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08/06/2023 | FRANCE | N°21MA02087

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 08 juin 2023, 21MA02087


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Primovar a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2017 par lequel le maire de La Garde a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de l'édification d'un immeuble d'habitation comportant quinze logements sur un terrain situé rue Auguste Aiguier.

Par un jugement n° 1704529 du 23 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du maire de La Garde du 11 octobre 2017 et a enjoint à cette a

utorité de délivrer à la société Primovar le permis de construire sollicité dans un dé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Primovar a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2017 par lequel le maire de La Garde a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de l'édification d'un immeuble d'habitation comportant quinze logements sur un terrain situé rue Auguste Aiguier.

Par un jugement n° 1704529 du 23 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du maire de La Garde du 11 octobre 2017 et a enjoint à cette autorité de délivrer à la société Primovar le permis de construire sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 février et 13 mars 2020, la commune de La Garde, représentée par la SCP L. Poulet, Odent, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 23 décembre 2019 ;

2°) de rejeter la demande de première instance de la société Primovar ;

3°) de mettre à la charge de la société Primovar la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il ne respecte pas les exigences de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le tribunal n'a pas suffisamment répondu à son moyen relatif à l'intérêt paysager et architectural du secteur d'implantation du projet ;

- le motif de refus fondé sur l'article UE 3 du règlement du plan local d'urbanisme n'est pas illégal, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'arrêté de refus de permis de construire était entaché d'une erreur d'appréciation au regard des articles UE 11 du règlement du plan local d'urbanisme et R. 111-27 du code de l'urbanisme.

Par une ordonnance n° 20MA00839 du 2 avril 2020, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête de la commune de La Garde tendant à l'annulation de ce jugement.

Par une décision n° 441112 du 3 mars 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a attribué à la cour le jugement de la requête de la commune de La Garde.

La société Primovar n'a pas produit de mémoire en défense en dépit de la mise en demeure qui lui a été adressée le 13 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mouret,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me Poulet, représentant la commune de La Garde.

Considérant ce qui suit :

1. La société Primovar a déposé, le 12 mai 2017, une demande de permis de construire, ultérieurement complétée, en vue de l'édification d'un immeuble d'habitation comprenant quinze logements, ainsi que vingt-quatre places de stationnement en sous-sol, sur un terrain cadastré section AW nos 491 et 493 situé rue Auguste Aiguier sur le territoire de la commune de La Garde. Par un arrêté du 11 octobre 2017, le maire de La Garde a refusé de délivrer le permis de construire sollicité. La commune de La Garde relève appel du jugement du 23 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté et a enjoint à son maire de délivrer à la société Primovar le permis de construire sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le moyen tiré de ce que la minute du jugement attaqué ne comporterait pas l'ensemble des signatures requises en vertu de l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque en fait.

3. En second lieu, il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal a suffisamment exposé, aux points 10 et 11 de ce jugement, les raisons pour lesquelles le projet litigieux n'était pas, selon lui et contrairement à ce qu'a retenu le maire de La Garde, de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué sur ce point doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En vertu des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme en retenant un ou plusieurs moyens, de se prononcer expressément sur le bien-fondé des différents motifs d'annulation retenus par les premiers juges, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui, afin d'apprécier si ce moyen ou l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation. Dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance.

5. Pour refuser de délivrer le permis de construire sollicité par la société Primovar, le maire de La Garde a estimé que le projet litigieux méconnaît, d'une part, les articles R. 111-5 du code de l'urbanisme et UE 3 du règlement du plan local d'urbanisme communal et, d'autre part, les articles R. 111-27 du code de l'urbanisme et UE 11 du même règlement. Les premiers juges ont annulé l'arrêté du 11 octobre 2017 après avoir censuré ces différents motifs de refus.

6. En premier lieu, la commune de La Garde ne conteste pas en appel que le refus de permis de construire en litige ne pouvait être fondé sur l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme, ces dispositions du règlement national d'urbanisme n'étant pas applicables dès lors que, comme l'a relevé à bon droit le tribunal au point 4 du jugement attaqué, le territoire communal était régi par un plan local d'urbanisme opposable à la date de l'arrêté attaqué.

7. En deuxième lieu, l'article UE 3 du règlement du plan local d'urbanisme de La Garde, dans sa rédaction applicable au présent litige, prévoit, à son 1° relatif aux accès, que : " Pour être constructible, un terrain doit comporter un accès (automobile) à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisins, ou éventuellement obtenu par application de l'article 682 du code civil. / Les caractéristiques des accès doivent permettre de satisfaire aux règles minimales de desserte : défense contre l'incendie, protection civile, brancardage, etc. / Il peut être aménagé par terrain (faisant l'objet d'un projet d'occupation ou d'utilisation des sols) soit un accès à la voie publique conçu en double sens, soit deux accès en sens unique (...) ". Le 2° du même article UE 3, relatif à la voirie, dispose que : " Les terrains doivent être desservis par des voies publiques ou privées, répondant à l'importance et à la destination de la construction ou de l'ensemble des constructions qui y sont édifiées. / Aucune voie privée automobile ne doit avoir une largeur inférieure à 4,00 mètres. Les voies en impasse doivent être aménagées dans leur partie terminale afin de permettre aux véhicules de faire aisément demi-tour et doivent présenter des caractéristiques correspondant à leur destination ".

