Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le préfet du Var a déféré devant le tribunal administratif de Toulon l'arrêté du 6 février 2020 par laquelle le maire de la commune de Bauduen a accordé un permis de construire à M. A....
Par un jugement n° 2002275 du 7 juillet 2023, le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrée le 7 septembre 2023, le 15 juillet et le 6 septembre 2024, M. B... A..., représenté par Me Boumaza, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 7 juillet 2023 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 600 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que le projet litigieux n'emporte aucun changement de destination de la bergerie qui en est l'objet et est conforme aux dispositions du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Bauduen applicables en zone agricole, dès lors qu'il porte sur des activités directement liées et nécessaires à son exploitation agricole, et que les modifications projetées des espaces en vue de la vente directe de produits de la ferme, et non de l'exploitation d'une table d'hôtes, sont accessoires, au sens de l'article L. 151-29 du code de l'urbanisme, au bâtiment principal dédié à l'élevage d'ovins et de caprins, et sont donc réputés avoir la même destination que ce bâtiment ; l'activité de dégustation qu'il propose dans ces espaces est résiduelle et le préfet du Var comme le tribunal commettent une confusion entre l'affectation et l'usage du bâtiment au sens de la jurisprudence en la matière ; l'activité projetée est conforme à l'objectif fixé par le rapport de présentation et le plan d'aménagement et de développement durables du PLU de la commune ; la création d'un logement n'emporte pas davantage de changement de destination.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2024, le préfet du Var conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Claudé-Mougel,
- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,
- et les observations de Me Garnerone, représentant M. A..., et de Me Gonzales-Lopez, représentant la commune de Bauduen.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... relève appel du jugement du 7 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé, à la demande du préfet du Var, l'arrêté du maire de la commune de Bauduen du 6 février 2020 lui délivrant un permis de construire sur la parcelle cadastrée section C n° 191 dont il est propriétaire sur le territoire de la commune.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. D'une part, aux termes de l'article A 1 du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Bauduen relatifs aux occupations et utilisation des sols interdites en zone agricole : " Toutes occupations et utilisations du sol sont interdites à l'exception de celles prévues à l'article A.2. (...) " Aux termes de l'article A 2 de ce PLU relatif aux occupations et utilisations du sol soumises à des conditions particulières : " Seules peuvent être autorisées les occupations et utilisations du sol ci-après, selon l'une des conditions particulières suivantes : / a) Sont autorisés, dans la zone A à condition d'être directement liées et nécessaires à l'exploitation agricole en respectant le caractère de la zone (...) /- Les bâtiments d'exploitation, installations ou ouvrages techniques nécessaires à la production agricole (...) / - L'aménagement d'un local permettant la vente directe des produits de l'exploitation à l'intérieur ou en extension d'un bâtiment technique (existant ou à construire et nécessaire à l'exploitation), à condition que la surface affectée à l'activité de vente directe soit proportionnelle et cohérente par rapport à la taille de l'exploitation. Ce principe de localisation (à l'intérieur ou en extension) pourra être adapté en cas d'impossibilité technique, sanitaire, juridique ou économique dûment démontrée./ - Les constructions à destination d'habitation nécessaire à l'exploitation agricole dans la limite de 200 m² de surface de plancher ; (...) d) Dans la zone A, est autorisé l'accueil à la ferme, à condition que cette activité soit exercée dans le prolongement de l'activité agricole. Est autorisé, à conditions que cette activité soit exercée dans le prolongement de l'activité agricole, l'accueil de campeurs à la ferme en zone A (...) Cette activité ne pourra donner lieu à la construction d'aucun bâtiment nouveau ne nécessitant un permis de construire. / Cette activité ne devra être exercée et implantée qu'à proximité des bâtiments existants et sur l'unité foncière de l'exploitation (...) e Dans la zone A, sont autorisées les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière du terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages ".
