Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I. Sous le n° 2002091, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle l'office public de l'habitat
13 Habitat a rejeté sa réclamation indemnitaire préalable, d'autre part, de condamner solidairement 13 Habitat, la société Eiffage construction Provence et la commune d'Aix-en-Provence à lui verser la somme de 387 000 euros, ou, a minima, la somme de
19 500 euros, hors taxes (HT), au titre du manque à gagner sur quinze ans qui résulterait de la privation définitive de l'alimentation en eau de source de son terrain et, enfin, de mettre à leur charge solidaire les dépens de l'instance ainsi qu'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
II. Sous le n° 2002092, M. A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle la société Eiffage construction Provence a rejeté sa réclamation indemnitaire préalable, d'autre part, de condamner solidairement 13 Habitat, la société Eiffage construction Provence et la commune d'Aix-en-Provence à lui verser la somme de 387 000 euros, ou, a minima, la somme de 19 500 euros, HT, au titre du manque à gagner sur quinze ans qui résulterait de la privation définitive de l'alimentation en eau de source de son terrain et, enfin, de mettre à leur charge solidaire les dépens de l'instance ainsi qu'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
III. Sous le n° 2002093, M. A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle la commune
d'Aix-en-Provence a rejeté sa réclamation indemnitaire préalable, d'autre part, de condamner solidairement 13 Habitat, la société Eiffage construction Provence et la commune d'Aix-en-Provence à lui verser la somme de 387 000 euros, ou, a minima, la somme de 19 500 euros, HT, au titre du manque à gagner sur quinze ans qui résulterait de la privation définitive de l'alimentation en eau de source de son terrain et, enfin, de mettre à leur charge solidaire les dépens de l'instance ainsi qu'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Après avoir procédé à la jonction de ces trois demandes, le tribunal administratif de Marseille les a, par un jugement commun nos 2002091, 2002092, 2002093 du 25 mars 2022, rejetées et il a également rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août et 12 octobre 2022, M. A..., représenté par Me Ribière, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 25 mars 2022 ;
2°) de condamner solidairement 13 Habitat, la société Eiffage construction Provence et la commune d'Aix-en-Provence, à lui verser une somme totale de 387 000 euros HT, assortie des intérêts à compter de " la demande préalable " et de leur capitalisation, en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi consécutivement à la privation définitive de l'alimentation en eau de source de son terrain ;
3°) de mettre à la charge de 13 Habitat, de la société Eiffage construction Provence et de la commune d'Aix-en-Provence, une somme de 1 500 euros, chacun, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- résidant en Angleterre, il bénéficie du délai de distance prévu à l'article R. 421-7 du code de justice administrative ;
- le jugement est irrégulier en tant qu'il n'est pas revêtu de la signature des magistrats qui l'ont rendu ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Marseille, son terrain était alimenté par une source depuis son acquisition en 2000 et jusqu'aux travaux litigieux réalisés en 2006 ; le tribunal ne pouvait pas se dispenser de procéder à des investigations complémentaires ;
- c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a mis hors de cause la commune d'Aix-en-Provence qui avait préconisé un dévoiement du réseau enterré ;
- le lien de causalité avec les travaux réalisés en 2006 est établi et tous les intervenants doivent être déclarés solidairement responsables ;
- son préjudice, qui n'est pas dû à ses travaux de remblaiement, peut être évalué à la somme à parfaire de 387 000 euros HT, laquelle doit être assortie des intérêts capitalisés.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 novembre 2022 et 21 avril 2024, la société par actions simplifiée (SAS) Eiffage construction Sud-Est, anciennement " Eiffage construction Provence ", représentée par Me Alias, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet tant de la requête que de l'appel en garantie formé par 13 Habitat et à ce que les entiers dépens de l'instance ainsi qu'une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative soient mis à la charge de M. A....
