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07/05/2024 | FRANCE | N°22MA00027

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 07 mai 2024, 22MA00027


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, dans l'instance enregistrée sous le n° 2003709, d'annuler la décision du 3 octobre 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis a refusé de reconnaître son accident du 17 juin 2019 imputable au service, ensemble la décision implicite rejetant sa demande de maintien du plein traitement dans l'attente de l'avis de la commission de réforme et d'enjoindre au directeur de l'établisseme

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, dans l'instance enregistrée sous le n° 2003709, d'annuler la décision du 3 octobre 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis a refusé de reconnaître son accident du 17 juin 2019 imputable au service, ensemble la décision implicite rejetant sa demande de maintien du plein traitement dans l'attente de l'avis de la commission de réforme et d'enjoindre au directeur de l'établissement de la placer à plein traitement à compter du 26 août 2019 et de lui verser les sommes afférentes, et, dans l'instance enregistrée sous le n° 2105011, d'annuler la décision du 9 avril 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis a refusé de reconnaître son accident du 17 juin 2019 imputable au service et de prononcer les mêmes mesures d'injonction.

Par un jugement n° 2003709 et 2105011 du 25 octobre 2021, le tribunal administratif de Marseille a prononcé l'annulation de la décision du 3 octobre 2019 et de la décision du 18 janvier 2020, et a rejeté le surplus des conclusions de Mme A....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 janvier 2022 et le 2 juin 2022, Mme A..., représentée par la SELARL NOÛS Avocats, agissant par Me Leturcq, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 2003709 et 2105011 du 25 octobre 2021 en tant qu'il a rejeté sa requête n° 21005011 tendant à l'annulation de la décision du 9 avril 2021 refusant de reconnaître son accident du 17 juin 2019 comme imputable au service ;

2°) d'annuler la décision du 9 avril 2019 refusant d'imputer au service l'accident de trajet survenu le 17 juin 2019 comme la pathologie consécutive ;

3°) d'enjoindre au centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis de la placer à plein traitement à la date du 26 août 2019 et de lui verser les sommes afférentes à la reconstitution de son traitement depuis cette date ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le signataire de la décision en litige n'était pas compétent ;

- la décision en litige est insuffisamment motivée dès lors que l'avis défavorable de la commission de réforme ne lui a pas été communiqué ;

- la procédure suivie devant la commission de réforme est irrégulière dès lors que le médecin du travail n'a été ni informé ni consulté, que la commission de réforme n'a pas consulté d'expert et que la commission n'a pas examiné l'ensemble des pièces qu'elle a produites ;

- l'accident dont elle a été victime est imputable au service en tant qu'accident de trajet entre le travail et son domicile.

Par un mémoire, enregistré le 1er mars 2022, le centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis, représenté par Me Million-Rousseau, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rigaud ;

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public ;

- les observations de Me Broeckaert, représentant Mme A..., et celles de Me Million-Rousseau, représentant le centre hospitalier intercommunal (CHI) Aix-Pertuis.

Considérant ce qui suit :

1. Le 17 juin 2019, après avoir effectué son service au centre hospitalier intercommunal (CHI) Aix-Pertuis, Mme A... est rentrée à son domicile en automobile. A son arrivée, elle a été victime d'un accident lorsqu'elle a été heurtée par son propre véhicule. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Marseille du 25 octobre 2021 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 avril 2021 refusant de reconnaître son accident du 17 juin 2019 comme imputable au service.

Sur le bienfondé du jugement :

2. Mme A... reprend en appel le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige. Toutefois, elle n'apporte aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ce moyen par les premiers juges. Par suite, il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 11 du jugement attaqué.

3. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière susvisée : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (... ) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. ( ...) .". Aux termes de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. / Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. / Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller. ".

4. Aux termes de l'article 18 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : " Le médecin du travail attaché au service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical ou à la commission de réforme est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir, s'il le demande, communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion. Il remet un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 34, 43 et 47-7. / Le fonctionnaire intéressé et l'administration peuvent, en outre, faire entendre le médecin de leur choix par le comité médical ou la commission de réforme. ".

5. Mme A... ne peut utilement soutenir que le médecin du travail aurait dû être informé de la réunion de la commission de réforme le 20 janvier 2021 et de son objet, et que ce dernier aurait dû être sollicité pour remettre un rapport écrit, en se prévalant d'une part des dispositions précitées de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 et de l'article L. 4622-2 du code du travail, qui ne prévoient pas cette procédure, et d'autre part de celles de l'article 18 du décret du 14 mars 1986 dès lors que n'était pas en cause un des cas prévus aux articles 34, 43 et 47-7 de ce décret.

6. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 : " Le président de la commission de réforme est désigné par le préfet qui peut choisir soit un fonctionnaire placé sous son autorité, soit une personnalité qualifiée qu'il désigne en raison de ses compétences, soit un membre élu d'une assemblée délibérante dont le personnel relève de la compétence de la commission de réforme. (...) Cette commission comprend : 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que, dans le cas où il est manifeste, eu égard aux éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas, l'absence d'un tel spécialiste est susceptible de priver l'intéressé d'une garantie et d'entacher ainsi la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée.

7. La requérante soutient que la commission de réforme n'aurait pu valablement statuer en l'absence d'un médecin spécialiste en chirurgie thoracique, en pneumologie et en podologie à même de se prononcer sur l'état de fatigue qui serait à l'origine de son accident et donc sur le lien avec ses conditions de travail dans un service en sous-effectif chronique et dans le cadre d'un poste en inadéquation avec son état de santé après l'accident de service dont elle a été victime le 3 mars 2018. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'avis de la commission de réforme n'a été sollicité que sur l'imputabilité au service de l'accident survenu le 17 juin 2019 et Mme A... n'établit pas que la présence d'un médecin spécialiste aurait permis d'éclairer l'examen de son cas et déterminer l'imputabilité au service ou non de cet accident. Si Mme A... soutient que la commission de réforme aurait méconnu le périmètre de sa saisine pour avis et n'aurait pas examiné l'ensemble des pièces qu'elle a produites devant elle, elle n'établit pas, compte tenu des termes de l'attestation établie par la représentante syndicale qui l'a assistée devant la commission, seule pièce dont elle se prévaut à l'appui de ces allégations, que la commission de réforme n'aurait pas été suffisamment informée sur les circonstances de l'accident. Il ressort en outre des pièces du dossier que la commission de réforme a rendu son avis sur la base d'un dossier comprenant la déclaration d'accident de service de la requérante, le témoignage de son fils et le rapport du cadre du service de Mme A.... Dans ces conditions, la commission de réforme doit être regardée comme ayant été suffisamment informée et a pu régulièrement émettre son avis sans s'adjoindre un médecin dans les spécialités invoquées par Mme A....

8. Si Mme A... soutient que la décision du 9 avril 2021 n'est pas suffisamment motivée dès lors qu'elle n'a pas eu communication de l'avis de la commission de réforme malgré les demandes adressées en ce sens, elle reprend ce moyen en appel sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ce moyen par les premiers juges. Par suite, il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 17 du jugement attaqué.

9. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " I. -Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. / (...) III. -Est reconnu imputable au service, lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit en apportent la preuve ou lorsque l'enquête permet à l'autorité administrative de disposer des éléments suffisants, l'accident de trajet dont est victime le fonctionnaire qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son service et sa résidence ou son lieu de restauration et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel du fonctionnaire ou toute autre circonstance particulière étrangère notamment aux nécessités de la vie courante est de nature à détacher l'accident du service. (...) ". Pour que soit reconnue l'existence d'un accident de trajet, il faut que le trajet du lieu de travail au domicile ne soit pas achevé. Tel n'est pas le cas lorsque l'intéressé se trouve déjà, lors de l'accident, à l'intérieur de son domicile ou de sa propriété.

10. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été victime d'un accident le 17 juin 2019 après être rentrée de son lieu de travail en voiture et avoir pénétré dans l'enceinte de sa propriété, au moment où, étant sortie de son véhicule, elle fermait le portail d'entrée à sa propriété. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été percutée par son propre véhicule lequel a reculé car il n'avait pas été correctement immobilisé par un serrage suffisant du frein à main. Mme A... a alors été écrasée entre son véhicule et le portail qu'elle venait de fermer. Si Mme A... soutient qu'elle aurait ainsi été projetée sur la voie publique, elle ne l'établit en tout état de cause pas. L'accident dont a été victime la requérante s'étant produit à l'intérieur des limites de la propriété où se situe son domicile et alors que le trajet entre son lieu de travail et son domicile était achevé, c'est donc à bon droit que les premiers juges ont retenu que cet accident ne pouvait pas être reconnu comme imputable au service.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'annulation et d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CHI Aix-Pertuis, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme A.... Il y a lieu, en revanche, et en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de cette dernière la somme de 1 000 euros à verser au CHI Aix-Pertuis.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera au centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier intercommunal Aix-Pertuis.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Cécile Fedi, présidente de chambre,

- Mme Lison Rigaud, présidente assesseure,

- M. Jérôme Mahmouti, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mai 2024.

2

N° 22MA00027


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00027
Date de la décision : 07/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie. - Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: Mme Lison RIGAUD
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SELARL NOUS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-07;22ma00027 ?
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