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16/11/2023 | FRANCE | N°22MA02278

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 16 novembre 2023, 22MA02278


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil de la métropole d'Aix-Marseille-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) du territoire Marseille-Provence.

Par un jugement n° 2007514 du 9 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette délibération en tant que sont classés :

- en zone UP2b, le secteur non bâti situé à l'ouest de la voie menant

au quartier des Devens et chemin des Garlaban sur le territoire de la commune de Ceyreste...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil de la métropole d'Aix-Marseille-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) du territoire Marseille-Provence.

Par un jugement n° 2007514 du 9 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette délibération en tant que sont classés :

- en zone UP2b, le secteur non bâti situé à l'ouest de la voie menant au quartier des Devens et chemin des Garlaban sur le territoire de la commune de Ceyreste ;

- en zone UQP le secteur situé à proximité du camping sur le territoire de la commune de Ceyreste ;

- en zone UP2a une parcelle non bâtie située au nord du lotissement Saint Jean sur le territoire de la commune de Gémenos ;

- en zone UEa1 un secteur situé dans le quartier de Saint-Tronc sur le territoire de la commune de Marseille ;

- en zone UEa1 un secteur situé au lieu-dit " I... " sur le territoire de Roquefort-la-Bédoule ;

- en zone UCt2 un secteur situé au lieu-dit E... sur le territoire de la commune de Sausset-les-Pins ;

- en zone UP2b deux secteurs situés, pour l'un au lieu-dit A..., pour l'autre au lieu-dit G..., sur le territoire de la commune de Septèmes-les-Vallons ;

- en zone UQP la bande de terrain incluse dans un secteur UQP et limitrophe d'une zone Ns au lieu-dit H... sur le territoire de la commune de Septèmes-les-Vallons ;

- en zone UP1 deux parcelles non construites situées au lieu-dit F..., en partie nord, sur le territoire de la commune de Septèmes-les-Vallons ;

- en zone A2 un secteur constituant sur un axe nord-sud une coupure d'urbanisation entre les enveloppes urbaines de Châteauneuf-les-Martigues et de Gignac-la-Nerthe, dans la plaine agricole de Châteauneuf-les-Martigues ;

- tous les secteurs classés en zone Nh et situés dans les communes soumises à la loi Littoral, en dehors des agglomérations et villages existants et à proximité de zones agricoles ou naturelles de zonage Ns ;

- en zone Nt deux secteurs situés sur la colline de Notre-Dame sur le territoire de la commune de Marignane ;

- en zone UP2b, le compartiment non urbanisé d'un secteur ainsi classé situé sur le territoire de l'opération d'aménagement et de programmation MRS-16 relative aux quartiers de Saint-Antoine- La Bricarde- la Castellane à Marseille ;

- en zone Nt un secteur vierge de toute construction, situé à la Marcouline sur le territoire de la commune de Cassis ;

- en zone AU2, 41,6 hectares correspondant à un projet dit B..., sur le territoire de la commune de Gignac-la-Nerthe.

Par ce même jugement, le tribunal administratif de Marseille a également annulé cette délibération, d'une part, en tant que l'orientation d'aménagement et de programmation du Coupier sur le territoire de la commune de Gémenos, et l'orientation d'aménagement et de programmation Val Tendre sur le territoire de la commune de Ceyreste prévoient, dans les zones que ces OAP dédient à l'extension de l'urbanisation, une densité en logements à l'hectare incohérente avec celle prescrite par le projet d'aménagement et de développement durables, d'autre part, en tant que la parcelle cadastrée OK0092 dans la calanque de Morgiou et les espaces non construits du campus de Luminy ne sont pas inclus dans les espaces naturels remarquables figurant aux planches graphiques du PLUi.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 août 2022, la métropole d'Aix-Marseille-Provence, représentée par Me Mialot et Me Poulard, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 juin 2022 en tant qu'il a annulé la délibération du 19 décembre 2019 en tant que sont classés en zone UP2a une parcelle non bâtie située au nord du lotissement Saint Jean sur le territoire de la commune de Gémenos, en zone A2 un secteur constituant sur un axe nord-sud une coupure d'urbanisation entre les enveloppes urbaines de Châteauneuf-les-Martigues et de Gignac-la-Nerthe, dans la plaine agricole de Châteauneuf-les-Martigues, en zone Nt un secteur vierge de toute construction, situé à la Marcouline sur le territoire de la commune de Cassis, en zone AU2, 41,6 hectares correspondant à un projet dit B..., sur le territoire de la commune de Gignac-la-Nerthe et en tant que les espaces non construits du campus de Luminy ne sont pas inclus dans les espaces naturels remarquables figurant aux planches graphiques du PLUi.

