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11/07/2024 | FRANCE | N°22MA01511

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre, 11 juillet 2024, 22MA01511


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société Planet a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et majorations, des retenues à la source mises à sa charge au titre des années 2011 à 2014.



Par un jugement n° 1605447, 1605448, 1705980 du 18 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille a déchargé la société Planet des retenues à la source mises à sa charge au titre des années 2011 à 2014, en droits et majorations, et rejeté le surplus d

es conclusions de ses demandes.



Par un arrêt n° 18MA04302 du 15 juillet 2020, la cour admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Planet a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et majorations, des retenues à la source mises à sa charge au titre des années 2011 à 2014.

Par un jugement n° 1605447, 1605448, 1705980 du 18 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille a déchargé la société Planet des retenues à la source mises à sa charge au titre des années 2011 à 2014, en droits et majorations, et rejeté le surplus des conclusions de ses demandes.

Par un arrêt n° 18MA04302 du 15 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Marseille, sur recours du ministre, a annulé l'article 1er du jugement n° 1605447, 1605448, 1705980 du 18 mai 2018 du tribunal administratif de Marseille et remis à la charge de la société Planet les retenues à la source, en droits et majorations, dont le tribunal avait prononcé la décharge.

Par une décision n° 444451 du 20 mai 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté pour la société Planet, annulé l'arrêt n° 18MA04302 du 15 juillet 2020 et décidé de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Marseille.

Procédure devant la Cour :

Par un recours et des mémoires, enregistrés les 18 septembre 2018, 21 novembre 2022, 22 juin 2023 et 7 septembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1605447, 1605448, 1705980 du 18 mai 2018 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de remettre à la charge de la société Planet, en droits et majorations, les retenues à la source qui lui ont été réclamées au titre des années 2011 à 2014, pour un montant total de 739 517 euros.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les sommes versées par la société Planet relèvent du b. du I de l'article 182 B du code général des impôts et ont la nature de redevances au sens des articles 12 de la convention fiscale franco-néo-zélandaise du 30 novembre 1979 et de l'accord fiscal franco-maltais du 25 juillet 1977 ;

- la société néo-zélandaise Les Mills International était la véritable bénéficiaire des redevances versées par la société Planet, les sociétés belge Les Mills Belgium et maltaise Les Mills Euromed n'étant qu'intermédiaires ;

- dès lors que le bénéficiaire effectif des redevances versées était la société néo-zélandaise Les Mills International, la société Planet n'est pas fondée à se prévaloir des 1 et 2 de l'article 182 B bis du code général des impôts, conformément au 3 de cet article et à l'article 119 quater du même code ;

- l'administration ne s'est pas placée implicitement sur le terrain de l'abus de droit ;

- les propositions de rectification sont suffisamment motivées ;

- l'ensemble des sommes versées doit être qualifié de redevances soumises à la retenue à la source ;

- la circonstance que la société Planet s'est acquittée des retenues à la source est sans incidence sur leur bien-fondé.

Par des mémoires en défense enregistrés les 21 décembre 2018, 29 juin 2022, 23 décembre 2022 et 24 juillet 2023, la société Planet, représentée par Me Weller, conclut au rejet du recours et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 10 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration s'est implicitement placée sur le terrain de l'abus de droit ;

- les propositions de rectification sont insuffisamment motivées ;

- les sommes en litige étant la contrepartie d'un droit de distribution exclusif et non de redevances de marque, ainsi que le confirment les commentaires de la convention modèle OCDE, le b. du I de l'article 182 B du code général des impôts n'est pas applicable et ces rémunérations étaient exclusivement imposables en Belgique et à Malte, en application des conventions fiscales conclues avec ces Etats ;

- la société néo-zélandaise Les Mills International ne peut être regardée comme le bénéficiaire effectif de ces sommes, compte tenu de la conclusion des contrats de sous-distribution avec les sociétés Les Mills Belgium et Les Mills Euromed, qui écartent toute relation juridique antérieure ;

- elle est fondée à se prévaloir de l'article 182 B bis du code général des impôts, ne permettant pas d'appliquer une retenue à la source entre sociétés de l'Union européenne entretenant des liens capitalistiques ;

- à titre subsidiaire, à supposer la qualification de redevances retenue, les droits ne sont qu'accessoires au droit de distribution exclusif et l'ensemble des rémunérations versées est soumis au régime suivi par la prestation principale ;

- à titre infiniment subsidiaire, il convient de déterminer la part des rémunérations susceptibles d'être soumises à la retenue à la source, qui ne peut excéder 5 %, ce que confirme la doctrine administrative référencée BOI-INT-DG-20-20-10 n° 140 ;

- l'administration n'a pas pris en compte les sommes déjà acquittées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord du 25 juillet 1977 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Malte tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;

- la convention du 30 novembre 1979 entre la France et la Nouvelle-Zélande en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Platillero,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,

- et les observations de Me Weller, pour la société Planet.

