Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure
La société anonyme à responsabilité limitée (SARL) Clinique Mozart et la société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Mozart ont demandé au tribunal administratif de Nice :
- d'annuler les décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 par lesquelles le directeur de l'agence régionale de santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d'Azur a rejeté leur demande de prorogation de l'autorisation d'exercer une activité de chirurgie ambulatoire ;
- d'annuler la décision par laquelle le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur a implicitement rejeté leur demande du 16 avril 2018 tendant à l'abrogation et au retrait des décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 ;
- d'annuler la décision du 19 juillet 2018 par laquelle le ministre de la santé et des sports a rejeté leur recours hiérarchique dirigé contre les décisions prises par le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur le 10 juin 2016, le 29 septembre 2017 et le 5 janvier 2018 ;
- d'enjoindre à l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur d'autoriser la clinique Mozart à poursuivre son activité de chirurgie ambulatoire jusqu'au 16 août 2021 ou, en tout état de cause, au moins jusqu'au jour du regroupement effectif de cette activité sur le nouveau site de la polyclinique Santa Maria.
Par un jugement n° 1802811 du 26 janvier 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 mars 2021 et 7 mai 2021, la SARL Clinique Mozart, représentée par Me Quadéri, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 26 janvier 2021 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler les décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 par lesquelles le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur a rejeté sa demande de prorogation de l'autorisation d'exercer une activité de chirurgie ambulatoire ;
3°) d'annuler la décision par laquelle le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur a implicitement rejeté sa demande du 16 avril 2018 tendant à l'abrogation et au retrait des décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 ;
4°) d'annuler la décision du 19 juillet 2018 par laquelle le ministre de la santé et des sports a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre les décisions prises par le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur le 10 juin 2016, le 29 septembre 2017 et le 5 janvier 2018 ;
5°) d'enjoindre à l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur de l'autoriser, dans un délai maximum de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à reprendre son activité de chirurgie ambulatoire ou, à tout le moins, de statuer à nouveau sur ses demandes ;
6°) de mettre à la charge de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 15 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a omis de viser le moyen d'annulation dirigé contre la décision expresse de rejet du ministre de la santé du 19 juillet 2018 et de statuer sur celui-ci ;
- le rejet des conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision du ministre de la santé n'est pas motivé ;
- le considérant n° 5 du jugement, qui écarte de manière imprécise le moyen tiré de l'insuffisance de motivation " de cette décision " est insuffisamment motivé ;
- le tribunal s'est fondé sur des pièces qui n'ont pas été portées à sa connaissance ;
- conformément à l'article L. 1434-5 du code de la santé publique, aucun délai n'encadre le droit d'un requérant d'invoquer par voie d'exception l'illégalité interne du projet régional de santé et de ses composantes ; le moyen tiré de l'illégalité du schéma régional d'organisation sanitaire-Projet élaboré pour la mise en œuvre des projets régionaux de santé (SROS-PRS 2012-2016) n'était dès lors pas irrecevable ;
- le jugement est entaché de plusieurs erreurs de fait ;
- l'échéance fixée au 31 décembre 2018 par l'ARS pour procéder au regroupement de son activité de chirurgie avec celle de la polyclinique Santa Maria sur un nouveau site était insuffisante ; les décisions prises par le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur sont dès lors entachées d'illégalité ;
- les décisions de refus de réexamen et de refus de prorogation de l'autorisation d'exercer une activité de chirurgie ambulatoire prises les 29 septembre 2017 et 5 janvier 2018 par le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur sont entachées d'erreurs de fait, d'erreurs de droit et d'appréciation ;
- la décision implicite de rejet du directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur tendant à l'abrogation et au retrait des décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 et la décision du ministre de la santé et des sports du 19 juillet 2018 rejetant son recours hiérarchique sont entachées d'erreurs de fait, d'erreurs de droit et d'appréciation ;
- l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur était infondée à lui opposer l'orientation stratégique n° 1 de "regroupement" qui figurait dans son contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens du 31 juillet 2012 ;
- les dispositions du schéma régional d'organisation sanitaire - projet régional sanitaire (SROS-PRS) 2012-2016 telles qu'elles résultent des dispositions de l'arrêté n° 2013361-0001 du 27 décembre 2013 sont illégales et ne lui sont pas opposables ;
- la décision du 6 août 2015 par laquelle le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur lui a enjoint de déposer un dossier complet de demande de renouvellement pour son autorisation de chirurgie ambulatoire est illégale et ne pouvait servir de fondement aux décisions subséquentes prises par l'administration ;
- la décision du 10 juin 2016, renouvelant son autorisation de chirurgie sous réserve du regroupement, au plus tard le 31 décembre 2018, de son activité de chirurgie ambulatoire sur le nouveau site de la Polyclinique Santa Maria, est illégale et ne pouvait pas lui être opposée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2021, l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur conclut au rejet de la requête de la SARL Clinique Mozart.
