La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/05/2024 | FRANCE | N°23MA00304

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 31 mai 2024, 23MA00304


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2021, confirmé par la décision du 28 janvier 2022 rejetant son recours gracieux, par lequel la préfète de police des Bouches-du-Rhône lui a retiré son agrément d'agent de police municipale.



Par un jugement n° 2202534 du 6 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :
r>

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 février et 22 décembre 2023, M. D..., représenté par Me Leturcq,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2021, confirmé par la décision du 28 janvier 2022 rejetant son recours gracieux, par lequel la préfète de police des Bouches-du-Rhône lui a retiré son agrément d'agent de police municipale.

Par un jugement n° 2202534 du 6 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 février et 22 décembre 2023, M. D..., représenté par Me Leturcq, de la SELARL Noûs Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 décembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2021 pris par la préfète de police des Bouches-du-Rhône, confirmé par la décision du 28 janvier 2022 rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'acte : l'arrêté du 30 août 2021 par lequel la préfète de police a délégué sa signature à M. A... C..., sous-préfet, directeur de cabinet, pour signer tous actes, arrêtés ou décisions, dans les limites de ses attributions, est illégale car trop générale et excédant le champ des compétences qui pouvaient légalement être déléguées ; il soutient, par la voie de l'exception d'illégalité, que l'article 78-6 du décret du 29 avril 2004 est lui-même illégal ;

- la motivation des décisions contestées n'est pas suffisante au regard des prescriptions légales et réglementaires ;

- la préfète a commis une erreur d'appréciation en estimant que les faits dont elle fait état caractérisaient un manquement à l'honorabilité dont doivent faire preuve les agents de police municipale et alors même que l'exactitude matérielle de certains de ces faits n'est pas établie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2023, la préfète de police des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la cour a désigné Mme Rigaud, présidente-assesseur de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... relève appel du jugement du 6 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 novembre 2021, confirmé par la décision du 28 janvier 2022 rejetant son recours gracieux, par lequel la préfète de police des Bouches-du-Rhône a retiré son agrément d'agent de police municipale.

Sur le bienfondé du jugement attaqué :

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure : " L'agrément peut être retiré ou suspendu par le représentant de l'Etat ou le procureur de la République après consultation du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale ".Aux termes de l'article R. 511-2 du même code : " L'agrément des agents de police municipale prévu par l'article L. 511-2 est délivré par le préfet du département dans lequel l'agent prend ses fonctions lors d'une première affectation. /Il est retiré ou suspendu par le préfet du département dans lequel se situe le siège de l'autorité d'emploi de l'agent à la date de la décision. /Le préfet qui retire ou suspend l'agrément d'un agent de police municipale en informe le préfet qui l'avait initialement délivré. ". L'article 78-1 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements dispose que " Le préfet des Bouches-du-Rhône et le préfet de police des Bouches-du-Rhône sont, pour leurs attributions respectives, les représentants de l'Etat pour le département des Bouches-du-Rhône ". Aux termes de l'article 78-3 du même décret : " [Le préfet de police des Bouches-du-Rhône] exerce les attributions dévolues au représentant de l'Etat dans le département par les articles L. 2213-1, L. 2214-4, L. 2215-1 et L. 2215-3 à L. 2215-5 du code général des collectivités territoriales et par le titre Ier du livre V du code de la sécurité intérieure en matière d'ordre public ". Enfin, l'article 78-6 de ce décret dispose que " Le préfet de police des Bouches-du-Rhône peut donner délégation de signature, notamment en matière d'ordonnancement secondaire :/1° En toutes matières, au directeur de son cabinet ; (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté a été signé par M. A... C..., sous-préfet, directeur de cabinet, qui avait reçu, par arrêté du 30 août 2021 publié au recueil des actes administratifs du 2 septembre suivant, délégation de la préfète de police des Bouches-du-Rhône pour signer tous actes, arrêtés ou décisions, dans les limites de ses attributions. Si le requérant soutient que cette délégation est trop large, il résulte de l'article 78-6 du décret du 29 avril 2004 précité que le préfet de police des Bouches-du-Rhône peut donner délégation de signature en toutes matières à son directeur de son cabinet. Par ailleurs, le requérant n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'exception, que cet article 78-6 serait lui-même illégal, en se bornant à faire valoir que la préfète de police des Bouches-du-Rhône exerce ses propres attributions " sous l'autorité du premier ministre ", en matière de mobilisation des forces armées et préparation et de l'exécution des mesures de sécurité intérieure et de sécurité économique concourant à la sécurité nationale, alors que de telles dispositions font obstacle à ce qu'un préfet puisse déléguer sa compétence en ces matières mais non sa signature. Il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.