Considérant ce qui suit :

1. La société Planet, qui distribue auprès de salles de sport des programmes de cours collectifs de fitness sous la marque " Les Mills " conçus par la société de droit néo-zélandais Les Mills International, a fait l'objet de vérifications de comptabilité, à l'issue desquelles des propositions de rectification des 4 décembre 2014 et 2 mars 2015 lui ont été notifiées. Au terme de la procédure, des retenues à la source, assorties des intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue à l'article 1728 du code général des impôts, ont été mises à sa charge au titre des années 2011 à 2014, à raison de sommes qualifiées de redevances versées aux sociétés Les Mills Belgium et Les Mills Euromed, établies respectivement en Belgique et à Malte. Par un jugement du 18 mai 2018, le tribunal administratif de Marseille a déchargé la société Planet, en droits et majorations, de ces retenues à la source. Par un arrêt du 15 juillet 2020, la Cour a annulé l'article 1er de ce jugement et remis à la charge de la société Planet, en droits et majorations, ces retenues à la source. Par une décision du 20 mai 2022, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la Cour.

Sur le motif de décharge retenu par le tribunal administratif de Marseille :

2. La société Planet, créée en 1997 et qui a pour objet l'achat et la vente de produits pour le fitness, l'exploitation et la commercialisation directe de licences, la formation et le conseil dans le domaine du fitness et le développement de toutes activités liées, distribue auprès de clubs de fitness situés pour l'essentiel en France des programmes de cours collectifs sous la marque " Les Mills ", conçus et élaborés par la société Les Mills International, établie en Nouvelle-Zélande. Elle a payé au titre des années 2011 à 2014 des sommes à la société Les Mills Belgium, établie en Belgique, et à la société Les Mills Euromed, établie à Malte. Pour justifier de ces paiements, elle a présenté des contrats intitulés " Sub distribution agreement " conclus avec la société Les Mills Belgium, valable du 1er janvier au 31 décembre 2011, et la société Les Mills Euromed, stipulant une date de début au 1er janvier 2012. L'administration, estimant qu'un contrat intitulé " Supplementary agency agreement " conclu le 1er décembre 1998 entre la société Planet et la société de droit néo-zélandais Les Mills Aerobics International n'avait pas été dénoncé, a appliqué la retenue à la source sur les sommes ainsi versées, sur le fondement de l'article 182 B du code général des impôts. Considérant que ces sommes constituaient des redevances dont le bénéficiaire effectif était la société Les Mills International, elle a fait application de l'article 12 de la convention du 30 novembre 1979 entre la France et la Nouvelle-Zélande et a appliqué un taux de 10 % s'agissant des sommes versées à la société Les Mills Belgium. Elle a également appliqué un taux de 10 % s'agissant des sommes versées à la société Les Mills Euromed, sans qu'il soit besoin de rechercher le bénéficiaire effectif, en application de l'article 12 de l'accord du 25 juillet 1977 entre la France et Malte.

3. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale.

En ce qui concerne l'application du droit interne :

4. Aux termes de l'article 182 B du code général des impôts : " I. Donnent lieu à l'application d'une retenue à la source lorsqu'ils sont payés par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes ou des sociétés, relevant de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, qui n'ont pas dans ce pays d'installation professionnelle permanente : (...) b. Les produits définis à l'article 92 et perçus par les inventeurs ou au titre de droits d'auteur, ceux perçus par les obtenteurs de nouvelles variétés végétales au sens des articles L. 623-1 à L. 623-35 du code de la propriété intellectuelle ainsi que tous produits tirés de la propriété industrielle ou commerciale et de droits assimilés ; c. Les sommes payées en rémunération des prestations de toute nature fournies ou utilisées en France (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes payées par un débiteur qui exerce une activité en France à des personnes morales qui n'ont pas dans ce pays d'installations professionnelles permanentes, donnent lieu à retenue à la source lorsque ces personnes morales relèvent de l'impôt sur les sociétés, sans qu'il y ait lieu de rechercher si elles y ont été effectivement soumises. En outre, ne sont au nombre des sommes mentionnées au c. du I de l'article 182 B du code général des impôts que celles qui ne relèvent pas des autres catégories de revenus mentionnés à cet article.