Elle fait valoir que :
- la décision du 10 juin 2016 par laquelle la SARL Clinique Mozart a obtenu le renouvellement de son autorisation de chirurgie ambulatoire sous réserve du regroupement de cette activité sur le nouveau site de la Polyclinique Santa Maria et la décision du 15 novembre 2016 accordant à la société Polyclinique Santa-Maria cette autorisation sont devenues définitives ; la requête est dès lors irrecevable comme tardive et les moyens soulevés à l'encontre de ces décisions sont irrecevables ;
- les courriers du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 constituent des décisions confirmatives, de sorte que le recours formé contre ces décisions est irrecevable ;
- aucun des moyens invoqués par l'appelante ne sont fondés.
La procédure a été communiquée au ministre de la santé et de la prévention qui n'a pas produit d'observations.
Par une ordonnance du 19 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 février 2023.
Par lettre du 22 mai 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité du moyen tiré de l'illégalité, soulevée par la voie de l'exception, de la décision n° INJ 09-07-2015 du 6 août 2015 prise par le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur, dès lors que l'ordonnance du 21 mars 2018, par laquelle le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Nice a donné acte du désistement de la SARL Clinique Mozart dirigée contre cette décision, est devenue définitive.
Par un mémoire en reprise d'instance, enregistré le 31 mai 2023, la société civile professionnelle de mandataires judiciaires BTSG, agissant en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la société Clinique Mozart et représentée par Me Quadéri, a répondu à ce moyen d'ordre public et demande à la cour de prendre acte de ce qu'elle reprend à son compte les conclusions et les moyens de la requête de SARL Clinique Mozart.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Danveau,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société anonyme à responsabilité limitée (SARL) Clinique Mozart est un établissement de santé privé qui exerce notamment une activité de soins de chirurgie ambulatoire soumise à autorisation, conformément aux dispositions de l'article R. 6122-25 du code de la santé publique. Le 15 décembre 2015, la société Clinique Mozart a déposé une demande de renouvellement de son autorisation d'exercer une activité de soins de chirurgie en alternative à l'hospitalisation, qui a été accordée par décision du 10 juin 2016 du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d'Azur, sous réserve de regrouper son activité de chirurgie ambulatoire sur le nouveau site de la polyclinique Santa Maria à Nice au plus tard à la date du 31 décembre 2018. La même autorisation a été délivrée à la polyclinique Santa Maria par décision du 15 novembre 2016. La polyclinique Santa Maria l'ayant informée en 2017 que le projet avait pris du retard et que l'intérêt d'un tel regroupement sur le site choisi était discuté, la SARL Clinique Mozart a sollicité le report de l'échéance fixée au 31 décembre 2018. Sa demande a été rejetée par décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 prises par le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur. Son recours gracieux formé le 16 avril 2018, dirigé à l'encontre des décisions des 10 juin 2016, 29 septembre 2017 et 5 janvier 2018, a été implicitement rejeté par l'ARS, tandis que son recours hiérarchique formé contre ces mêmes décisions a été rejeté le 19 juillet 2018 par le ministre de la santé et des sports. La société Clinique Mozart, dont la requête est reprise par la société civile professionnelle BTSG, agissant en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de cette société, relève appel du jugement n° 1802811 du 26 janvier 2021 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'ensemble de ces décisions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En indiquant, au point 5 de son jugement, qu' " il ne ressort pas des pièces du dossier que les requérantes ont sollicité les motifs de la décision rejetant implicitement sa demande d'abrogation et de retrait des décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 " et que, par conséquent, celles-ci " ne peuvent utilement se prévaloir de l'insuffisance de motivation de cette décision ", le tribunal s'est référé expressément et sans ambiguïté à la décision, contestée par la société requérante, par laquelle le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur a implicitement rejeté sa demande du 16 avril 2018 d'abrogation et de retrait des décisions précitées. Par suite, le jugement du tribunal n'est, pour ce motif, entaché d'aucune irrégularité.
