Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer à titre principal la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes, et la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014 à raison des plus-values de cession d'immeubles situés RD 96 à Aubagne, et à titre subsidiaire la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015 à raison des plus-values de cession d'immeubles situés avenue Benjamin Delessert à Marseille.
Par un jugement n° 2105082 du 7 février 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 avril 2023 et le 25 avril 2024, M. et Mme B..., représentés par Me Maillard, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 février 2023 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction des revenus de la société civile immobilière (D... de charges relatives aux immeubles situés F...à Marseille ;
- le coût des travaux réalisés sur les immeubles situés RD 96 à Aubagne doit être pris en compte pour la détermination des plus-values de cession des appartements vendus en 2013 et 2014 ;
- à titre subsidiaire, le coût des travaux réalisés sur les immeubles situés F... à Marseille doit être pris en compte pour la détermination des plus-values de cession des appartements vendus en 2014 et 2015 ;
- l'administration n'était pas fondée à faire application de la majoration de 40 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 septembre 2023, le 7 juin 2024 et le 25 juin 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mastrantuono,
- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,
- et les observations de Me Maillard, représentant M. et Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B... détiennent la totalité du capital de la D..., société imposable selon le régime des sociétés de personnes de l'article 8 du code général des impôts, qui a fait l'objet d'un contrôle sur place portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015. Ils ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration fiscale les a assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant du rehaussement des résultats de la D.... M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 7 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à titre principal à la décharge de ces suppléments d'impôt, ainsi que des pénalités correspondantes, et à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014 à raison des plus-values de cession des immeubles situés RD 96 à Aubagne, et à titre subsidiaire à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015 à raison des plus-values de cession des immeubles situés avenue Benjamin Delessert à Marseille.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 8 du code général des impôts : " (...) les associés des sociétés en nom collectif (...) sont (...) personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. (...) / Il en est de même, sous les mêmes conditions : / 1° Des membres des sociétés civiles (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 15 du même code : " II. - Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu. (...) ". Selon l'article 28 de ce code, le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété. Aux termes de l'article 31 du même code : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; / (...) b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...) ". Il résulte de ces dispositions que les charges afférentes aux logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne peuvent venir en déduction pour la détermination du revenu foncier. Il appartient au propriétaire qui entend, pour déduire les charges afférentes à un logement resté vacant, se prévaloir de ce qu'il a entendu le louer et non s'en réserver la jouissance d'apporter la preuve des diligences qu'il a accomplies pour la location de ce logement.
3. Il résulte de l'instruction que la D... a fait l'acquisition, en 2013, d'une maison individuelle située F... à Marseille, a procédé à sa rénovation, et l'a divisée en deux appartements qu'elle a revendus en 2014 et 2015. Elle a déduit de ses résultats des charges à raison de cet immeuble pour des montants respectifs de 46 869 euros, 21 423 euros et 26'208 euros en 2013, 2014 et 2015. L'administration a remis en cause la déduction de ces charges au motif que les biens n'ont généré aucun revenu imposable, de sorte que les dépenses, qui ne sont pas nécessaires à la conservation d'un revenu, ne peuvent être admises en déduction. Les requérants font valoir que l'acquisition aurait été réalisée en vue de la location, qui aurait été confiée à la société C... le 1er juillet 2013. Toutefois, alors que la D..., qui n'avait produit au cours du contrôle aucun document relatif à la mise en location des appartements, a fait valoir pour la première fois en réponse à la proposition de rectification que l'immeuble aurait été proposé à la location, les pièces que les requérants produisent, à savoir un mandat de gérance conclu entre la D... et la société C..., dont la gérante est par ailleurs la dirigeante de la D... et la fille des requérants, un extrait d'un registre des mandats ne mentionnant ni le nom du mandataire, ni l'objet du mandat, un document intitulé " suivi des publications annonces " à l'en-tête de la société C... ne mentionnant pas l'objet des annonces, ainsi que des " fiches commerciales " relatives à la location de deux appartements ne mentionnant pas le nom du propriétaire, ne sont pas de nature à justifier de réalité de la mise en location des appartements. Ainsi, la D... doit être regardée comme s'étant réservé la jouissance de l'immeuble en cause pendant la période en litige. L'administration était, dès lors, fondée à remettre en cause le caractère déductible des dépenses déduites par la D... à raison de cet immeuble, et en conséquence à rehausser ses résultats et à imposer les revenus fonciers correspondants entre les mains de M. et Mme B....
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 150 V du code général des impôts, relatif aux plus-values de cession à titre onéreux de biens et droits mobiliers ou immobiliers : " La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession (...) est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant ". Aux termes de l'article 150 VB du même code : " I. - Le prix d'acquisition est le prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il est stipulé dans l'acte (...). / II. - Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : / (...) 4° Des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement ou d'amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise (...) ".