Elle fait valoir que :
- la Cour devra infirmer le jugement attaqué en tant que les premiers juges se sont prononcés au fond, sans examiner la fin de non-recevoir qu'elle opposait à la demande de première instance tirée de ce que l'action engagée par M. A... était prescrite ;
- en tout état de cause, les demandes présentées par M. A... sont infondées dès lors que ce dernier n'a démontré ni la réalité du dommage anormal et spécial qu'il allègue, ni l'existence d'un lien de causalité entre ce dommage et les travaux publics qu'elle a réalisés ;
- les travaux effectués par M. A..., avant ceux qu'elle a elle-même réalisés, ont pu contribuer au tarissement de l'alimentation en eau de source de son terrain ;
- la demande en garantie présentée pour la première fois en cause d'appel par 13 Habitat est irrecevable.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 décembre 2023 et 19 avril 2024, la commune d'Aix-en-Provence, représentée par Me Morabito, conclut, dans le dernier état de ses écritures, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, au rejet de la demande de condamnation formée à son encontre par la société Socotec et, en tout état de cause, à ce que les entiers dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative soient mis à la charge de M. A....
Elle fait valoir que :
- à titre principal, M. A... n'a pas d'intérêt pour agir à son encontre dès lors qu'elle n'est pas à l'origine des travaux litigieux et qu'elle n'a pas préconisé un dévoiement ; sa responsabilité pour faute comme sans faute ne peut être recherchée ;
- à titre subsidiaire, le recours de M. A... est irrecevable et infondé :
. son recours est irrecevable dès lors que son action était prescrite ;
. le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué manque en fait et les autres moyens de la requête sont infondés dès lors que M. A... ne démontre pas l'existence d'un dommage anormal et spécial directement en lien avec les travaux publics réalisés, qu'il n'apporte aucun élément probant permettant de confirmer que les travaux qu'il a effectués n'ont eu aucune incidence sur l'alimentation en eau et que l'évaluation de son préjudice est déraisonnable ;
- à titre infiniment subsidiaire, la demande de condamnation solidaire présentée par la société Socotec à son encontre devra être rejetée dès lors que sa responsabilité ne peut pas être retenue.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 29 janvier, 4 mars et 30 mai 2024, l'office public de l'habitat 13 Habitat, représenté par Me Bosquet, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête, à ce que, dans l'hypothèse où le jugement serait annulé, les sociétés Eiffage construction, Archipel Architecte, Socotec, Abo ERG Géotechnique et SICA soient condamnées à le garantir des condamnations qui pourraient être mises à sa charge et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- il appartient à M. A... de démontrer, d'une part, qu'il réside bien à l'étranger pour pouvoir prétendre au bénéfice des dispositions des articles R. 421-7 et R. 811-5 du code de justice administrative et, d'autre part, que la notification du jugement attaqué a été réalisée le 1er avril au plus tard ; à défaut, sa requête est irrecevable ;
- le lien de causalité entre les travaux litigieux et le prétendu tarissement de la source en cause n'est pas établi et, comme l'a jugé le tribunal administratif, les éléments produits par M. A... ne sont pas suffisamment probants pour contredire le rapport d'expertise ;
- M. A... n'apporte aucun élément nouveau en appel sur son préjudice ;
- M. A... a lui-même participé au dommage dont il demande réparation ;
- à supposer qu'il soit condamné à verser une indemnité à M. A... au titre de sa responsabilité sans faute, les sommes devront être mises à la charge des intervenants à l'opération de construire ; contrairement à ce que fait valoir la société Eiffage Construction
Sud-Est, sa demande d'appel en garantie est recevable.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 mars et 22 avril 2024, la société par actions simplifiée (SAS) Socotec Construction, représentée par Me Tertian, conclut , à titre principal, à la confirmation du jugement attaqué et à sa mise hors de cause, à titre subsidiaire, à ce que la commune d'Aix-en-Provence, et les sociétés Eiffage Construction Provence, Archipel Architecte et associés, ERG et SICA soient solidairement condamnées à la relever et la garantir de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre et, en tout état de cause, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de 13 Habitat et de tout succombant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal, M. A... n'établit pas l'existence d'un lien causal certain et le jugement attaqué devra donc être confirmé, ce qui rendra sans objet les appels en garantie formés par 13 Habitat ;
- à titre subsidiaire, et si la Cour devait infirmer ce jugement, aucune condamnation ne saurait pour autant être prononcée à son encontre, compte tenu des désordres en cause et de ses missions de bureau de contrôle technique ; elle n'a commis aucun manquement de nature à engager sa responsabilité ;