3. Il ressort des mentions du jugement attaqué que le tribunal, qui a jugé que l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur établissait " en défense qu'au cours des années 2014 et 2015, la clinique Mozart a été l'établissement exerçant une activité de chirurgie ambulatoire qui a réalisé le moins d'actes dans le département des Alpes-Maritimes. ", s'est fondé en particulier sur les écritures de l'ARS qui a expliqué, notamment à l'appui d'un tableau détaillé sur le nombre d'actes réalisés en 2014 et 2015, les raisons pour lesquelles elle a considéré que l'activité de soins de chirurgie ambulatoire de la société Clinique Mozart était faible au regard de celle des autres établissements de santé. La SARL Clinique Mozart a été mise à même de discuter des éléments ainsi présentés, ce qu'elle a d'ailleurs fait à travers ses écritures. Pour ces motifs, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement pour défaut du contradictoire doit être écarté.
4. Il ressort du jugement querellé que le tribunal administratif de Nice a omis de statuer sur le moyen invoqué par la SARL Clinique Mozart contestant le bien-fondé du seul motif opposé par le ministre de la santé et des sports dans sa décision du 19 juillet 2018, tiré de la tardiveté du recours hiérarchique. Dans son mémoire enregistré le 8 août 2018 devant le tribunal, la société requérante soutenait en particulier que le ministre, qui n'était pas fondé à invoquer les dispositions de l'article R. 6122-42 du code de la santé publique, ne pouvait lui opposer ce seul motif, en l'absence de mention des voies et délais de recours dans les décisions contestées du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018. Du fait de cette omission de statuer sur un moyen qui n'était pas inopérant, il y a lieu d'annuler le jugement du tribunal en tant qu'il a rejeté les conclusions de la SARL Clinique Mozart tendant à l'annulation de la décision du 19 juillet 2018 par laquelle le ministre de la santé et des sports a rejeté son recours hiérarchique.
