Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 9 août 2021 par lequel la directrice générale du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers (CNGPH) l'a détaché d'office, dans l'intérêt du service, au centre hospitalier d'Aix-Pertuis (CHIAP) pour une durée de cinq ans.
La Défenseure des droits, en application des dispositions de l'article 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits, a présenté des observations.
Par un jugement n° 2108842 du 30 janvier 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. B....
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 mars 2023 et le 14 mars 2024, M. B..., représenté par la SCP ALPAVOCAT, agissant par Me Ducrey-Bompard, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 30 janvier 2023 ;
2°) d'écarter des débats le rapport de médiation des 22 et 23 avril 2021 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 9 août 2021 pris par la directrice générale du CNGPH ;
4°) de mettre à la charge solidaire du CNGPH, du centre hospitalier intercommunal des Alpes du Sud (CHICAS) et du centre hospitalier intercommunal d'Aix-Pertuis (CHIAP) la somme de 5 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement attaqué :
- les premiers juges ont entaché leur décision d'irrégularité en ne rouvrant pas les débats et en ne tenant compte ni des observations présentées par la Défenseure des droits ni de son mémoire, produits après la clôture de l'instruction ;
- le tribunal a, en méconnaissance des règles de confidentialité gouvernant la médiation tant conventionnelle que judiciaire, tenu compte du rapport de médiation des 22 et 23 avril 2021 ;
Sur le bienfondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté du 9 août 2021 :
- la décision contestée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'a pas été mis à même de consulter préalablement son dossier ;
- la procédure de recueil des avis du chef de pôle et du président de la commission médicale d'établissement et du directeur du CHICAS, imposée par le deuxième alinéa de l'article R. 6152-54 du code de la santé publique, est irrégulière dès lors que ces autorités étaient partiales ;
En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté du 9 août 2021 :
- cet acte doit s'analyser comme une sanction déguisée ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à l'intérêt du service ;
- cet arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article 6 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la décision contestée est entachée de détournement de pouvoir.
La Défenseure des droits a, en application des dispositions de l'article 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits, présenté des observations, enregistrées le 21 juillet 2023.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 23 août 2023 et le 29 mars 2024, le CHICAS, représenté par la SELARL Pezet et associés, agissant par Me Pezet, conclut, dans le dernier état de ses écritures :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce que la cour écarte des débats les tableaux d'astreinte illégalement détournés et produits par M. B... et faisant mention de données personnelles protégées ;
3°) à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2024, le CNGPH conclut au rejet de la requête et à la confirmation du jugement attaqué.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2024, le CHIAP, représenté par Me Carlini, conclut à ce que la cour constate qu'il n'est pas l'auteur de l'acte contesté et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir qu'il a seulement été chargé de l'exécution de l'arrêté du 9 août 2021 contesté.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la santé publique ;
- la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011, notamment son article 33 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la cour a désigné Mme Rigaud, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mahmouti,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- les observations de Me Ducrey-Bompard, représentant M. B..., celles de Me Hebert, représentant le CHICAS.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... relève appel du jugement du 30 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 août 2021 par lequel la directrice générale du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers (CNGPH) l'a détaché d'office, dans l'intérêt du service, au centre hospitalier intercommunal d'Aix-Pertuis (CHIAP) pour une durée de cinq ans.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 611-17 du même code : " Le rapporteur règle, sous l'autorité du président de la chambre, la communication de la requête. Il fixe, eu égard aux circonstances de l'affaire, le délai accordé aux parties pour produire leurs mémoires (...) ". Aux termes de l'article R. 613-3 du même code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction. ".
3. En l'espèce, il ressort des pièces de première instance que, postérieurement à la clôture d'instruction intervenue le 29 novembre 2022, la Défenseure des droits a présenté des observations le 12 janvier 2023 et, le lendemain, M. B... a produit un mémoire.
4. D'une part, aux termes de l'article 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits : " Le Défenseur des droits ne peut remettre en cause une décision juridictionnelle. / Les juridictions civiles, administratives et pénales peuvent, d'office ou à la demande des parties, l'inviter à présenter des observations écrites ou orales. Le Défenseur des droits peut lui-même demander à présenter des observations écrites ou à être entendu par ces juridictions ; dans ce cas, son audition est de droit. (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions que si l'audition du Défenseur des droits par les juridictions est, lorsque celui-ci le demande, de droit, cette circonstance n'a pour autant pas pour effet de lui conférer la qualité d'intervenant au litige, mais celle de simple observateur. Par suite, c'est sans commettre d'irrégularité que le tribunal s'est borné à viser sans les analyser, ni les communiquer ou y répondre, les observations présentées devant lui, postérieurement du reste à la clôture de l'instruction, par la Défenseure des droits.
