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03/10/2023 | FRANCE | N°22MA03165

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 03 octobre 2023, 22MA03165


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 17 janvier 2019 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif exercé contre la décision du 19 juillet 2018 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Sud a rejeté sa demande de renouvellement de sa carte professionnelle en qualité d'agent de sécurité privée.

Par un jugement n° 1901173 du

20 octobre 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M. B....

Pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 17 janvier 2019 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif exercé contre la décision du 19 juillet 2018 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Sud a rejeté sa demande de renouvellement de sa carte professionnelle en qualité d'agent de sécurité privée.

Par un jugement n° 1901173 du 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 décembre 2022 et le 9 juin 2023, M. B..., représenté par Me Darras, demande à la Cour :

1°) d'infirmer le jugement n° 1901173 du 20 octobre 2022 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision du 17 janvier 2019 de la commission nationale d'agrément et de contrôle ;

3°) d'enjoindre à la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité de lui délivrer une carte professionnelle d'agent de sécurité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de la commission nationale d'agrément et de contrôle méconnaît l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et est entachée d'une insuffisante motivation ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que, s'il existe effectivement des informations portées au fichier du traitement des antécédents judiciaires, aucun comportement contraire à l'honneur et de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ne peut être lui reproché dès lors qu'il n'a jamais été condamné pour un quelconque fait répréhensible, son innocence ayant été reconnue par deux jugements de relaxe, et qu'il a toujours respecté scrupuleusement les valeurs imposées par la profession d'agent de sécurité à savoir honneur, dignité et probité en toutes circonstances.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mai 2023, le Conseil national des activités privées de sécurité, représenté par Me Claisse, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge du requérant la somme de 500 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Un courrier du 12 juin 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article

R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 30 juin 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martin,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations de Me Paolinetti, substituant Me Claisse, représentant le conseil national activités privées de sécurité.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., titulaire d'une carte professionnelle l'autorisant à exercer des fonctions d'agent de sécurité privée délivrée le 24 mai 2013, en a sollicité le renouvellement par courrier du 27 juin 2017. Par une décision du 19 juillet 2018, la commission locale d'agrément et de contrôle (CLAC) Sud du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté cette demande. L'intéressé a alors saisi la commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) du Conseil national des activités privées de sécurité d'un recours administratif préalable obligatoire, lequel a été rejeté par une délibération du 17 janvier 2019. M. B... relève appel du jugement du 20 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération par laquelle la CNAC a rejeté son recours administratif.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. /

A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ". Et aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. Ainsi que le tribunal l'a jugé à bon droit, la délibération du 17 janvier 2019, qui vise les dispositions pertinentes du code de la sécurité intérieure, décrit de manière suffisamment précise les faits qui ont conduit l'administration à estimer que les agissements de M. B... sont incompatibles avec l'exercice d'une activité d'agent de sécurité. A cet égard, la circonstance selon laquelle l'intéressé a bénéficié d'une relaxe, par une décision rendue par le tribunal correctionnel de Nice le 11 septembre 2019 en ce qui concerne les faits de violences aggravées commis en 2017, demeure sans incidence sur la régularité formelle de la décision attaquée.

Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure : " Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu'elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : 1° A fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles ou dans les véhicules de transport public de personnes ; ". Aux termes de l'article L. 612-20 de ce même code, dans sa version applicable au litige : " Nul ne peut être employé ou affecté pour participer à une activité mentionnée à l'article L. 611-1 : / (...) 2° S'il résulte de l'enquête administrative, ayant le cas échéant donné lieu à consultation, par des agents du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l'Etat territorialement compétent et individuellement désignés, des traitements de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification, que son comportement ou ses agissements sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat et sont incompatibles avec l'exercice des fonctions susmentionnées ; (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, à l'issue d'une enquête administrative, et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les actes commis par le demandeur sont compatibles avec l'exercice de la profession ou la direction d'une personne morale exerçant cette activité, alors même que les agissements en cause n'auraient pas donné lieu à une condamnation inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire, ou que la condamnation prononcée en raison de ces agissements aurait été effacée de ce bulletin.

A ce titre, si la question de l'existence de poursuites ou de sanctions pénales est indifférente, l'autorité administrative est en revanche amenée à prendre en considération, notamment, les circonstances dans lesquelles ont été commis les faits qui peuvent être reprochés au pétitionnaire ainsi que la date de leur commission.