5. Dès lors, il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué portant sur cette même décision du 19 juillet 2018, sur les conclusions de la société Clinique Mozart dirigées contre cette décision et de statuer sur le surplus des conclusions dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 et la décision rejetant implicitement le recours gracieux du 16 avril 2018 :
6. Aux termes de l'article L. 1434-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige : " Le projet régional de santé définit les objectifs pluriannuels des actions que mène l'agence régionale de santé dans ses domaines de compétences, ainsi que les mesures tendant à les atteindre. ". En vertu des dispositions de l'article L. 1434-2 du code, le projet régional de santé est constitué notamment d'un schéma régional d'organisation de soins, dénommé schéma régional de santé (SRS) depuis le 28 janvier 2016. L'article L. 1434-7 du même code prévoit que " Le schéma régional d'organisation des soins a pour objet de prévoir et de susciter les évolutions nécessaires de l'offre de soins afin de répondre aux besoins de santé de la population et aux exigences d'efficacité et d'accessibilité géographique. (...) ". Aux termes de l'article L. 1434-16 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige : " L'agence régionale de santé définit les territoires de santé pertinents pour les activités de santé publique, de soins et d'équipement des établissements de santé, de prise en charge et d'accompagnement médico-social ainsi que pour l'accès aux soins de premier recours. Les territoires de santé peuvent être infrarégionaux, régionaux ou interrégionaux. (...) ". Aux termes de l'article L. 1434-9 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le schéma régional d'organisation des soins fixe, en fonction des besoins de la population, par territoire de santé :1° Les objectifs de l'offre de soins par activités de soins et équipements matériels lourds, dont les modalités de quantification sont fixées par décret ; 2° Les créations et suppressions d'activités de soins et d'équipements matériels lourds ; 3° Les transformations et regroupements d'établissements de santé, ainsi que les coopérations entre ces établissements ; (...) Les autorisations accordées par le directeur général de l'agence régionale de santé en vertu des 2° et 3° doivent être compatibles avec les objectifs fixés par le schéma régional d'organisation des soins. (...) ".
7. Aux termes de l'article D. 6121-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les objectifs quantifiés de l'offre de soins qui sont précisés par le schéma d'organisation des soins portent sur les activités de soins et les équipements matériels lourds faisant l'objet du schéma d'organisation des soins mentionnés à l'article L. 1434-9. ". Aux termes de l'article D. 6121-7 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les objectifs quantifiés de l'offre de soins mentionnés à l'article D. 6121-6 sont exprimés pour les activités de soins : 1° Par territoire de santé : -nombre d'implantations assurant une activité de soins déterminée, définie à l'article R. 6122-25 ; (...) ".
8. Aux termes de l'article L. 6122-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige : " L'autorisation d'activités ou d'équipements relevant d'un schéma régional est donnée ou renouvelée par l'agence régionale de santé après avis de la commission spécialisée de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie compétente pour le secteur sanitaire. (...) ". L'article R. 6122-25 du même code dispose que : " Sont soumises à l'autorisation prévue à l'article L. 6122-1 les activités de soins, y compris lorsqu'elles sont exercées sous la forme d'alternatives à l'hospitalisation, énumérées ci-après : / (...) 2° chirurgie (...) ". Aux termes de l'article R. 6122-34 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " Une décision de refus d'autorisation ou, lorsqu'il est fait application des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 6122-10, de refus de renouvellement d'autorisation ne peut être prise que pour l'un ou plusieurs des motifs suivants : / (...) 2° Lorsque les besoins de santé définis par le schéma d'organisation des soins sont satisfaits ; / 3° Lorsque le projet n'est pas compatible avec les objectifs du schéma d'organisation des soins ; (...) ".
9. Il résulte des articles L. 1434-2, L. 1434-7, L. 1434-9, L. 6122-1 et L. 6122-2 du code de la santé publique, d'une part, que le législateur a entendu que les autorisations d'activités de soins et d'équipements matériels lourds soient compatibles avec les objectifs fixés par le schéma régional d'organisation des soins. Mais, d'autre part, il a également prévu que ces autorisations soient prises pour l'application des objectifs de l'offre de soins arrêtés par le schéma régional de l'offre de soins, notamment de ses objectifs quantifiés, et entendu permettre que la légalité de ce schéma en sa partie relative à l'offre de soins et notamment en ce qui concerne les objectifs quantifiés de l'offre de soins, puisse être contestée par voie d'exception, dans la limite prévue par l'article L. 1434-5 du code de la santé publique. Par suite, ces autorisations qui font application du schéma régional de l'offre de soins en sa partie relative aux objectifs de l'offre de soins, et notamment de ses objectifs quantifiés, peuvent être utilement contestées par des moyens tirés, par voie d'exception, de leur illégalité.
