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06/10/2023 | FRANCE | N°22MA00868

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 06 octobre 2023, 22MA00868


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance du 4 avril 2019, la présidente du tribunal administratif de Marseille a transmis au tribunal administratif de Bastia, en application des articles R. 351-3 et R. 761-5 du code de justice administrative, la requête présentée par la SAS Eiffage Construction Provence.

La SAS Eiffage Construction Provence, devenue la SAS Eiffage Construction Sud-Est, a demandé au tribunal administratif de Bastia de ramener à la somme de 7 821,68 euros TTC le montant des frais et honoraires de l'expertise

de M. B... liquidés et taxés à la somme de 26 940 euros TTC par une ordonn...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance du 4 avril 2019, la présidente du tribunal administratif de Marseille a transmis au tribunal administratif de Bastia, en application des articles R. 351-3 et R. 761-5 du code de justice administrative, la requête présentée par la SAS Eiffage Construction Provence.

La SAS Eiffage Construction Provence, devenue la SAS Eiffage Construction Sud-Est, a demandé au tribunal administratif de Bastia de ramener à la somme de 7 821,68 euros TTC le montant des frais et honoraires de l'expertise de M. B... liquidés et taxés à la somme de 26 940 euros TTC par une ordonnance du 26 février 2019 de la première vice-présidente du tribunal administratif de Marseille.

Par un jugement n° 1900488 du 25 janvier 2022, le tribunal administratif de Bastia a ramené à la somme de 12 315 euros TTC le montant des frais et honoraires dus à M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2022, M. A... B..., représenté par Me Fontbressin, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 25 janvier 2022 ;

2°) de fixer sa rémunération à la somme de 26 940 euros TTC.

Il soutient qu'au vu de la note de frais et honoraires produite en première instance ainsi que des extraits de fiches analytiques, les vacations qu'il a déclarées ne sont pas excessives.

Par un mémoire enregistré le 11 août 2022, la SAS Eiffage Construction Sud-Est, représentée par Me Duteil, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande à la Cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia en tant qu'il a taxé le montant des frais et honoraires de M. B... à la somme de 12 315 euros TTC et de les ramener à la somme de 7 965 euros TTC.

Elle soutient que le moyen soulevé par M. B... n'est pas fondé et que rien ne justifie que l'expert aurait passé toutes les heures retenues par le tribunal à l'analyse du dossier.

La région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, représentée par Me Vivien, a produit un mémoire enregistré le 15 septembre 2023, soit postérieurement à la clôture de l'instruction fixée au 24 février 2023, lequel n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Radi pour la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur.

Considérant ce qui suit :

1. La société Eiffage Construction Provence a déposé, le 4 juin 2015, au greffe du tribunal administratif de Marseille une requête tendant à ce qu'une expertise soit ordonnée sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative concernant les conditions d'exécution du macro lot n° 1 intitulé " bâtiment GO clos-couvert - bâtiments provisoires - VRD " d'un marché de travaux relatif à la restructuration et à l'extension du lycée Diderot situé à Marseille dont la maîtrise d'ouvrage a été déléguée par la région Provence-Alpes-Côte d'Azur à la société publique locale d'aménagement Agence régionale d'équipement et d'aménagement Provence-Alpes-Côte d'Azur (AREA). Par une ordonnance du 24 juillet 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a désigné M. A... B... en qualité d'expert et, par une ordonnance du 9 juin 2016, les opérations d'expertise ont été étendues à d'autres parties. Par une ordonnance du 29 novembre 2018, il a été mis fin aux opérations d'expertise. La SAS Eiffage Construction Provence, devenue la SAS Eiffage Construction Sud-Est a demandé au tribunal administratif de Bastia de ramener à la somme de 7 821,68 euros TTC le montant des frais et honoraires d'expertise liquidés et taxés à la somme de 26 940 euros TTC par une ordonnance du 26 février 2019 de la première vice-présidente du tribunal administratif de Marseille. M. B... relève appel du jugement du 25 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Bastia a ramené à la somme de 12 315 euros TTC le montant des frais et honoraires dus à M. B.... Par la voie de l'appel incident, la SAS Eiffage Construction Sud-Est demande à la Cour de ramener les frais et horaires de M. B... à la somme de 7 965 euros TTC.

