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28/06/2024 | FRANCE | N°22MA00458

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 28 juin 2024, 22MA00458


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nice de d'annuler l'arrêté de péril imminent pris par le maire de Vallauris le 8 octobre 2018 portant mise en demeure du propriétaire de l'immeuble sis 126 chemin des Clos (parcelle cadastrée section AW n° 178 et 593) de prendre toutes mesures pour garantir la sécurité publique et mettre fin au péril imminent en procédant à l'étaiement des planchers du 2ème étage sous quinze jours et à la réfection du plancher sous tr

ois mois à compter de la notification de l'arrêté, et sous peine d'y procéder d'office et à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nice de d'annuler l'arrêté de péril imminent pris par le maire de Vallauris le 8 octobre 2018 portant mise en demeure du propriétaire de l'immeuble sis 126 chemin des Clos (parcelle cadastrée section AW n° 178 et 593) de prendre toutes mesures pour garantir la sécurité publique et mettre fin au péril imminent en procédant à l'étaiement des planchers du 2ème étage sous quinze jours et à la réfection du plancher sous trois mois à compter de la notification de l'arrêté, et sous peine d'y procéder d'office et à ses frais, ensemble la décision du maire de Vallauris rejetant le recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté, de condamner la commune de Vallauris à la prise en charge des frais découlant de sa décision soit : 18 000 euros au titre des frais d'étaiement inutiles, 1 800 euros au titre des honoraires de l'expert C..., 1 656,60 euros au titre des frais d'expertise, 28 920 euros au titre de la perte d'exploitation ; de condamner la commune de Vallauris à lui payer la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral et d'enjoindre au maire de Vallauris de prononcer la levée de l'arrêté de péril imminent du 8 octobre 2018.

Par un jugement n° 1902612 du 7 décembre 2021, le tribunal administratif de Nice a abrogé l'arrêté du 8 octobre 2018 en tant qu'il prescrit la réalisation par un bureau d'études de structure agréé d'un plan d'étaiement et en tant qu'il prescrit de procéder à l'étaiement des planchers du 2ème étage selon le plan établi, déchargé M. D... de l'obligation de payer la somme de 6 000 euros mise à sa charge par le titre exécutoire n° 356 émis à son encontre le 14 mars 2019, mis à la charge de la commune de Vallauris et de M. D... les frais et honoraires de l'expertise ordonnée par la présidente de la cour administrative d'appel le 17 mars 2021, liquidés et taxés à la somme de 4 221,12 euros, à hauteur, chacun, de la somme de 2 110,56 euros, et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 février 2022, M. D..., représenté par Me Romeo, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Nice du 7 décembre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté de péril imminent pris par le maire de Vallauris le 8 octobre 2018 ;

3°) d'ordonner la levée de l'arrêté de péril imminent du 8 octobre 2018 ;

4°) de condamner la commune de Vallauris à la prise en charge des frais découlant de sa décision soit : 18 000 euros au titre des frais d'étaiement inutiles, 1 800 euros au titre des honoraires de l'expert C..., 1 656,60 euros au titre des frais d'expertise et 28 920 euros au titre de la perte d'exploitation ;

5°) de le décharger du paiement desdites sommes ;

6°) de condamner la commune de Vallauris à lui payer la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

7°) de mettre à la charge de la commune de Vallauris la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que la commune de Vallauris a fait procéder d'office à un étaiement du plancher du R+2 de son immeuble ;

- c'est à tort que la commune exige des travaux de renforcement dès lors que ceux-ci ne sont pas nécessaires ;

- il est fondé à demander l'indemnisation des préjudices qu'il a subis, à savoir :

* 18 000 euros au titre des frais d'étaiement auquel la commune a procédé d'office ;

* 3 456,60 euros au titre des frais d'expertise qui ont été mis à sa charge ;

* 28 920 euros au titre des pertes de loyers ;

* 50 000 euros au titre du préjudice moral.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2022, la commune de Vallauris, représentée par la SELARL Fayol et Associés, agissant par Me Blanc, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête d'appel de M. D... ;

A titre incident :

2°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Nice du 7 décembre 2021 en ce qu'il a abrogé partiellement l'arrêté du 8 octobre 2018 ;

