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08/06/2023 | FRANCE | N°21MA01566

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 08 juin 2023, 21MA01566


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 à 2015.

Par un jugement n° 1905882 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 avril 2021, les 6 et 7 mars 2023 et le

13 avril 2023, Mme A..., représentée par la SCP Alcade et Associés agissant par Me Amiel, dema...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 à 2015.

Par un jugement n° 1905882 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 avril 2021, les 6 et 7 mars 2023 et le 13 avril 2023, Mme A..., représentée par la SCP Alcade et Associés agissant par Me Amiel, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 mars 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et majorations en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les vérifications de comptabilité des sociétés à responsabilité limitée (SARL) Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs, des Rives d'Arcins, Bowling du Bassin et Bowling du Pontet, dont elle est la gérante ou associée, sont viciées : la nature et les résultats des traitements réalisés à partir des fichiers informatiques saisis lors de la visite domiciliaire n'ont pas été portés à la connaissance de chacune des sociétés en violation de l'alinéa 3 du IV de l'article L 16 B du livre des procédures fiscales ; concernant certaines sociétés les dispositions du c. du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales ont été méconnues ; les indications données par le service vérificateur sur la nature des traitements informatiques à effectuer sont trop générales et imprécises et caractérisent un défaut d'information et le service vérificateur n'a pas laissé le choix de la forme de la restitution des résultats de tels traitements informatiques ;

- concernant la nature des traitements informatiques effectués dans le cadre de l'application des dispositions du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, la communication des résultats des traitements informatiques effectués par le vérificateur et les comptabilités tenues au moyen de systèmes informatisés, elle est fondée à se prévaloir de la doctrine référencée BOI-CF-IOR-60-40-30 n° 120 et n° 310 du 13 février 2013, BOI-BIC-DECLA-30-10-20-40 n° 170, n° 180 et n° 190 du 13 décembre 2013 ;

- les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ont été méconnues ;

- les propositions de rectification sont insuffisamment motivées en fait concernant les rémunérations et avantages occultes et n'ont pu interrompre le délai de reprise ;

- l'administration a ainsi entaché la procédure d'imposition d'une erreur substantielle au sens de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;

- la comptabilité de chaque société a été tenue régulièrement conformément à la loi fiscale et à la doctrine référencée BOI-BIC-DECLA-30-10-20-50 n° 1 du 17 mars 2014 et BOI-CF-IOR-10-20 n° 80 et n° 90 du 12 septembre 2012 et leur rejet n'est donc n'est pas fondé ;

- par voie de conséquence, la reconstitution du chiffre d'affaires des SARL Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs, des Rives d'Arcins, Bowling du Bassin et Bowling du Pontet est injustifiée ;

- les bases d'imposition de ces sociétés sont exagérées en raison du caractère excessivement sommaire de la méthode utilisée sur la base des pièces saisies qui n'est pas corroborée par une autre méthode de reconstitution ;

- les dettes au passif de la SARL Bayonne loisirs sont justifiées au niveau comptable et par l'existence de conventions de trésorerie entre les sociétés du groupe ;

- c'est à tort que l'administration fiscale a notifié à la SARL Lyon Loisirs des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2015 concernant les loyers pour lesquels aucun justificatif n'avait été présenté dès lors qu'elle a procédé à une régularisation à la fin de l'année 2016 ;

- l'administration ne pouvait imposer les revenus réputés distribués entre ses mains sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts ;

- l'administration n'établit pas l'appréhension des revenus réputés distribués ;

- en particulier, concernant la SARL Bowling Valentine, l'administration ne pouvait retenir une maîtrise conjointe de l'affaire et la présomption d'appréhension des revenus regardés comme distribués ;

- par voie de conséquence, les pénalités ne sont pas fondées.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 27 janvier 2023 et le 21 mars 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts peut être substitué comme fondement de l'imposition des revenus distribués à la base légale initialement retenue, qui était le c. de l'article 111 du même code ;

- concernant la SARL Bowling Valentine, Mme A... disposant seule des pouvoirs les plus étendus au sein de cette société, elle était la seule maître de l'affaire ;

- pour le surplus, les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carotenuto,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,

- et les observations de Me Babin représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... est gérante des SARL Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs, des Rives d'Arcins, Bowling du Bassin et associée aux côtés de son frère, M. A..., gérant, des SARL Bowling du Pontet et Bowling Valentine, sociétés qui font partie d'un groupe informel et qui exercent une activité de loisirs (bowling, billards, jeux vidéo et bar). Elle a fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur l'année 2013 et d'un examen de sa situation fiscale personnelle portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015. L'administratif fiscale, à la suite de la vérification de comptabilité de ces sociétés a réintégré dans leurs résultats imposables des recettes non comptabilisées considérées comme des désinvestissements de fonds sociaux. En conséquence, Mme A... s'est vu notifier par deux propositions de rectification du 16 décembre 2016 et du 28 décembre 2017, selon la procédure de rectification contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, des suppléments d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et des contributions sociales au titre des années 2013 à 2015, issus de la réintégration de ces revenus réputés distribués. Mme A... relève appel du jugement du 9 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a ainsi été assujettie, pour un montant total de 9 357 056 euros.

