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15/03/2024 | FRANCE | N°22MA01530

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 15 mars 2024, 22MA01530


Vu les autres pièces du dossier.





Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.



Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.



Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.







Considérant ce qui suit :



1. M. B..., qui détient 95 % de

s parts de la société anonyme à responsabilité limitée (SARL) Nobeltis, laquelle détient 95,40 % de la SARL Yaltis et 95 % de la SARL Presstis, est le gérant de c...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui détient 95 % des parts de la société anonyme à responsabilité limitée (SARL) Nobeltis, laquelle détient 95,40 % de la SARL Yaltis et 95 % de la SARL Presstis, est le gérant de ces trois sociétés. A la suite de la vérification de comptabilité de la SARL Yaltis et d'un contrôle sur pièces des déclarations fiscales de M. B..., l'administration fiscale a constaté que les rémunérations de gérance versées par les trois sociétés étaient supérieures aux montants déclarés par le contribuable. Une proposition de rectification a été adressée le 13 novembre 2017 à M. B..., ayant pour effet de réintégrer dans ses revenus les rémunérations de gérance versées par les sociétés au titre des années 2014 à 2016. M. B... relève appel du jugement du 28 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de ces années.

Sur le désistement partiel :

2. Par un mémoire enregistré le 19 décembre 2023, M. B... a précisé qu'il n'entendait pas demander la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, des " suppléments d'imposition " au titre de l'année 2013. Son désistement étant pur et simple, il y a lieu de lui en donner acte.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre aux conclusions d'appel :

3. Aux termes de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales : " Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation à l'administration. (...) ". Il résulte de ces dispositions que le demandeur ne peut contester devant une juridiction des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation, ni prétendre à un dégrèvement supérieur au montant de celui demandé dans la réclamation.

4. Il résulte de l'instruction que M. B... n'a contesté dans sa réclamation en date du 14 novembre 2018 qu'une partie des redressements qui lui ont été notifiés par la proposition de rectification du 13 novembre 2017, s'agissant des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de prélèvements sociaux et des pénalités mises à sa charge au titre des années 2014 à 2016. Sa contestation portait sur la somme totale de 64 827 euros au titre de l'année 2014, de 69 290,93 euros au titre de l'année 2015 et de 75 992 euros au titre de l'année 2016. Si le requérant a demandé devant le tribunal administratif de Toulon, par un mémoire en réplique enregistré le 28 juillet 2021, puis devant la cour, la décharge totale, en droits, pénalités et intérêts de retard, des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des mêmes années, ces conclusions ne sont pas recevables en tant qu'elles excèdent les limites des réductions demandées par voie de réclamation. Par suite, le ministre est fondé, dans cette mesure et non dans la limite invoquée d'un quantum de 141 389 euros qui ne ressort en tout état de cause pas de la réclamation du contribuable, à soutenir que les conclusions présentées en appel par ce dernier doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

5. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, les conclusions à fin de décharge que M. B... a présentées devant le tribunal administratif de Toulon n'étaient recevables que dans la limite des montants sollicités dans sa réclamation du 14 novembre 2018.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. D'une part, aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices retenus ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ". Aux termes de l'article 62 de ce même code : " Les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes autres rémunérations sont soumis à l'impôt sur le revenu au nom de leurs bénéficiaires s'ils sont admis en déduction des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés par application de l'article 211, même si les résultats de l'exercice social sont déficitaires, lorsqu'ils sont alloués : / Aux gérants majoritaires des sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes (...) ".

7. D'autre part, il résulte des dispositions combinées des articles 12, 13 et 83 du code général des impôts que les sommes à retenir, au titre d'une année déterminée, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires sont celles qui sont mises à la disposition du contribuable, soit par voie de paiement soit par voie d'inscription à un compte courant ou un compte de charges à payer ouvert dans les écritures de la société qui l'emploie, dès lors, dans ces deux derniers cas, que le créancier de la somme est un dirigeant de la société ayant déterminé la décision d'inscrire dans les comptes sociaux la somme qui lui est due et que le retrait effectif de la somme au plus tard le 31 décembre de l'année d'imposition n'est pas rendu impossible, en fait ou en droit, par des circonstances telles que, notamment, la situation de trésorerie de la société, les circonstances matérielles du retrait ou les modalités de détermination du montant exact de la somme susceptible d'être retirée.