4. Par ailleurs, l'arrêté contesté comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Ainsi et comme l'avait jugé le tribunal sans être critiqué sur ce point, cet arrêté est suffisamment motivé.

5. Aux termes de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure : " Les fonctions d'agent de police municipale ne peuvent être exercées que par des fonctionnaires territoriaux recrutés à cet effet dans les conditions fixées par les statuts particuliers prévus à l'article 6 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale (...) / Ils sont nommés par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale, agréés par le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République, puis assermentés. (...) / L'agrément peut être retiré ou suspendu par le représentant de l'Etat ou le procureur de la République après consultation du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale. (...) ". Aux termes de l'article R. 515-7 du même code : " L'agent de police municipale est intègre, impartial et loyal envers les institutions républicaines. Il ne se départit de sa dignité en aucune circonstance. / Il est placé au service du public et se comporte de manière exemplaire envers celui-ci. / Il accorde la même attention et le même respect à toute personne et n'établit aucune distinction dans ses actes et ses propos de nature à constituer l'une des discriminations énoncées à l'article 225-1 du code pénal. ".

6. L'agrément accordé à un policier municipal sur le fondement de ces dispositions peut légalement être retiré lorsque l'agent ne présente plus les garanties d'honorabilité auxquelles est subordonnée la délivrance de l'agrément. L'honorabilité d'un agent de police municipale, nécessaire à l'exercice de ses fonctions, dépend notamment de la confiance qu'il peut inspirer, de sa fiabilité et de son crédit.

7. Il ressort des pièces du dossier que, pour décider de retirer l'agrément de policier municipal accordé à M. D..., la préfète de police des Bouches-du-Rhône s'est fondée sur trois motifs, tirés de la détention sans déclaration d'armes, munitions ou de leurs éléments de catégorie C par l'intéressé, à l'origine de son interpellation par le brigade de gendarmerie d'Orgon le 7 juillet 2019, de la falsification par lui, à deux reprises, d'attestations médicales pour garde d'enfant malade afin d'obtenir des autorisations d'absence pour un total de cinq journées fin 2020 et enfin, de la sollicitation par lui de son supérieur hiérarchique, le 22 mars 2021, alors qu'il était placé en arrêt de maladie, à fin de consultation du fichier d'identification des véhicules dans le but de connaître le propriétaire du véhicule stationné devant le garage du bailleur de son logement. Le requérant n'apporte pas davantage en appel que devant les premiers juges d'élément de nature à remettre en cause l'exactitude matérielle des faits qui lui sont reprochés. Si le premier et le troisième motifs ne sont pas de nature à fonder la décision contestée, le deuxième concerne en revanche des faits qui jettent le discrédit sur les fonctions exercées par le requérant et sont de nature à rompre la confiance entre lui et son employeur, lequel a d'ailleurs entamé des poursuites pénales pour faux et usage de faux. Au regard de ces faits, la préfète de police des Bouches-du-Rhône a pu légalement décider de retirer à M. D... l'agrément qu'il détenait en estimant qu'il ne remplissait plus les conditions de confiance, de fiabilité et de crédit pour l'exercice des fonctions d'agent de police municipale. Par suite, dans les circonstances de l'espèce et bien qu'il ressorte des pièces du dossier que le requérant a toujours été donné satisfaction à ses précédents employeurs, c'est par une exacte application des dispositions de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure que la préfète de police des Bouches-du-Rhône a retiré au requérant son agrément de policier municipal. Celui-ci n'est, par conséquent, pas fondé à soutenir que l'arrêté du 9 novembre 2021 contesté est entaché d'erreur d'appréciation.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que M. D... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Lison Rigaud, présidente assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ;

- M. Jérôme Mahmouti, premier conseiller ;

- M. Nicolas Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mai 2024.

2

N° 23MA00304

cm


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00304
Date de la décision : 31/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-08-02-02-01-02 Procédure. - Voies de recours. - Cassation. - Contrôle du juge de cassation. - Bien-fondé. - Qualification juridique des faits.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SELARL NOUS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-31;23ma00304 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award