6. D'autre part, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge administratif a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. Il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser. S'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser. Dans le cas particulier où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à peine d'irrégularité de sa décision.
7. En l'espèce, M. B... soutient qu'il appartenait aux premiers juges d'analyser et de tenir compte de son mémoire produit le 13 janvier 2023, après la clôture de l'instruction. Toutefois et compte tenu des principes rappelés au point précédent, la seule circonstance qu'il ait produit un mémoire n'imposait pas au tribunal de communiquer celui-ci. En outre, l'intéressé ne précise pas le ou les éléments dont il n'aurait pas été en mesure de faire état antérieurement et qui aurait été susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire. Dans ces conditions, son moyen doit être écarté.
8. En second lieu, aux termes de l'article L. 213-1 du code de justice administrative : " La médiation régie par le présent chapitre s'entend de tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par la juridiction. ". Aux termes de l'article L. 213-2 du même code : " Le médiateur accomplit sa mission avec impartialité, compétence et diligence. / Sauf accord contraire des parties, la médiation est soumise au principe de confidentialité. Les constatations du médiateur et les déclarations recueillies au cours de la médiation ne peuvent être divulguées aux tiers ni invoquées ou produites dans le cadre d'une instance juridictionnelle ou arbitrale sans l'accord des parties. / Il est fait exception au deuxième alinéa dans les cas suivants : 1° En présence de raisons impérieuses d'ordre public ou de motifs liés à la protection de l'intérêt supérieur de l'enfant ou à l'intégrité physique ou psychologique d'une personne ; 2° Lorsque la révélation de l'existence ou la divulgation du contenu de l'accord issu de la médiation est nécessaire pour sa mise en œuvre. ". Aux termes l'article L. 213-5 du même code : " Les parties peuvent, en dehors de toute procédure juridictionnelle, organiser une mission de médiation et désigner la ou les personnes qui en sont chargées. (...) ".
9. M. B... soutient qu'en fondant leur décision sur les constatations faites par les deux docteurs missionnés par le CNGPH afin d'organiser une " médiation " entre lui et les autres membres du service hospitalier, les premiers juges ont méconnu le principe de confidentialité de la médiation, qui serait selon lui garanti tant par les dispositions citées au point précédent que par la jurisprudence de la Cour de cassation mais aussi par la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale. Toutefois, l'invocation des principes applicables devant le juge judiciaire en matière civile et commerciale est inopérante. En outre, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'ordre de mission du 19 avril 2021 l'organisant, ainsi que d'un échange de courriels des 20 et 21 du même mois entre M. B... et les prétendus " médiateurs ", que la mission, dès lors qu'elle a été confiée exclusivement par le CNGPH à ces derniers, en vue d'examiner les causes et le cas échéant, de rechercher une issue à la situation conflictuelle durable affectant son service de rattachement, ne constitue pas une procédure de médiation à l'initiative des parties au sens des dispositions de l'article L. 213-5 du même code, tandis qu'elle n'a pas davantage été ordonnée par un tribunal avec leur accord sur le fondement de celles de son article L. 213-7. Par suite, celle-ci, même dénommée " médiation ", ne peut être regardée comme une médiation au sens et pour l'application des articles L. 213-1 et suivants précités. D'où il suit que le moyen est inopérant.
10. Il résulte de tout ce qui vient d'être dit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement qu'il attaque a été rendu au terme d'une procédure irrégulière.
Sur la demande de M. B... d'écarter une pièce des débats :
11. Compte tenu de ce qui a été dit au point 9, il n'y a pas lieu d'écarter des débats le rapport de médiation des 22 et 23 avril 2021.
Sur le bienfondé du jugement attaqué :
12. Aux termes de l'article R. 6152-54 du code de la santé publique : " (...) le détachement d'office ne peut être prononcé que lorsque l'intérêt du service l'exige sur un emploi de praticien hospitalier de même discipline et comportant une rémunération équivalente, dans l'un des établissements mentionnés à l'article R. 6152-1. / Le détachement d'office est prononcé par le directeur général du Centre national de gestion, après avis du chef de pôle, du président de la commission médicale d'établissement et du directeur, pour une période maximale de cinq ans renouvelable, pour la même durée, par tacite reconduction. (...). "
En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté du 9 août 2021 :
13. En premier lieu et comme l'a jugé à juste titre le tribunal, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a été averti, par courrier de la directrice du CNGPH du 26 juillet 2021 reçu le 29 juillet suivant, de l'intention de celle-ci de prononcer son détachement d'office dans l'intérêt du service, M. B... a été mis à même de demander la communication de son dossier et de faire connaître ses observations en temps utile avant l'intervention de l'arrêté du 9 août 2021 contesté.
