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12/10/2023 | FRANCE | N°23MA01360

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 12 octobre 2023, 23MA01360


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI ASD, M. D... E..., Mme B... E... et Mme F... E... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 2 février 2021 du maire de la commune de Cassis de non opposition à une déclaration préalable déposée par M. C... pour la démolition et la reconstruction d'une piscine.

Par une ordonnance n° 2207977 du 31 mars 2023, le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requ

ête enregistrée le 31 mai 2023, M. D... E..., ayant été désigné comme représentant unique en ap...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI ASD, M. D... E..., Mme B... E... et Mme F... E... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 2 février 2021 du maire de la commune de Cassis de non opposition à une déclaration préalable déposée par M. C... pour la démolition et la reconstruction d'une piscine.

Par une ordonnance n° 2207977 du 31 mars 2023, le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 mai 2023, M. D... E..., ayant été désigné comme représentant unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, la SCI ASD, Mme B... E... et Mme F... E... représentés par Me Molland, demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Marseille du 31 mars 2023 ;

2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) à défaut de faire droit à leur demande de première instance en annulant l'arrêté du 2 février 2021 du maire de Cassis de non opposition à une déclaration préalable ;

4°) de mettre une somme de 3 000 euros solidairement à la charge solidairement de M. C... et de la commune de Cassis en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière car rendue en méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure, car il appartenait au tribunal de fixer aux requérants un délai pour produire leurs observations sur le mémoire en défense communiqué et d'attendre pour statuer l'expiration de ce délai ;

- le tribunal a estimé à tort que la demande de première instance était tardive et dès lors manifestement irrecevable ;

- ils justifient d'un intérêt à agir ;

- l'arrêté en litige méconnaît les articles L. 421-6, L. 421-7 et R. 421-23 du code de l'urbanisme ;

- le pétitionnaire n'a pas déposé de déclaration pour l'abattage de quatre arbres ;

- le projet aurait dû faire l'objet d'une demande de permis de démolir ;

- le projet méconnaît l'article 5.1 du règlement du PLUI et l'article L. 113-2 du code de l'urbanisme ;

- le projet méconnaît l'article 10 du règlement du PLUI.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 juillet 2023, la commune de Cassis, représentée par la SCP Bérenger-Blanc-Burtez-Doucède et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la requête d'appel comme la demande de première instance sont irrecevables faute de justification des notifications exigées par l'article R. 600-1 du code de justice administrative ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité à agir contre l'arrêté en litige.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail, président rapporteur,

- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,

- et les observations de Me Molland, représentant les requérants, et de Me Claveau, représentant la commune de Cassis ;

Considérant ce qui suit :

1. La SCI ASD, M. D... E..., Mme B... E... et Mme F... E... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 2 février 2021 du maire de la commune de Cassis de non opposition à une déclaration préalable déposée par M. A... C... pour la démolition et la reconstruction d'une piscine. Par une ordonnance n° 2207977 du 31 mars 2023, le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande en application de l'article R. 222-1 4°) en raison de son irrecevabilité manifeste du fait de sa tardiveté. Les requérants relèvent appel de cette ordonnance.

Sur la recevabilité de la requête :

2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas (...) de recours contentieux à l'encontre (...) d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant (...) une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code. (...) / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt (...) du recours / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la présente requête a été notifiée conformément aux dispositions précitées à la commune de Cassis et à M. C... le 1er juin 2023. La fin de non recevoir tirée du défaut de notification de la requête doit dès lors être écartée.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, les premiers vice-présidents des tribunaux et des cours (...), les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) ".

5. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif de Marseille que, saisi de la demande des requérants, ce tribunal l'a communiquée à la commune de Cassis et à M. C.... A l'appui de son mémoire en défense, M. C... a soulevé une fin de non-recevoir tirée du caractère tardif de cette demande et a produit à cette fin notamment des attestations relatives à l'affichage d'un panneau de chantier. Le mémoire de M. C... et ces pièces ont été communiqués le 27 janvier 2023 à l'avocat des requérants. Le courrier accompagnant cette communication ne fixait pas de délai de réponse mais indiquait " Afin de ne pas retarder la mise en état d'être jugé de votre dossier, vous avez tout intérêt, si vous l'estimez utile, à produire ces observations aussi rapidement que possible ". Le 31 mars 2023, le vice-président du tribunal administratif de Marseille a, sur le fondement des dispositions précitées du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté par ordonnance la demande comme tardive.

