Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de A... d'annuler l'arrêté du 10 juillet 2023 par lequel le préfet du Var l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour la durée d'un an.
Par un jugement n° 2302206 du 18 août 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de A... a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 septembre 2023, M. B..., représenté par Me Caillouet-Ganet, demande à la cour :
1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 août 2023 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 10 juillet 2023 du préfet du Var ;
4°) d'enjoindre au préfet du Var de procéder à un nouvel examen de sa situation tout en lui délivrant, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision méconnait l'article L. 611-3 1e du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de sa minorité établie par les pièces qu'il produit ;
- elle méconnaît l'article L. 631-4 du même code ;
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français pour la durée d'un an :
- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 24 novembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Rigaud a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant guinéen, relève appel du jugement du 18 août 2023 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de A... a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 juillet 2023 par lequel le préfet du Var lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président (...) ".
3. Par une décision du 24 novembre 2023, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Dès lors, les conclusions présentées par l'intéressé tendant à ce que la cour l'admette provisoirement à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet à la date du présent arrêt. Il n'y a, dès lors, plus lieu d'y statuer.
4. D'une part, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans. (...). ".
5. D'autre part, l'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " La vérification des actes d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". L'article 47 du code civil dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".
6. Lorsqu'est produit devant l'administration un acte d'état civil émanant d'une autorité étrangère qui a fait l'objet d'une légalisation, sont en principe attestées la véracité de la signature apposée sur cet acte, la qualité de celui qui l'a dressé et l'identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu. En cas de doute sur la véracité de la signature, sur l'identité du timbre ou sur la qualité du signataire de la légalisation, il appartient à l'autorité administrative de procéder, sous le contrôle du juge, à toutes vérifications utiles pour s'assurer de la réalité et de l'authenticité de la légalisation.
7. En outre, la légalisation se bornant à attester de la régularité formelle d'un acte, la force probante de celui-ci peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. Par suite, en cas de contestation de la valeur probante d'un acte d'état civil légalisé établi à l'étranger, il revient au juge administratif de former sa conviction en se fondant sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis.
8. A la condition que l'acte d'état civil étranger soumis à l'obligation de légalisation et produit à titre de preuve devant l'autorité administrative ou devant le juge présente des garanties suffisantes d'authenticité, l'absence ou l'irrégularité de sa légalisation ne fait pas obstacle à ce que puissent être prises en considération les énonciations qu'il contient.
9. M. B... se présente comme mineur né le 5 janvier 2007 en se prévalant d'un jugement supplétif d'acte de naissance rendu par le tribunal de première instance de Macenta le 9 janvier 2023 et d'un extrait des registres de l'état civil portant transcription de ce jugement en date du 24 janvier 2023, légalisés par les autorités ministérielles guinéennes. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant a fait des déclarations contradictoires au sujet de son année de naissance durant son audition par les services de police le 10 juillet 2023, et, que par jugement du 23 juin 2023, le tribunal pour enfants de A... a prononcé un non-lieu à mesure de protection après avoir écarté la force probante des actes produits par M. B... aux motifs que l'évaluation sociale menée par les services de l'aide sociale à l'enfance et les constatations à l'audience ont révélé que l'aspect physique de l'intéressé n'était pas compatible avec l'âge allégué de 16 ans et demi, et que le discours de ce dernier était particulièrement flou et impossible à vérifier tant en ce qui concerne son parcours migratoire que ses conditions de départ ou les conditions d'obtention des actes présentés, ces dernières étant particulièrement douteuses sur le mode d'obtention des documents. Le tribunal pour enfant a ainsi écarté la présomption posée par l'article 47 du code civil pour constater que M. B... ne rapportait pas la preuve de sa minorité sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise des documents d'identité par la police aux frontières. Dans la présente instance comme devant les premiers juges, M. B... ne conteste pas utilement les éléments qui ont ainsi été retenus par le tribunal pour enfant et par le préfet du Var. Le préfet a pu légalement remettre en cause la valeur probante des pièces d'état civil présentées par M. B... en se fondant sur ces éléments concordants. Dans ces conditions, c'est à bon droit que la magistrate désignée du tribunal administratif de A... a écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 611-3 1e du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 47 du code civil.
10. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 631-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est repris dans les mêmes termes que ceux énoncés devant le tribunal administratif. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 3 du jugement, le requérant ne critiquant pas utilement le bienfondé de ces motifs.
11. Il résulte de ce précède que le requérant n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée par l'arrêté en litige.
12. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...). ".
13. Il ne ressort ni des écritures de M. B..., ni d'aucune pièce du dossier que l'interdiction de retour sur le territoire français serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées ou que des circonstances humanitaires justifieraient l'absence d'édiction d'une interdiction de retour sur le territoire français.
14. Enfin, si le requérant invoque la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droit de l'homme et des libertés fondamentales, il n'établit pas que l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an prononcée à son encontre porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale eu égard à la très brève durée et aux conditions de son séjour en France et à l'absence de toute attache privée et familiale sur le territoire.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de A... a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle présentée par M. B....
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Me Caillouet-Ganet et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 8 février 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Cécile Fedi, présidente de chambre ;
- Mme Lison Rigaud, présidente assesseure ;
- M. Nicolas Danveau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2024.
N° 23MA02425 2