6. La délibération en litige de la CNAC du Conseil national des activités privées de sécurité est fondée sur la circonstance que M. B... a été mis en cause le 22 octobre 2017 en qualité d'auteur de faits de violence aggravée par deux circonstances suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours, et qu'antérieurement à la délivrance de sa carte initiale, il avait déjà été mis en cause, au cours de l'année 2000, en qualité d'auteur de faits de faux ou usage de faux et escroquerie, et, au cours de l'année 2007, en qualité d'auteur de faits de violence ayant entrainé une incapacité de travail n'excédant pas huit jours, autant d'éléments révélant sa persistance dans un comportement transgressif incompatible avec l'exercice de la profession d'agent de sécurité.

7. D'une part, il résulte de ce qui précède que la décision de la CNAC n'est pas fondée sur des faits de violence commis le 2 juin 2000, ni sur des faits d'agression sexuelle commis en 2002, et pas davantage sur des faits de violences et de délaissement de mineur commis le 3 août 2013. Par suite, M. B... ne peut utilement soutenir que de tels faits n'auraient pas dû être pris en compte pour apprécier le caractère répréhensible de son comportement.

8. D'autre part, si les faits constatés par le juge pénal et qui commandent nécessairement le dispositif d'un jugement ayant acquis force de chose jugée s'imposent à l'administration comme au juge, la même autorité ne saurait s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe tirés de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou qu'un doute subsiste sur leur réalité. Il appartient, dans ce cas, au juge non pénal d'apprécier si les faits, qui peuvent, d'ailleurs, être différents de ceux qu'avait connus le juge pénal, sont suffisamment établis et, dans l'affirmative, s'ils justifient l'application d'une sanction.

9. M. B... ne conteste pas plus en appel qu'en première instance la matérialité des faits de faux ou usage de faux et escroquerie commis au cours de l'année 2000. Par ailleurs, s'agissant des faits de violence commis sur sa conjointe en 2017, leur matérialité est établie tant par la procédure de médiation pénale mise en place par le parquet de Nice que par la fiche réponse circonstanciée établie par les services de police, selon laquelle, le 22 octobre 2017, ils ont dû intervenir à deux reprises dans le cadre d'un différend entre M. B... et sa compagne, différend au cours duquel il a violenté celle-ci, ce qui a entrainé l'intervention d'une voisine. Il ressort également de ladite fiche que ces faits de violence ont été confirmés par le jeune enfant du couple, âgé de 12 ans seulement et témoin de la scène. Si M. B... produit, pour la première fois en appel, le jugement du 11 septembre 2019 par lequel le tribunal correctionnel de Nice a prononcé sa relaxe, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que cette décision ne saurait suffire, par elle-même, à établir l'absence de matérialité des faits sur lesquels s'est fondée la commission nationale d'agrément et de contrôle pour rejeter sa demande de renouvellement de carte professionnelle. Au demeurant, en se bornant à soutenir que le jugement du tribunal correctionnel atteste de son innocence, M. B... ne conteste pas utilement la matérialité des faits dont il s'agit.

10. Enfin, il résulte de l'instruction que la CNAC du Conseil national des activités privées de sécurité aurait pris la même décision en se fondant sur les seuls faits d'escroquerie commis en 2000 et les faits de violence commis en 2017, ces derniers devant par ailleurs être regardés comme remettant en cause la capacité de l'appelant à conserver son sang-froid en toutes circonstances et à intervenir avec le calme requis dans les situations parfois tendues et conflictuelles auxquelles un agent de sécurité est susceptible d'être confronté. Par suite, en estimant, pour refuser le renouvellement de l'autorisation sollicitée, que l'intéressé ne remplissait pas les conditions pour exercer une activité privée d'agent de sécurité, la commission nationale d'agrément et de contrôle n'a pas méconnu les dispositions du 2° de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure ni commis d'erreur d'appréciation, et ce, en dépit de la circonstance qu'il a exercé son activité d'agent de sécurité pendant plusieurs années sans commettre d'infraction, qu'il aurait donné satisfaction à son employeur, et que son casier judiciaire est vierge de toute mention de condamnation pénale.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 17 janvier 2019 par laquelle la CNAC du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif exercé contre la décision du 19 juillet 2018 par laquelle la CLAC Sud a rejeté sa demande de renouvellement de sa carte professionnelle en qualité d'agent de sécurité privée Par suite, ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais d'instance :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CNAPS, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que réclame l'appelant sur leur fondement. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. B... le versement au Conseil national des activités privées de sécurité de la somme de 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera la somme de 500 euros au Conseil national des activités privées de sécurité en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au Conseil national des activités privées de sécurité.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2023, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2023.

2

N° 22MA03165


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA03165
Date de la décision : 03/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05 Police. - Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : DARRAS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-10-03;22ma03165 ?
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