8. D'une part, en l'absence de précision contraire, les dispositions citées ci-dessus du 2° de l'article UE 3 du règlement du plan local d'urbanisme de La Garde s'appliquent aux seules voies qui desservent le terrain d'assiette et non aux voies internes à ce terrain.

9. Le terrain d'assiette du projet est bordé par la rue Auguste Aiguier qui constitue sa voie de desserte. Il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux prévoit la modification du tracé et de la consistance du chemin privé en impasse intégralement situé sur ce terrain. Le chemin en cause, qui débouche au sud sur la rue Auguste Aiguier et dessert, au niveau de sa partie terminale en impasse, deux propriétés bâties jouxtant le terrain d'assiette, doit en particulier permettre aux véhicules d'accéder aux places de stationnement dont la création est prévue au sous-sol de l'immeuble projeté. Contrairement à ce que soutient la commune de La Garde, ce chemin, dont l'emprise demeurera située en totalité sur le terrain d'assiette au vu des plans joints à la demande de permis de construire de la société Primovar, doit être regardé comme une voie de circulation interne à ce terrain. Par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal au point 5 du jugement attaqué, le maire de La Garde a commis une erreur de droit en opposant à cette voie interne au terrain d'assiette les dispositions du 2° de l'article UE 3 du règlement du plan local d'urbanisme de La Garde applicables aux seules voies de desserte.

10. D'autre part, pour l'application des dispositions du 1° de l'article UE 3 du règlement du plan local d'urbanisme de La Garde, et en l'absence de précision contraire dans ce règlement, l'accès doit s'entendre du seul débouché sur une voie publique ou privée, ouverte à la circulation, du terrain d'assiette du projet ou, le cas échéant, du passage aménagé sur un fonds voisin permettant de relier ce terrain à une telle voie de desserte.

11. Le terrain d'assiette du projet dispose d'un accès direct à la rue Auguste Aiguier, voie publique présentant un caractère rectiligne au droit de cet accès à double sens. Contrairement à ce que soutient la commune de La Garde, le projet litigieux ne prévoit pas l'aménagement d'une aire de présentation des ordures ménagères au niveau de l'accès en cause. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cet accès existant, d'une largeur d'un peu plus de quatre mètres, présenterait des caractéristiques insuffisantes pour satisfaire aux règles minimales de desserte, en particulier au regard des exigences de défense contre l'incendie et de protection civile. Par suite, comme l'a jugé à bon droit le tribunal au point 7 du jugement attaqué, le maire de La Garde a fait une inexacte application des dispositions du 1° de l'article UE 3 du règlement du plan local d'urbanisme en retenant que les caractéristiques de cet accès automobile étaient insuffisantes.

12. En troisième lieu, aux termes du 1° de l'article UE 11 du règlement du plan local d'urbanisme de La Garde, dans sa rédaction applicable au présent litige : " En aucun cas, les constructions et installations ne doivent (...) par leur situation, leurs dimensions ou leur aspect extérieur porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites et aux paysages naturels ou urbains. / Les constructions doivent présenter une simplicité de volume et une unité d'aspect et de matériaux en harmonie avec les constructions avoisinantes. / Tout pastiche d'une architecture archaïque ou étrangère à la région est interdit ".

13. Dès lors que les dispositions du règlement d'un plan local d'urbanisme ont le même objet que celles d'un article du code de l'urbanisme fixant des règles nationales d'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que doit être appréciée la légalité d'une décision délivrant ou refusant une autorisation d'urbanisme. Les dispositions de la première phrase du 1° de l'article UE 11 du règlement du plan local d'urbanisme de La Garde ont le même objet que celles de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres que celles résultant de ce dernier article.

14. Si la commune de La Garde soutient que, comme l'a relevé son maire dans l'arrêté attaqué, le projet litigieux méconnaît les dispositions citées ci-dessus du 1° de l'article UE 11 du règlement du plan local d'urbanisme ainsi que celles de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, elle ne se prévaut pas en appel d'éléments distincts de ceux soumis à l'appréciation des premiers juges. Comme l'a estimé à bon droit le tribunal aux points 10 et 11 du jugement attaqué dont il convient d'adopter les motifs, le maire de La Garde a fait une inexacte application des dispositions citées au point 12 en retenant ce motif de refus.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de La Garde n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a fait droit à la demande de la société Primovar. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de La Garde est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Garde et à la société à responsabilité limitée Primovar.

Délibéré après l'audience du 25 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juin 2023.

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N° 21MA02087


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02087
Date de la décision : 08/06/2023
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : LACHAUT DANA

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-06-08;21ma02087 ?
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