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03/12/2024 | FRANCE | N°23MA02453

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 4ème chambre, 03 décembre 2024, 23MA02453


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 29 juin 2021 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif exercé contre la décision du 16 février 2021 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Sud lui a infligé une interdiction d'exercice de toute activité privée de sécurité pour une durée de trois ans ainsi

qu'une pénalité financière d'un montant de 10 000 euros.



Par un jugement n° 210184...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 29 juin 2021 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif exercé contre la décision du 16 février 2021 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Sud lui a infligé une interdiction d'exercice de toute activité privée de sécurité pour une durée de trois ans ainsi qu'une pénalité financière d'un montant de 10 000 euros.

Par un jugement n° 2101846, 2102219 du 27 juillet 2023, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de M. C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2023, M. C..., représenté par Me Sinelle, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2101846, 2102219 du 27 juillet 2023 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler la décision du 16 février 2021 par laquelle la Commission locale d'agrément et de contrôle Sud a prononcé la sanction de l'interdiction d'exercer toute activité privée de sécurité pour une durée de trois ans, assortie d'une pénalité financière d'un montant de 10 000 euros ;

3°) d'annuler la décision implicite ainsi que la délibération du 29 juin 2021 par lesquelles la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif exercé contre la décision du 16 février 2021 ;

4°) de mettre à la charge du Conseil national des activités privées de sécurité la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision en litige est entachée d'un vice de procédure tiré de ce que le compte rendu de visite du 3 juillet 2020 ne lui pas été remis, en sa qualité de seul responsable de l'entreprise, en méconnaissance de l'article L. 643-3 du code de la sécurité intérieure ;

- les manquements reprochés, tirés, d'une part, de ce que la réalisation de fausses lettres d'intention d'embauche pour la société Oropex Conseil serait la seule activité réelle de la société Marsec, et, d'autre part, de ce que la société Marsec aurait entendu se prévaloir irrégulièrement d'une activité publique, ne sont pas établis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2024, le Conseil national des activités privées de sécurité, représenté par Me Claisse, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge du requérant la somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les conclusions tendant à l'annulation de la décision de la commission locale d'agrément et de contrôle et de la décision implicite de rejet de la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Un courrier du 9 avril 2024 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 27 août 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire, produit par Me Sinelle pour M. C... le 13 novembre 2024, n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure,

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martin,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations de Me Olivier, substituant Me Claisse, représentant le Conseil national activités privées de sécurité.

Considérant ce qui suit :

1. La société Marsec, gérée par M. C..., qui exerçait dans le domaine de la protection des navires, a fait l'objet d'un contrôle de son activité diligenté par les agents de la direction territoriale sud du Conseil national des activités privées de sécurité. A la suite de ces opérations, au cours desquelles M. C... et M. B..., directeur général, ont été auditionnés, la commission locale d'agrément et de contrôle (CLAC) Sud du Conseil national des activités privées de sécurité a décidé, par délibération du 16 février 2021, de prononcer à l'encontre de M. C... la sanction de l'interdiction d'exercice de toute activité privée de sécurité pour une durée de

trois ans, assortie d'une pénalité financière d'un montant de 10 000 euros. M. C... a alors saisi la Commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) d'un recours administratif préalable obligatoire, lequel a été rejeté par une décision implicite, confirmée par une délibération expresse du 29 juin 2021. Dans la présente instance, M. C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 29 juin 2021 par laquelle la CNAC a rejeté son recours administratif.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 634-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa version applicable au litige : " Les membres et les agents du Conseil national des activités privées de sécurité ainsi que les membres des commissions d'agrément et de contrôle assurent le contrôle des personnes exerçant les activités mentionnées aux titres Ier, II et II bis. Ils peuvent, pour l'exercice de leurs missions, accéder aux locaux à usage professionnel de l'employeur, du donneur d'ordres ou du prestataire de formation, à l'exclusion des locaux affectés au domicile privé, ainsi qu'à tout site d'intervention des agents exerçant les activités mentionnées aux mêmes titres Ier et II, en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant. Le procureur de la République territorialement compétent en est préalablement informé. ". Et aux termes de l'article L. 634-3 de ce même code : " Les membres et les agents de la commission nationale ou des commissions d'agrément et de contrôle peuvent demander communication de tout document nécessaire à l'accomplissement de leur mission, quel qu'en soit le support, et en prendre copie ; ils peuvent recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement et toute justification utiles. Ils peuvent consulter le registre unique du personnel prévu à l'article L. 1221-13 du code du travail. Ils peuvent, à la demande du président de la Commission nationale ou de la commission d'agrément et de contrôle territorialement compétente, être assistés par des experts désignés par l'autorité dont ceux-ci dépendent. Il est dressé contradictoirement un compte rendu de visite en application du présent article dont une copie est remise immédiatement au responsable de l'entreprise. ".