2°) de rejeter dans cette mesure le déféré du préfet des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à elle seule, la situation à l'intérieur du site inscrit des Calanques des espaces non construits du campus de Luminy, d'ailleurs anthropisés, ne justifie pas leur inclusion dans les espaces naturels remarquables ;

- dès lors que le cahier global et les cahiers communaux du PADD ont la même valeur juridique et que la cohérence entre le règlement du PLUi et les orientations pertinentes du PADD doit s'apprécier à l'échelle du territoire couvert par le PLUi, le classement en zone AU2 du secteur correspondant au projet dit B... n'est pas entaché d'une telle incohérence ;

- les autres moyens soulevés par le préfet des Bouches-du-Rhône à l'encontre de ce classement et tirés de l'incompatibilité avec les orientations du SCoT et avec la directive territoriale des Bouches-du-Rhône ne sont pas fondés ;

- le classement en zone A2 d'un secteur situé entre les enveloppes urbaines de Châteauneuf-les-Martigues et de Gignac-la-Nerthe ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 121-22 du code de l'urbanisme eu égard à ses caractéristiques et aux effets d'un tel classement ;

- le classement en zone UP2a d'une parcelle non bâtie située au nord du lotissement Saint- Jean sur le territoire de la commune de Gémenos n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement en zone Nt d'un secteur vierge de toute construction, situé à la Marcouline, ne méconnaît pas les dispositions du premier alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort, rapporteur,

- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,

- et les observations de Me Poulard, représentant la métropole d'Aix-Marseille-Provence, et de Mme C..., représentant le préfet des Bouches-du-Rhône.

Une note en délibéré a été enregistrée le 31 octobre 2023, présentée par la métropole Aix Marseille Provence et non communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet des Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal administratif de Marseille l'annulation partielle de la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil de la métropole d'Aix-Marseille-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) du territoire Marseille-Provence. Par un jugement du 9 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a partiellement fait droit aux conclusions du préfet en annulant la délibération déférée en ce qui concerne le classement de certains secteurs, la densité en logements à l'hectare prévue par deux orientations d'aménagement et de programmation et l'exclusion de deux secteurs des espaces naturels remarquables figurant aux planches graphiques du PLUi. La métropole d'Aix-Marseille-Provence relève appel de ce jugement en tant seulement qu'il a annulé la délibération du 19 décembre 2019 en tant que sont classés en zone UP2a une parcelle non bâtie située au nord du lotissement Saint-Jean sur le territoire de la commune de Gémenos, en zone A2 un secteur constituant sur un axe nord-sud une coupure d'urbanisation entre les enveloppes urbaines de Châteauneuf-les-Martigues et de Gignac-la-Nerthe, dans la plaine agricole de Châteauneuf-les-Martigues, en zone Nt un secteur vierge de toute construction, situé à la Marcouline sur le territoire de la commune de Cassis, en zone AU2, 41,6 hectares correspondant à un projet dit B..., sur le territoire de la commune de Gignac-la-Nerthe et en tant que les espaces non construits du campus de Luminy ne sont pas inclus dans les espaces naturels remarquables figurant aux planches graphiques du PLUi.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la commune de Cassis :