10. A l'appui de sa requête tendant à l'annulation des décisions litigieuses, la SARL Clinique Mozart a excipé de l'illégalité du schéma régional d'organisation sanitaire - projet régional sanitaire 2012-2016 (SROS-PRS 2012-2016) concernant en particulier les objectifs d'implantation des activités de chirurgie dans le département des Alpes-Maritimes. Cependant, en application des dispositions de l'article L. 1434-5 du code de la santé publique, seules les illégalités pour vice de forme ou de procédure du projet régional de santé et de ses composantes prévues à l'article L. 1434-2 ne peuvent plus être invoquées par voie d'exception après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet du document concerné. C'est dès lors à tort que les premiers juges ont estimé que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du SROS-PRS, qui ne reposait pas sur une illégalité pour vice de forme ou de procédure, était irrecevable en raison du caractère définitif de cet acte.
11. Les objectifs du SROS-PRS Provence-Alpes-Côte d'Azur établi sur la période 2012-2016, dans sa version modifiée par arrêté du directeur général de l'ARS du 27 décembre 2013, prévoient notamment que " lorsqu'il est géographiquement possible, pour des raisons de sécurité des patients mais également pour faire face aux problématiques de démographie des professionnels de santé, le regroupement de plateaux techniques à faible activité est préconisé ". Il ne saurait être déduit de cette préconisation, qui vise à définir des objectifs cohérents sur l'offre de soins proposée, que le schéma régional aurait imposé une prescription non prévue par les textes. Il était en ce sens spécifié, pour le département des Alpes-Maritimes, une suppression de trois sites sur ce territoire de santé, faisant ainsi passer le nombre d'implantations d'activités de soins de chirurgie de 21 à 18 unités en 2016. La circonstance, à la supposer même avérée, que ce schéma régional mentionnerait inexactement, au paragraphe 4.3.1 " Rappels de l'existant et du contexte " l'implantation, prévue par le SROS 2006-2011, de 23 sites chirurgicaux, au lieu de 24, et un recensement, au 30 juin 2011, de 21 sites au lieu de 22 est sans incidence sur sa légalité et ne saurait établir que le projet de regroupement en cause, même non concrétisé, n'était pas justifié, compte tenu par ailleurs des éléments exposés aux points suivants. De même, si le schéma régional de santé 2018-2023 mentionne un objectif quantifié de 19 implantations de sites chirurgicaux sur le territoire des Alpes-Maritimes alors qu'il était de 18 selon le précédent SROS au titre de l'année 2016, cette différence dans la réduction envisagée du nombre de structures est également sans incidence et ne révèle aucune erreur d'appréciation dans la décision de regroupement en cause. Par ailleurs, en faisant référence à des " centres exclusifs de chirurgie ambulatoire " et en indiquant notamment que le maintien d'activités ambulatoires ne sera pas encouragé lorsque le volume de ces activités est insuffisant pour conserver une organisation d'hospitalisation complète, le SROS-PRS 2012-2016 se borne à définir des objectifs qui demeurent en tout état de cause dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article L. 1434-7.
12. Conformément à ce schéma régional, le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM), conclu le 31 juillet 2012 entre l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur et la SARL Clinique Mozart, définit les orientations stratégiques de la clinique dont l'activité de soins est soumise à l'autorisation prévue à l'article L. 6122-1 du code de la santé publique. L'orientation n° 1 prévoit à cet effet la nécessité de " s'engager dans une perspective de regroupement avec une structure d'hospitalisation complète de chirurgie ". Contrairement à ce que soutient l'appelante qui a signé le CPOM, aucun élément ne permet d'établir que cette orientation stratégique ainsi fixée contractuellement, et dont la rédaction reprend la proposition faite par la clinique dans un courrier du 31 juillet 2012, lui aurait été imposée sans son consentement et serait, de ce fait, inopposable alors qu'en tout état de cause, la clinique s'est par la suite engagée, comme la Polyclinique Santa Maria, à mettre en œuvre le projet de regroupement reposant sur les objectifs opérationnels du SROS-PRS 2012-2016. Est enfin sans incidence la circonstance, à la supposer même avérée, qu'une telle orientation ne figurerait pas dans les CPOM conclus par l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur avec les autres établissements de santé du département des Alpes-Maritimes, l'ARS faisant au demeurant valoir que la clinique " Le Méridien ", située à Cannes, s'était également engagée à regrouper son activité de chirurgie ambulatoire et à cesser concomitamment cette activité sur son propre site.