5. Il résulte de l'instruction, notamment des contrats intitulés " Sub distribution agreement " conclus par la société Planet sous le nom " A... " avec les sociétés Les Mills Belgium et Les Mills Euromed, qu'ils indiquent en préambule que ces sociétés distributrices possèdent certains droits dans et sur les programmes, le logiciel et la propriété intellectuelle en vertu des termes et conditions de contrats de distribution passés entre ces sociétés et la société Les Mills International B.V. Ces préambules précisent que, sous réserve des termes et conditions de ces contrats, les distributeurs successifs accordent au sous-distributeur le droit d'autoriser les clubs affiliés, sur les territoires de la France et de l'Afrique francophone, à utiliser dans une certaine limite ces programmes, logiciel et propriété intellectuelle conformément aux termes du contrat. En outre, ces contrats prévoient notamment qu'est conféré à la société Planet en tant que sous-distributeur le droit exclusif, d'une part, de facturer les clubs qui utilisent les programmes et les ressources à destination des instructeurs, les ressources à destination des cours collectifs, les améliorations et la propriété intellectuelle, d'autre part, d'afficher, d'exposer et d'utiliser les programmes et les ressources à destination des instructeurs, les ressources à destination des cours collectifs, les améliorations et la propriété intellectuelle pour toute démonstration et prestation de services de support y compris la formation, et, enfin, d'utiliser le logiciel et les ressources de logiciel pour administrer les clubs affiliés en évaluant leurs performances et les performances des programmes et en assurant des services de formation. Ils prévoient également que la société Planet devra exercer sous le nom " A... " la facturation des clubs qui utilisent les programmes, les ressources à destination des instructeurs et des cours collectifs, les améliorations et la propriété intellectuelle, ainsi que la facturation des clubs affiliés qui utilisent le logiciel et les ressources de logiciel.

6. L'administration se prévaut par ailleurs du contrat intitulé " Supplementary agency agreement " conclu le 1er décembre 1998 entre la société Planet et la société de droit néo-zélandais Les Mills Aerobics International, la société Planet ne produisant au demeurant pas le contrat d'agence initial auquel fait référence ce contrat. Il résulte notamment des stipulations de ce contrat d'agent que la société Planet pouvait utiliser le savoir-faire pour la formation initiale et complémentaire des instructeurs et qu'elle bénéficiait d'un droit d'utiliser le nom et les logos aussi bien dans le cadre de son activité que pour la publicité y afférente. Il résulte également des énonciations non contredites des propositions de rectification que la société Planet, sous l'enseigne " Les Mills " facturait mensuellement les programmes de cours collectifs homologués sous ce nom aux clubs suivant un contrat de vente comprenant un ensemble de départ composé de formations, de marketing et d'accès au club " Les Mills International " et différents programmes de cours collectifs chorégraphiés, ces programmes d'entraînement vendus aux clubs ayant fait l'objet de dépôts de marques par la société Planet auprès de l'Institut national de la propriété intellectuelle.

7. A cet égard, contrairement à ce que soutient la société Planet, il ne résulte pas de l'instruction que le contrat intitulé " Supplementary agency agreement " conclu le 1er décembre 1998 aurait fait l'objet d'une résiliation. En effet, aucun document ne vient confirmer cette résiliation, les modalités de résiliation stipulées par le contrat d'agence auquel se réfère ce contrat n'étant d'ailleurs même pas précisées. En outre, le point 3 de la partie 13 des contrats intitulés " Sub distribution agreement " conclus avec les sociétés Les Mills Belgium et Les Mills Euromed, qui se borne à mentionner que les contrats, y compris leurs annexes qui ne sont au demeurant pas produites, constituent seulement l'intégralité des contrats entre les parties concernant les questions qu'ils traitent et annulent et remplacent tout autre document précédent concernant les questions traitées par ces contrats, ne fait aucunement état de l'annulation de toute autre relation contractuelle entre les sociétés du groupe et n'emporte pas résiliation automatique de l'ensemble des obligations résultant du contrat d'agence du fait de la conclusion des contrats de sous-distribution.