5. D'une part, il résulte de l'instruction que la D... a fait l'acquisition, en 2011, d'une maison individuelle située à Aubagne, à l'angle de la RD 96 et du chemin de la Passerelle, a procédé à sa rénovation, et l'a divisée en deux appartements et une cave qu'elle a revendus. Elle a mentionné sur les déclarations de plus-value sur les cessions de ces biens des dépenses de construction, reconstruction, agrandissement ou amélioration majorant les prix d'acquisition pour des montants respectifs de 103 358 euros pour l'appartement et la cave revendus en 2013 et 96 175 euros pour l'appartement revendu en 2014. Par ailleurs, elle a déduit de ses résultats des dépenses de réparation, d'entretien et d'amélioration à raison de ces biens pour des montants respectifs de 135 048 euros et 3 171 euros en 2012 et 2013. L'administration a remis en cause la déduction de ces dernières dépenses aux motifs que les travaux correspondant aux dépenses exposées en 2012 constituent une reconstruction de l'immeuble, et que les dépenses exposées en 2013 ne peuvent être admises en déduction dès lors que les biens n'ont généré aucun revenu imposable, de sorte que les dépenses ne sont pas nécessaires à la conservation d'un revenu. Les requérants, qui ne contestent pas ces rectifications, soutiennent que le coût des travaux en cause doit être retenu au titre de la majoration du prix d'acquisition à retenir pour le calcul des plus-values de cession des immeubles. Toutefois, en s'abstenant de verser aux débats le moindre élément de justification du paiement effectif des dépenses mentionnées sur les déclarations de plus-value souscrites en 2013 et 2014 pour les montants respectifs de 103 358 euros et 96 175 euros, à raison desquelles les requérants produisent des factures émises par la société Camela Travaux, dont M. B... est le dirigeant, les requérants, qui supportent la charge de la preuve, ne justifient pas que ces dépenses ne feraient pas double emploi avec celles qui avaient été déduites à tort des résultats de la D... au titre des années 2012 et 2013 pour les montants respectifs de 135 048 euros et 3 171 euros. Ils ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le prix d'acquisition à retenir pour le calcul de la plus-value de cession réalisée par la D... en 2014 à raison de la vente d'un des logements situés RD 96 à Aubagne devrait être majoré de la somme de 69 110 euros. Pour les mêmes motifs, ils ne sont en tout état de cause pas fondés à soutenir que le prix d'acquisition à retenir pour le calcul de la plus-value de cession réalisée par la D... en 2013 à raison de la vente de l'autre logement situé à la même adresse devrait être majoré de la même somme.
6. D'autre part, il résulte de l'instruction que la D... a mentionné sur les déclarations de plus-value sur les cessions des appartements situés F... à Marseille, évoqués au point 3, des dépenses de construction, reconstruction, agrandissement ou amélioration majorant les prix d'acquisition pour des montants respectifs de 97 495 euros pour l'appartement revendu en 2014 et de 62 612 euros pour l'appartement revendu en 2015. Les requérants soutiennent à titre subsidiaire que le coût des travaux dont la déduction a été remise en cause doit être retenu à hauteur de 34 015 euros au titre de la majoration du prix d'acquisition à retenir pour le calcul des plus-values de cession des immeubles. Toutefois, en s'abstenant de verser aux débats le moindre élément de justification du paiement effectif des dépenses mentionnées sur les déclarations de plus-value souscrites en 2014 et 2015 pour les montants respectifs de 97 495 euros et 62 612 euros, à raison desquelles les requérants produisent des factures émises notamment par la société Camela Travaux, dont M. B..., ainsi qu'il a été dit précédemment, est le dirigeant, relatives à des travaux facturés pour un montant global de 135 409 euros, les requérants, qui supportent la charge de la preuve, ne justifient pas que ces dépenses ne feraient pas double emploi avec celles qui avaient été déduites à tort des résultats de la D... au titre des années 2013, 2014 et 2015 pour les montants respectifs de 46 869 euros, 21 423 euros et 26 208 euros. Ils ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le prix d'acquisition à retenir pour le calcul de la plus-value de cession réalisée par la D... en 2014 à raison de la vente d'un des appartements situés F... à Marseille devrait être majoré de la somme de 20 749 euros. Pour les mêmes motifs, ils ne sont en tout état de cause pas fondés à soutenir que le prix d'acquisition à retenir pour le calcul de la plus-value de cession réalisée par la D... en 2015 à raison de la vente de l'autre appartement situé à la même adresse devrait être majoré.
Sur les pénalités :
7. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
8. Il est constant que M. B... est associé de plusieurs SCI, qu'il est le gérant de la E...ainsi que de SCI de construction vente, et que la fille des requérants est la dirigeante de la D..., l'intéressée dirigeant par ailleurs une société spécialisée en matière immobilière. En outre, il n'est pas contesté que la D... avait déjà fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 1997 et 1998, à l'issue de laquelle les règles portant sur les travaux de construction et les travaux d'amélioration avaient été rappelés. Dans ces conditions, eu égard à l'importance des omissions et à leur caractère répété, et compte tenu des liens familiaux unissant la dirigeante de la D... et M. et Mme B..., l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'intention de ces derniers de se soustraire à l'impôt. Elle justifie ainsi l'application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme B... la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre chargé du budget et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2024, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2024.
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N° 23MA00818