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13/07/2023 | FRANCE | N°22MA02395

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 13 juillet 2023, 22MA02395


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 par lequel le président de la communauté de communes Cœur du Var l'a admis à la retraite pour invalidité à compter du 1er février 2021 et d'enjoindre à cette même communauté de communes, à titre principal, de le réintégrer dans son cadre d'emplois, de reconstituer sa carrière et de mettre en œuvre la procédure de reclassement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans le délai de 10 jours

à compter de la notification de la décision à intervenir, à titre subsidiaire, d'e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 par lequel le président de la communauté de communes Cœur du Var l'a admis à la retraite pour invalidité à compter du 1er février 2021 et d'enjoindre à cette même communauté de communes, à titre principal, de le réintégrer dans son cadre d'emplois, de reconstituer sa carrière et de mettre en œuvre la procédure de reclassement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans le délai de 10 jours à compter de la notification de la décision à intervenir, à titre subsidiaire, d'enjoindre à la communauté de communes Cœur du Var de réexaminer sa situation, dans les mêmes conditions.

Par un jugement n° 2100713 du 4 juillet 2022, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 18 janvier 2021 et enjoint à la communauté de communes Cœur du Var de procéder à la réintégration juridique de M. B... dans son cadre d'emplois et de reconstituer sa carrière, dans un délai de trois mois à compter de la notification à la communauté de communes Cœur du Var du jugement.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 septembre 2022 et le 2 juin 2023 sous le numéro 22MA02395, la communauté de communes Cœur du Var, représentée par la SELARL LLC et Associés, agissant par Me Reghin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 juillet 2022 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon ;

3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

- pour prononcer l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2021, le tribunal a retenu un moyen soulevé de manière lapidaire par le requérant ;

- le moyen retenu par les premiers juges pour annuler ledit arrêté est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'interprétation des faits ;

- en lui enjoignant de procéder à la réintégration juridique de M. B... dans son cadre d'emplois alors qu'ils ont annulé la décision de mise à la retraite pour un simple motif de légalité externe, les premiers juges ont commis une erreur de droit ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté contesté :

- les moyens soulevés par M. B... dans sa demande présentée devant le tribunal administratif de Toulon n'étaient pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2023, M. A... B..., représenté par Me Varron Charrier, conclut :

1°) au rejet de la requête et à la confirmation du jugement attaqué ;

2°) à ce qu'il soit enjoint à la communauté de communes Cœur du Var, à titre principal, de le réintégrer dans son cadre d'emplois à la date de son éviction, de l'affecter sur un poste administratif, de reconstituer sa carrière et ses droits sociaux et de lui reverser à titre rétroactif ses traitements et primes, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de 10 jours courant à compter de la notification de la décision à intervenir, à titre subsidiaire, d'enjoindre à ladite communauté de communes de réexaminer sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de 10 jours courant à compter de la notification de la décision à intervenir ;

3°) à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Cœur du Var la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par la commune requérante ne sont pas fondés ;

- il entend reprendre les moyens précédemment soulevés en première instance : l'arrêté contesté est insuffisamment motivé et n'a pas été précédé d'une expertise médicale ; les articles 14 et 16 de l'arrêté du 4 août 2004 ont été méconnus ; la composition de la commission de réforme était irrégulière ; l'arrêté querellé ne précise aucunement que l'invalidité est imputable au service et ne prononce pas la radiation des cadres d'office pour inaptitude physique ; aucune mesure préalable n'a été mise en place par la communauté de communes, qui y était pourtant tenue, pour tenter d'adapter son poste ou le reclasser ;

- l'annulation d'une décision ayant irrégulièrement mis d'office à la retraite un fonctionnaire oblige l'autorité compétente à réintégrer l'intéressé à la date de sa mise à la retraite et à prendre rétroactivement les mesures nécessaires pour reconstituer sa carrière et le placer dans une situation régulière.

La clôture de l'instruction a été fixée au 16 juin 2023, par application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du même jour.

M. B..., représenté par Me Varron Charrier, a présenté un mémoire, enregistré le 14 juin 2023, qui n'a pas été communiqué.

II. Par une requête, enregistrée le 2 septembre 2022 sous le numéro 22MA02396, la communauté de communes Cœur du Var, représentée par la SELARL LLC et Associés, agissant par Me Reghin, demande à la cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 2100713 du 4 juillet 2022 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'exécution du jugement frappé d'appel risque d'entraîner pour elle des conséquences difficilement réparables et que les moyens énoncés dans sa requête d'appel numéro 22MA02395 paraissent sérieux en l'état de l'instruction.

La procédure a été communiquée à M. B... qui n'a pas produit de mémoire.