3°) de réformer ce jugement en ce qu'il a déchargé M. D... de l'obligation de payer la somme de 6 000 euros ;

4°) de réformer ce jugement en ce qu'il a mis les frais et honoraires d'expertise pour moitié à sa charge ;

Statuant à nouveau :

5°) de rejeter toutes les demandes formées par M. D... ;

6°) de mettre à la charge de M. D... l'intégralité des frais et honoraires d'expertise ;

7°) de mettre à la charge de M. D... la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête n'est pas motivée pour l'application des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative et elle est, de ce fait, irrecevable ;

- les conclusions indemnitaires sont irrecevables faute d'avoir été précédées d'une demande indemnitaire préalable, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges ;

- les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de péril imminent du 8 octobre 2018 étaient tardives ;

- la contestation des titres exécutoires émis le 22 novembre 2018 et le 14 mars 2019 était tardive ;

- un péril grave et imminent a été constaté ;

- les travaux entrepris par la mairie étaient justifiés et elle a dû réaliser le plan d'étaiement, l'étaiement et le relogement des locataires ;

- M. D... n'est pas fondé à demander la levée de l'arrêté de péril dès lors qu'il n'a pas procédé à l'ensemble des travaux prescrits ;

- les travaux d'étaiement entre le 2ème et le 3ème étage ont été réalisés de manière préventive, conformément aux préconisations de l'expert ;

- le préjudice de perte locative n'est pas réel, direct et certain ;

- le préjudice moral est inexistant ;

- les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rigaud,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Gontard, représentant la commune de Vallauris.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de Vallauris a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nice qui a prescrit, par une ordonnance du 4 octobre 2018, une expertise aux fins de décrire la nature et l'étendue des désordres affectant l'immeuble sis 126 chemin des Clos cadastré section AW n°s 178 et 593 à Vallauris. L'expert désigné a déposé un rapport le 6 octobre 2018. Par un arrêté du maire de Vallauris du 8 octobre 2018, l'immeuble a été déclaré en état de péril grave et imminent. En l'absence d'intervention du propriétaire, la commune de Vallauris a effectué d'office les travaux prescrits et a émis à l'encontre de M. D... un titre exécutoire n° 356 daté du 14 mars 2019 d'un montant de 18 000 euros en vue du recouvrement de la somme correspondant aux coût des travaux réalisés par elle, un titre exécutoire n° 355 du 14 mars 2019 d'un montant de 1 800 euros en vue du recouvrement de la somme correspondant aux honoraires correspondant aux honoraires du bureau d'études de structure agréé et un titre exécutoire n° 2907 daté du 22 novembre 2018 d'un montant de 1 656,60 euros en vue du recouvrement de la somme correspondant aux frais d'expertise. M. D..., propriétaire de l'immeuble, relève appel du jugement du 7 décembre 2021 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il n'a pas prononcé l'annulation totale de l'arrêté du 8 octobre 2018, en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses conclusions indemnitaires et en tant qu'il n'a pas enjoint au maire de Vallauris de prononcer la levée de cet arrêté. Par un appel incident, la commune de Vallauris demande à la cour de réformer ce jugement en tant qu'il a abrogé partiellement l'arrêté du 8 octobre 2018, déchargé M. D... de l'obligation de payer la somme de 6 000 euros et qu'il a mis les frais et honoraires d'expertise pour moitié à sa charge.

2. En demandant la condamnation de la commune de Vallauris à la prise en charge des frais mis à sa charge par trois titres exécutoires émis à son encontre le 22 novembre 2018 et le 14 mars 2019, M. D... doit être regardé comme demandant à la cour d'annuler ces titres exécutoires et de prononcer la décharge de l'obligation de payer ces sommes.

