La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/06/2023 | FRANCE | N°21MA04490

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 02 juin 2023, 21MA04490


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 19 juillet 2019 par laquelle la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône lui a retiré son agrément d'assistante maternelle, ainsi que la décision du 17 septembre 2019 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1909503 du 22 septembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 novembre 20

21, Mme B..., représentée par Me Moulin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 19 juillet 2019 par laquelle la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône lui a retiré son agrément d'assistante maternelle, ainsi que la décision du 17 septembre 2019 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1909503 du 22 septembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 novembre 2021, Mme B..., représentée par Me Moulin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 septembre 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler la décision du 19 juillet 2019 par laquelle la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône lui a retiré son agrément d'assistante maternelle, ainsi que la décision du 17 septembre 2019 rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la lettre de sa référente sur laquelle la commission consultative paritaire départementale s'est fondée n'a pas été portée à sa connaissance ; cette lettre a eu une influence sur la décision de retrait d'agrément prise par le département alors que ce dernier avait initialement envisagé de prononcer à son encontre un avertissement ;

- les reproches formulés dans le courrier de convocation à la commission consultative paritaire départementale sont injustifiés ;

- la décision de retrait d'agrément a été prise en méconnaissance des dispositions des articles L. 421-3 et L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles ; elle est fondée sur des faits qui ne sont pas matériellement établis et révèle seulement l'existence de rapports conflictuels avec sa référente ;

- la mesure prise son encontre est disproportionnée.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 mai 2022, le département des Bouches-du-Rhône, représenté par Me Mendes Constante, conclut au rejet de la requête de Mme B....

Par une ordonnance du 16 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le décret n° 2012-364 du 15 mars 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Extremet, représentant le département des Bouches-du-Rhône.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... s'est vu délivrer le 3 mai 2011 un agrément en qualité d'assistante maternelle, renouvelé à plusieurs reprises, lui permettant d'accueillir des enfants âgés de 0 à 6 ans à son domicile. Toutefois, par une décision du 19 juillet 2019, la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a, après un avis défavorable de la commission consultative paritaire départementale du 18 juillet 2019, prononcé le retrait de son agrément en qualité d'assistante maternelle. Mme B... a dès lors formé le 7 août 2019, à l'encontre de cette décision, un recours gracieux qui a été rejeté par une décision du 17 septembre 2019. L'intéressée a alors saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande d'annulation de ces deux décisions, mais le tribunal a rejeté sa demande par un jugement du 22 septembre 2021 dont elle relève appel.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel (...) est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. (...) ". Aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article L. 421-6 du même code : " Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. (...) / Toute décision de retrait de l'agrément (...) doit être dûment motivée (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-23 de ce code : " Lorsque le président du conseil départemental envisage de retirer un agrément, (...) il saisit pour avis la commission consultative paritaire départementale (...) en lui indiquant les motifs de la décision envisagée. / L'assistant maternel (...) concerné est informé, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, des motifs de la décision envisagée à son encontre, de la possibilité de consulter son dossier administratif et de présenter devant la commission ses observations écrites ou orales. (...). L'intéressé peut se faire assister ou représenter par une personne de son choix. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a été convoquée, par une lettre recommandée du 1er juillet 2019, à la séance de la commission consultative paritaire départementale du 18 juillet suivant, chargée d'émettre un avis sur le retrait envisagé de son agrément d'assistante maternelle. Ce courrier l'informait de la possibilité de présenter des observations écrites ou orales devant la commission, de se faire assister par un conseil de son choix et de consulter son dossier. La requérante, qui a ainsi été régulièrement informée de ses droits, a consulté, par le biais de son conseil, son dossier administratif le 5 juillet 2019 et était présente lors de la séance de la commission, assistée de son conseil. La circonstance, au demeurant non établie, qu'une lettre adressée par sa référente à la commission ne lui aurait pas été communiquée et aurait fait l'objet de discussions au cours de la séance n'a pas eu pour effet de priver celle-ci d'une garantie, et n'a pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de l'avis émis par la commission qui, en tout état de cause, était favorable au maintien de l'agrément de Mme B.... En outre, si l'avis de la commission mentionne que la requérante a " un discours imperméable aux conseils donnés par le service " et " des difficultés à se remettre en question ", de tels éléments figurent déjà dans les rapports établis par les services du département à la suite des visites réalisées au domicile de l'intéressée, rapports auxquels cette dernière a eu accès. Enfin, si le département a initialement envisagé, dans le rapport d'évaluation rédigé à la suite d'une visite de suivi réalisée le 16 mai 2019, de prononcer un nouvel avertissement à l'encontre de la requérante, avant de proposer, le 27 juin 2019, le retrait de son agrément, cette circonstance demeure par elle-même sans influence sur le respect, par l'administration, de la procédure contradictoire ayant conduit à l'édiction de la décision contestée. Par suite, le moyen tiré de ce que la procédure de retrait d'agrément engagée à l'encontre de Mme B... serait entachée d'irrégularité doit être écarté.