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Les destinations de constructions sont :/ 1° Exploitation agricole et forestière ; / 2° Habitation ;/ 3° Commerce et activités de service ;/ 4° Equipements d'intérêt collectif et services publics ;/ 5° Autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire. " Aux termes de l'article R. 151-28 de ce code dans sa rédaction alors applicable : " Les destinations de constructions prévues à l'article R. 151-27 comprennent les sous-destinations suivantes :/ 1° Pour la destination " exploitation agricole et forestière " : exploitation agricole, exploitation forestière ; / 2° Pour la destination " habitation " : logement, hébergement ;/3° Pour la destination " commerce et activités de service " : artisanat et commerce de détail, restauration, commerce de gros, activités de services où s'effectue l'accueil d'une clientèle, cinéma, hôtels, autres hébergements touristiques ;/4° Pour la destination " équipements d'intérêt collectif et services publics " : locaux et bureaux accueillant du public des administrations publiques et assimilés, locaux techniques et industriels des administrations publiques et assimilés, établissements d'enseignement, de santé et d'action sociale, salles d'art et de spectacles, équipements sportifs, autres équipements recevant du public (...) " L'article R. 151-29 dispose : " Les définitions et le contenu des sous-destinations mentionnées à l'article R. 151-28 sont précisées par arrêté du ministre chargé de l'urbanisme. / Les locaux accessoires sont réputés avoir la même destination et sous-destination que le local principal. "
4. Il ressort de la demande de permis de construire déposée par M. A..., en particulier de la notice explicative et du formulaire de dossier spécifique permettant de vérifier la conformité des établissements recevant du public aux règles d'accessibilité et de sécurité contre l'incendie et la panique et des plans dits " concernés par le changement d'affectation ", que, en dépit des dénégations de la requête d'appel, le projet consiste en l'aménagement, au sein de la bergerie implantée sur la parcelle lui appartenant située en zone agricole dite A, d'un espace de tables d'hôtes permettant l'accueil de 24 couverts et d'espaces annexes d'accueil d'un effectif de quatre personnels, ainsi que de 14 places de stationnement, et, au premier étage du bâtiment principal, d'un logement d'habitation. Il ressort au demeurant de l'arrêté litigieux que ce projet consiste en un changement d'affectation en habitation, sur une surface de 165,8 m², et en commerce, sur une surface de 247,8 m². Or, les dispositions du règlement du PLU de la commune de Bauduen rappelées au point 2 n'autorisent pas un tel changement d'affectation des bâtiments à vocation agricole dans cette zone, ni leur aménagement en vue d'exercer une telle activité, le projet ne pouvant à l'évidence, contrairement ce que soutient le requérant, être qualifié d'aménagement d'un local permettant la vente directe des produits de l'exploitation à l'intérieur au sens de ces dispositions et pouvant encore moins être regardé comme un aménagement pour l'accueil à la ferme, qui est limitée par ces dispositions à l'accueil de campeurs. A cet égard, M. A... ne saurait donc sérieusement soutenir que le projet en cause n'emporte aucun changement de destination. En outre, ce projet, destiné en réalité, au regard de ses caractéristiques, à aménager un restaurant, ne peut davantage être regardé, contrairement à ce que soutient M. A..., comme un local accessoire au bâtiment que constitue la bergerie alors que cet espace de restauration ne présente pas, compte tenu de son caractère commercial au sens du 3° de l'article R. 151-28 du code de l'urbanisme, de lien nécessaire avec l'exploitation agricole qu'abrite la bergerie, et ne peut être ainsi réputé avoir la même destination en application de l'article R. 151-29 du même code. Par ailleurs, compte tenu de ce que la demande déposée par M. A... porte à la fois sur la réalisation d'un espace de restauration et d'un espace dédié au logement, et alors qu'aucun espace destiné à l'habitation n'existe au sein de la bergerie à la date de l'arrêté attaqué, il n'est pas établi que la partie du projet consistant à créer au premier étage de ce bâtiment un local d'habitation soit nécessaire à son exploitation agricole.
Sur l'application des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :
5. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce (...) ". Selon l'article L. 600-5-1 du même code : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux (...) ".
6. Le vice entachant l'arrêté attaqué, relevé au point 4, porte sur l'objet même du projet objet de la demande de permis de construire de M. A.... Dès lors, ce vice ne peut faire l'objet d'une régularisation, et cet arrêté ne peut davantage n'être annulé qu'en partie.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du maire de la commune de Bauduen du 6 février 2020 lui délivrant un permis de construire.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser une quelconque somme à M. A....
D É C I D E
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- Mme Courbon, présidente assesseure,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe 26 septembre 2024.
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N° 23MA02335