13. Il ressort ainsi de la décision contestée du 29 septembre 2017 du directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui s'appuie sur l'ensemble de ces orientations, que le renouvellement de l'autorisation d'exercer la chirurgie ambulatoire sur le site de la clinique Mozart a été accordé sous réserve du regroupement avec la polyclinique Santa Maria au plus tard le 31 décembre 2018. Ce regroupement d'activité avec un autre établissement apparaît, ainsi qu'il a été dit, conforme à l'engagement figurant au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens signé par la SARL Clinique Mozart, qui repose sur la circonstance que l'offre de soins sur le territoire de l'agglomération niçoise est largement suffisante, et sur les orientations du volet chirurgie du SROS qui prévoient une réduction des implantations de chirurgie dans les Alpes-Maritimes en préconisant une adaptation structurelle de l'offre chirurgicale par regroupement de plateaux techniques de faible activité. L'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur s'appuie par ailleurs sur le rapport publié conjointement par l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales en juillet 2014. Celui-ci fait état de la difficulté pour les établissements ayant une faible activité de chirurgie ambulatoire à développer des organisations de qualité et efficientes dans cette activité, et recommande le regroupement des activités de chirurgie à faible volume. Il ressort en outre des pièces du dossier, et sans qu'il y ait lieu de rechercher si l'activité chirurgicale de la SARL Clinique Mozart était la plus faible de tous les établissements présents sur le territoire de santé des Alpes-Maritimes, que celle-ci demeurait en tout état de cause particulièrement modeste, au vu notamment des 1 305 actes pratiqués en 2015, hors chirurgie esthétique, soit 0,98 % des 132 878 séjours de chirurgie du territoire, et des 1 080 actes réalisés en 2016. Est à cet égard sans incidence la circonstance qu'aucun texte règlementaire ne définisse un seuil d'activité en matière d'activités de soins de chirurgie. Enfin, il n'apparaît pas davantage établi que le délai de regroupement avec la polyclinique Santa Maria, fixé au plus tard au 31 décembre 2018, dont le respect conditionnait la poursuite sur le nouveau site de l'exercice de l'activité de chirurgie ambulatoire et qui ressort de la décision du directeur général de l'ARS PACA du 10 juin 2016 prise plus de deux ans auparavant, était insuffisant compte tenu notamment des délais de réalisation des travaux. Une telle perspective de regroupement était au demeurant prévisible depuis la conclusion du CPOM en juillet 2012, quand bien même la Polyclinique Santa Maria l'a informée en 2017 que le projet avait pris du retard et que l'intérêt d'un tel regroupement sur le site choisi était réévalué.
La SARL Clinique Mozart ne saurait, de surcroît, sérieusement prétendre que cette condition du regroupement imposée par la décision du 10 juin 2016 serait illégale au motif que l'autorisation de regroupement accordée à la Polyclinique Santa Maria en novembre 2016 lui est postérieure. Par suite, comme l'ont à bon droit considéré les premiers juges sans entacher leur appréciation d'erreurs de fait, le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur n'a, en accordant le renouvellement de l'autorisation d'exercer l'activité de chirurgie ambulatoire sous réserve d'un regroupement de cette activité avec la polyclinique Santa Maria au plus tard le 31 décembre 2018, commis aucune erreur d'appréciation.