2. L'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dispose : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants. / Dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, des constructions et installations peuvent être autorisées, en dehors de la bande littorale de cent mètres, des espaces proches du rivage et des rives des plans d'eau mentionnés à l'article L. 121-13, à des fins exclusives d'amélioration de l'offre de logement ou d'hébergement et d'implantation de services publics, lorsque ces constructions et installations n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre bâti existant ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti. Ces secteurs déjà urbanisés se distinguent des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs. (...) ". Il résulte des articles L. 131-4 et L. 131-7 du même code, que, s'agissant d'un plan local d'urbanisme (PLU), il appartient à ses auteurs de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de sa compatibilité avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral. Dans le cas où le territoire concerné est couvert par un schéma de cohérence territorial (SCoT), cette compatibilité s'apprécie en tenant compte des dispositions de ce document relatives à l'application des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, sans pouvoir en exclure certaines au motif qu'elles seraient insuffisamment précises, sous la seule réserve de leur propre compatibilité avec ces dernières.

3. Sur le territoire de la commune de Cassis, les auteurs du PLUi ont classé en zone Nt un secteur situé à la Marcouline. D'une part, alors que ce secteur est vierge de toute construction, le règlement indique que ce zonage recouvre " des secteurs naturels, notamment voués à des activités touristiques et de loisirs de plein air ", dans lesquels sont admises sous conditions les constructions de la sous-destination " locaux et bureaux accueillant du public des administrations publiques et assimilés ". D'autre part, ce secteur borde à l'est, un secteur Ns, et à l'ouest deux secteurs Ns dénués de toute construction. Il jouxte également au nord un secteur Nh dans lequel se trouve, à distance, un groupe de quelques constructions dont le nombre est insuffisant pour constituer une agglomération ou un village existants au sens de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. Le secteur Nt litigieux fait en outre face, à l'ouest, de l'autre côté de la route de la Bédoule, sur une longueur de 20 à 30 mètres seulement, à un secteur UEc1correspondant aux zones ouvertes à toutes les activités économiques, y compris commerciales avec des hauteurs de façade maximales limitées à 10 mètres, dans lequel sont construits un immeuble, au nord de ce secteur et à distance de cette limite commune et où d'autres bâtiments étaient en cours de construction à la date d'approbation du PLUi au sud du secteur mais encore à distance de cette limite d'ailleurs positionnée sur une voie de communication démarquant deux compartiments distincts. Il confronte aussi, à l'ouest un secteur UV3, délimité en continuité des secteurs précités UEc1 et Ns, la zone UV3 couvrant notamment " de grands espaces végétalisés urbains à vocation sportive ou de loisirs, sur lesquels des projets de développement complémentaires modérés sont identifiés pour améliorer leur fonctionnement ", le règlement y autorisant une constructibilité " légèrement accrue mais toujours relativement modeste eu égard à la superficie des sites ". Etant constaté que le SCoT de Marseille-Provence ne comporte pas de dispositions relatives à l'application des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral portant sur ce secteur et dans la mesure où il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, le classement en zone Nt contesté par le préfet est compatible avec les dispositions de l'article L. 121-28 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne la commune de Châteauneuf-les-Martigues :

4. Aux termes de l'article L. 121-22 du code de l'urbanisme : " Les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme doivent prévoir des espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation. ".

5. Dans son cahier spécifique à la commune de Châteauneuf-les-Martigues, le PADD du PLUi du territoire Marseille-Provence reconnaît que l'agriculture de plaine, qui participe à la qualité paysagère en maintenant de grands espaces ouverts, telle la plaine de Châteauneuf-les-Martigues/Gignac-la-Nerthe, doit être préservée, celle-ci étant repérée à ce titre sur la carte annexée localisant ces orientations. Il rappelle que celle-ci accueille l'un des espaces d'agriculture de plaine principaux du territoire de Marseille Provence, qu'il convient de préserver de l'urbanisation, " dans le respect des objectifs de protection des zones agricoles et des contraintes règlementaires liées à la DTA et à la Loi Littoral, tout en favorisant son exploitation " et d'assurer la préservation durable de ces espaces dès lors qu'ils " jouent un rôle économique important " et " contribuent à l'entretien des paysages et au maintien d'une coupure d'urbanisation ".