8. Enfin, en vertu des dispositions de l'article L. 223-18 du code de commerce, la rémunération du gérant d'une société à responsabilité limitée doit, avant tout versement à son profit, être déterminée soit par les statuts soit par une décision de la collectivité des associés. Ainsi, en l'absence d'une telle stipulation ou d'une telle décision, le retrait de fonds par ce gérant au titre de sa rémunération est impossible en droit, alors même que les sommes en cause figureraient comme charges à payer dans les comptes de la société.

9. Il résulte de l'instruction, en particulier de la proposition de rectification du 13 novembre 2017, que l'administration fiscale a relevé qu'étaient inscrites dans les déclarations de résultats et les écritures comptables de la SARL Nobeltis, des rémunérations de M. B..., gérant majoritaire de cette société, à hauteur de 222 100 euros au titre de l'exercice clos au 30 septembre 2014, 295 400 euros au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2015 et 109 100 euros au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2016. La même constatation a été effectuée s'agissant de la SARL Yaltis, à hauteur de 12 500 euros au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2015 et de 91 200 euros au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2016, et de la SARL Presstis, à hauteur de 130 000 euros au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2016. Or, lors du contrôle sur pièces des déclarations fiscales de M. B..., le service a relevé que ce dernier n'avait déclaré, en traitements et salaires, que les sommes de 111 754 euros au titre de l'année 2014, 124 668 euros au titre de l'année 2015 et 126 000 euros au titre de l'année 2016. Le service a, en conséquence, rectifié les bases d'imposition au titre de chacune de ces années, après prise en compte de certains frais et cotisations sociales admises en déduction.

10. Pour la première fois en appel, le requérant soutient, à l'appui des procès-verbaux des assemblées générales ordinaires des sociétés Nobeltis, Yaltis et Presstis, en date du 1er octobre 2014, du 27 mars 2015, du 26 février 2016 et du 28 février 2017, que les rémunérations de M. B... ont été déterminées par une décision de la collectivité des associés intervenue à une période qui ne coïncide pas avec la clôture des exercices concernés, de sorte que le service s'est trompé en retenant une année d'imposition correspondant aux années de clôture de ces exercices. A cet égard, il résulte de l'instruction que la somme de 222 100 euros, qui n'a été validée que lors de l'assemblée générale ordinaire de la SARL Nobeltis du 27 mars 2015, a été imposée au titre de l'année 2014. La somme de 295 400 euros a fait l'objet d'une décision de l'assemblée générale ordinaire de la même société du 1er octobre 2014 et ne pouvait ainsi être imposée au titre de l'année 2015. La somme de 12 500 euros, qui a été imposée au titre de l'année 2015, a donné lieu à une décision de l'assemblée générale ordinaire de la SARL Yaltis du 26 février 2016, postérieure à cette année d'imposition. Il en va de même des rémunérations de 109 100 euros, 91 200 euros et 130 000 euros, émanant respectivement de décisions des assemblées générales ordinaires des sociétés Nobeltis, Yaltis et Presstis du 28 février 2017, imposées au titre de l'année 2016. Il ne résulte pas de l'instruction et il n'est pas davantage soutenu par le ministre que ces rémunérations auraient été déterminées par les statuts de chacune des sociétés, alors qu'elles l'ont en tout état de cause été par les délibérations des assemblées générales ordinaires précitées. Dans ces conditions, et sans que l'administration puisse utilement faire valoir que les salaires litigieux avaient été déclarés et inscrits dans la comptabilité des sociétés afférente aux exercices clos en cause, M. B... ne peut être regardé comme ayant eu la disposition de ces sommes au titre des années d'imposition litigieuses. Par suite, c'est à tort que l'administration a réintégré les sommes en cause au titre des rémunérations versées à M. B....

11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits, pénalités et intérêts de retard, des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à sa charge au titre des années 2014 à 2016, à raison, compte tenu des éléments exposés au point 4, des sommes de 64 827 euros au titre de l'année 2014, de 69 290,93 euros au titre de l'année 2015 et de 75 992 euros au titre de l'année 2016.

Sur les frais liés au litige :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de M. B... à fin de décharge des suppléments d'imposition au titre de l'année 2013.

Article 2 : M. B... est déchargé, en droits, pénalités et intérêts de retard, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti, à raison des sommes de 64 827 euros au titre de l'année 2014, de 69 290,93 euros au titre de l'année 2015 et de 75 992 euros au titre de l'année 2016.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 28 mars 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 22 février 2024, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente assesseure,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 mars 2024.

N° 22MA01530


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01530
Date de la décision : 15/03/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : VIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-15;22ma01530 ?
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