3. Il résulte de ces dispositions que, lorsque, pour l'exercice de leur mission de contrôle des personnes exerçant les activités privées de sécurité mentionnées aux titres Ier, II et II bis du livre VI du code de la sécurité intérieure, les agents du Conseil national des activités privées de sécurité sollicitent la communication de tout document utile à l'accomplissement de leurs missions, un compte-rendu doit être dressé contradictoirement et remis immédiatement au responsable de l'entreprise, que ces documents aient été recueillis dans les locaux de la société contrôlée ou sur convocation.

4. En l'espèce, il est constant qu'au cours de la visite réalisée au siège de la société Marsec le 3 juillet 2020, les agents du Conseil national des activités privées de sécurité ont consulté plusieurs documents, et que ces documents ont été recensés dans un compte rendu de visite remis le jour même à M. B..., directeur général de la société contrôlée. Il résulte par ailleurs de l'instruction, notamment de l'extrait du rapport " Intuiz+ " issu du site " Altares.com " produit en défense par le Conseil national des activités privées de sécurité, dont le contenu n'est pas contesté, que M. B... est l'un des deux dirigeants de la société avec M. C..., dont il assume, au demeurant, la direction effective, notamment en signant les lettres d'intention d'embauche pour l'exercice d'une activité de protection des navires. Dans ces conditions, en remettant le compte rendu de visite au seul directeur général de la société Marsec, le Conseil national des activités privées de sécurité n'a pas méconnu les dispositions citées au point 2 de l'article L. 634-3 du code de la sécurité intérieure.

5. Au surplus, tant M. B... que M. C... ont été auditionnés par les agents du Conseil national des activités privées de sécurité. En outre, le rapport de séance a été adressé à l'appelant par courrier du 15 décembre 2020, et il a pu faire valoir ses observations avant la séance de la CLAC Sud du 14 janvier 2021, au cours de laquelle il a d'ailleurs été entendu par visioconférence. Il a donc été informé, en temps utile, sur les manquements relevés par les contrôleurs, et mis en mesure de présenter de manière effective ses observations avant l'intervention de la sanction en litige. Dans ces conditions, la circonstance que le compte rendu de visite du 3 juillet 2020 ne lui a pas été personnellement remis ne l'a privé d'aucune garantie et n'a pas davantage eu d'influence sur le sens de la décision en litige.

6. En second lieu et d'une part, aux termes de l'article R. 631-7 du code de la sécurité intérieure : " En toute circonstance, les acteurs de la sécurité privée s'interdisent d'agir contrairement à la probité, à l'honneur et à la dignité. Ils font preuve de discernement et d'humanité. / Ils agissent avec professionnalisme et veillent à acquérir et maintenir leurs compétences par toute formation requise ". Et selon l'article R. 631-13 de ce même code : " Les acteurs de la sécurité privée entretiennent des relations loyales et transparentes avec les administrations publiques. / Leurs déclarations auprès de celles-ci sont sincères. Ils répondent avec diligence à toutes les demandes des administrations publiques. / Ils défèrent aux convocations des autorités judiciaires, services de police ou de gendarmerie. ".

