Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2022 du préfet des Alpes-Maritimes en ce qu'il lui refuse la délivrance d'une attestation de demandeur d'asile et l'oblige à quitter le territoire français et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer ladite attestation.
Par un jugement n° 2205054 du 30 décembre 2022, le magistrat désigné près le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Abassit, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 décembre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la motivation de l'arrêté litigieux est insuffisante et traduit un défaut d'examen personnel de sa situation ;
- les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues ; depuis que ses deux premières demandes ont été rejetées, sa mère s'est vu reconnaître le bénéfice de l'asile ; il est exposé aux mêmes risques qu'elle ; en outre le fait de ne pas avoir déféré à la mobilisation générale pour la guerre en Ukraine l'expose à un nouveau risque ;
- les décisions méconnaissent également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur sa situation ; il réside en France depuis 2012, aux côtés de sa mère, réfugiée, de son frère et de sa tante.
La procédure a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Poullain a été entendu en audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant russe né le 14 juin 1992, relève appel du jugement du 30 décembre 2022 par lequel le magistrat désigné près le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 6 octobre 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a refusé la délivrance d'une attestation de demande d'asile et l'a obligé à quitter le territoire français, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer ladite attestation.
2. En premier lieu, l'arrêté litigieux vise les dispositions applicables et énonce notamment que M. A... a formulé deux demandes de réexamen de son droit au bénéfice de l'asile qui ont été définitivement rejetées et qu'il ne justifie pas avoir durablement fixé le centre de sa vie privée et familiale en France. Alors même que l'intégralité des éléments relatifs à la situation personnelle de l'intéressé n'y sont pas mentionnés ou que le préfet se serait mépris sur l'analyse effectuée, cet arrêté est dès lors suffisamment motivé. Il n'en ressort par ailleurs pas qu'il n'aurait pas été procédé à l'examen particulier de la situation du requérant.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : / (...) / 2° Lorsque le demandeur : / (...) / c) présente une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d'une première demande de réexamen ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 542-3 du même code : " Lorsque le droit au maintien sur le territoire français a pris fin dans les conditions prévues aux articles L. 542-1 ou L. 542-2, l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé. / (...) ". Aux termes de son article L. 542-4 : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 542-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
4. M. A..., qui se déclare d'origine tchétchène et indique être entré en France à la fin de l'année 2012, s'est vu refuser une première fois le bénéfice de l'asile par une décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 4 juin 2014, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile par décision du 11 février 2015. Il ressort de la décision attaquée qu'il a depuis formé deux demandes de réexamen, les 23 février 2016 et 30 juin 2017, qui ont toutes deux été rejetées par des décisions devenues définitives. Pour justifier le dépôt d'une nouvelle demande, il fait valoir que la qualité de réfugiée a été reconnue à sa mère, par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 23 juin 2021. Toutefois, il ne ressort pas de cette dernière décision, qui met surtout en évidence des craintes pour sa mère liées aux activités de son beau-père, que M. A... encourrait lui-même des risques en cas de retour dans son pays d'origine. Ainsi, et alors même qu'absent du territoire russe, il n'a pas été mobilisé dans le cadre de la guerre en Ukraine, le moyen tiré de ce que les décisions contestées méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'omme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Si M. A... soutient être présent en France depuis 2012, il ne l'établit pas par les pièces parcellaires qu'il produit. En tout état de cause, il ne justifie pas d'une quelconque insertion sociale sur le territoire. Il est célibataire et sans charge de famille et a vécu dans son pays d'origine la majeure partie de sa vie. La régularité du séjour de son frère et de sa tante n'est pas établie. Ainsi, malgré la présence régulière de sa mère sur le territoire, le centre de sa vie privée et familiale n'est pas fixé en France de façon telle que les décisions litigieuses y porteraient une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elles ont été prises. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné près le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 6 octobre 2022 ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction. Dès lors, il y a lieu de rejeter les conclusions d'appel qu'il présente, en ce comprises les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles formulées au titre des frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 12 janvier 2024, où siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Vincent, présidente assesseure,
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 janvier 2024.
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N° 23MA00273
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