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06/07/2023 | FRANCE | N°23MA00575

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 06 juillet 2023, 23MA00575


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2020 du maire de Carqueiranne portant délégation de fonction, et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 8 juin 2022 par lequel le maire de Carqueiranne a délivré à Mme C... B... un permis de construire modificatif.

Par une ordonnance n° 2203048 du 11 janvier 2023, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon a, sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-1 du

code de justice administrative, rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2020 du maire de Carqueiranne portant délégation de fonction, et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 8 juin 2022 par lequel le maire de Carqueiranne a délivré à Mme C... B... un permis de construire modificatif.

Par une ordonnance n° 2203048 du 11 janvier 2023, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon a, sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 mars 2023, Mme D..., représentée par Me Blin, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 11 janvier 2023 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon en tant qu'elle rejette sa demande dirigée contre l'arrêté du 8 juin 2022 du maire de Carqueiranne ;

2°) à titre principal, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Toulon pour qu'il soit à nouveau statué sur sa demande ; à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 8 juin 2022 du maire de Carqueiranne ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Carqueiranne la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité au regard de l'opposabilité de l'obligation de notification du recours prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- elle a intérêt à agir ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme ; il est entaché d'incompétence de son auteur ;

- il méconnaît les dispositions des articles L. 421-6 et R. 111-8 du code de l'urbanisme et L. 1331-1 du code de la santé publique, au regard des conditions de raccordement au réseau d'assainissement collectif ;

- l'avis de la métropole Toulon-Provence-Méditerranée est entaché d'une erreur de fait au regard du réseau d'assainissement collectif.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 mai 2023, la commune de Carqueiranne, représentée par Me Parisi, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme D... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, à titre subsidiaire, au renvoi de l'affaire devant le tribunal administratif de Toulon pour qu'il soit à nouveau statué sur la demande de Mme D....

Elle soutient, à titre principal, que la demande de première instance était irrecevable, et, à titre subsidiaire, que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à Mme B..., qui n'a pas produit de mémoire.

Un mémoire enregistré le 16 mai 2023 pour Mme D... n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail, président ;

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public ;

- et les observations Me Bauducco, substituant Me Parisi, représentant la commune de Carqueiranne.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... demande l'annulation de l'ordonnance du 11 janvier 2023 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon en tant qu'elle a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 8 juin 2022 par lequel le maire de Carqueiranne a accordé à Mme B... un permis de construire modificatif.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. (...) ". Selon l'article R. 424-15 de ce même code : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...) Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. (...) ".

3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'irrecevabilité tirée de l'absence d'accomplissement des formalités de notification prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne peut être opposée, en première instance, en appel ou en cassation, qu'à la condition, prévue au deuxième alinéa de l'article R. 424-15 du même code, que l'obligation de procéder à cette notification ait été mentionnée dans l'affichage du permis de construire.

4. Lorsque l'auteur d'un recours entrant dans le champ d'application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'a pas justifié en première instance de l'accomplissement des formalités de notification requises alors qu'il a été mis à même de le faire, soit par une fin de non-recevoir opposée par le défendeur, soit par une invitation à régulariser adressée par le tribunal administratif, il n'est pas recevable à produire ces justifications pour la première fois en appel. Il appartient néanmoins au juge, s'il est saisi de moyens en ce sens, y compris pour la première fois en appel, de vérifier si l'obligation de notification posée par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme peut, au regard des conditions fixées par l'article R. 424-15 du même code, être opposée à la demande.

5. En l'espèce, Mme D... soutient qu'il n'est justifié ni de la régularité, ni même de la réalité de l'affichage du permis de construire contesté, en particulier de ce qu'il indiquait, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, l'obligation de notification du recours administratif ou du recours contentieux. Les défendeurs, à qui la requête de Mme D... a été communiquée, n'apportent pas la preuve de la régularité de cet affichage. En particulier, la requête a été communiquée à Mme B..., pétitionnaire, qui en a accusé réception le 25 mars 2023 mais n'a pas produit de mémoire. La commune de Carqueiranne, quant à elle, relève dans son mémoire en défense enregistré le 4 mai 2023 qu'aucun élément relatif au panneau d'affichage ou à son contenu n'a été produit par la requérante. Ainsi, Mme B..., bénéficiaire du permis de construire contesté, et la commune de Carqueiranne, au nom de laquelle ce permis a été délivré, n'établissent pas que ledit permis ait été régulièrement affiché sur le terrain, dans les conditions notamment prévues à l'article R. 424-15 précité du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, l'obligation de notification du recours contentieux prévue par les dispositions précitées de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'était pas opposable à la requête de Mme D.... Dès lors, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge de première instance a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 8 juin 2022 du maire de Carqueiranne comme irrecevable au regard de l'article R. 600-1 susmentionné.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire, dans cette mesure, devant le tribunal administratif de Toulon.

Sur les frais liés au litige :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Carqueiranne la somme demandée par Mme D... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font par ailleurs obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme D..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée à ce titre par la commune de Carqueiranne.

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 2203048 du 11 janvier 2023 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Toulon est annulée en tant qu'elle rejette la demande de Mme D... dirigée contre l'arrêté du 8 juin 2022 du maire de Carqueiranne.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure de l'annulation prononcée à l'article 1er, au tribunal administratif de Toulon.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D..., à la commune de Carqueiranne et à Mme C... B....

Délibéré après l'audience du 22 juin 2023, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Quenette, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2023.

2

N° 23MA00575

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00575
Date de la décision : 06/07/2023
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-06-01-04 Urbanisme et aménagement du territoire. - Règles de procédure contentieuse spéciales. - Introduction de l'instance. - Obligation de notification du recours.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELARL LEX PUBLICA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-07-06;23ma00575 ?
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