Sur la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, Mme A... soutient que la procédure de vérification de comptabilité conduite à l'égard des SARL Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs, Bowling du Pontet, Bowling des Rives d'Arcins et Bowling du Bassin est irrégulière et fait valoir que la nature et les résultats des traitements réalisés à partir des fichiers informatiques saisis lors de la visite domiciliaire n'ont pas été portés à la connaissance de chacune des sociétés en violation de l'alinéa 3 du IV de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, que concernant certaines sociétés les dispositions du c. du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales ont été méconnues, que les indications données par le service vérificateur sur la nature des traitements informatiques à effectuer sont trop générales et imprécises et caractérisent un défaut d'information, que le service vérificateur n'a pas laissé le choix de la forme de la restitution des résultats de tels traitements informatiques et que les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ont été méconnues. Toutefois, les irrégularités de la procédure de rectification suivie à l'encontre de ces sociétés, à les supposer même établies, sont sans incidence sur l'imposition personnelle de Mme A..., en vertu du principe d'indépendance des procédures de rectification menées à l'encontre de la société, d'une part, et de ses associés, d'autre part.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rehaussements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

4. Les propositions de rectification des 23 décembre 2016 et 28 décembre 2017 adressées à Mme A... mentionnent le montant des revenus distribués, la catégorie d'imposition et les années d'imposition concernées. Elles indiquent que les rehaussements envisagés font suite aux vérifications de comptabilité des SARL Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs, des Rives d'Arcins, Bowling du Bassin, Bowling du Pontet et Bowling Valentine, qu'ils sont notifiés dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers et fondés sur le c. de l'article 111 du code général des impôts. En particulier, les propositions de rectifications expliquent précisément en quoi Mme A..., en sa qualité de maître de l'affaire de chacune des sociétés, est présumée avoir appréhendé les bénéfices désinvestis qui trouvent leur origine, pour chacune des sociétés, dans des omissions et minorations des recettes imposables et indiquent que " ces prélèvements irréguliers s'analysent comme la mise à votre disposition de fonds sociaux sous forme de rémunérations et avantages occultes ". Ainsi, la motivation des propositions de rectification était suffisante concernant l'imposition des sommes en litige regardées comme des rémunérations et avantages occultes, quel que soit le bien-fondé des motifs, pour que la contribuable puisse utilement faire valoir ses observations, ce qu'elle a d'ailleurs fait par lettres des 21 février 2017, 26 janvier et 20 février 2018, auxquelles l'administration a répondu le 11 juillet 2018. Par suite, le moyen doit être écarté.

5. Il résulte de ce qui précède que la procédure mise en œuvre à l'encontre de Mme A... n'est entachée d'aucune irrégularité. Par suite, la requérante ne saurait demander l'application des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Ainsi qu'il a été dit précédemment, les propositions de rectification répondaient aux exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. Par suite, elles ont, en application des dispositions de l'article L. 189 du livre des procédures fiscales, interrompu le délai de prescription prévu par l'article L. 169 du même livre.

En ce qui concerne le fondement légal de l'imposition des revenus distribués :

7. Aux termes du 1. de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1. de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) ". L'article 111 du même code dispose que : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) / c. les rémunérations ou avantages occultes ; ".

8. L'administration est en droit à tout moment de la procédure contentieuse de demander, pour justifier le bien-fondé d'une imposition, que soit substituée une base légale à celle qui avait été initialement invoquée, dès lors que cette substitution peut être faite sans priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues en matière de procédure d'imposition.

9. L'administration a imposé les revenus distribués entre les mains de Mme A... sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts. Le ministre demande à la cour de substituer à ce fondement celui reposant sur les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du même code au titre des trois années litigieuses. Mme A... n'ayant été privée d'aucune garantie, la substitution de base légale demandée par le ministre doit être accueillie.

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité des sociétés :

10. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux impositions contestées : " Lorsque l'une des commissions ou le comité mentionnés à l'article L. 59 est saisi d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission ou le comité. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou du comité. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la charge de démontrer les graves irrégularités dont serait entachée la comptabilité des sociétés dont Mme A... est gérante ou associée incombe à l'administration.