Sur la recevabilité de la requête :

3. Une requête d'appel qui se borne à reproduire intégralement et exclusivement le texte du mémoire de première instance ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, en vertu desquelles la requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des faits et moyens ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge et ne peut être régularisée que jusqu'à l'expiration du délai d'appel. En l'espèce et contrairement à ce que fait valoir la commune de Vallauris, le requérant ne se borne pas à reprendre intégralement et exclusivement ses écritures de première instance mais critique le bien-fondé du jugement du tribunal administratif de Nice, en particulier en soutenant que la question de savoir si le fléchissement des poutres des planchers d'un immeuble de plus de cent ans représente à lui-seul un péril voire un péril imminent en l'absence de toute fragilisation de la structure elle-même de l'immeuble. La fin de non-recevoir opposée par la commune de Vallauris doit donc être écartée.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

4. La commune de Vallauris fait valoir que M. D... a formé, dans le délai de recours contentieux, un premier recours gracieux contre l'arrêté de péril imminent du 8 octobre 2018 par courrier du 7 décembre 2018, adressé par lettre recommandée avec accusé de réception le 10 décembre suivant, que ce recours gracieux a été rejeté par courrier du 5 février 2019, si bien que l'exercice d'un second recours gracieux par courrier électronique du 6 mars 2019, expressément rejeté par courrier du 29 mars 2019, n'a pas eu pour effet de proroger le délai de recours contentieux et que la requête enregistrée par le greffe du tribunal administratif de Nice le 28 mai 2019 était tardive. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que la décision de rejet du premier recours gracieux, en date du 5 février 2019, qui n'est pas versée aux débats, mentionnait les voies et délais de recours et aurait ainsi fait courir le délai de recours contentieux à l'encontre de l'arrêté du 8 octobre 2018. Dans ces conditions, un tel délai, qui doit être regardé comme ayant commencé à courir à compter de la date de notification du courrier du 29 mars 2019, lequel mentionnait quant à lui les voies et délais de recours, n'était pas expiré le 28 mai 2019, date à laquelle la requête de M. D... a été enregistrée par le greffe du tribunal administratif de Nice. Par suite, aucune tardiveté ne peut être opposée, en application des dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, aux conclusions présentées le 28 mai 2019 par M. D... contre l'arrêté du 8 octobre 2018.

5. Aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, l'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. Si la commune de Vallauris fait valoir que les conclusions de M. D... dirigées contre les titres exécutoires émis à son encontre le 22 novembre 2018 et le 14 mars 2019 étaient tardives, elle n'établit toutefois pas la date à laquelle ces titres ont été régulièrement notifiés à M. D.... Par suite, aucune tardiveté ne peut être opposée aux conclusions présentées le 28 mai 2019 par M. D... contre les titres exécutoires émis à son encontre le 22 novembre 2018 et le 14 mars 2019.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué du tribunal administratif de Nice du 7 décembre 2021 :

En ce qui concerne l'arrêté du maire de Vallauris du 8 octobre 2018 :

6. Aux termes de l'article L. 511-3 alors en vigueur du code de la construction et de l'habitation : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. (...) ". La contestation d'un arrêté de péril imminent, pris sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation relève du contentieux de pleine juridiction. Par suite, la légalité d'un tel arrêté s'apprécie à la date à laquelle le juge se prononce.

7. Par le rapport d'expertise du 6 octobre 2018, l'expert désigné par ordonnance du tribunal administratif du 4 octobre 2018 a constaté le péril imminent affectant l'immeuble appartenant à M. D... et préconisé les travaux à réaliser en vue de la mise en sécurité du bâtiment sinistré. Par un arrêté de péril imminent du 8 octobre 2018, le maire de Vallauris a mis M. D... en demeure de prendre, dans un délai de quinze jours, les mesures conservatoires nécessaires à la sécurisation de l'immeuble, telles que préconisées par l'expert dans son rapport, à savoir la réalisation d'un plan d'étaiement par un bureau d'études et l'étaiement des planchers du 2ème étage selon le plan établi et, dans un délai de trois mois, d'enlever la bâche de protection, de purger l'enduit en sous face du plancher haut du 1er étage, d'enlever les lattis de bois pour découvrir les poutres porteuses et leur état, d'enlever le plancher du carrelage et de la chape, en fonction de l'état des poutres, de procéder à leur réfection par moisage ou de remplacer les poutres porteuses primaires et secondaires, de procéder à la réfection de l'enduit et de la peinture en sous face du plancher haut du premier étage et de procéder à la réfection et à la réalisation d'une chape en mortier allégé et à la pose de carrelage sur le plancher du 2ème étage. En l'absence de réalisation des travaux prescrits par le propriétaire, le maire de Vallauris les a fait exécuter.

