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23/01/2024 | FRANCE | N°22MA03098

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 23 janvier 2024, 22MA03098


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler le certificat d'urbanisme du 18 mars 2020 par lequel le maire d'Olmeta-di-Tuda a déclaré non réalisable la construction de trente-deux logements sur les parcelles cadastrées section B n°s 391 et 392, au lieu-dit Forno, ensemble la décision du 27 juillet 2020 rejetant son recours gracieux contre cette mesure.



Par un jugement n° 2001013 du 21 octobre 2022, le tribunal administratif de Basti

a a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler le certificat d'urbanisme du 18 mars 2020 par lequel le maire d'Olmeta-di-Tuda a déclaré non réalisable la construction de trente-deux logements sur les parcelles cadastrées section B n°s 391 et 392, au lieu-dit Forno, ensemble la décision du 27 juillet 2020 rejetant son recours gracieux contre cette mesure.

Par un jugement n° 2001013 du 21 octobre 2022, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Filippini, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 21 octobre 2022 ;

2°) d'annuler ce certificat du 18 mars 2020 et cette décision du 27 juillet 2020 ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Olmeta-di-Tuda les entiers dépens et la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- son projet, qui est compatible avec le classement de ses parcelles en zone AU 1 au plan local d'urbanisme, se situe en continuité avec un groupe d'habitations existant, au sens de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme qui doit être lu conformément au principe d'égalité devant la loi, et l'arrêté en litige a été pris en méconnaissance de ces dispositions ;

- c'est à tort que ses parcelles sont identifiées au plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC) en zone forestière, la cartographie des espaces stratégiques agricoles ayant été annulée par le tribunal et le secteur assez construit ne revêtant pas un caractère forestier ou pastoral, de sorte que, par la voie de l'exception, l'arrêté en litige est illégal pour s'être fondé sur l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme, tel que précisé par ce document ;

- cet arrêté méconnaît le principe d'égalité devant la loi découlant de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, dès lors que des voisins du projet, placés dans une situation identique à la sienne, ont obtenu un permis de construire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2023, la commune d'Olmeta-di-Tuda, représentée par Me Muscatelli, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de son auteur la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en faisant valoir que les moyens d'appel ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 3 octobre 2023 la clôture d'instruction a été fixée au 24 octobre 2023, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- l'arrêté interministériel du 6 septembre 1985 délimitant la zone de montagne en France métropolitaine ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Revert,

- et les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a déposé le 19 février 2020 une demande de certificat d'urbanisme pour la réalisation, sur les parcelles cadastrées 0-B 0391 et 0-B-392, situées lieu-dit Forno sur la commune d'Olmeta-di-Tuda, d'un ensemble de neuf bâtiments destinés à accueillir trente-deux logements. Par un certificat d'urbanisme du 18 mars 2020, le maire de la commune d'Olmeta-di-Tuda a déclaré non réalisable cette opération. Par un jugement du 21 octobre 2022, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce certificat d'urbanisme et de la décision du 27 juillet 2020 rejetant son recours gracieux contre ce certificat.

Sur le cadre juridique applicable :

2. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. ".

3. En outre, aux termes de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme : "L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes, ainsi que de la construction d'annexes, de taille limitée, à ces constructions, et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées. ". L'article L. 122-5-1 de ce code précise que : " Le principe de continuité s'apprécie au regard des caractéristiques locales de l'habitat traditionnel, des constructions implantées et de l'existence de voies et réseaux ".

4. Il résulte des dispositions citées au point précédent, d'une part, qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol mentionnée à l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet aux dispositions du code de l'urbanisme particulières à la montagne et, d'autre part, que l'urbanisation en zone de montagne, sans être autorisée en zone d'urbanisation diffuse, peut être réalisée non seulement en continuité avec les bourgs, villages et hameaux existants, mais également en continuité avec les " groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants " et qu'est ainsi possible l'édification de constructions nouvelles en continuité d'un groupe de constructions traditionnelles ou d'un groupe d'habitations qui, ne s'inscrivant pas dans les traditions locales, ne pourrait être regardé comme un hameau. L'existence d'un tel groupe suppose plusieurs constructions qui, eu égard notamment à leurs caractéristiques, à leur implantation les unes par rapport aux autres et à l'existence de voies et de réseaux, peuvent être perçues comme appartenant à un même ensemble. Pour déterminer si un projet de construction réalise une urbanisation en continuité par rapport à un tel groupe, il convient de rechercher si, par les modalités de son implantation, notamment en termes de distance par rapport aux constructions existantes, ce projet sera perçu comme s'insérant dans l'ensemble existant.

