Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins d'évaluer les préjudices qu'il a subis, à la suite de la chute dont il a été victime, le 7 avril 2020, en empruntant l'escalier mécanique extérieur menant au centre commercial Mayol à Toulon.
Par une ordonnance n° 2201076 du 8 août 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 août 2023 sous le n° 23MA02168, M. B... représenté par Me Dhib, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 8 août 2023 ;
2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de première instance ;
3°) d'ordonner une dispense de frais compte tenu du bénéfice de l'aide juridictionnelle qui lui est accordée.
Il soutient qu'un témoin oculaire, qui lui est complétement étranger, atteste de la défectuosité de la main courante, à l'origine de son dommage.
La requête a été communiquée à la commune de Toulon et à la caisse primaire d'assurance maladie du Var qui n'ont pas produit de mémoire.
Par une ordonnance n° 23MA02168 du 15 janvier 2024 la présidente de la cour a rejeté sa demande.
Par une requête, enregistrée le 15 février 2024 sous le n° 24MA00343, M. B..., représenté par Me Dhib, demande à la cour de rectifier pour erreur matérielle l'ordonnance du 15 janvier 2024.
Il soutient qu'il a informé la cour de son intention de demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle le 28 décembre 2023, qu'il a déposé cette demande le 10 janvier 2024 et a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 26 janvier 2024.
La requête a été communiquée à la commune de Toulon et à la caisse primaire d'assurance maladie du Var qui n'ont pas produit de mémoire.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 26 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rigaud,
- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article R. 833-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision d'une cour administrative d'appel ou du Conseil d'Etat est entachée d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification (...) ".
2. Aux termes du premier alinéa de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Les dépenses qui incomberaient au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle s'il n'avait pas cette aide sont à la charge de l'Etat ". Aux termes de l'article 40 de la même loi : " L'aide juridictionnelle concerne tous les frais afférents aux instances, procédures ou actes pour lesquels elle a été accordée, à l'exception des droits de plaidoirie (...) / Les frais occasionnés par les mesures d'instruction sont avancés par l'Etat ". Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsque la partie perdante bénéficie de l'aide juridictionnelle totale, et hors le cas où le juge décide de faire usage de la faculté que lui ouvre l'article R. 761-1 du code de justice administrative, en présence de circonstances particulières, de mettre les dépens à la charge d'une autre partie, les frais d'expertise incombent à l'Etat.
3. M. B... forme un recours en rectification d'erreur matérielle à l'encontre de l'ordonnance du 15 janvier 2024 par laquelle la présidente de la cour a rejeté sa requête dirigée contre l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulon, en date du 8 août 2023, en l'absence de toute assurance sur la capacité et la volonté du requérant de prendre en charge des frais et honoraires de l'expertise qu'il demande et qui, en application de l'article L. 621-13 du code de justice administrative, seraient susceptibles d'être mis à sa charge.
4. Il résulte de l'instruction que M. B... a toutefois déposé une demande d'aide juridictionnelle le 10 janvier 2024 et en a obtenu le bénéfice total par décision du 26 janvier 2024. En considérant qu'aucune demande n'avait été enregistrée au bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Marseille, et en retenant par conséquent l'absence d'assurance sur la capacité et la volonté du requérant de prendre en charge des frais et honoraires de l'expertise qu'il demande, la cour a commis une erreur matérielle non imputable aux parties et qui a exercé une influence sur le jugement de l'affaire. Par suite, il y a lieu de faire droit au recours en rectification d'erreur matérielle présenté par M. B....
5. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. (...) ".
6. M. B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins d'évaluer les préjudices qu'il a subis à la suite de la chute dont il a été victime, le 7 avril 2020, rue Henri Pertus (Passage des fortifications) à Toulon au niveau des escalators menant au centre commercial Mayol. Par l'ordonnance attaquée du 8 août 2023, le juge des référés a refusé de faire droit à sa demande, au motif que la mesure d'expertise sollicitée ne présentait pas le caractère d'utilité exigée par l'article R. 532-1 du code de justice administrative, dès lors que le récit par le requérant de l'accident dont il avait été victime demeurait peu circonstancié et que le seul témoignage d'un témoin qu'il produit demeurait peu probant et qu'ainsi M. B... n'apportait pas la preuve, qui lui incombe, du lien de causalité entre l'ouvrage public et les dommages qu'il expose avoir subis.
7. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise permettant d'évaluer un préjudice, en vue d'engager la responsabilité d'une personne publique, en l'absence manifeste, en l'état de l'instruction, de fait générateur, de préjudice ou de lien de causalité entre celui-ci et le fait générateur.
8. Par ailleurs, la responsabilité de la personne publique, propriétaire d'un ouvrage public, est engagée de plein droit à l'égard de l'usager victime d'un dommage, sans que l'intéressé ait à établir l'existence d'une faute à la charge de cette personne publique, si le dommage est effectivement imputable à un défaut d'entretien normal de l'ouvrage et non à l'inattention de la victime à l'égard d'un obstacle ou d'une altération qui n'excèdent pas, par leur nature et leur importance, ceux auxquels un usager peut normalement s'attendre, en particulier l'usage piéton d'une voie publique.
9. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'attestation circonstanciée établie par une tierce personne le 21 décembre 2021 ainsi que de l'attestation d'intervention des sapeurs-pompiers intervenus sur les lieux, dont les termes ne sont pas contredits par la commune de Toulon qui n'a produit aucune écriture en défense tant en première instance qu'en appel, que M. B... a chuté le 7 avril 2020 vers 15 h en empruntant l'escalator extérieur menant au centre commercial Mayol à Toulon, en raison d'un dysfonctionnement de la rampe de cet ouvrage et que cette chute lui a occasionné des dommages physiques et notamment une plaie au cuir chevelu, une plaie au tibia droit avec dermabrasions et une plaie au pieds gauche avec dermabrasions. Par suite, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a retenu qu'il ne rapportait pas la preuve du lien de causalité entre l'ouvrage public que pourrait constituer cet escalator et les dommages qu'il expose avoir subis.
10. Il résulte de ce qui précède, la cour n'étant saisie par l'effet dévolutif de l'appel d'aucun autre moyen, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. En conséquence, l'ordonnance du 8 août 2023 doit être annulée et il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Toulon pour qu'il soit à nouveau statué sur sa demande.
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance de la présidente de la cour administrative de Marseille n° 23MA02168 du 15 janvier 2024 est déclarée non avenue.
Article 2 : L'ordonnance n° 2201076 du 8 août 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Toulon est annulée.
Article 3 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Toulon pour qu'il soit statué sur les demandes présentées par M. B....
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à à M. A... B..., à la commune de Toulon et à la caisse primaire d'assurance maladie du Var.
Délibéré après l'audience du 5 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Cécile Fedi, présidente de chambre,
- Mme Lison Rigaud, présidente assesseure,
- M. Jérôme Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 septembre 2024.
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N° 24MA00343