La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/04/2024 | FRANCE | N°20MA03762

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 6ème chambre, 15 avril 2024, 20MA03762


Vu la procédure suivante :



Procédure devant la Cour :



Par un arrêt avant dire droit n° 20MA03762 du 27 février 2023, saisie d'une requête de la société par actions simplifiée Atalian Propreté PACA tendant à la condamnation de l'office public Toulon Habitat Méditerranée à lui verser la somme de 204 170,08 euros toutes taxes comprises à parfaire, somme augmentée des intérêts moratoires capitalisés ainsi que de l'indemnité forfaitaire correspondante, la Cour a désigné un expert.



Le 27 décembre 2023, l'expert

désigné a remis son rapport, lequel a été communiqué aux parties le 5 janvier 2024.



Par ordonnan...

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la Cour :

Par un arrêt avant dire droit n° 20MA03762 du 27 février 2023, saisie d'une requête de la société par actions simplifiée Atalian Propreté PACA tendant à la condamnation de l'office public Toulon Habitat Méditerranée à lui verser la somme de 204 170,08 euros toutes taxes comprises à parfaire, somme augmentée des intérêts moratoires capitalisés ainsi que de l'indemnité forfaitaire correspondante, la Cour a désigné un expert.

Le 27 décembre 2023, l'expert désigné a remis son rapport, lequel a été communiqué aux parties le 5 janvier 2024.

Par ordonnance du 10 janvier 2024, la présidente de la Cour a liquidé et taxé les frais et honoraires du consultant à la somme de 12 750 euros.

Des observations ont été produites le 2 février 2024 pour l'office public Toulon Habitat Méditerranée et communiquées le jour même.

Par un mémoire, enregistré le 26 mars 2024, l'office public Toulon Habitat Méditerranée, représenté par Me Pilliard, demande à la Cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête et l'ensemble des demandes de la société Atalian Propreté PACA ;

2°) à titre subsidiaire, de ne pas admettre la demande de la société Atalian Propreté PACA à une somme excédant 46 178,59 euros au titre du paiement des factures dont elle poursuit le règlement ;

3°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de la société Atalian Propreté PACA la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 7 mars 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 29 mars 2024 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 2013-269 du 29 mars 2013 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Renaud Thielé, président assesseur de la 6ème chambre pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Isabelle Ruiz, rapporteure,

- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,

- et les observations de Me Darmon, pour la société Atalian Propreté PACA, et de Me Leroy, pour l'office public Toulon Habitat Méditerranée.

Connaissance prise de la note en délibéré enregistrée le 3 avril 2024 et produite pour l'office public Toulon Habitat Méditerranée.

Considérant ce qui suit :

1. La société TFN Propreté PACA, devenue Atalian Propreté PACA, est titulaire du marché à bons de commande conclu le 27 mars 2014 et relatif à l'entretien des parties communes des immeubles d'habitation, propriétés de l'OPH Terres du Sud, devenu office public Toulon Habitat Méditerranée. Considérant que des factures d'un montant de 204 170,08 euros sont restées impayées, elle a saisi le 17 novembre 2017 le comité consultatif national de règlement amiable des différends de Marseille. Parallèlement, elle a également saisi le tribunal administratif de Toulon d'une demande tendant à la condamnation de l'office public Toulon Habitat Méditerranée à lui régler le montant de ces factures. Par le jugement du 6 août 2020, le tribunal administratif a rejeté cette demande. La société Atalian Propreté PACA a fait appel de ce jugement. Par un arrêt n° 20MA03762 du 27 février 2023, la Cour a prescrit la réalisation d'une expertise et désigné un expert afin de répertorier les factures dont la société Atalian Propreté PACA réclame le paiement et de déterminer les éventuels doublons, d'identifier parmi ces factures, celles ayant fait l'objet de la part de l'office public Toulon Habitat Méditerranée d'un rejet dans son courrier du 18 novembre 2016, celles qui figuraient dans la décision de rejet de l'office public Toulon Habitat Méditerranée du 7 novembre 2016, celles qui figuraient dans la décision de rejet de l'office public Toulon Habitat Méditerranée du 14 février 2017 et celles pour lesquelles la société Atalian Propreté PACA a adressé une mise en demeure de payer le 28 juillet 2017, de déterminer parmi les factures dont le paiement est régulièrement réclamé, celles qui ont été effectivement adressées à l'office public Toulon Habitat Méditerranée, qui ont fait l'objet d'un bon de commande ou d'une commande, correspondant à des prestations effectivement réalisées, et qui n'ont pas déjà fait l'objet d'un mandatement de la part de l'office et de fixer, le cas échéant, au regard des réponses apportées aux précédentes questions, la somme globale qui peut être considérée comme due par l'office public.

