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22/11/2024 | FRANCE | N°23MA00437

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 22 novembre 2024, 23MA00437


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme D... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulon de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue d'une procédure pénale et de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014.



Par un jugement n° 2002326 du 26 décembre 2022, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur dema

nde.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 22 février 2023, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulon de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue d'une procédure pénale et de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 2002326 du 26 décembre 2022, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 février 2023, M. et Mme A..., représentés par Me Ciussi, doivent être regardés comme demandant à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 décembre 2022 ;

2°) de surseoir à statuer, subsidiairement d'ordonner la production du rapport de vérification, et de les décharger des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- une procédure pénale est en cours à l'encontre de M. C..., frère de Mme A... et bénéficiaire final de la SCI Domino, laquelle ne devrait pas être propriétaire de la villa qu'ils occupent ; les documents comptables de la SCI ont été mis sous scellés ; il y a lieu de surseoir à statuer ;

- c'est à tort que l'administration a procédé à une évaluation d'office de l'imposition de la SCI Domino sur le fondement de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales ; M. A..., gérant non-associé, n'est pas détenteur de la comptabilité et s'est trouvé dans l'impossibilité de la communiquer ; il n'y a pas opposition au contrôle ;

- en s'abstenant d'exercer son droit de communication auprès du comptable, l'administration fiscale a manqué de diligence ; le rapport de vérification devra être produit ;

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée, dès lors notamment qu'aucun terme de comparaison n'est utilisé ;

- les avis d'imposition ne sont pas signés ;

- la SCI ne s'est pas appauvrie en mettant la villa dont elle est propriétaire à leur disposition dès lors que les fonds ayant permis l'acquisition de cette villa appartiennent en réalité à Mme A... ; ils ignoraient que la SCI avait opté à l'impôt sur les sociétés ; en application du II de l'article 15 du code général des impôts, les revenus issus de leur logement ne sont en principe pas soumis à l'impôt ;

- dès lors que les fonds en cause n'appartenaient pas à la SCI, le taux de rendement à appliquer pour déterminer la valeur locative du bien est nul ;

- il ne saurait être considéré que la mise à leur disposition du bien constitue une distribution de revenus au sens du c de l'article 111 du code général des impôts dès lors qu'ils ne sont pas associés de la SCI ;

- le caractère délibéré du manquement n'est pas établi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné Mme Aurélia Vincent, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Poullain,

- et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Domino, qui a pour activité l'acquisition, la vente, l'administration, l'exploitation et la gestion par bail de tous immeubles, et dont M. A... est gérant non-associé, met à disposition des époux A... une villa d'habitation située à Saint-Paul-en-Forêt. L'administration fiscale, au terme d'une procédure d'évaluation d'office, l'a assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2013 et 2014, à raison notamment des loyers non perçus en contrepartie de la mise à disposition de la villa. Parallèlement, les époux A... ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à raison des revenus qui ont été regardés comme leur ayant été distribués de ce fait. Ils relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Toulon ayant rejeté leurs conclusions tendant à obtenir la décharge, en droits et pénalités, de ces cotisations.

Sur les conclusions à fin de sursis :

2. Si M. et Mme A... soutiennent qu'une procédure pénale serait en cours à l'encontre de M. C..., frère de Mme A..., qui aurait appréhendé des fonds appartenant à cette dernière afin d'acquérir notamment la villa de Saint-Paul-en-Forêt par l'intermédiaire de la SCI Domino dont il serait le bénéficiaire final, ils ne fournissent aucun élément précis quant à cette procédure. Au demeurant, il ne résulte pas de l'instruction que ces allégations, à les supposer fondées, seraient susceptibles d'avoir une incidence sur l'imposition des requérants, alors que la qualité de propriétaire de la villa en cause de la SCI Domino n'apparaît pas susceptible d'être remise en cause par une telle procédure, engagée à l'encontre d'une personne physique tierce. Il n'y a, dès lors, pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de cette procédure.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, en vertu du principe d'indépendance des procédures, les moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre d'une société soumise au régime d'imposition des sociétés de capitaux sont sans influence sur les impositions personnelles mises à la charge des bénéficiaires des revenus de capitaux mobiliers distribués par cette société. Par suite, les époux A... ne peuvent utilement faire valoir, pour contester les impositions en litige, que la SCI Domino, assujettie à l'impôt sur les sociétés, a irrégulièrement été soumise à une procédure d'évaluation d'office sur le fondement de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle se serait trouvée dans l'incapacité de produire ses documents comptables et que la vérificatrice n'aurait à cet égard pas accompli les diligences qui lui incombaient.

4. En deuxième lieu, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification et de l'absence de signature des avis d'imposition doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit aux points 6 et 7 du jugement attaqué.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; / (...) ". Lorsqu'une société n'a pas fait figurer dans sa comptabilité une créance qu'elle détenait sur un tiers, il appartient à l'administration, si elle entend faire application des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts pour imposer, dans les mains du tiers, la somme correspondante, d'établir, d'une part, que la créance a été abandonnée au profit du débiteur dans des conditions qui sont contraires à l'intérêt de la société qui la détenait, et d'autre part, qu'il existait une intention, pour celle-ci, d'octroyer, et pour le tiers, de recevoir, une libéralité. Cette intention est présumée lorsque les parties sont en relation d'intérêts.

6. En l'espèce, il n'était pas dans l'intérêt de la SCI Domino de mettre à la disposition gratuite des requérants la villa dont elle était propriétaire. Il n'a pourtant jamais été question de leur demander un loyer au titre de cette jouissance, aucun bail n'ayant d'ailleurs été conclu. Il ne saurait dès lors être sérieusement contesté, alors que M. A... est le gérant de la SCI Domino, qu'il existait une intention, pour la société d'octroyer, et pour M. et Mme A..., de recevoir, une libéralité. Ces derniers ont ainsi bénéficié d'un avantage occulte au sens des dispositions citées ci-dessus, dont l'application n'est pas exclue du seul fait qu'ils n'ont pas la qualité d'associés de ladite SCI. La circonstance que l'acquisition de cette villa par la SCI Domino n'aurait été rendue possible qu'au prix d'un détournement de fonds appartenant à Mme A..., à la supposer exacte, est à cet égard sans incidence, dès lors que la SCI Domino, soumise à l'impôt sur les sociétés, ce que son gérant ne saurait prétendre avoir ignoré, est l'unique propriétaire de ce bien, de telle sorte qu'ils ne peuvent se prévaloir des dispositions du II de l'article 15 du code général des impôts. Cette circonstance n'est pas davantage de nature à justifier que cet investissement soit considéré comme générant normalement un rendement à taux nul, comme les requérants le soutiennent sans contester utilement le taux de rendement de 4 % et la valeur vénale du bien pris en compte par l'administration pour déterminer le montant de la libéralité.

7. En quatrième et dernier lieu, dès lors que l'administration n'a pas appliqué la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôt en cas de manquement délibéré, le moyen visant à contester cette majoration doit être écarté comme inopérant.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon n'a pas sursis à statuer et a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et B... A..., au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 8 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Vincent, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Marchessaux, première conseillère,

- Mme Poullain, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 novembre 2024.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00437
Date de la décision : 22/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués. - Notion de revenus distribués. - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINCENT
Rapporteur ?: Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : SCP KLEIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-22;23ma00437 ?
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