La clôture de l'instruction a été fixée au 16 juin 2023, par application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du même jour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Gonzalez-Lopez, représentant la communauté de communes Cœur du Var, et de Me Body, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par les deux requêtes susvisées, la communauté de communes Cœur du Var sollicite l'annulation et le sursis à exécution du jugement du 4 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 18 janvier 2021 par lequel le président de la communauté de communes Cœur du Var a admis M. B... à la retraite pour invalidité à compter du 1er février 2021 et a enjoint à la communauté de communes Cœur du Var de procéder à sa réintégration juridique dans son cadre d'emplois et de reconstituer sa carrière. Ces deux requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur les conclusions de la requête n° 22MA02395 à fin d'annulation du jugement du 4 juillet 2022 :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

2. La circonstance, à la supposer établie, que le jugement du tribunal administratif de Toulon serait entaché d'erreurs de droit et d'interprétation des faits, est, en tout état de cause, sans incidence sur sa régularité dès lors que ces erreurs n'affecteraient, si elles étaient établies, que le bien-fondé du jugement et non sa régularité.

3. Il appartient au requérant d'assortir ses moyens des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé. Il ressort des termes de la demande dirigée contre l'arrêté du 18 janvier 2021 présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon qu'à son appui, il a invoqué le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 14 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière en soutenant qu'il appartenait à la communauté de communes Cœur du Var " de prouver que ces dispositions ont bien été respectées ". Compte tenu de ce que seule l'administration était en mesure de justifier de leur respect, les premiers juges n'ont pas commis d'irrégularité en annulant l'arrêté contesté sur ce motif dont ils étaient valablement saisis.

4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ". L'annulation d'une décision ayant irrégulièrement mis d'office à la retraite un fonctionnaire placé en disponibilité d'office pour raison de santé oblige l'autorité compétente à réintégrer l'intéressé à la date de sa mise à la retraite et à prendre rétroactivement les mesures nécessaires pour reconstituer sa carrière et le placer dans une situation régulière. Il s'en suit qu'en enjoignant à la communauté de communes Cœur du Var de procéder à la réintégration juridique de M. B... dans son cadre d'emplois et de reconstituer sa carrière, les premiers juges n'ont pas excédé les pouvoirs qu'ils tiennent des dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative.

En ce qui concerne le bienfondé du jugement attaqué :

5. Aux termes de l'article 14 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Le secrétariat de la commission de réforme convoque les membres titulaires et l'agent concerné au moins quinze jours avant la date de la réunion. (...) ". Aux termes de l'article 16 du même arrêté : " Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller. ".

6. Alors que M. B... conteste avoir été convoqué à la séance de la commission de réforme du 17 juin 2020, la communauté de communes Cœur du Var, à qui incombe la charge de la preuve quand bien même le secrétariat de cette commission est assuré par le centre départemental de gestion du Var, ne justifie pas que le courrier de convocation adressé à l'intéressé par ledit centre lui a été effectivement notifié. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que M. B... aurait été avisé selon une autre modalité ou que, bien qu'il ait assisté à la séance de la commission de réforme, ainsi que le montre le relevé des présences versé pour la première fois en appel, l'intéressé aurait disposé d'un délai suffisant pour organiser sa défense. Il s'en suit que M. B... a été privé de la garantie du caractère contradictoire de la procédure devant cette commission et que, par conséquent, c'est à bon droit que les premiers juges ont annulé l'arrêté du 18 janvier 2021 pris au vu de l'avis de cette commission.

7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par la communauté de communes Cœur du Var, celle-ci n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 18 janvier 2021.

Sur les conclusions à fin d'injonction de M. B... :

8. Eu égard au motif d'annulation retenu précédemment et compte tenu de ce qui a été dit au point 4, la présente décision n'implique aucune autre mesure d'exécution que celle déjà prononcée par le jugement attaqué.

Sur les conclusions de la requête n° 22MA02396 à fin de sursis à exécution du jugement :

9. Le présent arrêt statue sur la demande d'annulation du jugement attaqué. Les conclusions tendant au sursis à exécution de ce jugement n° 2100713 sont donc devenues sans objet.

Sur les frais liés au litige :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacun la charge de ses frais.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22MA02396 de la communauté de communes Cœur du Var à fin de sursis à l'exécution du jugement du 4 juillet 2022 du tribunal administratif de Toulon.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes Cœur du Var et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 29 juin 2023 où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- M. Mahmouti, premier conseiller,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2023.

2

N° 22MA02395 - 22MA02396


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02395
Date de la décision : 13/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-03 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Mise à la retraite d'office.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : LLC et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-07-13;22ma02395 ?
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