8. Pour contester les conclusions du rapport de l'expert M. C... du 6 octobre 2018, M. D... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, de prescrire une expertise aux fins de déterminer si le plancher du 2ème étage de l'immeuble présentait des risques pour sa stabilité, de nature à justifier un péril grave. Par une ordonnance du 16 janvier 2020, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté sa demande. Par une ordonnance du 5 juin 2020, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a annulé l'ordonnance du 16 janvier 2020, ordonné l'expertise sollicitée et mandaté M. B... en qualité d'expert, avec pour mission de décrire l'état des planchers du 2ème étage, objets de l'arrêté de péril imminent du maire de Vallauris du 8 octobre 2018, donner un avis motivé sur les travaux qui sont nécessaires pour remédier aux désordres et préciser, en particulier, si les poutres supportant ces planchers doivent, en tout ou en partie, faire l'objet d'une réfection par moisage ou d'un remplacement.

9. Il résulte du rapport d'expertise du 6 octobre 2018, dont les constats ne sont utilement contredits ni par le procès-verbal de constat d'huissier établi le 3 décembre 2018, ni par les rapports établis par la société Bec Richaux et par le bureau d'études Giudice, que la stabilité du plancher du 2ème étage de l'immeuble n'est pas garantie, menaçant de tomber, que les logements étant occupés " des morceaux d'enduit sont déjà tombés et peuvent finir de tomber ", que les poutres fléchies peuvent céder, qu'il existe ainsi un péril grave sur le plancher du 2ème étage de l'immeuble qu'il était nécessaire d'étayer provisoirement et conforter au niveau de la structure en moisant les poutres ancrées dans les planchers ou en changeant les poutres trop abimées, et qu'il était nécessaire de missionner un bureau d'études afin de calculer et dimensionner l'étaiement nécessaire à la tenue de ce plancher. La circonstance que la construction de l'immeuble date du début du XXème siècle est sans incidence sur les normes de construction applicables aux immeubles en vue d'en assurer la solidité et la stabilité. Dans ces conditions, M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu le péril grave et imminent caractérisant l'état de l'immeuble ainsi que le caractère nécessaire des travaux dont la réalisation a été ordonnée par l'arrêté du 8 octobre 2018.

10. En revanche, il résulte du rapport d'expertise de M. B... du 1er mars 2019 que les travaux réalisés d'office par le maire de Vallauris concernant l'étaiement du plancher en R+2/R+3 de l'immeuble n'étaient pas nécessaires pour remédier au péril imminent tel que décrit par le rapport d'expertise du 6 octobre 2018.

11. Il résulte du rapport d'expertise établi par M. B... le 1er mars 2019 que les travaux prescrits dans un délai de quinze jours par l'arrêté du 8 octobre 2018 s'agissant de l'étaiement des planchers du 2ème étage, et la réalisation, dans le même délai d'un plan d'étaiement par un bureau d'études de structure agréé, ont été entièrement réalisés d'office par le maire de Vallauris. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont abrogé l'arrêté en litige en ce qu'il prescrit la réalisation des travaux.

En ce qui concerne le titre exécutoire n° 356 :

12. Aux termes de l'article R. 511-5 du code de la construction et de l'habitation : " La créance de la commune sur les propriétaires ou exploitants née de l'exécution d'office des travaux prescrits en application des articles L. 511-2 et L. 511-3 comprend le coût de l'ensemble des mesures que cette exécution a rendu nécessaires, notamment celui des travaux destinés à assurer la sécurité de l'ouvrage ou celle des bâtiments mitoyens, les frais exposés par la commune agissant en qualité de maître d'ouvrage public et, le cas échéant, la rémunération de l'expert nommé par le juge administratif. "

13. Ainsi qu'il a été dit au point 10, les travaux d'étaiement des planchers du R+2/R+3 n'étaient pas nécessaires. En outre, il est constant que l'article 1er de l'arrêté de péril imminent prévoyait le seul étaiement des planchers du R+2. Par suite, la commune de Vallauris n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont prononcé la décharge de M. D... de l'obligation de payer la somme mise à sa charge au seul titre des travaux d'étaiement des planchers du R+2/R+3, établis à la somme de 6 000 euros.