5. Le plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC), qui peut préciser les modalités d'application de ces dispositions en application du I de l'article L. 4424-11 du code général des collectivités territoriales, adopté par la délibération n° 15/235 AC du 2 octobre 2015 de l'assemblée de Corse, prévoit qu'un bourg est un gros village présentant certains caractères urbains, qu'un village est plus important qu'un hameau et comprend ou a compris des équipements ou lieux collectifs administratifs, culturels ou commerciaux, et qu'un hameau est caractérisé par sa taille, le regroupement des constructions, la structuration de sa trame urbaine, la présence d'espaces publics, la destination des constructions et l'existence de voies et équipements structurants. Ces prescriptions apportent des précisions aux dispositions du code de l'urbanisme particulières à la montagne et sont compatibles avec celles-ci. En revanche, le PADDUC se borne à rappeler les critères mentionnés ci-dessus et permettant d'identifier un groupe de constructions traditionnelles ou d'habitations existant et d'apprécier si une construction est située en continuité des bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la légalité du certificat d'urbanisme négatif :

6. Pour déclarer non réalisable le projet de M. A... d'un ensemble immobilier de trente-deux logements et lui délivrer en conséquence un certificat d'urbanisme négatif, le maire de la commune d'Olmeta-di-Tuda s'est fondé sur le motif tiré de l'application du principe d'urbanisation en continuité de l'existant posé par l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme, et sur l'illégalité du classement des parcelles d'assiette de ce projet en zone AU 1 au plan local d'urbanisme communal.

7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que les parcelles d'assiette du projet en litige, de quelque 1,4 hectares, sont situées à 4 kilomètres du village, dans un vaste ensemble naturel, et séparées des trois constructions qui, implantées de part et d'autre d'une voie, leur sont les plus proches, par la route départementale qui les en distingue nettement, cependant que les autres constructions, situées au sud-ouest et au nord-est, en sont distantes de plus de 50 mètres. Ainsi, alors que compte tenu de leurs propres modalités d'implantation et de la distance qui les sépare, les constructions existantes ne peuvent être regardées comme constituant un groupe d'habitations existant, le projet en litige lui-même ne s'insère pas non plus dans un ensemble existant. Par suite, M. A... ne justifiant ni même n'alléguant que son projet s'implanterait en continuité avec un bourg, village ou hameau existant, dont il ne peut utilement invoquer une lecture conforme au principe d'égalité devant la loi, son moyen tiré de ce que le maire aurait fait une mauvaise application de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté.

8. D'autre part, pour soutenir que son projet est conforme aux dispositions citées au point 3 de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme, M. A... ne peut utilement se prévaloir du classement de son terrain en zone AU 1 au plan local d'urbanisme de la commune, compte tenu du seul rapport de compatibilité entre un tel document et les règles spécifiques à l'aménagement et à la protection des zones de montagne, issues notamment de l'article L. 122-5, et du rapport de conformité qui prévaut entre les décisions individuelles relatives à l'occupation ou à l'utilisation du sol et ces mêmes règles.

9. Enfin, le principe d'égalité des citoyens devant la loi ne saurait être invoqué pour justifier la demande d'un avantage illégal. M. A... ne peut dès lors se prévaloir d'un tel principe pour demander l'annulation du certificat d'urbanisme négatif litigieux, ni de la circonstance que, sur d'autres terrains compris dans le même secteur, ont été accordées des autorisations de construire.

En ce qui concerne la légalité de la décision du 27 juillet 2020 rejetant le recours gracieux de M. A... :

10. En prenant la décision du 27 juillet 2020 par laquelle il a rejeté le recours gracieux formé par M. A... contre le certificat d'urbanisme négatif du 18 mars 2020, le maire d'Olmeta-di-Tuda ne peut être regardé comme ayant entendu retirer ou modifier sa décision initiale et n'a pas eu à se prononcer au vu de circonstances de fait ou de droit nouvelles, et ce, alors même qu'il a cru devoir fonder sa décision de rejet sur un motif supplémentaire, tiré du non-respect par le projet de M. A... des dispositions de l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme, telles que précisées par le PADDUC. Par suite, M. A... n'étant pas fondé à demander l'annulation du certificat d'urbanisme négatif du 18 mars 2020, ses conclusions dirigées contre la décision du 27 juillet 2020, qui se borne à la confirmer sur recours gracieux, doivent être également rejetées, sans que l'intéressé puisse utilement critiquer le motif propre de cette décision.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande dirigée contre les décisions des 18 mars 2020 et 27 juillet 2020.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune d'Olmeta-di-Tuda, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme de 2 000 euros à verser à ce titre à la commune d'Olmeta-di-Tuda.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la commune d'Olmeta-di-Tuda la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune d'Olmeta-di-Tuda.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2024, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2024.

N° 22MA030982


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