Sur la régularité de l'expertise :

2. En premier lieu, l'office public Toulon Habitat Méditerranée soutient que le rapport établi par l'expert missionné par la Cour doit être écarté dès lors que l'expert n'aurait pas rempli la mission que lui avait confiée la Cour dans son avant dire droit du 27 février 2023. Toutefois, il résulte des termes mêmes de cet arrêt que la Cour a entendu missionner l'expert afin qu'il détermine, parmi toutes les factures dont la société Atalian Propreté PACA sollicitait le règlement celles qui avaient l'objet d'un bon de commande ou d'une commande. D'ailleurs, l'office public Toulon Habitat Méditerranée ne conteste sérieusement ni la réalisation des prestations en cause, ni le fait qu'elles aient été réalisées à sa demande.

3. En second lieu, l'office public Toulon Habitat Méditerranée soutient que l'expert s'est livré à des appréciations juridiques auxquelles il ne lui appartenait pas de se livrer. Or il résulte de l'instruction et en particulier des dires de l'expert que ce dernier s'est borné à mentionner que " la seule anomalie que j'ai relevée en termes de formalisme est l'absence de numéro de bon de commande sur de nombreuses factures ".

4. Il résulte de ce qui précède que l'office public Toulon Habitat Méditerranée n'est pas fondé à soutenir que l'expertise est irrégulière et que ses conclusions devraient être écartées.

Sur les conclusions d'appel de la société Atalian Propreté PACA :

S'agissant de la méthode d'identification des factures restant à payer :

5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la société Atalian Propreté PACA a effectué des prestations sur simple demande orale de la part de l'office public Toulon Habitat Méditerranée ou sur simple devis au moins jusqu'au mois de mars 2016, sans établissement systématique de bons de commande, même après que les prestations aient été réalisées, ainsi que l'atteste l'objet de l'avenant n° 4 conclu le 10 octobre 2015 mentionnant que " jusqu'à présent la prestation a été réalisée sur la base de devis sollicités auprès de l'entreprise ". Dans ces conditions, les parties doivent être regardées comme ayant renoncé, d'un commun accord, à appliquer les stipulations de l'article 7 du cahier des clauses techniques particulières, aux termes desquelles " les commandes successives seront adressées au titulaire sous forme de bon de commande ", et celles de l'article 11-2 du cahier des clauses administratives particulières prévoyant que les factures doivent notamment mentionner " le prix établi par le bon de commande ". Alors que l'office public Toulon Habitat Méditerranée ne conteste pas sérieusement que les prestations ont été effectivement réalisées, il ne peut dès lors opposer à la société, pour se soustraire à l'obligation de paiement, ces formalités.

6. En deuxième lieu, si l'office public Toulon Habitat Méditerranée se plaint de l'absence de production de l'ensemble des factures au dossier, l'expert a pu, quant à lui, examiner l'ensemble de ces factures, et l'office public en discuter la valeur. Or, ainsi qu'il a été dit au point précédent, l'expert mandaté a relevé comme seule mention manquante sur les factures dont le paiement était réclamé, et ce de manière ponctuelle, l'absence de numéro de bon de commande. Au demeurant, l'office public de l'habitat ne verse pas les lettres de rejet de ces factures pour ces motifs allégués alors que la société Atalian Propreté PACA produit des lettres de rejet par l'office public de l'habitat de ses demandes de paiement mentionnant seulement l'absence de bon de travaux ou l'existence de doublons.

7. En troisième lieu, si l'office public Toulon Habitat Méditerranée dénonce l'existence de doublons correspondant à des demandes de paiement de factures, il se borne à produire un tableau sous format Excel intitulé " réalisation TFN de 2014 à 2018 " qui, ne reprenant pas les numéros de factures initialement inscrits par la société appelante, ne permet pas de mettre en doute l'analyse de l'expert.

S'agissant des factures rejetées par courrier du 7 novembre 2016 :

8. Le montant des factures numérotées entre 1671122 à 1671816, ayant fait l'objet d'un rejet de paiement de la part de l'office public Toulon Habitat Méditerranée dans le courrier du 7 novembre 2016 et ayant fait l'objet d'une réclamation régulière de la part de la société Atalian Propreté PACA s'élève à 31 012,52 euros. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise, que l'ensemble des factures sont restées impayées, à l'exception de la facture FC16071813 du 28 juillet 2016 d'un montant de 1 248 euros toutes taxes comprises, mentionnée comme payée sur l'attestation de paiement du 12 février 2018 établie par l'office public Toulon Habitat Méditerranée. Il s'en déduit un reste à régler à hauteur de 29 764,52 euros.

