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14/06/2024 | FRANCE | N°23MA01746

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 14 juin 2024, 23MA01746


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C..., épouse B..., a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 17 février 2021 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de visa de long séjour en qualité de conjointe de français, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un visa long séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice

administrative.





Par un jugement n° 2102241 du 11 mai 2023, le tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C..., épouse B..., a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 17 février 2021 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de visa de long séjour en qualité de conjointe de français, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un visa long séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2102241 du 11 mai 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de Mme C... épouse B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2023, Mme A... C... épouse B..., représentée par Me Darmon, doit être regardée comme demandant à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 17 février 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de conjointe de français dans un délai de trente jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son mariage, célébré le 26 mars 2019 en Tunisie, a été retranscrit sur les registres de l'état civil français ;

- un refus de visa de long séjour ne pouvait, eu égard aux dispositions du 4ème alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui être opposé ; elle ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;

- la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues.

La procédure a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent,

- et les observations de Me Darmon pour Mme C... épouse B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., née en 1988, de nationalité tunisienne, a épousé, le 26 mars 2019 en Tunisie, M. B..., de nationalité française. Elle a présenté, le 8 septembre 2020, auprès des services de la préfecture des Alpes-Maritimes, une demande de visa de long séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français. Par une décision du 17 février 2021, le préfet a rejeté sa demande au motif de l'absence de mariage en France. Mme B... interjette appel du jugement du 11 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de cette décision ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " La demande d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande (...) Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. / Les autorités diplomatiques et consulaires sont tenues de statuer sur la demande de visa de long séjour formée par le conjoint de Français dans les meilleurs délais. / Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. / Dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, par dérogation à l'article L. 311-1, le visa délivré pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois au conjoint d'un ressortissant français donne à son titulaire les droits attachés à la carte de séjour temporaire prévue au 4° de l'article L. 313-11 pour une durée d'un an ".

3. Les dispositions précitées du sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettent à un étranger marié à un ressortissant français de saisir d'une demande de visa de long séjour le préfet du département de son lieu de résidence, compétent pour l'examen d'une demande de titre de séjour, aux lieu et place des autorités diplomatiques et consulaires, à la condition, d'une part, d'une entrée régulière en France, d'autre part, d'un mariage célébré en France et enfin, d'un séjour en France depuis plus de six mois avec le conjoint.

4. Il ressort des pièces du dossier que, bien que le mariage de la requérante ait été, ainsi qu'elle le fait valoir, retranscrit sur les registres de l'état civil français, il n'a pas été célébré en France mais en Tunisie. Pour ce seul motif, et quand bien même la circonstance qu'elle représenterait une menace à l'ordre public ne saurait lui être opposée, le préfet des Alpes-Maritimes a pu légalement rejeter la demande de visa de long séjour, présentée auprès de ses services, par l'intéressée.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Il ressort des pièces du dossier, éclairées par les déclarations de la requérante à l'audience, qu'à la suite de son mariage, le 26 mars 2019, Mme B... avait le choix de ne pas s'établir en France et circulait entre les deux pays sous couvert d'un visa autorisant des entrées multiples pour des séjours limités à 90 jours. Elle s'est maintenue en France à la suite de sa dernière entrée le 1er mars 2020, à la faveur de la pandémie de Covid 19. Si elle fait valoir que sa présence est désormais indispensable auprès de son époux, âgé de 78 ans à la date de la décision attaquée et qui a été victime d'un accident cardiaque le 10 décembre 2020, cette circonstance ne saurait suffire à établir que la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale eu égard aux buts en vue desquels elle a été prise, d'autant que Mme B... dispose de la faculté de demander la délivrance d'une carte temporaire de séjour sur le fondement de l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celui tiré de ce que la décision litigieuse serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle doivent être écartés.

7. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est dépourvu de toute précision permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de la décision du 17 février 2021 ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction.

Sur les frais d'instance :

9. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par Mme B... doivent, dès lors, être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... épouse B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 juin 2024.

N° 23MA01746 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01746
Date de la décision : 14/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005-01 Étrangers. - Entrée en France. - Visas.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : DARMON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-14;23ma01746 ?
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