8. Face à ces éléments, qui sont de nature à établir que les sommes versées rémunéraient l'utilisation de la marque " Les Mills ", un savoir-faire et des informations qui appartenaient à la société Les Mills International, et pas seulement un droit de distribution, la société Planet se borne à faire valoir que les rémunérations versées ne constituent pas la contrepartie de l'obtention du droit d'utiliser les marques ou le savoir-faire détenus par la société Les Mills International mais seulement un droit exclusif de distribution, dès lors que les contrats intitulés " Sub distribution agreement " conclus avec les sociétés Les Mills Belgium et Les Mills Euromed, qui ne constituent pas des contrats de licence de marques et de transfert de savoir-faire et auxquels la société Les Mills International n'est pas partie, ne comportent aucune stipulation qui lui accorde un tel droit et précisent au paragraphe introductif 4 que les droits conférés au sous-distributeur excluent les droits de fabriquer, de vendre et de distribuer des marchandises, produits ou services portant les marques " LMI " ou d'accorder à tout tiers de tels droits.

9. La société Planet n'apporte toutefois aucun élément, qu'elle seule est en mesure de produire, permettant d'expliquer les mentions du préambule des contrats, les circonstances qui ont rendu nécessaire de rappeler que les sociétés distributrices possèdent certains droits dans et sur les programmes, le logiciel et la propriété intellectuelle en vertu des termes et conditions de contrats de distribution qu'elles ont souscrits et l'articulation effective de ces mentions avec l'ensemble des stipulations des contrats, dont il résulte, ainsi qu'il a été dit précédemment, une utilisation de la marque et du savoir-faire détenus par la société Les Mills International. La société Planet ne produit ainsi aucune justification des droits que les distributeurs successifs ont acquis sur les programmes, le logiciel et la propriété intellectuelle dont la société Les Mills International était propriétaire. Par ailleurs, en se bornant à exposer un organigramme du groupe, à une date inconnue, qui ne mentionne qu'un contrat de distribution principal entre les sociétés Les Mills International et Les Mills Euromed et des contrats de sous-distribution, dont l'un conclu entre elle et cette société maltaise, et à soutenir que le contrat intitulé " Supplementary agency agreement " conclu le 1er décembre 1998 n'avait plus de raison d'être, alors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne résulte pas de l'instruction que ce contrat aurait été résilié, la société Planet n'apporte aucune précision qu'elle seule est en mesure d'exposer quant à la réalité des relations juridiques qui existent au titre des années en litige entre les différentes sociétés du groupe, permettant d'apprécier le traitement du savoir-faire et de la marque détenus par la société Les Mills International.

10. Dans ces conditions, l'administration fiscale était fondée à regarder les rémunérations versées comme ne portant pas uniquement sur un droit de distribution exclusif mais ayant également pour objet de rémunérer l'usage ou la concession de l'usage d'une marque, d'un savoir-faire ou d'informations demeurant la propriété de la société néo-zélandaise Les Mills International. Par suite, c'est à bon droit qu'elle a estimé que les sommes en litige étaient soumises à la retenue à la source prévue au b. du I de l'article 182 B en tant que produits tirés de la propriété industrielle ou commerciale et de droits assimilés. Au demeurant, et en tout état de cause, à supposer même qu'une partie de ces sommes auraient été dissociables des rémunérations versées en tant que produits tirés de la propriété industrielle ou commerciale et de droits assimilés, il n'en demeure pas moins qu'elles restaient alors soumises à la retenue à la source sur le fondement du c. du I de l'article 182 B du code général des impôts.

En ce qui concerne l'application du droit conventionnel :