14. En deuxième lieu, comme le soutient à raison le requérant, le principe d'impartialité s'imposant à toute autorité administrative, il incombe aux membres de ces autorités de s'abstenir de toute prise de position publique de nature à compromettre le respect de ce principe. Toutefois, en l'espèce, si le chef de pôle, la présidente de la commission médicale d'établissement ainsi que le directeur du CHICAS ont donné un avis favorable à la mutation dans l'intérêt du service de M. B... alors même que ces médecins participaient à un collectif publiquement défavorable au retour du docteur B... au sein du service hospitalier à Gap, les termes de leurs avis ne font cependant état d'aucune animosité particulière susceptible de mettre en cause leur impartialité tandis que leur participation au collectif précité ne révèle pas, à elle seule, qu'ils se seraient prononcés en tenant compte d'éléments étrangers à l'intérêt du service ainsi que l'exigeaient les dispositions de l'article R. 6152-54 du code de la santé publique.
15. Compte tenu de tout ce qui vient d'être dit, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté qu'il conteste procède d'une procédure irrégulière.
En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté du 9 août 2021 :
16. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de détacher d'office M. B... au centre hospitalier d'Aix-Pertuis (CHIAP) procèderait, comme il le soutient, de la volonté de le sanctionner alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'au contraire, elle résulte de celle de résorber un conflit majeur au sein du CHICAS qu'une conciliation organisée par le CNGPH n'était pas parvenue à résoudre et qui entraînait la menace d'une grève des agents et médecins. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette décision ait entraîné pour le requérant une perte de responsabilités ou de rémunération, ce qu'il ne conteste d'ailleurs pas, dès lors qu'il a été détaché au CHIAP en qualité de praticien hospitalier au service de chirurgie orthopédique et traumatologique et que son procès-verbal d'installation au CHIAP, établi le 24 novembre 2021, à l'issue de son arrêt de travail, confirme son installation dans le pôle chirurgie - bloc - stérilisation. Ainsi cette mesure ne présentait pas, dans les conditions où elle est intervenue, le caractère d'une sanction disciplinaire, mais constituait une mutation d'office prononcée dans l'intérêt du service. Le moyen tiré de ce que l'arrêté du 9 août 2021 doit s'analyser comme une sanction déguisée doit, dès lors, être écarté.
17. Le requérant soutient qu'alors que le service orthopédique du CHICAS dans lequel il était jusque-là affecté était en sous-effectif, il a été muté vers le CHIAP selon lui " en surnombre ". Toutefois, il allègue sans le démontrer l'existence dudit surnombre tandis qu'il ressort des pièces du dossier, que comme il a déjà été dit ci-dessus, c'est précisément sa présence au sein du CHICAS qui entraînait la persistance d'un conflit majeur au sein du personnel de cet établissement. M. B... n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la décision contestée est contraire à l'intérêt du service.
18. Enfin, aux termes de l'article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'appréciation de la valeur professionnelle, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, aux autorités judiciaires ou administratives de faits constitutifs d'un délit, d'un crime ou susceptibles d'être qualifiés de conflit d'intérêts au sens du I de l'article 25 bis dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions. / Aucun fonctionnaire ne peut être sanctionné ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. / Toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit. / Dans le cas d'un conflit d'intérêts, le fonctionnaire doit avoir préalablement alerté en vain l'une des autorités hiérarchiques dont il relève. Il peut également témoigner de tels faits auprès du référent déontologue prévu à l'article 28 bis. / En cas de litige relatif à l'application quatre premiers alinéas, dès lors que la personne présente des éléments de fait qui permettent de présumer qu'elle a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d'un délit, d'un crime, d'une situation de conflit d'intérêts ou d'un signalement constitutif d'une alerte au sens de l'article 6 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 précitée, il incombe à la partie défenderesse, au vu des éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l'intéressé. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. / Le fonctionnaire qui relate ou témoigne de faits relatifs à une situation de conflit d'intérêts de mauvaise foi ou de tout fait susceptible d'entraîner des sanctions disciplinaires, avec l'intention de nuire ou avec la connaissance au moins partielle de l'inexactitude des faits rendus publics ou diffusés est puni des peines prévues au premier alinéa de l'article 226-10 du code pénal. ".