14. Pour les mêmes motifs que ceux évoqués aux points précédents, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision n° INJ 09-07-2015 du 6 août 2015 du directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur, enjoignant à la SARL Clinique Mozart de déposer un dossier en vue d'obtenir le renouvellement de son autorisation d'activité de chirurgie en alternative à l'hospitalisation, ainsi que celui tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision du directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur du 10 juin 2016 par laquelle la SARL Clinique Mozart a obtenu le renouvellement de son autorisation de chirurgie ambulatoire sous réserve du regroupement de cette activité sur le nouveau site de la Polyclinique Santa Maria, doivent être écartés comme infondés.
15. Il suit de là, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que la décision précitée du 29 septembre 2017 ainsi que, par voie de conséquence, celle du 5 janvier 2018 confirmant le refus de prorogation de son activité de chirurgie ambulatoire au-delà de la date du 31 décembre 2018, ne sont entachées d'aucune illégalité. Il en va de même, par voie de conséquence et pour les mêmes motifs, de la décision par laquelle le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur a implicitement rejeté la demande du 16 avril 2018 tendant au retrait partiel de la décision du 10 juin 2016 et au retrait ou, à défaut, à l'abrogation, des décisions précitées du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018.
16. Il résulte de tout ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 et de la décision rejetant implicitement le recours gracieux du 16 avril 2018.
En ce qui concerne la décision du ministre de la santé et des sports du 19 juillet 2018 :
17. Aux termes de l'article R. 6122-42 du code de la santé publique : " Le recours hiérarchique prévu à l'article L. 6122-10-1 contre les décisions du directeur de l'agence régionale de santé est formé par le demandeur dans un délai de deux mois à partir de la notification de la décision. ". Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ".
18. Par une décision du 10 juin 2016, le directeur général de l'ARS Provence-Alpes-Côte d'Azur a autorisé la SARL Clinique Mozart à obtenir le renouvellement de l'autorisation de pratiquer une activité de chirurgie en alternative à l'hospitalisation, sous réserve du regroupement de l'activité chirurgicale sur le nouveau site de la Polyclinique Santa Maria au plus tard le 31 décembre 2018. Il ne ressort cependant pas des pièces du dossier que cette décision était, à la date du recours hiérarchique de la SARL Clinique Mozart du 16 avril 2018, devenue définitive à l'égard de la SARL Clinique Mozart, en l'absence de tout élément justifiant sa date de notification.
19. Par ailleurs, il est constant que les décisions du 29 septembre 2017 et du 5 janvier 2018 par lesquelles le directeur de l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur a rejeté la demande de prorogation de la société requérante de l'autorisation d'exercer une activité de chirurgie ambulatoire ne comportaient aucune mention des voies et délais de recours, contrairement aux dispositions précitées du code de justice administrative. Par suite, les délais de recours à l'égard de ces deux décisions n'ont pas couru.
20. Dès lors, c'est à tort que le ministre de la santé et des sports a, par sa décision du 19 juillet 2018, rejeté le recours hiérarchique de la SARL Clinique Mozart formé contre les trois décisions visées aux points 18 et 19 au seul motif que la demande était tardive. Cette décision doit donc être annulée.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
21. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par la SARL Clinique Mozart.
Sur les frais liés au litige :
22. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la SARL Clinique Mozart présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative aussi bien en appel qu'en première instance.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1802811 du 26 janvier 2021 du tribunal administratif de Nice est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la SARL Clinique Mozart tendant à l'annulation de la décision du 19 juillet 2018 par laquelle le ministre de la santé et des sports a rejeté son recours hiérarchique.
Article 2 : La décision du ministre de la santé et des sports du 19 juillet 2018 est annulée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par la SARL Clinique Mozart et reprise par la société BTSG, agissant en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SARL Clinique Mozart, est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société BTSG, agissant en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SARL Clinique Mozart, à l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur et au ministre de la santé et de la prévention.
Délibéré après l'audience du 15 juin 2023, où siégeaient :
- Mme Fedi, présidente de chambre,
- M. Mahmouti, premier conseiller,
- M. Danveau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 juin 2023.
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No 21MA01222
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