Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le certificat d'urbanisme du 18 mai 2018 par lequel le maire d'Upaix a indiqué que le projet de construction d'une maison individuelle d'habitation de la SAS Square habitat VDSP sur une parcelle cadastrée C 1545, située Le Village à Upaix, n'était pas réalisable ainsi que la décision rejetant implicitement son recours gracieux contre cet arrêté, en tant qu'ils indiquent que l'opération projetée n'est pas réalisable.
Par un jugement n° 1808285 du 30 décembre 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 26 février 2021 et le 23 mai 2021, M. B..., représenté par Me Paternot, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 30 décembre 2020 ;
2°) d'annuler le certificat d'urbanisme du 18 mai 2018 ;
3°) si nécessaire d'ordonner une expertise afin de déterminer si le terrain cadastré section C n° 1545 à Upaix est assujetti à un aléa au titre du glissement de terrain s'opposant à tout projet de construction ;
4°) de mettre à la charge de la commune d'Upaix la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce qu'il ne répond pas au moyen tiré de l'illégalité de la méthode de " carte informative " ;
- l'arrêté est entaché d'erreur d'appréciation au regard de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme ;
- le maire s'est fondé sur la méthode de " carte informative " qui ne repose sur aucune base légale et méconnaît le principe de participation du public résultant de la Convention d'Aarhus adoptée le 25 juin 1998 ;
- ce faisant, le maire a entaché son arrêté d'incompétence négative ;
- l'arrêté est entaché d'erreur d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- l'existence d'un aléa de glissement de terrain fort sur la parcelle C 1545 n'est pas établie.
Par des mémoires en défense enregistrés le 23 avril 2021 et le 13 juillet 2021, la commune d'Upaix, représentée par Me Ducrey-Bompard, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable faute d'avoir été notifiée au titre de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;
- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me Paternot, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Mandatée à cet effet par M. B..., propriétaire de la parcelle cadastrée C 1545, située Le Village à Upaix, la société Square Habitat a déposé une demande de certificat d'urbanisme opérationnel pour la construction sur ce terrain d'une maison individuelle. Le 18 mai 2018, le maire d'Upaix a délivré un certificat indiquant que le terrain ne pouvait pas être utilisé pour la réalisation de cette opération. M. B... relève appel du jugement du 30 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce certificat.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort du jugement en litige que le tribunal a relevé que le maire d'Uchaux s'est appuyé sur la carte informative des risques naturels établie par la direction départementale des territoires des Hautes-Alpes. Ce faisant, et en employant la qualification " informative ", le tribunal a implicitement, mais nécessairement, indiqué que ce document n'a pas de valeur normative et que le moyen tiré de son illégalité est inopérant. Le moyen tiré de l'insuffisance motivation de ce jugement ne peut dès lors qu'être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement
3. Aux termes de l'article L. 410-1 du même code, dans sa version en vigueur à la date du certificat attaqué : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. (...). ".
4. Aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune. ". Aux termes de l'article L. 111-4 du même code : " Peuvent toutefois être autorisés en dehors des parties urbanisées de la commune : / 1° L'adaptation, le changement de destination, la réfection, l'extension des constructions existantes ou la construction de bâtiments nouveaux à usage d'habitation à l'intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d'une ancienne exploitation agricole, dans le respect des traditions architecturales locales ; / 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole, à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées, à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national ; / 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et l'extension mesurée des constructions et installations existantes ; / 4° Les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune, en particulier pour éviter une diminution de la population communale, le justifie, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publiques, qu'elles n'entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques et que le projet n'est pas contraire aux objectifs visés à l'article L. 101-2 et aux dispositions des chapitres I et II du titre II du livre Ier ou aux directives territoriales d'aménagement précisant leurs modalités d'application. ". L'article R. 111-14 de ce code dispose : " En dehors des parties urbanisées des communes, le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature, par sa localisation ou sa destination : / 1° A favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en particulier lorsque ceux-ci sont peu équipés ; (...) ".
5. Pour considérer que le terrain concerné ne pouvait pas être utilisé pour la réalisation de l'opération mentionnée dans la demande de certificat d'urbanisme, le maire d'Upaix s'est d'abord fondé sur les dispositions de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme, applicable dès lors que la commune d'Upaix n'était dotée ni d'un plan d'occupation des sols, ni d'un plan local d'urbanisme, ni d'un document d'urbanisme en tenant lieu. Il a indiqué que le terrain se situait en dehors des parties urbanisées de la commune et que la construction d'une maison individuelle avait pour effet de favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ce terrain, dont la surface est de 1600 m², se situe dans la continuité de plusieurs parcelles bâties alignées au nord et qui constituent elle-même la limite est du village. Le terrain lui-même est en contrebas d'une rue qui traverse le village. Si un autre terrain non bâti et en partie arboré se trouve de l'autre côté de la rue, celle-ci n'est distante que d'une vingtaine de mètres d'une autre rue parallèle bordée de maisons du village alignées sans discontinuité. Le terrain litigieux est desservi par les réseaux publics d'eau, d'assainissement et d'électricité et constitue d'ailleurs le dernier lot d'un lotissement. Ainsi, il est compris dans les parties urbanisées de la commune. La commune ne peut utilement se prévaloir d'une cartographie des parties urbanisées de la commune élaborée à titre informatif par les services de l'Etat. Dans ces conditions, c'est à tort que le maire d'Upaix a opposé les dispositions de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme qui n'étaient pas applicables.
6. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Aux termes de l'article L. 422-5 du même code : " Lorsque le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : / a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu ; (...) ". Ces dernières dispositions, relatives au régime des autorisations d'urbanisme et des déclarations préalables, ne sont pas applicables aux certificats d'urbanisme. Aucune autre disposition ne subordonne la délivrance d'un certificat d'urbanisme à un avis conforme du préfet. Il s'ensuit que, s'il est loisible au maire de recueillir l'avis du préfet sur une demande de certificat d'urbanisme dont il est saisi, il n'est pas lié par cet avis.
7. Le maire d'Upaix a également opposé dans le certificat d'urbanisme attaqué les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en se référant à la localisation de la parcelle en litige dans une zone affectée d'un risque de glissement de terrain fort, déterminée par la cartographie informative des phénomènes torrentiels et de mouvements de terrain (CIPTM) élaborée par les services de l'Etat. Il a indiqué que les constructions nouvelles y étaient interdites sauf exceptions visées, au nombre desquelles la construction d'une maison individuelle ne figure pas. Il résulte en outre des motifs de la décision du 17 septembre 2018 par laquelle il a rejeté le recours gracieux formé par le requérant contre ce certificat que, postérieurement à celui-ci, le maire a vainement saisi les services de l'Etat d'une demande de révision du classement de la parcelle par cette cartographie. Il a mentionné dans ce courrier que le maintien du classement ne lui permettait pas de revenir sur le certificat d'urbanisme du 18 mai 2018. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que le maire d'Upaix n'a pas porté sa propre appréciation sur la réalité et l'étendue des risques résultant de l'opération mentionnée par la demande de certificat mais qu'il s'est estimé lié, à tort, par la cartographie purement informative élaborée par les services de l'Etat.
8. Cependant, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
9. En l'espèce, la commune d'Upaix fait valoir en défense devant la cour que le certificat d'urbanisme attaqué est légalement justifié par les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme au regard des informations apportées par la cartographie informative citée au point 8 et par l'étude réalisée en 2018 par le service départemental de restauration des terrains en montagne des Hautes-Alpes relative à l'état du risque glissement de terrain sur la parcelle C 1545. Le requérant n'est pas recevable à exciper de l'illégalité de la méthode de la " carte informative " dès lors que ce document revêt un caractère purement informatif. Il ressort des pièces du dossier que cette parcelle est " identifiée " par cette cartographie à son extrémité nord-est comme sujette à un aléa " glissement avéré " (G3) et à un " glissement présumé " (G2) pour le reste de sa surface, qui s'inscrit dans une combe accentuée sous le village. Si elle présente à cet endroit un replat, le service précité a constaté sur place des indices de mouvements de terrain et de présence de circulations d'eau autour de ce replat et notamment sur les terrains directement à l'aval. Pour contester ces éléments, M. B... se prévaut des mentions du rapport de " reconnaissance géotechnique de terrain " établi par un ingénieur agronome géologue pédologue. Ce dernier a relevé dans son rapport l'absence d'indices de mouvements de terrain et de présence de circulations d'eau sur la parcelle C 1545 même, sur le chemin rural qui la longe au sud ainsi que sur les parcelles voisines C 1122, 1146 et 1546, tout en reconnaissant la présence de robines constituant de tels indices sur les parcelles 129, 130, 171 à 182 de deux combes sous le village. Eu égard à la précision des éléments d'information apportés par la cartographie informative et le rapport d'expertise élaborés par les services de l'Etat, le rapport produit n'est pas de nature à remettre en cause la réalité de l'existence d'un risque de glissement de terrain sur l'ensemble de cette zone. En opposant à M. B..., pour ce motif, les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme pour considérer que la parcelle C 1545 ne pouvait pas être utilisée pour la réalisation de l'opération de construction envisagée, le certificat d'urbanisme du 18 mai 2018 n'est pas entaché d'une erreur d'appréciation. Le maire d'Upaix aurait pris la même décision s'il avait entendu se fonder initialement sur ce motif. Il y a lieu, dès lors, de procéder à la substitution de motifs demandée.
10. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que le maire d'Upaix aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que ce seul motif pour délivrer le certificat d'urbanisme.
11. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Upaix ni d'ordonner une expertise, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Upaix qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune d'Upaix présentées sur le fondement de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune d'Upaix au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune d'Upaix.
Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Quenette, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.
N° 21MA00826 2
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