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04/07/2024 | FRANCE | N°23MA00860

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 1ère chambre, 04 juillet 2024, 23MA00860


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée (SARL) SEC Immobilier a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2018 par lequel le maire de Saint-Etienne-du-Grès s'est opposé à la déclaration préalable qu'elle avait déposée le 12 juillet 2016 en vue de bâtir deux lots avec accès indépendant à la voie publique sur un terrain situé quartier de Laurade et cadastré section B n° 2259.



Par un jugement n° 1903045 du 20 f

évrier 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) SEC Immobilier a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2018 par lequel le maire de Saint-Etienne-du-Grès s'est opposé à la déclaration préalable qu'elle avait déposée le 12 juillet 2016 en vue de bâtir deux lots avec accès indépendant à la voie publique sur un terrain situé quartier de Laurade et cadastré section B n° 2259.

Par un jugement n° 1903045 du 20 février 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 7 avril 2023 et le 23 avril 2024, la SARL SEC Immobilier, représentée par Me Bocognano, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 février 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Saint-Etienne-du-Grès du 8 novembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au maire de Saint-Etienne-du-Grès de lui délivrer une attestation de décision de non-opposition tacite, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Etienne-du-Grès la somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête émane d'une personne ayant qualité pour représenter la SARL SEC Immobilier ;

- la décision portant sursis à statuer du 12 août 2016, fondée elle-même sur une demande de pièces illégale, constitue le fondement de l'arrêté attaqué du 8 novembre 2018 ;

- cette décision du 12 août 2016 est illégale en raison de l'absence de publication de la délibération prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme, de l'incompétence de son auteur, du caractère insuffisamment avancé des travaux d'élaboration du PLU et de l'erreur manifeste d'appréciation qui l'entache ;

- l'arrêté attaqué du 8 novembre 2018 retire la décision tacite de non-opposition résultant de l'absence de notification d'une décision d'opposition dans le délai d'instruction :

- il est intervenu en dehors de toute procédure contradictoire ;

- il est insuffisamment motivé ;

- il repose sur l'application du PLU illégal en ce que le classement de la parcelle en litige en secteur Ns est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, eu égard aux considérations environnementales et aux caractéristiques de la parcelle, ce classement étant en outre contradictoire avec le PADD et les OAP ;

- le règlement de zone n'interdit pas toute construction.

Par des mémoires en défense enregistrés le 1er juin 2023 et le 9 avril 2024, la commune de Saint-Etienne-du-Grès, représentée par Me Suzan, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la SARL SEC Immobilier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable en ce qu'elle a pour auteur une personne n'ayant pas qualité pour représenter la SARL SEC Immobilier ;

- la lettre par laquelle la SARL SEC Immobilier a, en application de l'article L. 111-8 du code de l'urbanisme, confirmé sa déclaration préalable n'a pas été signée par une personne n'ayant pas qualité pour la représenter ;

- les moyens soulevés par la SARL SEC Immobilier ne sont pas fondés.

Un mémoire a été enregistré le 23 mai 2024, présenté pour la commune de Saint-Etienne-du-Grès, et non communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,

- et les observations de Me Bocognano, représentant la SARL SEC Immobilier, et de Me Suzan, représentant la commune de Saint-Etienne-du-Grès.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) SEC Immobilier a déposé en mairie de Saint-Etienne-du-Grès, le 12 juillet 2016, une déclaration préalable de division en vue de bâtir deux lots avec accès indépendant à la voie publique sur un terrain situé quartier de Laurade et cadastré section B n° 2259, sur le territoire communal. Par un arrêté du 12 août 2016, le maire de Saint-Etienne-du-Grès a sursis à statuer sur cette déclaration préalable, pour une durée de deux ans. Sur les demandes de la SARL SEC Immobilier, le tribunal administratif de Marseille a, par deux jugements du 26 décembre 2018, annulé cet arrêté et la décision du 22 juillet 2016 par laquelle le maire lui avait demandé de produire des pièces complémentaires pour son dossier de déclaration préalable. Par deux arrêts du 18 février 2021, devenus définitifs, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement annulant l'arrêté du 12 août 2016 et rejeté la demande de première instance mais a rejeté l'appel présenté par la commune à l'encontre du jugement qui avait annulé la demande de pièces du 22 juillet 2016. Par courrier du 18 septembre 2018, la SARL SEC Immobilier a, en application de l'article L. 111-8 du code de l'urbanisme, confirmé sa déclaration préalable auprès du maire de Saint-Etienne-du-Grès. Par un arrêté du 8 novembre 2018, ce dernier s'est opposé à la déclaration préalable. La SARL SEC Immobilier relève appel du jugement du 20 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 8 novembre 2018.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Il résulte des dispositions de l'article L. 223-18 du code de commerce applicables aux sociétés à responsabilité limitée, en vertu desquelles dans les rapports avec les tiers, le gérant est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société, sous réserve des pouvoirs que la loi attribue expressément aux associés, d'une part, et des dispositions de l'article L. 227-6 du même code, applicables aux sociétés par actions simplifiées, en vertu desquelles la société est représentée à l'égard des tiers par un président désigné dans les conditions prévues par les statuts qui est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l'objet social, d'autre part, que ces personnes ont de plein droit qualité pour agir en justice au nom de leur société.