6. Il ressort des pièces du dossier que le PLUi litigieux a institué les trois principales coupures à l'urbanisation identifiées au SCoT de Marseille-Provence et par la DTA des Bouches-du-Rhône et notamment qui recouvre les abords de l'étang de Bolmon dans les zones humides ou agricoles de Marignane et de Châteauneuf-les-Martigues, au nord de la RD n° 568. Il a prévu par ailleurs sept autres coupures d'urbanisation environ. Il résulte du rapport de présentation que les auteurs du PLUi ont entendu assurer la préservation de l'ensemble de ces coupures d'urbanisation par la reconnaissance des parcelles non construites et l'application d'une zone et d'un règlement adéquat, empêchant la réalisation de constructions nouvelles pour éviter la conurbation entre deux secteurs urbains, soit par un classement en zones Ns, Nt, Nh et A1. Ne sont admises en zone agricole A1, sous conditions, les constructions de la sous-destination " locaux techniques et industriels des administrations publiques et assimilés " ainsi que les châssis et serres.

7. La plaine agricole de Châteauneuf-les-Martigues, grand espace ouvert et peu construit, comme il a été dit, qui s'intercale, au sud de de la RD n° 568, entre, l'ouest, l'enveloppe urbaine de Châteauneuf-les-Martigues et, à l'est, celle de Gignac-la-Nerthe, a été classée en zone agricole A2 dans laquelle sont admises sous conditions les bâtiments relevant des sous-destinations " exploitation agricole " et " logement " et les installations classées pour la protection de l'environnement à condition qu'ils soient nécessaires à l'exploitation agricole. Alors même que l'application de ce zonage n'exclut pas toute urbanisation de cet espace naturel, eu égard au nombre de coupures d'urbanisation préservées par le PLUi et à la localisation de ce secteur, les dispositions de l'article L. 121-22 du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnues, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges.

En ce qui concerne la commune de Marseille :

8. Aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. / Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, (...) ". Aux termes de l'article R. 121-4 du même code : " En application de l'article L. 121-23, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral et sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : (...) 7° Les parties naturelles des sites inscrits ou classés en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de l'environnement, des parcs nationaux créés en application de l'article L. 331-1 du code de l'environnement et des réserves naturelles instituées en application de l'article L. 332-1 du code de l'environnement ; (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que le secteur du campus de Luminy, entièrement compris dans le site inscrit des Calanques, a été classé en zone UQM2, zones principalement dédiées au développement et au fonctionnement d'équipements d'envergure métropolitaine dans lesquelles sont notamment admis des commerces et services de proximité. Il constitue une enclave au sein d'une vaste zone classée Ns correspondant à une zone naturelle inconstructible, à l'exception d'aménagement nécessaire à l'amélioration de la protection ou de la mise en valeur des sites concernés. Le rapport de présentation du PLUi du territoire Marseille-Provence précise que le classement en zone Ns permet d'assurer la préservation des espaces naturels remarquables identifiés par le plan local d'urbanisme pour répondre à l'exigence fixée en ce sens par l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme. Le rapport expose que la méthode retenue pour délimiter ces espaces a consisté à reprendre la délimitation opérée par la directive territoriale d'aménagement (DTA) des Bouches-du-Rhône, en la précisant à une échelle plus fine et en la réajustant au regard des évolutions d'occupations ou de protections connues, ce qui a conduit à procéder à une adaptation des limites au regard notamment d'un " arrêt à la limite urbaine, supposant parfois un réajustement fin dans les secteurs de franges mités ". Le rapport indique ainsi qu'il a été procédé à un tel ajustement au niveau du Technopôle de Luminy, en excluant du périmètre tous les secteurs d'équipements technopolitains existants ou projetés. Selon les explications données en appel par la métropole d'Aix-Marseille-Provence et les indications figurant sur la planche complémentaire 06 du règlement graphique, la limite des espaces naturels remarquables autour du campus coïncide avec le tracé de la piste de défense contre l'incendie (DFCI) qui l'entoure. Il ressort des vues aériennes du secteur figurant au dossier que plusieurs zones boisées, d'ailleurs classées en zone rouge du plan de prévention des risques d'incendie de forêt (PPRIF) de Marseille sont comprises à l'intérieur de ce périmètre et en continuité avec les espaces naturels situés à l'extérieur. Eu égard à leur étendue, au maillage viaire et en dépit de la présence de locaux universitaires de moyenne ampleur dispersés dans le campus, ces zones, identifiées par le préfet des Bouches-du-Rhône sur une carte jointe à son mémoire en défense produit en première instance, doivent être regardées comme étant restées à l'état naturel, la métropole d'Aix-Marseille-Provence n'ayant pas situé les lieux représentés sur les photographies dont elle se prévaut. Elles constituent dès lors des parties naturelles du site inscrit des Calanques devant être préservées en application de l'article L. 121-23 et du 7° de l'article R. 121-4 du code de l'urbanisme. En s'abstenant d'identifier ces zones à ce titre et ainsi d'assurer leur préservation, les auteurs du PLUi ont méconnu ces dispositions.