11. Il résulte de l'instruction qu'à l'occasion des opérations de contrôle des SARL Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs, des Rives d'Arcins, Bowling du Bassin et Bowling du Pontet, le vérificateur a écarté comme irrégulière et non probante chacune des comptabilités présentées. D'une part, la procédure de visite domiciliaire et de saisie diligentée le 24 mars 2016, en application des dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, a révélé l'existence pour chacune des sociétés d'une double comptabilité tenue à partir de fichiers et tableaux Excel, qui rendent compte des encaissements réels des sociétés contrôlées, et des dissimulations de recettes en raison notamment de l'absence de comptabilisation des recettes en espèces et des minorations substantielles des chiffres d'affaires déclarés. A cet égard, Mme A... ne peut sérieusement soutenir que ces fichiers auraient été élaborés à des fins statistiques, pour des " objectifs commerciaux ". D'autre part, les fichiers d'écritures comptables des SARL présentaient, pour les années soumises à vérification en cause, des lacunes, variables selon les années, tenant surtout à des irrégularités dans le traitement des factures dont une absence d'enregistrement de factures, des anomalies dans la numérotation des factures manuscrites, " facturettes " qui ne suit pas un ordre chronologique ainsi que des discordances au niveau des encaissements bancaires. Le vérificateur a également relevé, pour chacune des sociétés, un enregistrement global et manuel mensuel des recettes en dépit de l'existence de logiciels de gestion, rendant ainsi impossible tout chemin de révision journalier, l'absence de dépôt d'espèces en banque et le défaut de leur comptabilisation et l'absence de pièces justificatives pour les enregistrements des recettes. Concernant plus particulièrement la SARL Bayonne Loisirs, le vérificateur a relevé l'absence de comptabilisation de charges telles que des charges d'amortissement sur immeuble ou une charge liée à un contrat de location, et concernant les SARL Bowling des Rives d'Arcins et Bowling du Bassin, l'absence d'inventaire de stocks détaillé. Le vérificateur a, ainsi, constaté que les modalités d'enregistrement ne permettaient pas une traçabilité des opérations réellement effectuées.

12. Si Mme A... fait valoir qu'elle a remis les rapports d'activité journaliers contenant les données sources issues notamment du logiciel " Conqueror ", pour la gestion de l'activité bowling, et " Zatyoo ", pour la gestion du bar, toutefois, l'administration soutient sans être contredite qu'il s'agit de logiciels de gestion qui ne sont pas reliés aux logiciels comptables. Elle ne démontre pas l'absence d'incohérence dans la numérotation des facturettes, alors que le service a relevé que celle-ci ne suivait pas un ordre chronologique. Par ailleurs, si Mme A... fait état d'une comptabilité de trésorerie en fonction des encaissements, qui permettrait, selon elle, de distinguer les différentes activités des SARL et les modes de paiement, elle ne démontre pas l'existence d'une comptabilité d'engagement vérifiable à l'aide des logiciels de gestion existants qui permettent la ventilation des recettes par mode de paiement et nature d'activité. De surcroît, elle n'établit pas l'absence de discordances des recettes en espèces, caractérisées à la suite de la totalisation des paiements mise en évidence à l'aide des " fiches journalières " de recettes saisies. Enfin, elle ne démontre pas davantage par les pièces produites l'exhaustivité du traitement des factures et des rapprochements bancaires. Sans préjudice du défaut de comptabilisation de certaines charges, l'administration justifie ainsi que la comptabilité de chacune des SARL Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs, des Rives d'Arcins, Bowling du Bassin et Bowling du Pontet est entachée de graves irrégularités et par suite, du bien-fondé de leur rejet.

13. Par ailleurs, Mme A... ne conteste pas le rejet de la comptabilité de la SARL Bowling Valentine et aucun élément du dossier ne permet de considérer que ce rejet n'était pas fondé.

14. Enfin, Mme A... n'est pas fondée à se prévaloir, pour contester le rejet de la comptabilité des sociétés, du BOI-CF-IOR-10-20, n° 80 et n° 90 du 12 septembre 2012 et du BOI-BIC-DECLA-30-10-20-50 n° 1 du 17 mars 2014 qui ne donnent pas d'interprétation différente de la loi fiscale.