11. Aux termes de l'article 12 de la convention du 30 novembre 1979 entre la France et la Nouvelle-Zélande en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu : " 1. Les redevances provenant d'un Etat et payées à un résident de l'autre Etat sont imposables dans cet autre Etat. 2. Toutefois, ces redevances sont aussi imposables dans l'Etat d'où elles proviennent et selon la législation de cet Etat, mais si la personne qui reçoit les redevances en est le bénéficiaire effectif, l'impôt ainsi établi ne peut excéder 10 % du montant brut des redevances. 3. Le terme " redevances " employé dans le présent article désigne les rémunérations de toute nature payées pour l'usage ou la concession de l'usage d'un droit d'auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, y compris les films cinématographiques et les œuvres enregistrées pour la radiodiffusion ou la télévision, d'un brevet, d'une marque de fabrique ou de commerce, d'un dessin ou d'un modèle, d'un plan, d'une formule ou d'un procédé secrets, ainsi que pour l'usage ou la concession de l'usage d'un équipement industriel, commercial ou scientifique et pour les informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique (...) ". Aux termes de l'article 12 de l'accord du 25 juillet 1977 entre la France et Malte tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune : " 1. Les redevances provenant d'un Etat contractant et payées à un résident de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. 2. Toutefois, ces redevances peuvent être imposées dans l'Etat contractant d'où elles proviennent et selon la législation de cet Etat, mais si la personne qui perçoit les redevances en est le bénéficiaire effectif, l'impôt ainsi établi ne peut excéder 10 % du montant des redevances (...) 4. Le terme " redevances " employé dans le présent article désigne les rémunérations de toute nature payées pour l'usage ou la concession de l'usage d'un droit d'auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, y compris les films cinématographiques et les œuvres enregistrées pour la radio ou la télévision, d'un brevet, d'une marque de fabrique ou de commerce, d'un dessin ou d'un modèle, d'un plan, d'une formule ou d'un procédé secrets, ou pour des informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique (...) ".

S'agissant de la qualification de redevances :

12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 5 à 10, il résulte de l'instruction que l'administration fiscale était fondée à regarder les rémunérations versées comme ne portant pas uniquement sur un droit de distribution exclusif mais ayant également pour objet de rémunérer l'usage ou la concession de l'usage d'une marque, d'un savoir-faire ou d'informations demeurant la propriété de la société néo-zélandaise Les Mills International. Elles constituaient ainsi des redevances pour l'application des stipulations de l'article 12 de l'accord entre la France et Malte du 25 juillet 1977 et de l'article 12 de la convention entre la France et la Nouvelle-Zélande du 30 novembre 1979, qui, éclairées par les commentaires formulés par le comité fiscal de l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) sur l'article 12 de la convention-modèle établie par cette organisation, notamment leur paragraphe 10.1, excluent de la qualification de redevances les rémunérations qui sont versées uniquement en contrepartie de l'obtention de droits exclusifs de distribution d'un produit ou d'un service sur un territoire donné et ne constituent ainsi pas des redevances dans la mesure où ils ne sont pas effectués en contrepartie de l'usage, ou de la concession de l'usage, d'un bien mentionné dans la définition des redevances.

13. Il résulte de ce qui précède que la société Planet n'est pas fondée à soutenir que les rémunérations versées étant la contrepartie de droits exclusifs de distribution, elles ne constitueraient pas des redevances au sens des stipulations précitées et seraient exclusivement imposables en Belgique et à Malte, en application de l'article 4 de la convention du 10 mars 1964 entre la France et la Belgique et de l'article 7 de l'accord du 25 juillet 1977 entre la France et Malte. Par voie de conséquence, les stipulations de cet accord ne font pas obstacle à ce que la retenue à la source au taux de 10 % soit appliquée aux sommes versées à la société maltaise Les Mills Euromed, sans qu'il soit ainsi besoin, en tout état de cause, de rechercher si la société néo-zélandaise Les Mills International en était le bénéficiaire effectif, dès lors que l'article 12 de la convention entre la France et la Nouvelle-Zélande du 30 novembre 1979 ne fait pas plus obstacle à l'application d'une retenue à la source à ce taux.

S'agissant du bénéficiaire effectif des redevances versées :

14. Il résulte de l'instruction que, ainsi qu'il a été dit précédemment, les rémunérations en litige ne portent pas uniquement sur un droit de distribution exclusif mais ont également pour objet de rémunérer l'usage ou la concession de l'usage d'une marque, d'un savoir-faire ou d'informations demeurant la propriété de la société néo-zélandaise Les Mills International. Par ailleurs, dans son mémoire du 29 juin 2022, la société Planet indique que les flux financiers provenant des clients des pays des sous-distributeurs étaient centralisés sur la Belgique puis sur Malte pour ensuite être versés en Nouvelle-Zélande, ce qui implique ainsi que les flux financiers étaient effectivement dirigés vers le pays de résidence de la société Les Mills International. Enfin, il résulte des propositions de rectification que c'est à l'issue d'un premier contrôle qui s'est conclu par des rappels de retenue à la source que le schéma contractuel et le circuit de paiement des rémunérations initialement versées à la société néo-zélandaise sur un compte bancaire ouvert à Jersey ont été modifiés par la passation du contrat intitulé " Sub distribution agreement " conclu avec la société Les Mills Belgium, les paiements en cours au profit de la société néo-zélandaise étant d'ailleurs suspendus pour être transférés à la société belge.