3. La demande présentée pour la SARL SEC Immobilier devant le tribunal administratif de Marseille mentionne que celle-ci est représentée par M. B... A.... Mme C..., gérante de cette société et ayant de plein droit qualité pour agir en justice au nom de leur société a cependant donné mandat à ce dernier le 1er janvier 2016, notamment pour agir en justice au nom de cette société. Ainsi, la demande de première instance était recevable, contrairement à ce que soutient la commune de Saint-Etienne-du-Grès.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Il résulte des dispositions du code de l'urbanisme que les lotissements, qui constituent des opérations d'aménagement ayant pour but l'implantation de constructions, doivent respecter les règles tendant à la maîtrise de l'occupation des sols édictées par le code de l'urbanisme ou les documents locaux d'urbanisme, même s'ils n'ont pour objet ou pour effet, à un stade où il n'existe pas encore de projet concret de construction, que de permettre le détachement d'un lot d'une unité foncière. Il appartient, en conséquence, à l'autorité compétente de refuser le permis d'aménager sollicité ou de s'opposer à la déclaration préalable notamment lorsque, compte tenu de ses caractéristiques telles qu'elles ressortent des pièces du dossier qui lui est soumis, un projet de lotissement permet l'implantation de constructions dont la compatibilité avec les règles d'urbanisme ne pourra être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d'urbanisme requises.

5. Les auteurs du plan local d'urbanisme de Saint-Etienne-du-Grès ont délimité une zone naturelle N au sein de laquelle ils ont distingué plusieurs secteurs dont le secteur Ns, défini comme un secteur naturel de services. L'article N2 du règlement de ce plan autorise, pour tous les secteurs de la zone N, les équipements publics ou d'intérêt collectif, compatibles avec les caractéristiques de la zone, en démontrant l'absence d'alternative sur un autre site et lorsqu'ils sont compatibles avec les possibilités de raccordement aux réseaux. Il autorise en outre, pour le secteur Ns uniquement, les aires de stationnement à condition qu'elles soient paysagères et perméables.

6. Le projet faisant l'objet de la déclaration préalable en litige porte sur la division en deux lots à bâtir de la parcelle cadastrée section B n° 2259, dont la surface est de 10 000 m². L'arrêté attaqué qui s'y oppose mentionne que le dossier ne précise pas les projets à venir sur ces lots à l'exception du fait qu'il s'agit d'une division en vue de construire. Il en déduit que le projet est incompatible avec les occupations du sol autorisées en secteur Ns. Cependant, la SARL SEC Immobilier n'était pas tenue d'apporter davantage de précisions dans sa déclaration préalable de division. Or, en dépit du fait que la parcelle est classée en zone orange du plan de prévention des risques d'inondation, les caractéristiques du projet de lotissement, telles qu'elles ressortent des pièces du dossier de déclaration, n'excluent ni l'implantation d'un équipement public ou d'intérêt collectif, compatible avec les caractéristiques de la zone, en l'absence d'alternative, ni la création d'une aire de stationnement paysagère. Dans ces conditions, en se fondant sur ce motif pour s'opposer à la déclaration préalable déposée par la SARL SEC Immobilier, le maire de Saint-Etienne-du-Grès a commis une erreur de droit.

7. La commune de Saint-Etienne-du-Grès fait valoir que la lettre citée au point 1 par laquelle la SARL SEC Immobilier a confirmé sa déclaration préalable n'a pas été signée par une personne n'ayant pas qualité pour la représenter dans la mesure où, bien qu'indiquant comme nom du signataire celui de Mme C..., elle comporterait la signature de M. A.... En l'absence de tout autre élément, la réalité de ces allégations n'est en tout état de cause pas établie. Ainsi, ce motif ne peut être substitué au motif initial sur lequel repose l'arrêté attaqué du 8 novembre 2018.

8. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible de fonder l'annulation, en l'état du dossier, de l'arrêté du 8 novembre 2018.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL SEC Immobilier est fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Lorsque le juge annule un refus d'autorisation ou une opposition à une déclaration après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux prescriptions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation ou de prendre une décision de non-opposition. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée, qui eu égard aux dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme demeurent applicables à la demande, interdisent de l'accueillir pour un motif que l'administration n'a pas relevé, ou que, par suite d'un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date du jugement y fait obstacle.

11. Aucune des dispositions ou des circonstances décrites au point précédent ne fait obstacle à ce que soit ordonné au maire de Saint-Etienne-du-Grès de prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable de division déposée par la SARL SEC Immobilier. Dès lors, il y a lieu de lui adresser une injonction non pas de délivrer une attestation de décision de non-opposition tacite mais de prendre une décision de non-opposition, en lui impartissant un délai d'un mois pour s'exécuter. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette mesure d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL SEC Immobilier, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la commune de Saint-Etienne-du-Grès au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Etienne-du-Grès une somme de 2 000 euros au titre des frais de même nature exposés par la SARL SEC Immobilier.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 février 2023 et l'arrêté du maire de Saint-Etienne-du-Grès du 8 octobre 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire de Saint-Etienne-du-Grès de prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable de division déposée par la SARL SEC Immobilier dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Saint-Etienne-du-Grès versera à la SARL SEC Immobilier une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL SEC Immobilier est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée SEC Immobilier et à la commune de Saint-Etienne-du-Grès.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2024, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Angéniol, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.

N° 23MA00860 2


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