En ce qui concerne la commune de Gignac-la-Nerthe :

10. Aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".

11. Pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme (PLU) entre le règlement et le PADD, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le PADD, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du PLU à une orientation ou à un objectif du PADD ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

12. Le PADD du PLUi du territoire Marseille-Provence comporte d'abord un cahier global, qui, après avoir exposé que l'agriculture du territoire doit être protégée et la consommation des terres interrompue, inclut parmi les orientations stratégiques celle de protéger strictement les terrains cultivés en zone urbaine. Identifiant par ailleurs l'objectif de " localiser le développement économique en cohérence avec les principes du développement durable ", il constate à ce titre un " double enjeu d'attractivité des zones d'activités économiques dédiées, en favorisant la mise en place de caractéristiques urbaines favorables mais aussi de dimensionnement de l'offre, de sorte qu'elle réponde aux besoins tout en assurant une maîtrise de la consommation foncière ". Les orientations stratégiques correspondantes visent à favoriser la mobilisation des capacités résiduelles et l'optimisation des zones d'activités dédiées, à dimensionner les zones d'urbanisation future destinées au développement économique en rapport avec les capacités résiduelles et les besoins et à définir les zones d'urbanisation future à vocation économique, y compris touristiques et de loisirs, en fonction de leur pertinence urbaine au regard des critères environnementaux, d'accessibilité et de cohérence urbaine et dans la limite d'une enveloppe globale de l'ordre de 275 ha, avec la répartition suivante : une trentaine d'hectares pour le bassin Est, 120 ha pour le bassin centre et environ 125 hectares pour le bassin Ouest. Ensuite, le cahier communal propre à la commune de Gignac-la-Nerthe constate, s'agissant des zones urbaines à vocation économique, que " bénéficiant de la dynamique des pôles économiques de l'est étang de Berre, Gignac-la-Nerthe contribue au développement de l'emploi sur le territoire de Marseille Provence en s'appuyant sur la valorisation et la restructuration de ses espaces dédiés existants ". Ce document précise que " la commune entend inscrire son développement dans une stratégie d'ensemble avec la zone des Florides et la future zone du B... ". En outre, s'agissant des zones d'urbanisation future à vocation économique, il insiste sur la maîtrise de la consommation d'espace et confirme l'intention " d'inscrire le projet du B... dans la continuité du développement des Florides et du projet Henri Fabre, afin de dynamiser le tissu économique sur le site du projet et sur les zones intercommunales voisines ". Le cahier communal comporte une carte localisant la zone d'urbanisation future du B... en continuité au sud-ouest et au sud de la zone des Florides, dont la vocation économique doit être confortée à cet endroit, et limitée à l'est par un espace agricole dit D... à préserver.

