Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... E... et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du maire de Saint-Etienne-le-Laus en date du 25 février 2021, les mettant en demeure de prendre toutes les mesures aux fins de rétablir la circulation sur le chemin D... et de réinstaller les bornes de limites de propriété.
Par un jugement n° 2103085 du 15 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 12 janvier 2023, Mme E... et M. B..., représentés par Me Arditti, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 décembre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté municipal du 25 février 2021 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Etienne-le-Laus une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le maire ne pouvait exercer son pouvoir de police dès lors qu'il ne s'agit pas d'un chemin rural mais d'une propriété privée ;
- s'il devait s'agir d'un cours d'eau, le pouvoir de police appartiendrait au préfet et les dispositions de l'article L. 215-3 du code de l'environnement en donneraient la libre disposition à Mme E... dès lors qu'il est abandonné ;
- le plan produit par la commune est inexploitable, de sorte que le bornage sollicité est impossible ;
- la commune ne peut s'approprier les parcelles en cause sans conduire une action en revendication devant le juge judiciaire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2023, la commune de Saint-Etienne-le-Laus, représentée par Me Pellegrin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise solidairement à la charge de Mme E... et M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Poullain,
- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,
- et les observations de Me Royer, substituant Me Pellegrin, représentant la commune de Saint-Etienne-le-Laus.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E... est propriétaire de plusieurs parcelles, notamment cadastrées section Z n° 347, 348 et 351 situées à Chaussenoire sur le territoire de la commune d'Avançon et section ZD n° 1 à Pile-Porc sur celui de la commune de Saint-Etienne-le-Laus. M. B... les exploite. Ils relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 février 2021 par lequel le maire de la commune de Saint-Etienne-le-Laus les a mis en demeure principalement de prendre toutes mesures aux fins de rétablir la circulation sur le chemin D....
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 161-5 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorité municipale est chargée de la police et de la conservation des chemins ruraux ". Selon l'article L. 161-1 du même code : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ". L'article L. 161-2 de ce code précise : " L'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale. / (...) ". Enfin, son article L. 161-3 énonce : " Tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le chemin, dit D..., partant du hameau de Chaussenoire sur la commune d'Avançon, sépare de longue date, au nord les parcelles cadastrées section Z n° 619, 349 et 347 situées sur le territoire de cette commune d'une part, et au sud la parcelle cadastrée section ZD n° 1 située sur le territoire de la commune de Saint-Etienne-le-Laus d'autre part, avant de bifurquer vers le nord-est entre les deux parcelles cadastrées section Z n° 347 et 348 situées sur le territoire de la première collectivité. La commune de Saint-Etienne-le-Laus établit par les nombreuses attestations qu'elle produit, que ce chemin, apparaissant sur les photographies anciennes accessibles au public depuis le site Internet Géoportail, identifié en cartographie et figurant au cadastre sans numéro parcellaire, a toujours été utilisé par le public comme voie de passage. Alors même que la commune n'établit pas l'avoir toujours entretenu, son affectation à l'usage public est ainsi présumée, de même que sa propriété communale en application des dispositions citées ci-dessus du code rural et de la pêche maritime.
4. Si les requérants prétendent que ce chemin emprunterait en réalité la propriété de Mme E..., d'une part, il ne passe pas entre ses deux parcelles respectivement cadastrées section Z n° 351 à Avançon et section ZD n° 1 à Saint-Etienne-le-Laus qui sont effectivement limitrophes, d'autre part, ils ne produisent aucun titre de propriété en ce sens, les relevés cadastraux fournis n'identifiant pas ledit chemin. Ils ne sauraient utilement se prévaloir de ce que le plan de remembrement établi en 1954 pour la commune d'Avançon ne fait logiquement pas apparaître la partie de ce chemin située sur le territoire de la commune de Saint-Etienne-le-Laus, en litige. Les circonstances qu'il s'agirait du lit d'un ancien torrent, que le plan de remembrement établi en 1970 pour la commune de Saint-Etienne-le-Laus, qui corrobore l'existence de ce chemin, n'aurait pas été établi de façon contradictoire, que la commune ne détiendrait pas de titre de propriété ou que les requérants en auraient précisément condamné l'accès il y a une dizaine d'années ne sont pas davantage de nature à apporter la preuve contraire des présomptions d'affectation à l'usage public et de propriété communale.
5. Dès lors, en application de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime, le chemin D... constitue, sur le territoire de la commune de Saint-Etienne-le-Laus, un chemin communal, qui se prolonge d'ailleurs, sans que cela ne soit contesté, par le chemin communal n° 24 de la commune d'Avançon. Le maire de la commune de Saint-Etienne-le-Laus avait dès lors compétence pour exercer, en prenant l'arrêté litigieux, le pouvoir de police qu'il tient de l'article L. 161-5 du même code afin de rétablir le passage sur ledit chemin.
6. En deuxième lieu, ainsi que le relève les requérants eux-mêmes, le chemin en cause ne constitue pas un cours d'eau. Dès lors les moyens tirés de ce que le préfet détiendrait le pouvoir de police en application de l'article L. 215-7 du code de l'environnement ou de ce que Mme E... en aurait la libre disposition en application de l'article L. 215-3 du même code doivent être écartés.
7. En troisième lieu, il ne saurait être sérieusement soutenu que la remise du chemin en l'état, notamment la réinstallation des bornes limites de propriété, serait impossible eu égard à la mauvaise qualité du plan de remembrement produit par la commune alors que, comme le mentionne l'arrêté litigieux, les requérants peuvent, le cas échéant, faire appel à un géomètre-expert pour ce faire.
8. En quatrième et dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire aurait entendu, en prenant l'arrêté litigieux, non pas exercer son pouvoir de police, mais affirmer la propriété communale en s'épargnant une action en revendication. Le moyen tiré du détournement de procédure doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... et M. B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Saint-Etienne-le-Laus qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E... et M. B... la somme globale de 3 000 euros à verser à la commune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme E... et M. B... est rejetée.
Article 2 : Mme E... et M. B... verseront la somme globale de 3 000 euros à la commune de Saint-Etienne-le-Laus au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E..., à M. A... B... et à la commune de Saint-Etienne-le-Laus.
Délibéré après l'audience du 12 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Vincent, présidente assesseure,
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 janvier 2024.
2
N° 23MA00076
fa