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13/05/2024 | FRANCE | N°22MA00796

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 13 mai 2024, 22MA00796


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les lettres de fin d'instruction des 20 mai et 18 octobre 2019 des dossiers PAC 2017 et 2018, ensemble la décision du 8 novembre 2019 rejetant son recours gracieux formé le 5 novembre 2019.



Par un jugement n° 2000037 du 6 janvier 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enr

egistrée le 4 mars 2022, Mme A..., représentée par Me Cabriel, demande à la cour :



1°) d'annuler le jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les lettres de fin d'instruction des 20 mai et 18 octobre 2019 des dossiers PAC 2017 et 2018, ensemble la décision du 8 novembre 2019 rejetant son recours gracieux formé le 5 novembre 2019.

Par un jugement n° 2000037 du 6 janvier 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mars 2022, Mme A..., représentée par Me Cabriel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 janvier 2022 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler les lettres de fin d'instruction des 20 mai et 18 octobre 2019 des dossiers PAC 2017 et 2018, confirmées par la décision du 8 novembre 2019 rejetant son recours gracieux formé le 5 novembre 2019 ;

3°) d'enjoindre à la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) de prendre acte de la décision à intervenir et de permettre la mise en œuvre des conséquences de droit qui s'y attachent en donnant pour indication à l'agence de service et de paiement de lui verser l'aide jeune agriculteur ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la légalité externe :

- les décisions contestées et celle rejetant son recours gracieux sont insuffisamment motivées ;

- en méconnaissance des dispositions de l'article R. 112-11-4 du code des relations entre le public et l'administration, elle n'a pas été préalablement informée des anomalies affectant, selon l'administration, son dossier ;

- les décisions contestées procèdent d'une procédure qui a méconnu le principe du contradictoire ;

En ce qui concerne la légalité interne :

- elle remplit les conditions exigées pour la reconnaissance de la qualité de " jeune agriculteur " au sens de l'article 30 du règlement UE n° 1307/2013 du 13 décembre 2013 ;

- elle a bien adressé les diplômes requis avant la date limite du 15 mai, ce délai n'étant, en tout état de cause, pas intangible et sa méconnaissance a été sans incidence sur l'instruction de sa demande ;

- l'éventuelle non-transmission ou tardiveté de transmission des diplômes requis ne justifie pas l'infliction d'une sanction administrative en application du règlement UE n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 ;

- l'administration ne peut retirer une subvention, décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ;

- les décisions contestées méconnaissent le principe de proportionnalité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2023, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 112-11-4 du code des relations entre le public et l'administration est inopérant ;

- il en est de même s'agissant du moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire ;

- à supposer que la requérante ait soulevé le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 22 du règlement d'exécution (UE) n° 809/2014 de la Commission du 17 juillet 2014, celui-ci est inopérant ;

- l'invocation de l'article 7 de même règlement n° 809/2014 est inopérante ;

- le moyen fondé sur la méconnaissance du principe de proportionnalité est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) n° 352/78, (CE) n° 165/94, (CE) n° 2799/98, (CE) n° 814/2000, (CE) n° 1200/2005 et n° 485/2008 du Conseil ;

- le règlement (UE) n° 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (CE) n° 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil ;

- le règlement d'exécution (UE) n° 809/2014 de la Commission du 17 juillet 2014 établissant les modalités d'application du règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les mesures en faveur du développement rural et la conditionnalité ;

- l'arrêté du 9 octobre 2015 relatif aux modalités d'application concernant le système intégré de gestion et de contrôle, l'admissibilité des surfaces au régime de paiement de base et l'agriculteur actif dans le cadre de la politique agricole commune à compter de la campagne 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... exploite un élevage d'ovins à Alleins (13). Elle a déposé, le 12 mai 2017 au titre de la campagne 2017 et le 4 mai 2018 au titre de la campagne 2018, une demande d'aides liées à la surface du premier pilier de la PAC (paiement de base, paiement redistributif, paiement vert, paiement en faveur des jeunes agriculteurs). Mme A... s'est vu notifier par la DDTM des Bouches-du-Rhône une lettre de fin d'instruction du 20 mai 2019 relative à sa demande au titre de la campagne 2017 et une lettre de fin d'instruction du 18 octobre 2019 relative à sa demande au titre de la campagne 2018, par lesquelles elle a été informée que sa demande d'aide " jeune agriculteur " était rejetée au motif qu'elle y était inéligible en raison de l'absence de justification relative à la condition de diplôme et que le montant brut total des aides accordées s'élevait respectivement à 6 684,27 euros et 9 186,93 euros. Par une lettre en date du 5 novembre 2019, Mme A... a formé un recours gracieux à l'encontre ces deux lettres de fin d'instruction, recours qui a fait l'objet d'une décision explicite de rejet du 8 novembre 2019 au motif que la copie du diplôme de niveau IV n'a pas été adressée avant le 15 mai des années correspondantes, soit par courrier soit par téléchargement dans l'application TELEPAC. Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler les lettres de fin d'instruction des 20 mai et 18 octobre 2019 des dossiers PAC 2017 et 2018, ainsi que la décision du 8 novembre 2019 rejetant son recours gracieux formé le 5 novembre 2019. Par un jugement n° 2000037 du 6 janvier 2022 dont l'intéressée relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". L'article L. 211-5 du même code précise par ailleurs que : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". Comme l'a jugé à juste titre le tribunal, les deux lettres contestées comportent les considérations de droit et de fait qui en constituent les fondements, et notamment le fait que l'administration mentionne que la condition de diplôme n'est, en l'espèce, pas satisfaite. En outre, il ressort des termes des deux lettres contestées que leur motivation fait corps avec ces décisions, si bien que la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait méconnu son droit, en application des dispositions précitées, d'être informée sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. Enfin, le moyen tiré de ce que la décision rejetant le recours gracieux qu'elle a formé est insuffisamment motivée est inopérant et doit donc être écarté. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit, en toutes ses branches, être écarté.

3. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article L. 100-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Le présent code régit les relations entre le public et l'administration en l'absence de dispositions spéciales applicables. ". Aux termes de l'article R. 112-11-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Lorsqu'une saisine par voie électronique est incomplète, l'administration indique à l'intéressé, dans l'accusé de réception électronique ou dans un envoi complémentaire, les pièces et informations manquantes exigées par les textes législatifs et réglementaires en vigueur ainsi que le délai fixé pour la réception de celles-ci. / L'administration lui indique en même temps le délai prévu, selon le cas, au deuxième ou au troisième alinéa de l'article L. 114-5, au terme duquel la demande est réputée acceptée ou rejetée. ". D'autre part, aux termes de l'article 67 du règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les mesures en faveur du développement rural et la conditionnalité : " 1. Chaque État membre établit et gère un système intégré de gestion et de contrôle ("système intégré"). (...) ". Aux termes de l'article 68 de ce même règlement : " 1. Le système intégré comprend les éléments suivants : (...) les demandes d'aide et les demandes de paiement ; (...) " et aux termes de son article 72 : " 1. Chaque année, un bénéficiaire de l'aide visée à l'article 67, paragraphe 2, présente une demande de paiement direct ou une demande de paiement au titre des mesures de développement rural liées à la surface ou aux animaux (...) / 4. Un État membre peut décider qu'une seule demande d'aide couvre plusieurs, voire la totalité, des régimes et mesures d'aide visés à l'article 67 ou d'autres régimes et mesures d'aide. (...) ". Le règlement d'exécution (UE) n° 809/2014 de la Commission du 17 juillet 2014 fixe, de son article 11 à son article 17, fixe les règles applicables à toutes les demandes d'aide et demandes de paiement. Aux termes de l'article D. 615-1 du code rural et de la pêche maritime : " Conformément au 4 de l'article 72 du règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune, une demande unique est déposée pour les régimes d'aide dont la liste est établie par arrêté du ministre chargé de l'agriculture. / En application des dispositions des articles 11 à 17 et 22 du règlement d'exécution (UE) n° 809/2014 de la Commission du 17 juillet 2014 établissant les modalités d'application du règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les mesures en faveur du développement rural et la conditionnalité, cet arrêté précise le contenu, les modalités de présentation, la date limite de dépôt et la date limite de modification de la demande unique qui comporte, notamment, un registre parcellaire graphique mis à jour. / Il précise également la date limite de dépôt des demandes d'attribution de droits au paiement de base ou d'augmentation de la valeur de ces droits mentionnées à l'article 22 du même règlement. / La demande unique est transmise par voie électronique. ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que celles-ci régissent entièrement la situation du demandeur d'une aide en qualité de jeune agriculteur. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 112-11-4 du code des relations entre le public et l'administration, qui ne sont pas applicables à une telle situation, est inopérant. Au surplus, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier que les lettres contestées indiquaient à l'intéressée qu'elle ne justifiait pas du diplôme exigé pour bénéficier des aides sollicitées et mentionnaient qu'elle disposait d'un délai de 10 jours pour formuler ses observations écrites ou orales avant que ne naisse une décision définitive.

4. Comme l'avait retenu à juste titre le tribunal aux points 5 et 6 du jugement attaqué par un motif que la requérante ne critique pas sérieusement et qu'il y a, par suite, lieu d'adopter, l'invocation du moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire et des droits de la défense est, s'agissant de décisions qui ne constituent pas une sanction et qui font suite à une demande de l'administrée, inopérante.

