Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre des années 2013 à 2015, ainsi que des majorations correspondantes.
Par un jugement no 2006152 du 30 novembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a réduit de 155 555 euros la base imposable de M. A... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2013, déchargé la cotisation d'impôt sur le revenu en résultant et les majorations correspondantes, et rejeté le surplus de ses conclusions.
Procédure devant la cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 31 janvier, 8 septembre et 21 novembre 2022, M. A..., représenté par le cabinet Fidal, demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 3 du jugement du 30 novembre 2021 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et des majorations restant en litige ;
3°) de mettre la somme de 5 000 euros à la charge de l'État en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'article L. 50 du livre des procédures fiscales faisait obstacle à l'envoi de nouvelles propositions de rectification après l'examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2013 à 2015 ;
- la proposition de rectification du 17 décembre 2018 est insuffisamment motivée, en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- l'administration ne pouvait réintégrer au bénéfice imposable de la SARL RPPC le solde créditeur de son compte courant d'associé à l'ouverture de l'exercice 2013 ;
- les sommes taxées comme revenus d'origine indéterminée pour l'année 2015 correspondent en réalité à des virements à partir de son compte courant d'associé ouvert dans les comptes de la société Stage Permis d'Exploitation ;
- les versements effectués par la société Protagoras au titre des années 2014 et 2015 relevaient de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; il est en droit de déduire les charges afférentes ;
- la somme de 51 600 euros inscrite le 2 janvier 2015 au crédit de son compte courant d'associé dans la SAS RPPC correspond au remboursement d'une facture de la société Univers Demain qu'il avait personnellement acquittée ;
- la somme de 186 000 euros inscrite au crédit de son compte courant d'associé dans la SAS RPPC correspond à des prestations réglées par la société Protagoras à la SAS Point de Permis ;
- il renvoie aux moyens développés par la SAS RPPC dans l'instance n° 22MA00360 ;
- les majorations sont insuffisamment motivées ;
- elles sont infondées.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 août, 21 octobre et 2 décembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mérenne,
- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2013 à 2015, à la suite duquel l'administration fiscale lui a adressé une première proposition de rectification le 16 décembre 2016, puis une seconde proposition de rectification le 6 juillet 2017. A l'issue de la vérification de la comptabilité de la SAS RPPC, dont il est l'associé majoritaire, l'administration lui a adressé une troisième rectification le 17 décembre 2018. Par un jugement du 30 novembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a réduit de 155 555 euros la base imposable de M. A... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2013, déchargé la cotisation d'impôt sur le revenu en résultant et les majorations correspondantes, et rejeté le surplus de ses conclusions. M. A... fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu, l'administration des impôts ne peut plus procéder à des rectifications pour la même période et pour le même impôt, à moins que le contribuable ne lui ait fourni des éléments incomplets ou inexacts ou que l'administration n'ait dressé un procès-verbal de flagrance fiscale dans les conditions prévues à l'article L. 16-0 BA, au titre d'une période postérieure. "
3. Au cours de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, l'administration a demandé en vain à M. A... de lui faire connaître les références précises de l'ensemble de ses comptes financiers, y compris les comptes courants d'associés ouverts dans la comptabilité de sociétés. S'agissant du compte courant d'associé ouvert dans la comptabilité de la SAS RPPC, M. A..., contrairement à ce qu'il soutient, n'a pas répondu à cette demande par un courrier du 2 juin 2017, ce document se bornant à discuter de divers mouvements bancaires, à indiquer, s'agissant de l'année 2015, que les montants imposés correspondent à des virements de compte à compte, ou des rachats de produits financiers non imposables, et à mentionner qu'un délai supplémentaire lui est nécessaire pour justifier du caractère non imposable d'autres mouvements bancaires. L'existence de ce compte courant n'était pas davantage révélée par des virements bancaires émanant de la société. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales, en ce qui concerne les sommes inscrites sur ce compte au titre de l'année 2015, doit être écarté.
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.
5. La proposition de rectification du 17 décembre 2018 mentionne les principes et les modalités des rectifications envisagées, les impôts concernés, les années d'imposition, et les motifs sur lesquels l'administration fiscale s'est fondée pour déterminer les impositions en litige, y compris pour les rehaussements de prélèvements sociaux. Elle indique les sommes inscrites au crédit du compte courant de M. A... dans la comptabilité de la SAS RPPC et l'origine qu'elle leur prête, en mettant ainsi à même l'intéressé de formuler ses observations sur les points en question. Cette proposition de rectification est suffisamment motivée.