13. Le préfet des Bouches-du-Rhône a contesté en première instance la création par les auteurs du PLUi litigieux de deux secteurs formant la zone dite du B...-Bricard classés en zone AU2 d'urbanisation stricte à vocation principale d'activités économiques, l'un situé sur le territoire de la commune de Gignac-la-Nerthe, d'une superficie de 33,3 hectares, l'autre sur le territoire de la commune de Marignane, de l'autre côté de la route départementale n° 368, d'une superficie de 8,3 hectares environ, soit une superficie totale de 41,6 hectares. Les limites de ces secteurs correspondent sensiblement à celles qui sont envisagées sur la carte annexée au PADD, citée ci-dessus. En particulier, ils s'inscrivent dans la continuité de la zone des Florides classée UEb2, correspondant aux zones principalement dédiées au développement d'activités industrielles et logistiques ainsi que de bureaux avec des hauteurs de façade maximales limitées à 18 mètres. Le secteur situé sur la commune de Gignac-la-Nerthe préserve un espace agricole à l'est classé A2. La superficie totale des deux secteurs, égale à 41,6 hectares, est inférieure à la superficie de 125 ha prévue par le PADD pour l'ensemble du bassin ouest, pour lequel le PADD définit une orientation stratégique de création de 10 600 emplois. Il résulte des mentions du rapport de présentation relatives à l'explication des choix retenus pour le zonage que le PLUi du territoire Marseille-Provence comporte, pour le bassin ouest, outre le secteur du B..., deux autres secteurs en zone AU2, situés en limite sud de l'aéroport à Marignane et en connexion avec une zone d'activités existante à Saint-Victoret, la superficie totale étant de 124 hectares. Le rapport précise notamment que le tissu agricole existant sur le site du B... est en friche et mité et que le zonage contesté vise à créer un espace dédié à l'économie productive et de compléter l'offre offerte au sein de la zone existante pour les PME/PMI. Dans ces conditions, le classement en zone AU2 du secteur correspondant au projet dit B... n'est pas entaché d'une incohérence avec les orientations générales et objectifs du PADD.

En ce qui concerne la commune de Gémenos :

14. Les auteurs du PLUi ont classé en zone UP2a, sur le territoire de la commune de Gémenos, une parcelle non bâtie et en nature de vignes, située au nord du lotissement Saint-Jean à l'angle du chemin de Saint-Jean de Garguier et du chemin Saint-Clair. Le règlement définit les zones UP comme permettant notamment le développement de l'habitat individuel sous toutes ses formes (pavillonnaires, habitat individuel groupé...), les zones UP2a étant celles dans lesquelles les emprises aux sols sont principalement limitées à 15 %. L'article 13 du règlement de cette zone dispose que les constructions doivent être desservies par des équipements conformes aux exigences fixées par le règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie des Bouches-du-Rhône. Selon la carte jointe au porter à connaissance du préfet des Bouches-du-Rhône relatif au risque de feu de forêt, communiqué le 23 mai 2014, ce terrain, comme les autres parcelles situées au pied du massif de la Sainte-Baume et d'ailleurs classées, elles, en zone Nh ou Nt, à l'exception du lotissement précité, est exposé à un aléa subi fort. Les pentes du massif au nord-est, en majorité boisées, sont exposées à un aléa exceptionnel. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la moindre densité de la végétation sur les roches surplombant la partie boisée jouxtant au nord-est le terrain litigieux, ni sa culture en vignes soient de nature à minorer le risque d'incendie de forêt retenu par la carte d'aléa précitée. La circonstance dont la métropole se prévaut de ce que le secteur est desservi par les transports en commun ne préjuge pas de l'accès commode par ces voies étroites et sinueuses pour les véhicules de secours et de lutte contre l'incendie, ni de la présence de bornes d'incendie à proximité. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que ce classement était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

