement contestée mais n'est pas susceptible d'avoir une incidence sur sa légalité.

8. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de ladite convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Enfin, aux termes du 1. de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 : " Aucun des Etats contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ".

9. M. A... soutient qu'il serait d'origine kurde et qu'après le décès de son père, il aurait subi des pressions antagonistes, d'une part, de la part des autorités pour devenir " protecteur du village " et, d'autre part, de la part du parti démocratique des peuples pour refuser ce rôle. Toutefois, il ne fournit à l'instance qu'un mandat d'arrêt qui aurait été établi à son encontre en raison d'actes de propagande accomplis pour une organisation terroriste le 20 mars 2023, sans donner aucune précision quant aux actes qui seraient en cause ni quant à la nature des pressions qui auraient été exercées sur lui. En l'état, M. A... n'établit pas qu'il encourrait des risques en cas de retour dans son pays d'origine. Les moyens tirés de ce que la décision fixant le pays à destination duquel l'obligation de quitter le territoire sera le cas échéant exécutée d'office méconnaitrait les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 33 de la convention de Genève doivent être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée près le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2023. Dès lors, il y a lieu de rejeter les conclusions d'appel présentées par M. A..., en ce comprises les conclusions présentées au titre des frais d'instance.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant au bénéfice de l'admission à titre provisoire à l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Bessis-Osty et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2024, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Poullain, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 décembre 2024.

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N° 24MA00347

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA00347
Date de la décision : 06/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : BESSIS-OSTY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-06;24ma00347 ?
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