En ce qui concerne la légalité interne :

5. Aux termes de l'article 30 du règlement (UE) n° 1307/2013 du 17 décembre 2013 : " 1. Chaque État membre crée une réserve nationale. À cette fin, les États membres appliquent, au cours de la première année de mise en œuvre du régime de paiement de base, un pourcentage de réduction linéaire au plafond du régime de paiement de base au niveau national. (...) / 4. Les États membres attribuent des droits au paiement à partir de leur réserve nationale ou de leurs réserves régionales en fonction de critères objectifs et en veillant à assurer l'égalité de traitement entre agriculteurs et à éviter toute distorsion de marché et de concurrence. (...) / 6. Les États membres utilisent leur réserve nationale ou leurs réserves régionales pour attribuer, en priorité, des droits au paiement aux jeunes agriculteurs et aux agriculteurs qui commencent à exercer une activité agricole. (...) / 11. Aux fins du présent article, on entend par:/ a) "jeune agriculteur", tout agriculteur répondant aux conditions fixées à l'article 50, paragraphe 2, et, le cas échéant, aux conditions visées à l'article 50, paragraphes 3 et 11;/ b) "agriculteur qui commence à exercer une activité agricole", une personne physique ou morale n'ayant pas, au cours des cinq années qui ont précédé le lancement de l'activité agricole, exercé d'activité agricole en son nom et à son propre compte ou n'ayant pas eu le contrôle d'une personne morale exerçant une activité agricole. Dans le cas d'une personne morale, la ou les personnes physiques qui exercent le contrôle de la personne morale ne doivent avoir exercé aucune activité agricole en leur nom et à leur propre compte ou ne doivent pas avoir eu le contrôle d'une personne morale exerçant une activité agricole au cours des cinq années qui ont précédé le lancement de l'activité agricole par la personne morale; les États membres peuvent établir leurs propres critères supplémentaires d'éligibilité objectifs et non discriminatoires pour cette catégorie d'agriculteurs en ce qui concerne les qualifications, l'expérience ou la formation requises ". L'article 50 paragraphe 2 du règlement (UE) n°1307/2013 du 17 décembre 2013 dispose que : " 2. Aux fins du présent chapitre, on entend par "jeunes agriculteurs", les personnes physiques: a) qui s'installent pour la première fois à la tête d'une exploitation agricole, ou qui se sont installées au cours des cinq années précédant la première introduction d'une demande au titre du régime de paiement de base ou du régime de paiement unique à la surface visée à l'article 72, paragraphe 1, du règlement (UE) no1306/2013; et b) qui sont âgés de 40 ans au maximum au cours de l'année d'introduction de la demande visée au point a). ".

6. Aux termes de l'article D. 615-37 du code rural et de la pêche maritime, en vigueur jusqu'au 19 octobre 2017 : " I. - Sont éligibles au paiement prévu à l'article 50 du règlement (UE) n° 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013, en application du 3 de cet article, les jeunes agriculteurs qui justifient, à la date de leur installation, d'un diplôme de niveau IV ou d'une qualification équivalente. (...) Un jeune agriculteur est réputé bénéficier d'une qualification équivalente s'il justifie : - soit d'un diplôme de niveau V ou d'une attestation de fin d'étude secondaires et d'une activité professionnelle dans le secteur de la production agricole d'au minimum vingt-quatre mois dans les trois ans précédant l'année de son installation en qualité de chef d'exploitation ; - soit d'une activité professionnelle dans le secteur de la production agricole d'au minimum quarante mois dans les cinq ans précédant l'année de son installation en qualité de chef d'exploitation. (...) ". Le décret n° 2017-1475 du 16 octobre 2017 relatif au paiement en faveur des jeunes agriculteurs a modifié les dispositions de cet article en remplaçant les mots " à la date de leur installation " par les mots " à la date de l'introduction de leur demande d'aide relative à ce paiement ".

7. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 9 octobre 2015 relatif aux modalités d'application concernant le système intégré de gestion et de contrôle, l'admissibilité des surfaces au régime de paiement de base et l'agriculteur actif dans le cadre de la politique agricole commune à compter de la campagne 2015 qui fixe les modalités de dépôt de demande et l'admissibilité des surfaces : " Contenu de la demande unique. / En application de l'article D. 615-1 du code rural et de la pêche maritime, la demande unique comprend les demandes au titre des régimes d'aides liées à la surface et des mesures de soutiens liés à la surface tels que définis respectivement aux 20 et 21 de l'article 2 du règlement (UE) n° 640/2014 susvisé. / Les pièces constituant la demande unique à compléter par les agriculteurs sont notamment : - la demande d'aides ; - le descriptif des surfaces ; - la déclaration des effectifs animaux ; - le registre parcellaire graphique mis à jour. / La demande unique doit être complétée et signée par voie électronique sur le site des téléservices des aides de la politique agricole commune disponible à l'adresse suivante : www. telepac. agriculture. gouv. fr. ". L'article 2 de cet arrêté dispose que : " Date de dépôt de la demande unique. La date limite de dépôt, à laquelle la demande unique doit être complétée et signée par voie électronique sur le site des téléservices des aides de la politique agricole commune, est fixée au 31 mai pour la campagne 2017 et au 15 mai pour les campagnes 2018 et postérieures. Toutefois, en application de l'article 12 du règlement (UE) n° 640/2014 susvisé, lorsque cette date limite est un jour férié, un samedi ou un dimanche, celle-ci est reportée au premier jour ouvré suivant. "

8. La requérante soutient qu'elle remplit les conditions exigées pour la reconnaissance de la qualité de " jeune agriculteur " au sens de l'article 30 du règlement UE n° 1307/2013 du 13 décembre 2013. Il ressort des deux lettres de fin d'instruction en litige portant refus d'octroi à Mme A... de l'aide " jeune agriculteur " pour les campagnes 2017 et 2018 au motif que cette dernière n'a pas produit les pièces justificatives relatives à la condition de diplôme. Si la requérante expose penser " de bonne foi " avoir adressé les copies de ses diplômes simultanément à l'envoi de sa demande et notamment à son attestation d'affiliation à la mutuelle sociale agricole, avant la date limite fixée au 15 mai de l'année civile, elle ne produit cependant aucune pièce de nature à l'établir, tandis que sa bonne foi, à la supposer même établie, n'est pas à, elle seule, une circonstance probante. Par ailleurs, la notice " généralités " concernant la campagne 2017, disponible sur TELEPAC et sur le site internet du Ministère de l'Agriculture, précise, en page 4, que la justification d'un diplôme est une condition d'éligibilité de la demande et constitue l'une des pièces à fournir pour l'examen de la demande du paiement de l'aide en qualité de jeune agriculteur. La requérante ne peut, à cet égard, utilement soutenir que " il est mentionné de fournir des pièces sans aucune précision de date pour ce faire " dès lors que la date pour déposer son dossier de demande est fixée au 15 mai de chaque année civile par l'article 2 précité de l'arrêté du 9 octobre 2015. Enfin, comme l'a retenu à juste titre le tribunal, la requérante ne peut utilement se prévaloir ni de la circonstance qu'elle n'ait pas fait l'objet d'une sanction de réduction pour dépôt tardif, prévue notamment par le règlement délégué (UE) n° 640/2014 de la Commission du 11 mars 2014 complétant le règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les conditions relatives au refus ou au retrait des paiements et les sanctions administratives applicables aux paiements directs, le soutien au développement rural et la conditionnalité, ni des reports de la date limite de dépôt des demandes au titre des aides relevant du 1er pilier de la politique agricole commune décidés par le passé par l'État dans des circonstances particulières pour soutenir que la date fixée au 15 mai de l'année civile par l'article 2 précité de l'arrêté du 9 octobre 2015 ne serait pas intangible. Il suit de là que Mme A... n'établit pas l'inexactitude matérielle du motif retenu par l'administration pour lui refuser le bénéfice de l'aide qu'elle sollicitait.

9. Aux termes de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. ". Aucune décision attribuant une aide en qualité de " jeune agriculteur " n'étant intervenue, la requérante ne peut utilement soutenir que les lettres contestées devraient être regardées comme abrogeant ou retirant une telle décision.

10. De même, si la requérante soutient que l'absence de transmission ou la tardiveté de transmission des diplômes requis ne justifie pas l'infliction de sanction administrative en application du règlement UE n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013, les lettres contestées ne présentent pas le caractère d'une sanction administrative. Le moyen soulevé est donc inopérant.

11. Enfin, dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article que le but est de n'accorder une aide qu'aux personnes qui remplissent effectivement les conditions prévues par les textes applicables, la requérante n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que les lettres dont elle a été destinataire sont disproportionnées par rapport au but poursuivi de favoriser l'installation des jeunes agriculteurs.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui, dans la présente instance, n'est pas partie perdante, une somme au titre des frais exposés par Mme A... non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2024 où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- M. Mahmouti, premier conseiller.

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 mai 2024.

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N° 22MA00796

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00796
Date de la décision : 13/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-06 Agriculture et forêts. - Exploitations agricoles. - Aides de l’Union européenne.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SELARL LAMBALLAIS & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-13;22ma00796 ?
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