15. Face à ces éléments, la société Planet se borne, d'une part, à se prévaloir de la conclusion des contrats intitulés " Sub distribution agreement " conclus avec la société belge Les Mills Belgium puis la société maltaise Les Mills Euromed, qui, contrairement à ce qui est soutenu, n'ont pas écarté toute relation juridique antérieure au sein du groupe, et d'un contrat de distribution conclu par la société néo-zélandaise Les Mills International, qui n'est pas produit. Elle n'apporte aucun élément, qu'elle seule est en mesure d'apporter, de nature à établir que la société Les Mills Belgium aurait été en droit d'utiliser les redevances et d'en jouir sans être limitée par une quelconque obligation, notamment contractuelle, de céder les paiements reçus à la société Les Mills International, en l'absence de toute précision quant aux liens contractuels unissant les sociétés Les Mills Belgium et Les Mills International et aux mouvements financiers entre les sociétés du groupe.

16. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que, au regard de l'ensemble des relations contractuelles liant les sociétés du groupe, la société Les Mills Belgium aurait pu user de prérogatives, du fait d'un rôle économique propre qui n'aurait pas été limité à celui d'intermédiaire, sur des sommes qui ne seraient pas restées sous le contrôle de la société Les Mills International et disposer des rémunérations qui lui ont été versées. Par suite, la société néo-zélandaise Les Mills International doit être regardée comme le bénéficiaire effectif des redevances payées et c'est dès lors à bon droit que l'administration a appliqué aux sommes versées à la société Les Mills Belgium la retenue à la source au taux de 10 %, en application des stipulations du 2 de l'article 12 de la convention entre la France et la Nouvelle-Zélande du 30 novembre 1979.

17. Il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a fait droit aux demandes de la société Planet. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la société Planet devant le tribunal administratif de Marseille et devant elle.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

18. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

19. Les propositions de rectification des 4 décembre 2014 et 2 mars 2015 citent les dispositions de l'article 182 B du code général des impôts et les stipulations des conventions fiscales bilatérales que l'administration a appliqué au titre de chacune des années en litige. Elles exposent avec précision les motifs de droit et de fait sur lesquels celle-ci s'est fondée pour estimer que les sommes en litige constituaient des redevances soumises à une retenue à la source à un taux de 10 %, notamment les motifs pour lesquels la société Les Mills International en a été regardée comme le bénéficiaire effectif au regard des contrats liant les sociétés du groupe, les précisions apportées quant à la qualification des sommes étant suffisantes pour informer la société Planet que ces sommes devaient être regardées comme correspondant à des produits relevant du b. du I de l'article 182 B du code général des impôts. Elles exposent également avec précision les différents versements au profit des sociétés Les Mills Belgium et Les Mills Euromed auxquels a procédé la société Planet et qui ont été soumis à la retenue à la source. Les propositions de rectification sont ainsi suffisamment motivées, sans que la société Planet puisse utilement contester le bien-fondé de ces motifs.

20. En second lieu, aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ".

21. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale s'est en dernier lieu bornée à apprécier, au regard des contrats qui lui étaient présentés et de la chronologie des versements opérés, quelle était la nature des sommes versées, qu'elle a qualifiées de redevances, et qui en était le bénéficiaire effectif s'agissant des sommes versées à la société Les Mills Belgium pour l'application du droit conventionnel, ce qu'elle pouvait faire sans mettre en œuvre la procédure de répression des abus de droit, en estimant que les contrats signés avec les sociétés Les Mills Belgium et Les Mills Euromed n'avaient pas remis en cause le contrat signé avec la société Les Mills International. Ainsi, et à supposer même que, contrairement aux mentions des propositions de rectification, la société Planet n'aurait pas déclaré en cours de contrôle que les contrats conclus avec les sociétés Les Mills Belgium et Les Mills Euromed étaient " dépourvus de portée juridique ", l'administration, qui ne se prévaut pas de ce que les premiers contrats auraient eu un caractère fictif ou auraient recherché le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs dans le but d'atténuer la charge fiscale de la société Planet, ne s'est pas placée sur le terrain de l'abus de droit sans accorder les garanties correspondantes à la requérante.

