La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/03/2024 | FRANCE | N°23MA01446

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 4ème chambre, 26 mars 2024, 23MA01446


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard

à compter de la notification du jugement à intervenir, et enfin, de mettre à la ch...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, et enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2204918 du 4 mai 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 juin 2023, M. A..., représenté par Me Combe, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 4 mai 2023 ;

2°) d'annuler cet arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 10 janvier 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes, en application des dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de

200 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, et dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, assortie d'une autorisation de travail en vue de la délivrance d'un titre de séjour, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- en écartant le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa vie privée et familiale, le tribunal administratif de Nice a lui-même commis cette erreur ainsi qu'une erreur d'appréciation ;

- il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, et de celles de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'arrêté préfectoral contesté est insuffisamment motivé ;

- en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, cet arrêté comporte des " erreurs grossières " qui permettent de douter de la réalité de l'examen de son cas personnel ;

- le tribunal administratif de Nice a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le jugement est insuffisamment motivé en droit et en fait ;

- le tribunal administratif de Nice a commis des erreurs de fait ;

- le préfet des Alpes-Maritimes a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas présenté d'observations.

Par une ordonnance du 17 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 février 2024, à 12 heures.

Le 29 février 2024, M. A..., représenté par Me Combe, a produit une copie du jugement par lequel son divorce d'avec Mme C... a été prononcé, en réponse à une mesure d'instruction qui lui a été adressée par la Cour, le 28 février 2024 par application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations du public avec l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Revert, président assesseur, pour présider la formation de jugement de la 4ème chambre, en application des dispositions de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lombart a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Né le 15 février 1970 et de nationalité sénégalaise, M. A... s'est marié, le 26 octobre 2016, au Sénégal, avec une ressortissante de nationalité française, puis il est entré en France, le 14 août 2020, sous couvert d'un visa D, en qualité de conjoint de Français. Il s'est alors vu délivrer, en cette même qualité, un titre de séjour valable du 14 août 2020 au 14 août 2021. Le 27 avril 2021, M. A... a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour. Mais, par un arrêté du 10 janvier 2022, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de faire droit à cette demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours tout en fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Par un jugement du 4 mai 2023, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant principalement à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il résulte de l'examen du jugement attaqué qu'il précise les motifs de droit et de fait pour lesquels les premiers juges, qui n'étaient, au demeurant, pas tenus de répondre à tous les arguments développés par M. A..., ont décidé de rejeter la demande de première instance présentée par ce dernier. Il suit de là que le moyen tiré d'un défaut de motivation de ce jugement manque en fait.

3. D'autre part, eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux, les moyens tirés de ce que le tribunal administratif de Nice aurait commis une erreur manifeste d'appréciation, une erreur d'appréciation et des erreurs de fait sont inopérants.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, il convient d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 2 de leur jugement, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté en litige et de l'absence d'examen particulier de la situation de M. A... que ce dernier réitère en cause d'appel sans apporter d'élément nouveau en fait et en droit.

5. En deuxième lieu, si M. A... soutient qu'en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, l'arrêté litigieux comporterait des " erreurs grossières ", un tel moyen, qui n'est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé, ne peut qu'être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : / 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; / 2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; / 3° Lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, il a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. " Selon l'article L. 423-3 du même code : " Lorsque la rupture du lien conjugal ou la rupture de la vie commune est constatée au cours de la durée de validité de la carte de séjour prévue aux articles L. 423-1 ou L. 423-2, cette dernière peut être retirée. / Le renouvellement de la carte est subordonné au maintien du lien conjugal et de la communauté de vie avec le conjoint qui doit avoir conservé la nationalité française. "

7. Au cas particulier, si M. A... a épousé, le 22 janvier 2020, au Sénégal, une ressortissante française et s'il s'est vu délivrer pour ce motif un titre de séjour, il ressort des pièces du dossier que, le 27 avril 2021, les époux ont rédigé une attestation commune indiquant l'engagement d'une procédure de divorce, et que l'appelant a assigné à cette fin son épouse, par un acte d'huissier délivré le 24 novembre 2021. Si ce divorce n'a été prononcé par le juge aux affaires familiales près le tribunal judiciaire de Grasse que par un jugement du 31 mai 2022, il ne ressort pas des pièces du dossier que la communauté de vie avec son épouse aurait perduré à la date de l'arrêté en litige. Dans ces circonstances, le préfet des Alpes-Maritimes, qui a pu à bon droit considérer que la communauté de vie entre les époux avait cessé, n'a pas méconnu les dispositions précitées des articles L. 423-1 et L. 423-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de renouveler le titre de séjour de M. A... en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Le moyen tiré de la violation de ces dispositions doit dès lors être écarté.

8. En quatrième et dernier lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

9. En l'espèce, M. A... expose s'être installé sur le territoire français en 1998.

Il précise y avoir travaillé et y avoir noué une relation amoureuse à compter de l'année 2002, avec une ressortissante française. Toutefois, l'appelant, qui, au demeurant n'allègue pas être alors entré régulièrement en France, n'établit pas, par les pièces qu'il verse au dossier, y avoir résidé continuellement, alors qu'il est constant qu'il a regagné son pays d'origine le

16 octobre 2016 où il s'est marié avec une autre ressortissante française, avant de revenir régulièrement, le 14 mai 2020, sur le territoire français. Ainsi, à la date de l'arrêté en litige, l'intéressé ne justifie que d'une présence très récente sur le territoire français. En outre, ainsi qu'il a été dit, à cette même date, M. A... était en instance de divorce. Il n'a pas d'enfants et ne fait pas état d'une nouvelle relation amoureuse. S'il soutient avoir noué des relations amicales en France, notamment grâce à ses activités sportives, et s'il se prévaut également de la présence d'un cousin, il n'établit, ni même n'allègue être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine qu'il a quitté, pour la dernière fois, en mai 2020, à l'âge de cinquante ans. Enfin, la circonstance qu'il a rempli des missions d'intérim et qu'il a conclu un contrat à durée indéterminée en juillet 2021, soit seulement sept mois avant l'édiction de l'arrêté contesté, n'est pas suffisante pour le faire regarder comme ayant établi le centre de sa vie privée et familiale en France. Au vu de l'ensemble de ces éléments, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas porté au droit de M. A... à mener une vie privée et familiale normale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels son arrêté a été pris. Cet arrêté n'est donc pas intervenu en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cet arrêté n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Il suit de là que ces deux moyens doivent être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sa requête doit dès lors être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction avec astreinte ainsi que ses prétentions relatives aux frais d'instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2024, où siégeaient :

- M. Revert, président,

- M. Martin, premier conseiller,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 mars 2024.

2

No 23MA01446


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01446
Date de la décision : 26/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Autorisation de séjour - Refus de renouvellement.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REVERT
Rapporteur ?: M. Laurent LOMBART
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : COMBE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-26;23ma01446 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award