Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la réduction de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2015, ainsi que des majorations correspondantes.
Par un jugement no 2004538 du 10 mai 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 juillet 2022 et le 17 octobre 2023, M. A..., représenté par le cabinet CMS Francis Lefèbvre avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 10 mai 2022 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;
3°) de mettre la somme de 5 000 euros à la charge de l'État en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la plus-value réalisée par la SNC Tomtip était imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, conformément au II de l'article 238 bis K du code général des impôts et à la doctrine BOI-BIC-BASE-10-20 du 11 mars 2013 ;
- il en va de même pour la moins-value ayant résulté de la dissolution de la SNC Tomtip ;
- les dispositions de l'article 150-0 A du code général des impôts ne sont pas applicables à la plus-value réalisée par la SNC Tomtip, dès lors qu'elle a été réalisée dans le cadre d'une activité industrielle ou commerciale et relève ainsi de l'article 39 duodecies du même code ;
- la moins-value ayant résulté de la dissolution de la SNC Tomtip s'élève à 114 189 euros, de sorte que la plus-value nette imposable s'élève à 44 348 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la dissolution de la SNC Tomtip est à l'origine d'un mali de liquidation, qui ne constitue pas une moins-value de même nature que la plus-value retirée par la société de la cession de son fonds de commerce ;
- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mérenne,
- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,
- et les observations de Me Le Camus, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... détenait 76 des 200 parts sociales de la société en nom collectif " le Tomtip ", qui exploitait le fonds de commerce d'un bar-tabac à Marseille. La SNC le Tomtip a cédé son fonds de commerce de bar, exploitation d'appareils automatiques, auquel était annexée la gérance d'un débit de tabac le 10 mars 2015, pour le prix de 500 000 euros. La déclaration de bénéfice industriel et commercial souscrite au titre de sa cessation d'activité a fait état de la réalisation d'une plus-value à long-terme d'un montant 447 203 euros, imposable à hauteur de 169 937 euros entre les mains de M. B... A..., associé non gérant. Puis, la société a été dissoute le 31 mars 2015, et la clôture des opérations de liquidation est intervenue le 3 juin 2015. Suite à un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a imposé la plus-value résultant de cette opération entre les mains de M. A... pour un montant, après prise en compte d'une commission d'agence, de 158 537 euros, et l'a assujetti aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux correspondantes. M. A... fait appel du jugement du 10 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la réduction de ces impositions et des majorations correspondantes.
2. D'une part, l'article 8 du code général des impôts prévoit que : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. " Le II de l'article 238 bis K du code général des impôts ajoute que dans les cas ne relevant pas du I du même article, " la part de bénéfice ainsi que les profits résultant de la cession des droits sociaux sont déterminés et imposés en tenant compte de la nature de l'activité et du montant des recettes de la société ou du groupement. "
3. D'autre part, l'article 39 quindecies du même code dispose, dans sa rédaction applicable, que : " I. 1. Sous réserve des dispositions des articles 41,151 octies et 210 A à 210 C, le montant net des plus-values à long terme fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 16 %. / Il s'entend de l'excédent de ces plus-values sur les moins-values de même nature constatées au cours du même exercice. "
4. M. A..., en tant qu'associé de la SNC Tomtip, n'entrait pas dans l'un des cas prévus au I de l'article 238 bis K du code général des impôts. La part de bénéfice ainsi que les profits résultant de la cession de ses droits sociaux dans la société devaient donc être imposés, conformément au II du même article, en fonction de l'activité de la SNC Tomtip, qui est de nature commerciale. La dissolution de la SNC Tomtip a eu pour effet de transférer son actif dans le patrimoine de ses associés, dont M. A..., en contrepartie de l'annulation des parts sociales. Cette annulation a constitué une cession de droits sociaux au sens du II de l'article 238 bis K du code général des impôts. Par suite, la plus-value réalisée par M. A... à la suite de la liquidation-partage de la société, égale à la différence entre la valeur des biens sociaux qui lui ont été attribués lors de la dissolution de la société et le prix d'acquisition de ses parts sociales, était imposable entre les mains de celui-ci sur le fondement des dispositions précitées.
5. Sur le fondement de l'article 39 quindecies du code général des impôts, l'administration a imposé, comme élément du revenu de M. A..., dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, la quote-part de la plus-value de long terme résultant de la vente, par la SNC Tomtip, de son fonds de commerce de bar-tabac, distribuée entre les mains de M. A... via la quote-part du boni de liquidation de la société à l'issue de son exercice de clôture, sans procéder à la déduction du prix d'acquisition des parts sociales de M. A.... Contrairement à ce que soutient le ministre en défense, la demande de M. A... ne porte pas sur la prise en compte d'un mali ou d'un autre boni de liquidation issu de la même société, mais sur la déduction du prix d'acquisition de ses parts sociales, au titre de la perte résultant de l'annulation de ces parts du fait de la dissolution de la société.
6. La déduction du prix d'acquisition des parts sociales est un élément de la détermination de la plus-value imposable. Elle ne constitue pas une moins-value résultant d'une opération distincte, pour laquelle l'administration aurait utilement pu opposer les dispositions du deuxième alinéa du I.1 de l'article 39 quindecies du code général des impôts, citées au point 3.
7. En outre, et ainsi qu'il a été dit au point 4, la quote-part des bénéfices sociaux est imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, ainsi que l'a d'ailleurs considéré à bon droit l'administration fiscale au cours de la procédure d'imposition. L'administration ne peut donc utilement invoquer les articles 150-0-A et suivants du code général des impôts, qui ne sont pas applicables aux plus-values relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.
8. Il suit de là que M. A... fait valoir à bon droit que la valeur d'acquisition des parts sociales de la SNC Tomtip doit être déduite de la plus-value imposée, pour le montant non contesté de 114 189 euros.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015, ainsi que des majorations correspondantes.
Sur les frais liés au litige :
10. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros à M. A... au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 10 mai 2022 du tribunal administratif de Marseille est annulé.
Article 2 : La base de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux fixée à M. A... au titre de l'année 2015 est réduite d'une somme de 114 189 euros.
Article 3 : M. A... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015 correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 2, ainsi que des majorations correspondantes.
Article 4 : L'État versera la somme de 2 000 euros à M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée pour information à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 20 juin 2024, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- M. Platillero, président-assesseur,
- M. Mérenne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.
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No 22MA01936