- à titre infiniment subsidiaire, et si la Cour devait estimer devoir prononcer une condamnation solidaire, notamment à son encontre, elle devra, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle, condamner solidairement la commune d'Aix-en-Provence, et les sociétés Eiffage Construction Provence, Archipel Architecte et Associés, ERG et SICA à la relever et la garantir intégralement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2024, la société anonyme (SA) Société d'ingénieurs conseils associés (SICA), représentée par Me Bergant, conclut , à titre principal, au rejet de la requête et à la confirmation du jugement attaqué, à titre subsidiaire, au rejet des appels en garantie formés à son encontre par 13 Habitat et la société Socotec, et à sa mise hors de cause, à titre infiniment subsidiaire, à ce que les sociétés Archipel Architectes, Eiffage Construction, Abo ERG Géotechnique et Socotec, et la commune d'Aix-en-Provence soient condamnées
in solidum à la relever et la garantir de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre et, en tout état de cause, à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de tout succombant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre liminaire, la requête est irrecevable dès lors que M. A... ne justifie pas que sa résidence principale était à l'étranger et que la date de notification du jugement par lettre recommandée avec avis de réception n'est pas précisée ;
- à titre principal, le jugement attaqué devra être confirmé :
. M. A... est défaillant dans la charge de la preuve qui lui incombe du lien de causalité entre les travaux litigieux et le tarissement de sa source ;
. M. A... ne démontre pas davantage qu'il aurait subi un dommage anormal et spécial ;
. l'ensemble des demandes de M. A... devant être rejeté par la Cour et le jugement devant être confirmé, les demandes aux fins d'appel en garantie dirigées contre elle sont dépourvues d'objet ;
- à titre subsidiaire, et si, par extraordinaire, la Cour devait considérer que l'existence d'un lien de causalité et d'un préjudice anormal étaient établis, elle devra rejeter les demandes d'appel en garantie formées à son encontre ;
- à titre infiniment subsidiaire, et si, par extraordinaire, la Cour venait à retenir sa responsabilité, les demandes présentées par M. A... devront être rejetées alors que les préjudices allégués par ce dernier ne sont pas établis et que ces demandes sont surévaluées ;
- la société Archipel Architectes, la commune d'Aix-en-Provence, et les sociétés Eiffage Construction, Abo ERG Géotechnique et Socotec devront être condamnées à la relever et garantir indemne de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;
- en tout état de cause, une part des responsabilités devra être laissée à la charge de M. A... qui a lui-même participé à la survenance du dommage.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 mai et 3 juillet 2024, la société Abo ERG Géotechnique, anciennement " ERG ", représentée par Me Hamdi, conclut, à titre principal, au rejet tant de la requête que des appels en garantie formés à son encontre et à sa mise hors de cause, à titre subsidiaire, à ce que les sociétés Archipel, Eiffage Construction Provence et Socotec, et la commune d'Aix-en-Provence soient condamnées à la relever et la garantir de toutes les condamnations qui pourraient être mises à sa charge et, en tout état de cause, à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge solidaire de toute partie formant des demandes à son endroit et de tout succombant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal :
. la requête est irrecevable car tardive ;
. toutes les demandes formées à son endroit sont prescrites ;
. en tout état de cause, et alors qu'elle n'a effectué aucune mission de suivi des travaux et n'a pas davantage conçu, ni participé à la conception de l'ouvrage réalisé, il n'est pas établi de lien de causalité entre son intervention, d'une part, et les demandes et les préjudices allégués par M. A..., d'autre part ;
. l'appel en garantie formé par la société SICA est irrecevable car nouvelle en cause d'appel ;
- à titre subsidiaire, et si la Cour devait lui imputer un manquement :
. elle serait fondée à demander à être relevée et garantie par les sociétés Archipel, Eiffage Construction Provence et Socotec, et la commune d'Aix-en-Provence ;
. M. A... est à l'origine d'importants travaux qui sont, sans doute, à l'origine des difficultés alléguées.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 juin et 9 juillet 2024, ce second mémoire n'ayant pas été communiqué, la société à responsabilité limitée (SARL) Archipel Architectes Associés, représentée par Me Melloul, conclut , à titre principal, à la confirmation du jugement attaqué et au rejet de toutes les demandes présentées à son encontre, à titre subsidiaire, à ce que la société Eiffage Construction Sud-Est, 13 Habitat, la commune d'Aix-en-Provence et la société Socotec soient solidairement condamnés à la relever et la garantir des condamnations prononcées à son encontre et, en tout état de cause, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de tout succombant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal,
. la requête est irrecevable car tardive ;
. M. A... ne formule aucune demande à son encontre et, n'étant intervenue qu'en qualité de maître d'œuvre, sans avoir exécuté elle-même les travaux, elle ne peut être tenue responsable de la prétendue suppression de la source ;
- à titre subsidiaire, et si, par extraordinaire, la Cour devait entrer en voie de condamnation à son encontre, elle entend appeler en garantie la société Eiffage Construction Sud-Est, 13 Habitat, la commune d'Aix-en-Provence et la société Socotec.
