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17/05/2024 | FRANCE | N°23MA02202

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 17 mai 2024, 23MA02202


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 16 février 2023 par lequel le préfet du Var a refusé le renouvellement de son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.



Par un jugement n° 2300977 du 28 juillet 2023, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté précité du 16 février 2023 et a enjoint au préfet du Var de délivrer à M. A... un t

itre de séjour adapté à sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 16 février 2023 par lequel le préfet du Var a refusé le renouvellement de son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 2300977 du 28 juillet 2023, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté précité du 16 février 2023 et a enjoint au préfet du Var de délivrer à M. A... un titre de séjour adapté à sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 août 2023, le préfet du Var demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon.

Il soutient que :

- M. A... ne justifie pas du caractère réel et sérieux des études pour prétendre à la délivrance d'un titre de séjour " étudiant " ; le diplôme d'université " étudiant - entrepreneur " ne propose que 23 heures d'enseignement et n'est pas soumis à une habilitation du ministère de l'enseignement supérieur ; l'inscription à cette formation diplômante n'est pas cohérente au regard des études et du projet professionnel initialement poursuivis ;

- le tribunal ne pouvait se fonder sur la circonstance, postérieure à l'arrêté contesté, qu'il a obtenu le diplôme universitaire " étudiant - entrepreneur ".

Par deux mémoires en défense enregistrés les 30 novembre 2023 et 25 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Macone, demande à la cour de rejeter la requête du préfet du Var et de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention franco-sénégalaise relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Dakar le 1er août 1995 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties le jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les observations de Me Macone, représentant M. A....

Une note en délibéré, présentée pour M. A..., a été enregistrée le 7 mai 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant de nationalité sénégalaise né le 2 mars 1995, est entré sur le territoire français le 3 septembre 2019 sous couvert d'un visa long séjour portant la mention " étudiant ", valable du 30 août 2019 au 30 août 2020. Il a ensuite bénéficié d'une carte de séjour pluriannuelle dans le cadre de ses études, valable du 23 novembre 2020 au 22 novembre 2022. Par un arrêté du 16 février 2023, le préfet du Var a rejeté sa demande de renouvellement du titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le préfet du Var relève appel du jugement du 28 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté précité du 16 février 2023 et lui a enjoint de délivrer à M. A... un titre de séjour adapté à sa situation.

2. Aux termes de l'article 9 de la convention conclue entre la France et le Sénégal le 1er août 1995 : " Les ressortissants de chacun des Etats contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation qui ne peut être assuré dans le pays d'origine, sur le territoire de l'autre Etat doivent, pour obtenir le visa de long séjour prévu à l'article 4, présenter une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage. Ils doivent en outre justifier de moyens d'existence suffisants, tels qu'ils figurent en annexe. Les intéressés reçoivent, le cas échéant, un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite des études ou du stage, ainsi que de la possession de moyens d'existence suffisants ". Aux termes de l'article 13 de la même convention : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation respective des deux Etats sur l'entrée et le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord ".

3. Ainsi que l'ont à juste titre indiqué les premiers juges, l'arrêté préfectoral attaqué trouve son fondement légal dans les stipulations de l'article 9 de l'accord franco-sénégalais et non dans les dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour l'application de ces stipulations, il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour présentée en qualité d'étudiant par un ressortissant sénégalais, de rechercher, sous le contrôle du juge et à partir de l'ensemble du dossier, si l'intéressé peut être raisonnablement regardé comme poursuivant effectivement ses études. Le renouvellement de ce titre de séjour est ainsi subordonné à la réalité et à la progression des études poursuivies par le bénéficiaire.

4. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir obtenu sa licence de droit en 2020, M. A... s'est inscrit à deux reprises en première année de master de droit des affaires - parcours droit de la banque en 2020 et 2021 mais a cependant été ajourné en raison de moyennes insuffisantes. Il ressort des attestations établies par la doyenne de la faculté de droit de Toulon et de l'enseignant responsable de son master que M. A... a fait preuve, en dépit de cet échec, d'assiduité et de sérieux avant d'abandonner le suivi de cette formation universitaire au printemps de l'année 2022. M. A... s'est alors investi vers un changement d'orientation professionnelle, en obtenant le statut national d'étudiant-entrepreneur, délivré par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche au titre de l'année universitaire 2022-2023, permettant de disposer d'un accompagnement individualisé et d'accéder au diplôme universitaire " étudiant-entrepreneur ", délivré par l'université de Toulon et de nature à ouvrir droit au renouvellement d'un titre de séjour " étudiant ". De plus, l'insuffisance de sérieux des études ne saurait être révélée par le volume des enseignements dispensés, que le préfet estime, sans le justifier, à seulement 23 jours, alors qu'au demeurant et au vu de la plaquette d'information, la durée de la formation est de six mois, comporte 178 heures d'enseignement et prévoit un important accompagnement de l'étudiant en vue de la réalisation de son projet professionnel. Il est constant que M. A... a obtenu le diplôme correspondant avec la mention " bien " et une moyenne de 14,347 sur 20 au vu du relevé de notes du 16 juin 2023, son assiduité et son sérieux étant de nouveau soulignés au titre de l'année en cause. Cette formation a permis à M. A... d'obtenir la validation de la certification professionnelle relative à la conception et au développement d'un projet entrepreneurial, celui-ci ayant pour projet de créer une entreprise d'agent de sécurité. A la date de la décision contestée, l'intéressé, déjà titulaire d'une licence de droit, justifiait ainsi du caractère et réel et sérieux de ses études, corroboré postérieurement par l'obtention du diplôme précité en juin 2023. Dans ces conditions, en estimant, au seul vu des échecs successifs de l'intéressé au titre des années universitaires 2020-2021 et 2021-2022 et de son changement d'orientation, qu'il ne justifiait d'aucune progression dans ses études et n'établissait pas leur caractère sérieux, le préfet du Var a inexactement apprécié le caractère effectif des études de M. A.... Par suite, et ainsi que l'a à bon droit jugé le tribunal, c'est à tort que ce dernier a refusé de renouveler le titre de séjour étudiant de M. A....

5. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Var n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 16 février 2023 en litige et lui a enjoint de délivrer à M. A... un titre de séjour.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du préfet du Var est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 6 mai 2024, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente assesseure,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mai 2024.

23MA02202 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02202
Date de la décision : 17/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : MACONE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-17;23ma02202 ?
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