En ce qui concerne le titre exécutoire n° 2907 :

14. Le maire qui, s'étant substitué au propriétaire ou aux copropriétaires défaillants, a fait usage des pouvoirs d'exécution d'office qui lui sont reconnus par les dispositions de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, est alors en droit de rendre débitrice de la créance que la collectivité détient la personne qui a la qualité de propriétaire ou de copropriétaire de l'immeuble à la date d'expiration du délai imparti par la mise en demeure d'exécuter les travaux. En revanche, si le propriétaire de l'immeuble a réalisé les mesures prescrites par l'arrêté de péril imminent, les dispositions précitées n'autorisent pas la collectivité à procéder au recouvrement sur celui-ci d'une somme correspondant aux frais d'expertise et elle supporte donc définitivement les frais d'expertise mis à sa charge par la juridiction qui l'a ordonnée.

15. Par l'ordonnance du 4 octobre 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, dans le cadre d'une procédure de péril imminent, désigné un expert ayant pour mission d'examiner l'immeuble appartenant à M. D.... Par une ordonnance du 10 octobre 2018, le président du tribunal administratif a taxé et liquidé les frais d'expertise à la somme de 1 656,60 euros. Le 22 novembre 2018, la commune de Vallauris a émis un titre exécutoire à l'encontre de M. D... d'un montant de 1 656,60 euros, portant sur le " remboursement " des frais de l'expertise.

16. Il est constant que M. D... n'a pas exécuté les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité de l'immeuble dans les délais impartis par l'arrêté du 8 octobre 2018. Dès lors, la commune pouvait légalement émettre un titre exécutoire afin de recouvrer auprès de M. D... tout ou partie de ces frais.

En ce qui concerne le titre exécutoire n° 355 :

17. Par l'arrêté du 8 octobre 2018, M. D... a été mis en demeure de faire procéder à la réalisation d'un plan d'étaiement par un bureau d'études de structure agréé. M. D... n'établit pas ni même n'allègue qu'il aurait fait réaliser le plan d'étaiement. Dès lors, c'est à bon droit que la commune de Vallauris a dû procéder à la réalisation d'office de la mesure prévue par l'arrêté.

18. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 800 euros mise à sa charge par le titre exécutoire n° 355 émis le 14 mars 2019 et correspondant aux honoraires du bureau d'études Revea qui a procédé au plan d'étaiement.

En ce qui concerne les demandes indemnitaires :

19. Les premiers juges ont rejeté les demandes indemnitaires de M. D... comme étant irrecevables en se fondant sur l'absence de demande indemnitaire et de décision de la commune rejetant une demande indemnitaire. Dans son appel contre le jugement attaqué, M. D... se borne à demander l'indemnisation de la perte de loyers et de son préjudice moral sans contester l'irrecevabilité retenue par le tribunal administratif. Le jugement attaqué doit ainsi être confirmé en tant qu'il rejette ces conclusions.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

20. Le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions présentées à ce titre doivent donc être rejetées.

Sur les dépens :

21. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'État. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) ".

22. Par une ordonnance du 17 mars 2021, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a fixé les frais de l'expertise à la somme de 4 221,12 euros et les a mis à la charge de M. D.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions précitées et de mettre à la charge de la commune de Vallauris la moitié des frais d'expertise liquidés et taxés à un montant de 4 221,12 euros, soit la somme de 2 110,56 euros et à la charge définitive de M. D... la moitié des frais d'expertise, soit la somme de 2 110, 56 euros. La commune de Vallauris n'est dès lors pas fondée à soutenir que les premiers juges ont, à tort, mis à sa charge la moitié des frais et horaires d'expertise.

Sur les frais d'instance :

23. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de laisser à chacune des parties la charge des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Vallauris sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et à la commune de Vallauris.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Cécile Fedi, présidente de chambre,

- Mme Lison Rigaud, présidente assesseure,

- M. Jérôme Mahmouti, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juin 2024.

2

N° 22MA00458


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00458
Date de la décision : 28/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-001 Police. - Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: Mme Lison RIGAUD
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : ROMEO

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-28;22ma00458 ?
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