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires des sociétés et l'existence et le montant des distributions :

15. Il résulte de l'instruction que les reconstitutions des chiffres d'affaires des SARL Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs, des Rives d'Arcins, Bowling du Bassin et Bowling du Pontet ont été opérées à partir des fichiers Excel saisis dans le cadre des perquisitions précédemment évoquées, qui récapitulaient le chiffre d'affaires réalisé par les sociétés, en réintégrant les différences dues aux minorations de recettes. Mme A... se borne à faire valoir que cette méthode n'est pas pertinente dès lors qu'elle n'est pas corroborée par une autre méthode de reconstitution mais n'apporte aucun élément et ne propose pas, au demeurant, de méthode alternative permettant une meilleure approximation des recettes réellement enregistrées. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de chacune de ces sociétés, dont Mme A... était gérante, fondée sur les conditions réelles d'exploitation, n'est ni radicalement viciée dans son principe ni excessivement sommaire. Elle établit ainsi l'existence et le montant des revenus distribués par les SARL Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs, des Rives d'Arcins, Bowling du Bassin et Bowling du Pontet, dès lors que c'est à bon droit que les sommes en cause ont été réintégrées au résultat des sociétés en tant que recettes. Par ailleurs, la requérante ne conteste pas le chiffre d'affaires reconstitué de la SARL Bowling Valentine. L'administration doit donc être regardée comme établissant l'existence et le montant des revenus regardés comme distribués par cette société.

16. Par ailleurs, si la requérante soutient que certaines sommes inscrites au passif de la SARL Bayonne Loisirs sont des avances justifiées faites par d'autres sociétés ayant toutes entre elles des liens en raison de conventions de trésorerie destinées à optimiser la gestion entre les différentes sociétés du groupe, le moyen est inopérant dès lors qu'il résulte de l'instruction que ces réintégrations n'ont pas été regardées comme distribuées au bénéfice de Mme A.... Il en est de même concernant le rappel de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL Lyon Loisirs au titre de la taxe déduite à tort, dont en tout état de cause, la requérante ne justifie pas la régularisation par la société.

En ce qui concerne l'appréhension des revenus distribués :

17. En cas de refus des propositions de rectification par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

18. D'une part, il résulte de l'instruction que l'administration a relevé que Mme A... est la gérante de droit des SARL Bowling du Bassin, des Rives d'Arcins, Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs et se comporte dans les faits comme la gérante de la SARL Bowling du Pontet, qu'elle assure la direction effective de ces sociétés, ainsi que la gestion administrative, commerciale et financière. A ce titre, elle dispose de la signature sur les comptes bancaires des sociétés et est habilitée à effectuer toutes les opérations bancaires sur les comptes des sociétés. La requérante n'apporte aucun élément de nature à contredire ces faits. Ainsi, l'administration a pu regarder à bon droit Mme A... comme maître de l'affaire. Elle apporte, par suite, la preuve de l'appréhension par l'intéressée des revenus distribués par les SARL Bowling du Bassin, des Rives d'Arcins, Bayonne Loisirs, Lyon Loisirs et Bowling du Pontet et était fondée à imposer entre les mains de la requérante les sommes en litige sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.

19. D'autre part, il résulte de l'instruction que Mme A... est associée avec son frère, gérant de droit, de la SARL Bowling Valentine. L'administration a considéré que Mme A... et son frère avaient conjointement la qualité de maîtres de l'affaire et qu'ils avaient appréhendé à raison de 50 % chacun les bénéfices reconstitués de la société qu'il a regardés comme des revenus distribués. L'administration, en appel, fait valoir que Mme A... disposait seule des pouvoirs les plus étendus au sein de la SARL Bowling Valentine, qu'elle exerçait la responsabilité effective de l'ensemble de la gestion administrative, commerciale et financière de la société, qu'elle a été mandatée par son frère pour représenter la société au cours des opérations de vérification, qu'elle était chargée des enregistrements comptables sur le logiciel de comptabilité et effectuait les contrôles à partir des fichiers issus des logiciels de gestion de la société, que les fichiers de suivi journalier de l'activité constitutifs d'une double comptabilité ont été saisis sur son ordinateur portable personnel et qu'elle détenait avec son frère la signature sur le compte bancaire de la société. Cette substitution de motifs n'a pour effet de priver la requérante d'aucune garantie. La requérante n'apportant aucun élément de nature à contredire ces faits, l'administration établit ainsi que Mme A... était la seule maître de l'affaire. Elle apporte, par suite, la preuve de l'appréhension par l'intéressée des revenus distribués par la SARL Bowling Valentine et était fondée à imposer entre ses mains les sommes en litige sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.

Sur les pénalités :

20. La contestation des pénalités doit être rejetée par voie de conséquence du rejet des conclusions à fin de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à la charge de Mme A... qui ne soulève à cet égard aucun moyen propre.

21. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Carotenuto, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 juin 2023.

2

N° 21MA01566


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01566
Date de la décision : 08/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : CABINET VALENTIN ESCALE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-06-08;21ma01566 ?
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