15. Il résulte de ce qui précède que la métropole d'Aix-Marseille-Provence est seulement fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération du 19 décembre 2019 en tant qu'elle classe en zone A2 un secteur constituant sur un axe nord-sud une coupure d'urbanisation entre les enveloppes urbaines de Châteauneuf-les-Martigues et de Gignac-la-Nerthe, dans la plaine agricole de Châteauneuf-les-Martigues, en zone Nt un secteur vierge de toute construction, situé à la Marcouline sur le territoire de la commune de Cassis, et en zone AU2, 41,6 hectares correspondant à un projet dit B..., sur le territoire de la commune de Gignac-la-Nerthe.

Sur les frais liés au litige :

16. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la métropole d'Aix-Marseille-Provence et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La délibération du 19 décembre 2019 est annulée en tant que sont classés en zone UP2b, le secteur non bâti situé à l'ouest de la voie menant au quartier des Devens et chemin des Garlaban sur le territoire de la commune de Ceyreste, en zone UQP le secteur situé à proximité du camping sur le territoire de la commune de Ceyreste, en zone UP2a une parcelle non bâtie située au nord du lotissement Saint Jean sur le territoire de la commune de Gémenos, en zone UEa1 un secteur situé dans le quartier de Saint-Tronc sur le territoire de la commune de Marseille, en zone UEa1 un secteur situé au lieu-dit I... sur le territoire de Roquefort-la-Bédoule, en zone UCt2 un secteur situé au lieu-dit E... sur le territoire de la commune de Sausset-les-Pins, en zone UP2b deux secteurs situés, pour l'un au lieu-dit A..., pour l'autre au lieu-dit G..., sur le territoire de la commune de Septèmes-les-Vallons, en zone UQP la bande de terrain incluse dans un secteur UQP et limitrophe d'une zone Ns au lieu-dit H... sur le territoire de la commune de Septèmes-les-Vallons, en zone UP1 deux parcelles non construites situées au lieu-dit F..., en partie nord, sur le territoire de la commune de Septèmes-les-Vallons, tous les secteurs classés en zone Nh et situés dans les communes soumises à la loi Littoral, en dehors des agglomérations et villages existants et à proximité de zones agricoles ou naturelles de zonage Ns, en zone Nt deux secteurs situés sur la colline de Notre-Dame sur le territoire de la commune de Marignane et, en zone UP2b, le compartiment non urbanisé d'un secteur ainsi classé situé sur le territoire de l'opération d'aménagement et de programmation MRS-16 relative aux quartiers de Saint-Antoine- La Bricarde- la Castellane à Marseille. Cette délibération est également annulée, d'une part, en tant que l'orientation d'aménagement et de programmation du Coupier sur le territoire de la commune de Gémenos, et l'orientation d'aménagement et de programmation Val Tendre sur le territoire de la commune de Ceyreste prévoient, dans les zones que ces OAP dédient à l'extension de l'urbanisation, une densité en logements à l'hectare incohérente avec celle prescrite par le projet d'aménagement et de développement durables, d'autre part, en tant que la parcelle cadastrée OK0092 dans la calanque de Morgiou et les espaces non construits du campus de Luminy ne sont pas inclus dans les espaces naturels remarquables figurant aux planches graphiques du PLUi.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 juin 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la métropole d'Aix-Marseille-Provence une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la métropole d'Aix-Marseille-Provence est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la métropole d'Aix-Marseille-Provence et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 26 octobre 2023, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 novembre 2023.

N° 22MA02278 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02278
Date de la décision : 16/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-03-03-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU). - Légalité des plans. - Légalité interne. - Appréciations soumises à un contrôle d'erreur manifeste. - Classement et délimitation des ones.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : SELARL CAMILLE MIALOT AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 25/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-11-16;22ma02278 ?
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