Sur le bien-fondé des impositions :

22. En premier lieu, aux termes de l'article 182 B bis du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " 1. La retenue à la source prévue à l'article 182 B n'est pas applicable aux redevances payées par une personne morale revêtant une des formes énumérées au premier alinéa du 1 de l'article 119 quater ou par un établissement stable à une personne morale qui est son associée ou à un établissement stable dépendant d'une personne morale qui est son associée. Pour l'application du présent article, la qualité de personne morale associée d'une personne morale et de personne morale associée d'un établissement stable est reconnue conformément aux deuxième et troisième alinéas du 1 de l'article 119 quater. Pour l'application du présent article, les redevances s'entendent des paiements de toute nature reçus à titre de rémunération pour l'usage ou la concession de l'usage d'un droit d'auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, y compris les films cinématographiques et les logiciels informatiques, d'un brevet, d'une marque de fabrique ou de commerce, d'un dessin ou d'un modèle, d'un plan, d'une formule ou d'un procédé secret, ainsi que pour des informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique. Les paiements reçus pour l'usage ou la concession de l'usage d'un droit relatif à des équipements industriels, commerciaux ou scientifiques sont considérés comme des redevances. 2. L'exonération prévue au 1 est soumise aux mêmes conditions et justifications que celles prévues à l'article 119 quater (...) ". Aux termes de l'article 119 quater du même code : " 1. (...) Pour l'application du présent article, la qualité de personne morale associée d'une autre personne morale est reconnue à toute personne morale lorsqu'elle détient une participation directe d'au moins 25 % dans le capital de l'autre personne morale ou lorsque l'autre personne morale détient une participation directe d'au moins 25 % dans son capital ou lorsqu'une troisième personne morale détient une participation directe d'au moins 25 % dans son capital et dans le capital de l'autre personne morale et à condition dans tous les cas que cette participation soit détenue de façon ininterrompue depuis deux ans au moins ou fasse l'objet d'un engagement selon lequel elle sera conservée de façon ininterrompue pendant un délai de deux ans au moins. Si cet engagement est pris par une personne morale qui n'a pas son siège de direction effective en France, il donne lieu à la désignation d'un représentant qui est responsable du paiement de la retenue à la source mentionnée au premier alinéa en cas de non-respect de cet engagement (...) 2. Pour bénéficier de l'exonération prévue au premier alinéa du 1, la personne morale bénéficiaire doit justifier auprès du débiteur ou de la personne qui assure le paiement de ces revenus qu'elle en est le bénéficiaire effectif et qu'elle remplit les conditions suivantes : a. Avoir son siège de direction effective dans un Etat membre de la Communauté européenne ; b. Revêtir l'une des formes énumérées sur une liste établie par arrêté du ministre chargé de l'économie conformément à l'annexe à la directive 2003/49/CE du Conseil du 3 juin 2003 concernant un régime fiscal commun applicable aux paiements d'intérêts et de redevances effectués entre les sociétés associées d'Etats membres différents ; c. Etre passible, y compris au titre de ces revenus, dans l'Etat membre où elle a son siège de direction effective, de l'impôt sur les sociétés de cet Etat sans en être exonérée ; d. Lorsque la reconnaissance de sa qualité de société associée du débiteur de ces revenus en dépend, détenir la participation mentionnée au deuxième alinéa du 1 (...) ".

23. D'une part, en se bornant à se prévaloir d'un rapport de recherche de la direction nationale des enquêtes fiscales du 6 octobre 2017 qui ne concerne pas les années en litige et qui ne cite même pas son nom, la société Planet n'apporte aucun élément précis, qu'elle seule est en mesure de produire, de nature à apprécier les liens capitalistiques entre les sociétés du groupe au titre des années en litige. Elle ne justifie ainsi pas que les conditions prévues au deuxième alinéa du 1 de l'article 119 quater du code général des impôts auraient été remplies. D'autre part, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, la société Planet n'apporte pas plus d'éléments qu'elle seule est en mesure d'apporter de nature à justifier que les personnes morales bénéficiaires auraient été les bénéficiaires effectifs des revenus. Elle ne justifie ainsi pas que les conditions prévues au 2 de l'article 119 quater du code général des impôts auraient été remplies. Par suite, la société Planet n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article 182 B bis de ce code général ne permettaient pas l'application de la retenue à la source.

