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09/07/2024 | FRANCE | N°24MA01315

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 09 juillet 2024, 24MA01315


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... C... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, une expertise médicale à la suite de la prise en charge dont il a fait l'objet le 10 décembre 2021 par le centre hospitalier de Bastia.





Par une ordonnance n° 2310340 du 9 novembre 2023, le président du tribunal administratif de Marseille a transmis au tribunal administratif de Bast

ia, en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, la requête présentée par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, une expertise médicale à la suite de la prise en charge dont il a fait l'objet le 10 décembre 2021 par le centre hospitalier de Bastia.

Par une ordonnance n° 2310340 du 9 novembre 2023, le président du tribunal administratif de Marseille a transmis au tribunal administratif de Bastia, en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, la requête présentée par M. C....

M. C... a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la récusation de M. B..., expert désigné par ordonnance n° 2301391, 2301435 du juge des référés du tribunal administratif de Bastia du 11 décembre 2023.

Par une ordonnance n° 2400516 du 21 mai 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête de M. C....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 mai 2024, M. C..., représenté par Me Carillo, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bastia du 21 mai 2024 ;

2°) de prononcer la récusation de M. B... et de désigner un nouvel expert exerçant son activité sur un territoire autre que la Corse ;

3°) d'ordonner la restitution de l'allocation provisionnelle d'un montant de 1 200 euros versée à l'expert, en exécution de l'ordonnance du 18 décembre 2023 du président du tribunal administratif de Bastia.

Il soutient que :

- sa demande de récusation a été rejetée à tort comme irrecevable ; le mandat de représentation exigé par l'article R. 621-6-1 du code de justice administrative pour demander la récusation de l'expert présente le caractère d'un pouvoir spécial ;

- il existe un doute sur l'impartialité de l'expert qui exerçait en qualité de praticien au sein du pôle de spécialités chirurgicales orthopédiques du centre hospitalier de Bastia, sous la responsabilité du praticien directement concerné par la prise en charge chirurgicale litigieuse ;

- un nouvel expert, exerçant son activité dans une zone géographique distincte de la Corse, doit être désigné, en application de l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 14 paragraphe 1 du pacte international relatif aux droits civils et politiques et des articles L. 621-6 et L. 721-1 du code de justice administrative ;

- l'allocation provisionnelle de 1 200 euros qu'il a versée à l'expert doit lui être restituée.

Par un mémoire enregistré le 3 juin 2024, M. A... B..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la demande de M. C... et à ce que les dépens et une somme de 2 000 euros soient mis à la charge de ce dernier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable, à défaut de justification d'un pouvoir spécial et en raison de la tardiveté de la demande de récusation ;

- les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2024, le centre hospitalier de Bastia et la société Relyens Mutual Insurance, représentés par la SARL Le Prado-Gilbert, concluent au rejet de la demande de M. C....

Ils font valoir que :

- à titre principal, la demande de première instance est irrecevable et le mandat produit en appel n'est pas de nature à régulariser celle-ci ;

- à titre subsidiaire, la demande de récusation est tardive ;

- à titre infiniment subsidiaire, elle est infondée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Rocca-Serra, substituant Me B..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a sollicité auprès du président du tribunal administratif de Bastia une expertise en vue de déterminer la responsabilité encourue par le centre hospitalier de Bastia à la suite de la prise en charge dont il a fait l'objet le 10 décembre 2021. Par une ordonnance du 11 décembre 2023, le président du tribunal administratif de Bastia a désigné en qualité d'expert M. B... avec pour mission, notamment, de donner un avis motivé sur l'existence de fautes médicales ou dans l'organisation du service lors de la prise en charge de M. C.... Ce dernier a demandé au tribunal administratif de Bastia de récuser cet expert. M. C... relève appel de l'ordonnance du président du tribunal administratif de Bastia du 21 mai 2024 qui a rejeté sa demande.

2. D'une part, aux termes de l'article R. 621-6-1 du code de justice administrative : " La demande de récusation formée par une partie est présentée à la juridiction qui a ordonné l'expertise. Si elle est présentée par un mandataire, ce dernier doit être muni d'un pouvoir spécial (...) ". Aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; (...) ".

4. Conformément aux dispositions citées ci-dessus des articles R. 612-1 et R. 621-6-1 du code de justice administrative, une demande de régularisation, tendant à la production du pouvoir spécial dont doit être muni le mandataire de la partie qui demande la récusation de l'expert a été adressée à Me Carillo, conseil de M. C... via l'application Télérecours, le 29 avril 2024, et mis à sa disposition le même jour. En vertu de l'article R. 611-8-6 du code de justice administrative, l'intéressé est réputé, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, avoir reçu communication de cette demande de régularisation à l'issue d'un délai de deux jours suivant cette mise à disposition, soit le 2 mai 2024. Cette lettre mentionne qu'à défaut de la production du document réclamé, la requête pourra être rejetée par ordonnance pour irrecevabilité manifeste à l'expiration d'un délai de 15 jours. Le requérant a transmis au tribunal, le 14 mai 2024, un document, non daté, qui ne peut être regardé comme un pouvoir spécial au sens des dispositions précitées de l'article R. 621-6-1 du code de justice administrative, dès lors que celui-ci, qui ne porte pas précisément sur sa demande de récusation de l'expert, confère un pouvoir général à son avocat pour agir, pour son compte et en son nom, au tribunal administratif de Bastia et pour, à cet effet, " faire toutes déclarations, signer et certifier toutes pièces, payer et recevoir toutes sommes, donner bonnes et valables quittances, mainlevées et décharges, et généralement faire tout ce qui sera utile et nécessaire. ". Si le requérant a produit, postérieurement et pour la première fois en appel, un mandat spécial, établi à la date du 14 mai 2024, et habilitant son conseil à introduire, en son nom et pour son compte, une requête en récusation de l'expert judiciaire devant le tribunal administratif de Bastia et la cour administrative d'appel de Marseille, ce document ne saurait permettre une régularisation de l'irrecevabilité de première instance, constatée par l'ordonnance attaquée à l'expiration du délai de quinze jours imparti.

5. Il résulte de ce qui précède que la demande de récusation de M. C... est entachée d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance et que le président du tribunal administratif de Bastia a, à bon droit, rejeté celle-ci en application des dispositions citées ci-dessus de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

6. Par voie de conséquence, les conclusions de M. C... tendant à obtenir la restitution de l'allocation provisionnelle d'un montant de 1 200 euros versée à l'expert, en exécution de l'ordonnance du 18 décembre 2023 du président du tribunal administratif de Bastia, ne peuvent qu'être rejetées.

7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. B... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La demande de récusation présentée par M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. B... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., au centre hospitalier de Bastia, à la société Relyens Mutual Insurance, à M. A... B..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Corse et à la mutualité sociale agricole corse.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2024, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente assesseure,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 juillet 2024.

N° 24MA01315


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01315
Date de la décision : 09/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Instruction - Moyens d'investigation - Expertise - Recours à l'expertise - Caractère frustratoire.

Procédure - Incidents - Récusation.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SARL LE PRADO - GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-09;24ma01315 ?
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