S'agissant des factures rejetées par courrier du 14 février 2017 :

9. En ce qui concerne le montant total de 55 244,10 euros de factures dont le règlement a été réclamé par l'appelante dans son courrier du 14 mars 2017, il y a lieu, comme le propose l'expert, de fixer le montant de factures restées dues à la somme de 32 074,27 euros.

S'agissant des factures mentionnées dans les courriers des 28 juillet 2017 et 12 octobre 2017 :

10. Il résulte de l'instruction que par un courrier du 12 octobre 2017, la société Atalian Propreté PACA a réclamé une somme totale de 204 170,08 euros. Parmi le total de quatre-cent-une factures dont le paiement est réclamé à ce titre, il résulte de l'instruction que doivent être soustraites les cent-huit factures déjà prises en compte au point 8 et objet de la réclamation du 7 novembre 2016, les soixante-sept factures mentionnées au point précédent et objet de la réclamation du 14 février 2017, ainsi que les trente-huit factures présentes dans la liste annexée à la réclamation du 18 novembre 2016, dont il a été jugé dans l'arrêt avant dire droit du 27 février 2023 qu'elle n'avait pas été présentée dans les délais de deux mois suivant la naissance du différend. Ainsi, parmi les factures dont le paiement est dû, il y a lieu de retenir la somme de 111 646,35 euros.

11. Il se déduit de ce qui précède un montant total restant dû à hauteur de 173 485,14 euros dont il y a lieu de déduire un montant non contesté d'avoirs et règlement non lettrables à hauteur de 8 199,92 euros, en conséquence de quoi la somme due par l'office public Toulon Habitat Méditerranée à la société Atalian Propreté PACA doit être fixée à 165 285,22 euros.

Sur les intérêts, leur capitalisation et l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement :

12. Aux termes de l'article 7 du décret du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique : " Lorsque les sommes dues en principal ne sont pas mises en paiement à l'échéance prévue au contrat ou à l'expiration du délai de paiement, le créancier a droit, sans qu'il ait à les demander, au versement des intérêts moratoires et de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement prévus aux articles 39 et 40 de la loi du 28 janvier 2013 susvisée. ". En vertu de ce décret, repris par l'article 11-3 du cahier des clauses administratives particulières, le délai global de paiement est fixé à trente jours calendaires à compter de la réception de la facture, et le taux de l'intérêt moratoire est celui du taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de huit points.

13. Il résulte de ces dispositions et stipulations qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions de la société Atalian Propreté PACA tendant à ce que la somme de 165 285,22 euros qui lui reste due porte intérêts moratoires au taux contractuel, ces intérêts courant à compter de l'expiration du délai de trente jours courant à compter de la date comptable de chaque facture, telle qu'identifiée par l'expert dans les tableaux recensant les différentes factures restant dues. La société est également fondée à demander à ce que l'office public Toulon Habitat Méditerranée soit condamné à lui verser la somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement.

Sur les dépens :

14. Les frais d'expertise taxés par ordonnance de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 10 janvier 2024 à 12 750 euros sont mis à la charge de l'office public Toulon Habitat Méditerranée.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de l'office public Toulon Habitat Méditerranée dirigées contre la société Atalian Propreté PACA qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'office public Toulon Habitat Méditerranée une somme de 2 000 euros à verser à la société Atalian Propreté PACA en application de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : L'office public Toulon Habitat Méditerranée est condamné à verser à la société Atalian Propreté PACA la somme de 165 285,22 euros, somme majorée des intérêts moratoires calculés conformément au point 13 du présent arrêt ainsi que l'indemnité de recouvrement à hauteur de 40 euros.

Article 2 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés au montant de 12 750 euros, sont mis la charge définitive de l'office public Toulon Habitat Méditerranée.

Article 3 : L'office public Toulon Habitat Méditerranée versera à la société Atalian Propreté PACA la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Atalian Propreté PACA et à l'office public Toulon Habitat Méditerranée.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2024, où siégeaient :

- M. Renaud Thielé, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère,

- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 avril 2024.

2

N° 20MA03762


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03762
Date de la décision : 15/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat.

Marchés et contrats administratifs - Règles de procédure contentieuse spéciales - Recevabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Isabelle RUIZ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : CLL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-15;20ma03762 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award