Un courrier du 13 mai 2024, adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.
Par une ordonnance du 17 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
En application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, la Cour a demandé, le 19 août 2024, au conseil de M. A... de produire une copie complète du rapport d'expertise du 19 septembre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lombart,
- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,
- les observations Me Olmier, substituant tant Me Bosquet, représentant 13 Habitat, que Me Morabito, représentant la commune d'Aix-en-Provence ;
- les observations de Me Martinez, substituant Me Tertian, représentant la SAS Socotec Construction ;
- les observations de Me Decombe, substituant Me Bergant, représentant la SA SICA ;
- et les observations de Me Bedrossian, substituant Me Hamdi, représentant la société Abo ERG Géotechnique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A... a acquis, le 28 juillet 2000, une parcelle cadastrée section BT n° 16, d'une superficie de 18 844 m2. Elle est située chemin du Coton rouge, dans le quartier de l'Arc-de-Meyran, entre la rive droite de l'Arc et la contre-allée de l'autoroute A8, sur le territoire de la commune d'Aix-en-Provence. M. A... expose qu'à l'occasion de travaux de construction menés, en 2006, sur une parcelle cadastrée section BT n° 127, sise 640 avenue Gaston-Berger, de l'autre côté de l'autoroute A8, sous la maîtrise d'ouvrage de l'office public d'aménagement et de construction (OPAC) Sud, devenu 13 Habitat, pour la réalisation d'une résidence pour étudiants, l'alimentation en eau naturelle dont bénéficiait sa parcelle par une source provenant du centre-ville d'Aix-en-Provence se serait tarie. M. A... relève appel du jugement du 25 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant à la condamnation solidaire de 13 Habitat, de la société Eiffage construction Sud-Est et de la commune d'Aix-en-Provence à l'indemniser du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de ce tarissement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. "
3. Il ressort du dossier de première instance communiqué à la Cour par le greffe du tribunal administratif de Marseille que la minute du jugement attaqué a été signée par la présidente de la formation de jugement, le rapporteur et la greffière d'audience, de sorte que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent doit être écarté comme manquant en fait.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Même en l'absence de faute, le maître de l'ouvrage et, le cas échéant, l'entrepreneur chargé des travaux sont responsables vis-à-vis des tiers des dommages causés à ceux-ci par l'exécution d'un travail public, à moins que ces dommages ne soient imputables à un cas de force majeure ou à une faute de la victime. Il appartient toutefois aux tiers, victimes de ces dommages, d'apporter la preuve de la réalité des préjudices qu'ils allèguent avoir subis et de l'existence d'un lien de causalité entre les travaux publics réalisés et ces préjudices.
