Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 28 août 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de sa destination.
Par un jugement n° 2005017 du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 mai et le 23 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Oloumi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 1er juillet 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 28 août 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et de lui délivrer dans cette attente un récépissé l'autorisant à travailler, ou, à défaut, de réexaminer son droit au séjour et de lui délivrer dans l'attente d'une nouvelle décision un récépissé l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige est entaché d'incompétence de son signataire dès lors que l'identité et la qualité de ce dernier sont illisibles ;
- alors que M. A... avait levé le secret médical devant les premiers juges, le tribunal administratif n'a pas demandé à ce que soit produit le rapport médical du médecin instructeur de l'OFII, de sorte que les premiers juges n'ont pu s'assurer de ce que les garanties procédurales ont été respectées ;
- l'avis du collège des médecins de l'OFII ne mentionne ni les conditions dans lesquelles le rapport et l'avis ont été rendus, ni si le demandeur a été amené à justifier de son identité, de sorte qu'il a été privé d'une garantie ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de la nécessité de produire le rapport médical du médecin instructeur de l'OFII.
La requête et le mémoire ont été communiqués au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2022.
Par une ordonnance du 21 février 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 mars 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnées aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Fedi a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité russe, relève appel du jugement du 1er juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande aux fins d'annulation de l'arrêté du 28 août 2020 du préfet des Alpes-Maritimes lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de sa destination.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce que soutient M. A..., les premiers juges ont répondu au moyen tiré de ce que le rapport médical du médecin instructeur de l'OFII devait être produit au débat, au point 4 de leur jugement. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. (...)".
4. Si le requérant soutient en appel que le cachet devant mentionner le nom et la qualité du signataire de la décision n'est pas déchiffrable, la décision a été signée par M. C... B... dont le nom apparait lisiblement. Aussi, alors même que le cachet apposé par le service et relatif à la qualité du signataire de l'arrêté est difficilement déchiffrable, il est cependant aisé d'identifier sa fonction au regard de l'entête de l'arrêté qui comporte bien l'intitulé du service dont il émane : " Préfet des Alpes-Maritimes - Direction de la réglementation, de l'intégration et des migrations ". Par suite le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté.
5. Par arrêté n° 2020-323 du 19 mai 2020, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial n° 106.2020, M. C... B..., attaché principal hors classe, chargé de la direction de la règlementation, de l'intégration et des migrations par intérim, a reçu délégation à l'effet de signer au nom du préfet des Alpes-Maritimes les actes et documents relevant de la compétence de cette direction et ayant trait à la délivrance de titres de séjour, aux obligations de quitter le territoire français ou aux mesures d'éloignement. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision en cause doit donc être écarté comme manquant en fait.
6. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code précité : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration./ L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...)". Et aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) ".
7. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.
8. Pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. A..., le préfet des Alpes-Maritimes a estimé, au regard de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en date du 3 août 2020, que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, M. A... peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Devant la cour, M. A... se borne à soutenir que les premiers juges auraient dû solliciter la communication du rapport médical du médecin instructeur de l'OFII ainsi qu'il le leur demandait afin de vérifier qu'il n'aurait pas été privé d'une garantie procédurale essentielle. D'une part, les premiers juges n'étaient pas tenus, pour statuer sur la requête de M. A..., d'ordonner la communication de ce rapport médical, quand bien même le requérant en avait explicitement formulé la demande. D'autre part, à supposer même que M. A... puisse être regardé comme se prévalant de ce même moyen devant la cour, il n'apporte aucun élément permettant de douter de la régularité de la procédure ayant conduit à l'élaboration de l'avis du collège des médecins de l'OFII. Il ressort au contraire des pièces du dossier, et notamment des pièces produites par le préfet en première instance, que l'auteur du rapport médical n'a pas siégé au sein du collège des médecins de l'OFII, ainsi que le prescrivent les dispositions de l'article R. 313-23 précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Enfin, à supposer encore que M. A... puisse être regardé comme contestant le bien-fondé de l'avis du collège des médecins de l'OFII et comme levant le secret médical le concernant, il n'apporte aucun élément, ni devant le tribunal administratif, ni devant la cour, permettant de contester utilement cet avis. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que le médecin de l'OFII qui a établi le rapport médical n'aurait pas tenu compte des éléments médicaux qu'il avait à sa disposition. Par suite, il n'apparaît pas nécessaire pour la cour, qui n'y est pas tenue même si le requérant a levé le secret médical, ainsi qu'il a été dit précédemment, de demander la communication de l'entier dossier médical. Dès lors, les moyens tirés de ce que M. A... aurait été privé d'une garantie de la procédure faute de production du rapport médical et de ce que le préfet aurait commis une erreur d'appréciation au regard du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.
9. L'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 de la ministre des affaires sociales et de la santé et du ministre de l'intérieur relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté. ". Aux termes de l'article 4 de cet arrêté du 27 décembre 2016 : " Pour l'établissement de son rapport médical, le médecin de l'office peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant renseigné le certificat médical et faire procéder à des examens complémentaires. / Le médecin de l'office, s'il décide, pour l'établissement du rapport médical, de solliciter un complément d'information auprès du médecin qui a renseigné le certificat médical, en informe le demandeur. /Il peut convoquer, le cas échéant, le demandeur auprès du service médical de la délégation territoriale compétente ". Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ;
/ b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ". Et aux termes de l'article 7 : " Et aux termes de l'article 7, " Pour l'établissement de l'avis, le collège de médecins peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant rempli le certificat médical. Le demandeur en est informé. Le complément d'information peut être également demandé auprès du médecin de l'office ayant rédigé le rapport médical. Le demandeur en est informé. /Le collège peut convoquer le demandeur. (...). Le collège peut faire procéder à des examens complémentaires. "
10. M. A... se borne à soutenir que l'avis du collège des médecins de l'OFII n'indique pas les conditions dans lesquelles le rapport et l'avis ont été rendus et qu'il est de ce fait entaché d'un vice de procédure sans apporter d'éléments permettant de faire douter de la régularité de la procédure qui a été suivie, alors qu'au contraire il ressort des pièces du dossier que l'avis a bien été signé par chacun des trois membres du collège conformément à l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016. En outre, si aucune précision relative à la justification de l'identité du requérant au stade de l'élaboration du rapport puis de l'avis par les services de l'OFII, qualifiée " d'éléments de procédure " par les dispositions précitées de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, n'est renseignée sur l'avis, il résulte toutefois des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 4 de l'arrêté du 27 décembre 2016 mentionnées précédemment que la faculté pour l'auteur du rapport médical préalable ou pour les membres du collège de procéder à une convocation du demandeur ainsi qu'à des vérifications complémentaires et à la justification de l'identité de son identité le cas échéant ne présente pas un caractère obligatoire. Dès lors, si le médecin instructeur ou le collège ne font pas usage de cette faculté, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé d'une garantie en l'absence de justification de son identité. Le moyen tiré du vice de procédure doit par conséquent être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 août 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Me Oloumi et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, où siégeaient :
- Mme Fedi, présidente de chambre,
- M. Mahmouti, premier conseiller,
- M. Danveau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2023.
N° 22MA014592