6. Si l'instruction ainsi conduite ne faisait pas obstacle à ce que le vice-président du tribunal administratif de Marseille fît usage des pouvoirs qui lui sont attribués par les dispositions citées au point 2, il lui appartenait de fixer aux demandeurs de première instance un délai pour produire ses observations sur le mémoire en défense communiqué et d'attendre, pour statuer, que ce délai fût écoulé. Les requérants sont par suite fondés à soutenir que l'ordonnance attaquée, par laquelle le vice-président du tribunal a, en se fondant sur le mémoire en défense et les pièces produits par M. C..., rejeté comme tardive leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 février 2021 a été rendue en méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure. Cette ordonnance, est dès lors entachée d'irrégularité.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage.". L'article A. 424-15 du même code dispose : " L'affichage sur le terrain du permis de construire, d'aménager ou de démolir explicite ou tacite ou l'affichage de la déclaration préalable, prévu par l'article R. 424-15, est assuré par les soins du bénéficiaire du permis ou du déclarant sur un panneau rectangulaire dont les dimensions sont supérieures à 80 centimètres. ". Aux termes de l'article A. 424-16 du même code : " Le panneau prévu à l'article A. 424-15 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom de l'architecte auteur du projet architectural, la date de délivrance, le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté... ". Aux termes de l'article A. 424-17 du même code: " Le panneau d'affichage comprend la mention suivante : / " Droit de recours : / " Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau ."

8. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contesté indéfiniment par les tiers un permis de construire, une décision de non-opposition à une déclaration préalable, un permis d'aménager ou un permis de démoli. Dans le cas où l'affichage du permis ou de la déclaration, par ailleurs conforme aux prescriptions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, n'a pas fait courir le délai de recours de deux mois prévu à l'article R. 600-2, faute de mentionner ce délai conformément à l'article A. 424-17, un recours contentieux doit néanmoins, pour être recevable, être présenté dans un délai raisonnable à compter du premier jour de la période continue de deux mois d'affichage sur le terrain. En règle générale et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable.

9. Pour retenir que la décision de non opposition à déclaration de travaux par le maire de Cassis avait fait l'objet d'un affichage pendant une période continue de deux mois conformément aux dispositions de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme, le tribunal a pris en compte trois attestations produites en défense par M. C.... Ces attestations se bornent à faire état de la présence d'un panneau de chantier sur le terrain d'assiette du projet en litige, sans apporter la moindre précision sur le contenu de ce panneau, dont aucune photographie n'a été produite. En l'absence d'affichage de l'arrêté de non opposition à déclaration de travaux conforme aux prescriptions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, le délai de recours n'a pas couru, et la demande présentée devant le tribunal n'était donc pas manifestement irrecevable en raison de sa tardiveté. L'ordonnance attaquée qui rejette la demande de première instance comme manifestement irrecevable est également irrégulière pour ce motif.

10. Il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée.

11. Dans les circonstances de l'espèce, Il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Marseille.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Dans les circonstances, et en tout état de cause, il n'y a lieu de faire droit à aucune des conclusions des parties fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 2207977 du 31 mars 2023 du président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Marseille est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Marseille.

Article 3 : Les conclusions présentées par chacune des parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., représentant unique des requérants à la commune de Cassis et à M. A... C....

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2023 laquelle siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Mouret, premier conseiller

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2023.

2

N° 23MA01360

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01360
Date de la décision : 12/10/2023
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Délais.

Procédure - Instruction - Caractère contradictoire de la procédure.

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales - Introduction de l'instance - Délais de recours.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : MOLLAND

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-10-12;23ma01360 ?
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