5. Au cas particulier, il résulte de l'instruction, éclairée par le rapport dressé par l'expert commis par le juge des référés du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, que l'existence d'une ancienne source ayant circulé dans une galerie maçonnée au droit de la parcelle cadastrée section BT n° 16 est établie. Toutefois, l'évolution et le niveau du débit de cette source avant la réalisation, en 2006, des travaux litigieux sous la maîtrise d'ouvrage de l'OPAC Sud ne sont spécifiés par aucune pièce probante versée aux débats, y compris par les conclusions de l'expert judiciaire qui relève, dans son rapport, que ce débit est " impossible " à établir tout en précisant que les débits observés par les agents du service des eaux pluviales en novembre 2006 et ceux qui auraient été constatés en 2003 par un architecte, auteur d'une attestation du 7 avril 2008, n'ont pas été mesurés. En outre, il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise, que le tracé de cette source a été remanié au fil des années et a été " fortement perturbé ", notamment, par la réalisation de l'autoroute A8, dans les années 1970, les travaux de collecte des eaux pluviales diligentés par la commune d'Aix-en-Provence sur le chemin du Coton Rouge et sur l'avenue de l'Arc-de-Meyran, mais aussi par les importants travaux de remblaiement de la parcelle cadastrée section BT n° 16 entrepris par M. A... à compter de l'année 2001 et dont la matérialité et l'ampleur ne sont pas utilement contestées par ce dernier, lequel a également fait procéder, sur cette même parcelle, à la démolition d'un bâtiment, d'un bassin et d'un puits en 2000. L'expert judiciaire observe encore que la galerie maçonnée qui traversait la parcelle appartenant à M. A... a été remplacée " à une date indéterminée " par un ovoïde en béton comportant un regard, également en béton, au milieu du terrain, avant de conclure, dans la partie finale de son rapport, qu'" il est impossible d'établir une relation de cause à effet entre [l]es travaux [réalisés sous la maîtrise d'ouvrage de l'OPAC Sud] et la disparition de la source ". Au vu de ces éléments, les pièces versées aux débats par M. A... sont, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Marseille, au point 4 de son jugement attaqué, par des motifs qu'il convient d'adopter, insuffisantes pour établir la persistance de l'alimentation en eau de source de la parcelle cadastrée section BT n° 16 avant la réalisation des travaux litigieux. Dans ces conditions, et alors même qu'au cours de leur réalisation, une ancienne galerie maçonnée dans laquelle la présence d'eau avait été constatée a été démolie dans le tréfonds de la parcelle cadastrée section BT n° 127, sans que ne soit ultérieurement assurée la continuité hydraulique entre le Nord et le Sud de cette parcelle, l'appelant ne démontre pas que les opérations de travaux publics susmentionnées seraient à l'origine du tarissement de la source d'eau. En l'absence de tout lien de causalité établi entre les préjudices qu'il prétend avoir subis et ces opérations, M. A... n'est fondé ni à rechercher la responsabilité sans faute et solidaire de 13 Habitat, de la SAS Eiffage construction Sud-Est et de la commune d'Aix-en-Provence, ni davantage la responsabilité pour faute de cette même commune.
6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les exceptions de prescription et les fins de non-recevoir opposées en défense, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille, qui, au demeurant, n'avait pas à se livrer à des investigations complémentaires, a rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur les dépens :
7. Selon l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...) ".
8. La présente instance n'a pas donné lieu à dépens au sens des dispositions précitées de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. En effet, les frais exposés pour la réalisation de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence ne constituent pas des dépens sur lesquels il appartient à la Cour de statuer en application de ces dispositions. Par suite, les conclusions de la SAS Eiffage construction Sud-Est et celles de la commune d'Aix-en-Provence tendant à ce que les entiers dépens soient mis à la charge de M. A... doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. "
10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de 13 Habitat, de la SAS Eiffage construction Sud-Est et de la commune d'Aix-en-Provence, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, les sommes demandées par M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
11. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, et sur le fondement de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de M. A... le versement d'une somme de 500 euros, respectivement, à la SAS Eiffage construction Sud-Est, à la commune d'Aix-en-Provence, à 13 Habitat, à la SAS Socotec Construction, à la société Abo ERG Géotechnique, à la SA SICA, et à la SARL Archipel Architectes Associés.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : M. A... versera des sommes de 500 euros à la SAS Eiffage construction
Sud-Est, 500 euros à la commune d'Aix-en-Provence, 500 euros à 13 Habitat, 500 euros à
la SAS Socotec Construction, 500 euros à la société Abo ERG Géotechnique, 500 euros à
la SA SICA, et 500 euros à la SARL Archipel Architectes Associés, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la SAS Eiffage construction Sud-Est et la commune d'Aix-en-Provence au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la société par actions simplifiées (SAS) Eiffage construction Sud-Est, à la commune d'Aix-en-Provence, à l'office public de l'habitat 13 Habitat, à la société par actions simplifiée (SAS) Socotec Construction, à la société anonyme (SA) Société d'ingénieurs conseils associés (SICA), à la société Abo ERG Géotechnique et à la société à responsabilité limitée (SARL) Archipel Architectes Associés.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2024, où siégeaient :
- M. Marcovici, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Lombart, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2024.
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No 22MA02172
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