2. Aux termes de l'article R. 621-11 du code de justice administrative : " Les experts et sapiteurs mentionnés à l'article R. 621-2 ont droit à des honoraires, sans préjudice

du remboursement des frais et débours. Chacun d'eux joint au rapport un état de ses vacations, frais et débours. Dans les honoraires sont comprises toutes sommes allouées pour étude du dossier, frais de mise au net du rapport, dépôt du rapport et, d'une manière générale, tout travail personnellement fourni par l'expert ou le sapiteur et toute démarche faite par lui en vue

de l'accomplissement de sa mission. Le président de la juridiction, après consultation du président de la formation de jugement (...) fixe par ordonnance (...) les honoraires en tenant compte des difficultés des opérations, de l'importance de l'utilité et de la nature du travail fourni par l'expert ou le sapiteur (...). Il arrête sur justificatifs le montant des frais et débours qui seront remboursés à l'expert (...). Lorsque le président de la juridiction envisage de fixer la rémunération de l'expert à un montant inférieur au montant demandé, il doit au préalable l'aviser des éléments qu'il se propose de réduire, et des motifs qu'il retient à cet effet, et l'inviter à formuler ses observations ". Puis, selon l'article R. 621-13 du même code : " Lorsque l'expertise a été ordonnée sur le fondement du titre III du livre V, le président du tribunal (...), après consultation, le cas échéant, du magistrat délégué, (...) en fixe les frais et honoraires par une ordonnance prise conformément aux dispositions des articles R. 621-11 et R. 761-4. ". Enfin, l'article R. 761-5 du code de justice administrative dispose quant à lui que : " Les parties (...), ainsi que, le cas échéant, l'expert peuvent contester l'ordonnance mentionnée à l'article R. 761-4 devant la juridiction à laquelle appartient l'auteur de l'ordonnance. ".

3. L'ordonnance par laquelle le président du tribunal liquide et taxe les frais et honoraires d'expertise revêt un caractère administratif et non juridictionnel. Le recours dont elle peut faire l'objet en application des dispositions précitées de l'article R. 761-5 du code de justice administrative est un recours de plein contentieux par lequel le juge détermine les droits à rémunération de l'expert ainsi que les parties devant supporter la charge de cette rémunération. Les dispositions précitées donnent donc au tribunal saisi d'un recours contre cette ordonnance non pas le pouvoir de se prononcer sur la régularité des opérations de l'expertise, mais celui d'apprécier l'utilité et la nature du travail fourni par l'expert.

4. M. B... fait valoir que le dossier pour lequel il avait été désigné, par ordonnance du 24 juillet 2015, en qualité d'expert était particulièrement complexe puisqu'il concernait une importante restructuration et extension du lycée Diderot à Marseille qui avait donné lieu à un échange très volumineux de pièces entre les parties. S'il est constant que ledit dossier était, en effet, complexe et volumineux, il résulte cependant du rapport rendu en l'état par l'expert plus de trois années après sa désignation, le 28 novembre 2018, lequel est particulièrement lacunaire et ne répond à aucune des questions qui avaient été posées par le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, que l'intéressé, qui a précisé qu'il conviendrait de prendre connaissance des comptes-rendus de chantiers, recalages de plannings, travaux supplémentaires, adaptations " in situ ", ordres de service, pièces du marché, courriers, factures et réclamations, n'a pas procédé à la moindre analyse des pièces du dossier. Par ailleurs, s'il est fait état, dans l'état des vacations de l'expert, de correspondances rédigées au cours des semaines 14, 16, 29 et 35 de l'année 2017 et au cours des semaines 3, 4, 10, 21, 30 et 32 de l'année 2018, la réalité de celles-ci n'est pas établie par les pièces versées au dossier. En outre, les heures sollicitées au titre de tri et classement de pièces alors que celles-ci avaient été numérotées par chacune des parties, ou à l'occasion de la réception de celles-ci, ne sont pas non plus justifiées. Enfin, s'il est constant que M. B... a, au titre des années 2017 et 2018, rédigé des notes aux parties les 13 juin 2017 et 28 août 2017, ces deux dernières étaient la reproduction littérale, mise à part une actualisation des pièces produites par les parties et de la chronologie, de la 1ère note rédigée le 23 février 2016.

5. Au regard de l'ensemble de ces éléments, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a réduit le montant de ses frais et honoraires et à demander que ses frais et honoraires soient taxés à la somme globale de 26 940 euros TTC. Il y a lieu, en revanche, au regard de ce qui a été dit précédemment, et ainsi que le demande la société défenderesse dans ses conclusions incidentes, de faire une juste appréciation des vacations exercées par l'expert en les évaluant à 23 h en 2016, 12 h en 2017 et 10 h en 2018 et en ramenant, dès lors, le montant de ses frais et honoraires à la somme globale de 7 965 euros TTC. Par suite, la société Eiffage Construction Sud-Est est fondée à demander la réformation en ce sens du jugement du tribunal administratif de Bastia.

D É C I D E :

Article 1er : Le montant des frais et honoraires dus à M. B... tel que fixé par l'ordonnance de la première vice-présidente du tribunal administratif de Marseille du 26 février 2019 est ramené à la somme de 7 965 euros TTC.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia en date du 25 janvier 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la société Eiffage Construction Sud-Est.

Copie en sera adressée au président du tribunal administratif de Marseille, à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et au garde des Sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 octobre 2023.

N° 22MA00868 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00868
Date de la décision : 06/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-04-02-02-02 Procédure. - Instruction. - Moyens d'investigation. - Expertise. - Honoraires des experts.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : SELARL FONTBRESSIN AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-10-06;22ma00868 ?
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