Sur le bien-fondé des impositions au titre de l'année 2013 :
6. Aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. " Aux termes du a. de l'article 111 : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. "
7. Aux termes du premier paragraphe du 4 bis de l'article 38 du même code : " Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. "
8. Après la vérification de comptabilité de la SARL RPPC, le vérificateur a écarté comme injustifié le report à nouveau, sur l'exercice 2013, de la somme de 91 135,24 euros au crédit du compte courant de M. A... ouvert dans la comptabilité de la société. En procédant ainsi, il a rectifié un passif injustifié figurant au bilan du premier exercice non prescrit de la société concernée, sans corriger l'actif net d'ouverture de cet exercice. Le moyen tiré de la méconnaissance du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts doit donc, ainsi que l'a relevé le tribunal administratif au point 7 du jugement attaqué, qui est suffisamment motivé sur ce point, être écarté. En outre, et ainsi que l'a déjà jugé le tribunal administratif, si le requérant, pour justifier la somme reportée, soutient qu'il aurait pris en charge le règlement de fournisseurs de la société, il n'en apporte pas la preuve. Par suite, l'administration a valablement imposé cette somme sur le fondement du a. de l'article 111 du code général des impôts.
Sur le bien-fondé des impositions au titre des années 2014 et 2015 :
En ce qui concerne les rémunérations occultes :
9. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ".
10. L'administration a réintégré comme rémunérations occultes, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les sommes versées par la SARL Protagoras sur un compte personnel de M. A..., à hauteur de 631 624,60 euros en 2014 et 160 510 euros en 2015, correspondant à des factures émises par la société Brittex Services, qui avait cessé son activité le 6 janvier 2014. D'une part, le requérant ne conteste pas que les sommes en question revêtaient le caractère de rémunérations et d'avantages occultes au sens du c. de l'article 111 du code général des impôts. Par suite, elles étaient imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, dont relèvent les revenus distribués, et non dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. D'autre part, se bornant à renvoyer à un tableau établi par ses soins, où figurent des dépenses diverses, M. A... n'établit pas avoir personnellement supporté, dans le cadre des circuits qu'il a mis en place, des charges déductibles afférentes à cette activité occulte.
En ce qui concerne les revenus distribués :
11. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1 Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ".
12. A la suite de la vérification de comptabilité de la SAS RPPC, l'administration a imposé en tant que revenu distribué une première somme de 51 600 euros inscrite au compte courant d'associé de M. A... le 2 janvier 2015. M. A... fait valoir que cette somme correspond au remboursement d'une facture de la société Univers Demain qu'il aurait personnellement prise en charge. Toutefois, il n'établit pas davantage en appel que devant les premiers juges la réalité de cette affirmation, d'autant plus que la société Univers Demain avait été radiée du registre du commerce et des sociétés. En se bornant à renvoyer à la facture de cette société, M. A... n'apporte pas la preuve, qui lui incombe de ce que ce crédit ne correspondrait pas à un revenu distribué sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.
13. L'administration a également imposé un ensemble de crédits porté au compte courant d'associé de M. A... dans les comptes de la SAS RPPC entre le 30 octobre et le 30 novembre 2015 pour un montant total de 186 000 euros. Le requérant conteste seulement l'origine des recettes de la SAS RPPC. Il ne justifie pas de l'origine des sommes mises personnellement à sa disposition par la société via son compte courant d'associé. Il n'apporte donc pas la preuve que les crédits correspondant ne correspondraient pas à des revenus distribués sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :
14. Le requérant soutient que les crédits bancaires, ayant fait l'objet d'une taxation d'office sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales à hauteur de 42 000 euros au titre de l'année 2015, correspondent à des virements depuis son compte courant d'associé ouvert dans les comptes de la SAS Stage Permis d'Exploitation, et que ces virements proviennent eux-mêmes du reversement de sommes versées par la SCI Rocco, dont il est associé à hauteur de 30 % du capital. Il fait valoir qu'il aurait personnellement détenu cette somme dans le cadre d'un compte ouvert à son nom dans la comptabilité de la SCI Rocco, sans en apporter la preuve, l'extrait du grand livre de la société SAS Stage Permis d'Exploitation étant à cet égard insuffisant. La nature de ces versements restant indéterminée, c'est à bon droit que les sommes concernées ont été taxées sur le fondement de l'article L 69 du livre des procédures fiscales.
Sur les majorations :
15. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
16. D'une part, la proposition de rectification du 29 mai 2018 qui applique une majoration de 40 % aux rectifications relatives aux revenus de capitaux mobiliers, justifie cette pénalité par les circonstances que M. A... s'est abstenu de fournir au cours de la procédure son compte courant d'associé, qui n'a été découvert que postérieurement à la vérification de comptabilité de la SAS RPPC, que les sommes non justifiées étaient importantes, et que compte tenu de sa qualité de gérant, il ne pouvait ignorer le caractère erroné de ces comptabilisations. Elle comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui fondent les pénalités appliquées, quel que soit le bien-fondé de la motivation retenue. Cette proposition est suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales.
17. D'autre part, les deux premiers motifs retenus par l'administration fiscale sont justifiés, ainsi qu'il a été vu aux points 3, 12 et 13 du présent arrêt. Il résulte de l'instruction qu'elle aurait pris la même décision si elle s'était fondée sur ces deux motifs, qui caractérisent un manquement délibéré, indépendamment de celui tiré de ce qu'il était le gérant de la société, alors qu'il était seulement son associé majoritaire à la date des faits.
18. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de ses conclusions. Sa requête doit donc être rejetée, y compris ses conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée pour information à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2024, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- Mme C... et M. Mérenne, premiers conseillers.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juin 2024.
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No 22MA00382