24. En deuxième lieu, la société Planet soutient, à titre subsidiaire qu'à supposer la qualification de redevances retenue, les droits versés à ce titre ne sont qu'accessoires au droit de distribution exclusif et qu'ainsi, l'ensemble des rémunérations versées est soumis au régime suivi par la prestation principale. A titre infiniment subsidiaire, elle soutient qu'il conviendrait de dissocier les différents éléments à l'origine des versements et de déterminer la part des rémunérations susceptibles d'être soumises à la retenue à la source, qui ne peut excéder 5 % des sommes versées. Toutefois, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, de l'analyse de l'ensemble des contrats versés au dossier et de l'absence de production par la société Planet des éléments qu'elle seule est en mesure de produire, il ne résulte pas de l'instruction que, au sein des rémunérations versées, les sommes versées au titre des droits de distribution seraient dissociables des autres éléments de la rémunération, ni même d'ailleurs qu'elles en constitueraient l'objet principal et ne seraient pas la conséquence indissociable et nécessaire de ces autres éléments. Au demeurant, et en tout état de cause, pour l'application du droit interne, le moyen est dépourvu de portée, dès lors que les rémunérations en litige resteraient soumises à la retenue à la source sur le double fondement du b. et du c. du 1 de l'article 182 B du code général des impôts. Il est tout autant dépourvu de portée pour l'application du droit conventionnel, dès lors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, il ne résulte pas de l'instruction que ces rémunérations auraient été versées uniquement en contrepartie de l'obtention de droits exclusifs de distribution d'un produit ou d'un service et ne pourraient ainsi être qualifiées de redevances.

25. A cet égard, la société Planet n'est pas fondée à se prévaloir de l'interprétation administrative référencée BOI-INT-DG-20-20-10 n° 140, selon laquelle " Certains contrats complexes, tels que des contrats d'étude, de fourniture, d'installation ou de construction à l'étranger d'usines ou d'équipements ou d'établissements industriels, commerciaux ou scientifiques " clés en mains " ou d'ouvrages publics peuvent comporter des prestations diverses qui ne relèvent pas toutes du même régime fiscal. Des ventilations parfois délicates doivent alors être effectuées pour soumettre chaque composante du contrat aux dispositions conventionnelles qui lui sont effectivement applicables (...) ", qui ne donne pas d'interprétation différente de la loi fiscale, en l'absence de contrat complexe comportant des prestations dissociables.

26. En troisième lieu, la société Planet soutient que l'administration n'a pas pris en compte les sommes déjà acquittées, qui doivent ainsi être dégrevées. Toutefois, le quantum du litige est déterminé par les réclamations préalables. Or, dans sa réclamation du 12 octobre 2015, la société Planet a demandé le dégrèvement de la somme de 310 736 euros et des pénalités correspondantes, correspondant à la retenue à la source mise à sa charge au titre des années 2011 et 2012, et, dans sa réclamation du 1er décembre 2015, elle a demandé le dégrèvement de la somme de 319 531 euros et des pénalités y afférentes, correspondant à la retenue à la source mise à sa charge au titre des années 2013 et 2014, contestant ainsi l'intégralité des sommes dues, y compris celles dont elle s'est acquittées. Elle n'est ainsi pas fondée à demander un dégrèvement, au motif qu'elle a versé une partie des retenues à la source dues.

27. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a déchargé la société Planet des retenues à la source mises à sa charge au titre des années 2011 à 2014, en droits et majorations. Ce jugement doit dès lors être annulé dans cette mesure et les retenues à la source doivent être remises à la charge de la société Planet, en droits et majorations.

Sur les frais liés au litige :

28. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Planet demande au titre des frais qu'elle a exposés.

D E C I D E :

Article 1 : L'article 1er du jugement n° 1605447, 1605448, 1705980 du 18 mai 2018 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : Les retenues à la source dont le tribunal administratif de Marseille a prononcé la décharge par l'article 1er du jugement mentionné à l'article 1 sont remises à la charge de la société Planet, en droits et majorations.

Article 3 : Les conclusions de la société Planet tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la société par actions simplifiée Planet.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2024, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juillet 2024.

2

N° 22MA01511


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01511
Date de la décision : 11/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-01-05 Contributions et taxes. - Généralités. - Textes fiscaux. - Conventions internationales.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : SCP BEAM

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-11;22ma01511 ?
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