La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/03/2024 | FRANCE | N°23MA02132

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 08 mars 2024, 23MA02132


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.


<

br> Par un jugement n° 2301766 du 25 mai 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2301766 du 25 mai 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 août 2023, M. B..., représenté par Me Carmier, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour ou subsidiairement de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de son conseil, une somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet aurait dû consulter la commission du titre de séjour dès lors qu'il démontre sa résidence habituelle en France depuis le mois de janvier 2007 ;

- pour les mêmes raisons, la décision portant refus de droit au séjour méconnaît les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- eu égard à ses liens en France, cette décision méconnait également les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, comme celle portant obligation de quitter le territoire français, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est fondée sur une décision portant refus de séjour illégale ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation.

La procédure a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juillet 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Poullain a été entendu en audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien, né en 1941, relève appel du jugement du 25 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2022 du préfet des Bouches-du-Rhône lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) ".

3. Si le requérant produit de nombreux documents destinés à établir sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée, soit depuis le 17 octobre 2012, la copie intégrale de deux passeports qu'il fournit ne couvre pas l'intégralité de la période en cause puisque le premier document délivré en 2004 expirait en 2009 et que le second lui a été remis en 2020. Par ailleurs, les déclarations et avis d'impôt produits ne font apparaître aucun revenu d'activité sur le territoire, les relevés bancaires ne témoignent que de quelques retraits d'argent liquide et M. B... ne justifie d'aucun logement en France, ayant toujours été domicilié par des associations ou hébergé par des tiers. A titre d'exemple, pour l'année 2013, outre son admission à l'aide médicale d'Etat, justifiée jusqu'en 2019, M. B... ne fournit qu'un courrier de confirmation de rendez-vous du 10 janvier, la preuve d'un examen radiologique effectué le 14 février et de trois prélèvements hématologiques réalisés les 18 février, 22 juin et 16 septembre 2013, la copie de six ordonnances médicales des 11 mars, 28 juin, 2 juillet, 2 aout, 8 novembre et 16 décembre, une attestation du consul en date du 12 mars, un courrier de son avocat du 12 juin, ainsi qu'un courrier standard de Pro BTP du 29 juillet. Ces éléments ne suffisent pas, eu égard à leur nature, à établir sa résidence habituelle sur le territoire. Par voie de conséquence, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien auraient été méconnues.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".

5. Les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Un ressortissant algérien ne saurait dès lors utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national.

6. Toutefois, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il lui appartient, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle et professionnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

7. Si M. B... fait valoir qu'il est ancien combattant et qu'il souffre de soucis de santé pris en charge en France, ces éléments ne sont pas, eu égard notamment aux conditions de son séjour en France, exposées ci-dessus au point 3, et alors qu'il ne se prévaut d'aucune attache personnelle ou familiale sur le territoire, de nature à justifier une admission exceptionnelle au séjour. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice du pouvoir de régularisation doit être écarté.

8. En troisième lieu, il résulte des considérations énoncées aux points 3 et 7 ci-dessus que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour, laquelle ne doit l'être que du cas des ressortissants algériens qui remplissent effectivement les conditions prévues aux 1) et 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, équivalents aux dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. Eu égard à ce qui a été exposé au point 7, le moyen tiré de ce que les décisions portant refus de droit au séjour et obligation de quitter le territoire français méconnaitraient les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur la situation personnelle du requérant doit être écarté.

11. En cinquième et dernier lieu, aucun des moyens présentés à l'encontre de la décision portant refus de droit au séjour n'étant fondé, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision, présenté par voie d'exception à l'encontre de celle portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2022 ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction. Dès lors, il y a lieu de rejeter les conclusions d'appel présentées par M. B..., en ce comprises les conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des frais d'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Sylvain Carmier.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 23 février 2024, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Poullain, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 mars 2024.

2

N° 23MA02132

fa


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02132
Date de la décision : 08/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : CARMIER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-08;23ma02132 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award