7. La décision en litige relève un manquement aux dispositions du code de la sécurité intérieure citées au point précédent, plus précisément un manque de professionnalisme et un manque de transparence vis-à-vis des services du Conseil national des activités privées de sécurité, au motif que la société Marsec, sans client ni activité réelle et qui n'était de surcroît plus titulaire d'autorisation d'exercer depuis le 17 mai 2019, a été créée dans le seul but de signer des lettres d'intention d'embauche fictive afin d'orienter des demandeurs d'autorisation préalable vers l'organisme de formation Oropex Conseil, géré par M. C.... Alors que la matérialité de ces faits résulte des déclarations du directeur général de la société Marsec lors de son audition, et que le caractère fictif des lettres d'intention d'embauche est corroboré notamment par la circonstance que cette société n'a déclaré aucun salarié auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale ainsi que le fait valoir le CNAPS sans être contredit, M. C... n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause tant les déclarations de son directeur général que les constatations des agents du Conseil national des activités privées de sécurité, dont il se déduit que cette pratique avait pour seul but d'assurer un gain financier à la société Oropex Conseil, et ce indépendamment de la circonstance que cet organisme de formation aurait également accueilli des stagiaires sur le fondement de lettres d'intention d'embauche établies par d'autres opérateurs exerçant dans le secteur de la sécurité privée. Par conséquent, contrairement à ce que soutient M. C..., la matérialité de ces faits est établie.

8. D'autre part, aux termes de l'article R. 631-12 du code de la sécurité intérieure : " Les acteurs de la sécurité privée doivent éviter par leur comportement et leur mode de communication toute confusion avec un service public, notamment un service de police. / Est interdite l'utilisation de logotypes ou signes reprenant des caractéristiques et couleurs assimilables à celles identifiant les documents émis par les administrations publiques ainsi que de tout élément pouvant susciter ou entretenir une quelconque confusion avec un service dépositaire de l'autorité publique. / Les acteurs de la sécurité privée ne peuvent, dans leur communication vis-à-vis du public, se prévaloir d'un lien passé ou présent avec un service dépositaire de l'autorité publique. A l'égard des tiers, ils ne peuvent faire état de missions ou de délégations des administrations publiques qui ne leur auraient pas été confiées par celles-ci. / Ils s'interdisent tout équipement, notamment les avertisseurs sonores et lumineux des véhicules, susceptibles de créer une telle confusion ".

9. Il résulte de l'instruction que les lettres d'intention d'embauche évoquées au point 7 ont été établies à partir d'un modèle établi et mis à disposition des usagers par le Conseil national des activités privées de sécurité, dont elles comportaient le logo. En modifiant ces documents édités par un service administratif, afin d'y apposer son propre logo à côté de celui du Conseil national des activités privées de sécurité, la société Marsec doit être regardée comme ayant cherché à entretenir une confusion avec un service dépositaire de l'autorité publique afin de faciliter la signature de lettres d'intention d'embauche fictive, et comme ayant, par suite, contrevenu aux dispositions citées au point précédent de l'article R. 631-12 du code de la sécurité intérieure, et ce en dépit de la circonstance que le Conseil national des activités privées de sécurité aurait postérieurement modifié le modèle de lettre mis à disposition des tiers sur son site internet en supprimant tout logotype ou signe distinctif.

10. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que la sanction contestée serait fondée sur des faits non matériellement établis.

11. Enfin, les faits précédemment exposés étaient de nature à justifier une sanction en application des dispositions de l'article L. 634-4 du code de la sécurité intérieure dans sa version applicable au litige.

12. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 29 juin 2021 par laquelle la CNAC du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé à l'encontre de la délibération du 16 février 2021 de la CLAC Sud.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du Conseil national des activités privées de sécurité, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de M. C... la somme de 500 euros à verser au Conseil national des activités privées de sécurité au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : M. C... versera la somme de 500 euros au Conseil national des activités privées de sécurité en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au Conseil national des activités privées de sécurité.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 3 décembre 2024.

2

N° 23MA02453


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02453
Date de la décision : 03/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05 Police. - Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : ESCLAPEZ-SINELLE-PILLIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-03;23ma02453 ?
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