19. Il ressort des pièces du dossier que le docteur B..., alors chef du service de chirurgie orthopédique du CHICAS, a saisi le directeur de cet établissement par un courrier du 17 avril 2018 d'une " plainte pour faute grave délibérée détachable du service " visant le docteur C..., relative à la réalisation d'une étude clinique menée par ce chirurgien orthopédiste de 2015 à 2017 sur une technique non validée en France et sans information préalable des patients concernés. Malgré la démission présentée par le docteur B... de ses fonctions de chef de service le 2 juillet 2018, après en avoir été suspendu par une décision du directeur de l'hôpital du 24 avril 2018 à la suite du signalement opéré le 17 avril précédent, les relations professionnelles entre ces deux praticiens ont continué à fortement se dégrader. Ainsi et notamment, à la suite d'une réunion qui s'est tenue le 25 septembre 2018 au cours de laquelle le docteur C... a tenu des propos irrespectueux et proféré des insultes à l'encontre du docteur B..., ce dernier a procédé au signalement auprès de l'agence régionale de santé, de la caisse primaire d'assurance maladie et du conseil de l'ordre des médecins, de l'activité libérale et des pratiques chirurgicales de son confrère. Les courriels produits au dossier, notamment ceux échangés au cours du mois de novembre 2018 entre les membres du service de chirurgie orthopédique du centre hospitalier intercommunal des Alpes du Sud, et le procès-verbal de la réunion de la commission médicale d'établissement qui s'est tenue le 19 novembre 2018 attestent d'une entente fortement dégradée et d'un climat de violence verbale au sein de ce service. Il en ressort que cette vive tension est imputable à M. B... en raison des nombreux contrôles qu'il a réalisés sur les dossiers des patients du docteur C... mais également sur les conditions d'exercice de l'activité libérale de ce dernier ainsi que d'un autre médecin du même service. En outre, le courrier du 19 février 2019 du " Comité des Sages " du CHICAS fait état d'un " délitement des relations professionnelles " au sein du service de chirurgie orthopédique, d'une " impossibilité de travailler ensemble pour les praticiens " de ce service et de l'existence d'une opposition de ces derniers à la reprise d'activité de M. B... au sein de l'équipe de chirurgie orthopédique en mars 2019. Le rapport d'inspection du 26 février 2019 indique quant à lui que le retour de ce dernier " entrainerait une perte de sérénité chez les chirurgiens orthopédistes et potentiellement un risque pour les patients " en soulignant le " risque à très court terme d'un départ des 4 autres chirurgiens qui font l'essentiel de l'activité du service ". Par ailleurs, le 16 décembre 2019, 15 membres de la communauté médicale du CHICAS, praticiens, chefs de service, chefs de pôle et président de la CME, ont dénoncé le climat délétère entretenu par M. B... au sein de leur établissement, affirmant que " le Dr A... B... continue d'invectiver, de façon répétée, certains membres de la communauté médicale ", que " les chirurgiens du service d'orthopédie sont épuisés, voire meurtris, par deux années de conflits, d'attaques et de plaintes " et qu'" un sentiment d'angoisse, voire de peur, empêche même certains, à des niveaux différents, de pouvoir travailler sereinement et de se projeter dans l'avenir du service et de l'institution ", ne sachant pas " s'ils resteront en poste au CHICAS ou s'ils muteront ". D'ailleurs, l'intéressé a continué, durant la période de suspension prononcée le 4 mars 2019 par le directeur du centre hospitalier de Gap de tenir des propos sur les réseaux sociaux et par mail des propos désobligeants tant à l'égard de sa hiérarchie que du docteur C.... Enfin, il ressort de la lettre du 24 juin 2021 signée par l'ensemble des médecins anesthésistes du CHICAS, adressée à la directrice du CNGPH, que persistait dans le service un climat de " défiance ", tandis que l'alerte d'un collectif dénommé " Collectif pour l'avenir du CHICAS " relevait que les " moyens et procédés que le Dr A... B... (acharnement, dénigrement, insultes, disproportion entre son interprétation et les faits reprochés à ses collègues directs de travail, actions souhaitées/attendues, médiatisation partielle) ont renforcé la communauté hospitalière dans l'impossibilité concrète de travailler ensemble ". Au vu de tous ces éléments, le CNGPH apporte la preuve que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers aux deux signalements faits par l'intéressé. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983 doit être écarté.
20. Enfin et eu égard notamment à ce qui vient d'être dit, le détournement de pouvoir allégué n'est pas non plus démontré.
21. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CNGPH, du CHIAP et du CHICAS, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... réclame au titre des frais liés à l'instance. Il n'y a pas non plus lieu de mettre à la charge de ce dernier les sommes réclamées par le CHICAS et le CHIAP à ce même titre.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, au centre hospitalier d'Aix-Pertuis et au centre hospitalier intercommunal des Alpes du Sud.
Copie en sera adressée à la Défenseure des droits.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Rigaud, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ;
- M. Mahmouti, premier conseiller ;
- M. Danveau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 novembre 2024.
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N° 23MA00721
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