4. L'article L. 421-3 précité du code de l'action sociale et des familles prévoit, s'agissant de l'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel, qu'un " référentiel approuvé par décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément " et que " L'agrément est accordé (...) si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. (...) ". Le 1° de l'article R. 421-3 du même code précise que pour obtenir cet agrément, le candidat doit : " 1° Présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif ; (...) ".

5. Le référentiel fixant les critères de l'agrément des assistants maternels par le président du conseil départemental, dans sa version annexée au décret du 15 mars 2012, prévoit, dans la sous-section 2 de la section 1 relative à la maîtrise de la langue française orale et aux capacités de communication et de dialogue, qu'il convient " de prendre en compte : (...) 2° L'aptitude à la communication et au dialogue nécessaire pour l'établissement de bonnes relations avec l'enfant, ses parents et les services départementaux de protection maternelle et infantile ; / 3° Les capacités d'écoute et d'observation ; (...) ". Ce même référentiel prévoit dans la sous-section 5 de la même section, relative à la connaissance du métier, du rôle et des responsabilités de l'assistant maternel qu'il convient " de prendre en compte : 1° La capacité à mesurer les responsabilités qui sont les siennes vis-à-vis de l'enfant, de ses parents ainsi que des services départementaux de protection maternelle et infantile (...) / ; 4° La compréhension et l'acceptation du rôle d'accompagnement, de contrôle et de suivi des services départementaux de protection maternelle et infantile. ".

6. Par ailleurs, l'article R. 421-39 du code de l'action sociale et des familles prévoit que " L'assistant maternel est tenu de déclarer au président du conseil départemental, dans les huit jours suivant leur accueil, le nom et la date de naissance des mineurs accueillis ainsi que les modalités de leur accueil et les noms, adresses et numéros de téléphone des représentants légaux des mineurs. Toute modification de l'un de ces éléments est déclarée dans les huit jours. / (...) Il informe le président du conseil départemental du départ définitif d'un enfant et, selon des modalités fixées par le conseil départemental, de ses disponibilités pour accueillir des enfants.". Aux termes de son article R. 421-26 : " Un manquement grave ou des manquements répétés aux obligations de déclaration et de notification prévues aux articles (...) R. 421-39 (...) peuvent justifier, après avertissement, un retrait d'agrément ". Il résulte des termes mêmes de cet article R. 421-26 qu'un manquement aux obligations de déclaration et de notification incombant à un assistant maternel agréé, notamment l'obligation de déclarer sans délai au président du conseil départemental toute modification des informations relatives à sa situation familiale ou aux personnes vivant à son domicile, peut justifier, à la condition qu'il soit grave ou répété, un retrait d'agrément après un avertissement.

7. Pour prononcer le retrait d'agrément de Mme B..., la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône s'est fondée d'une part, sur des manquements à ses obligations de déclaration des mineurs accueillis et d'autre part, sur l'existence de relations difficiles entretenues avec le personnel du service de la protection maternelle et infantile.

8. Il ressort d'un rapport d'évaluation rédigé à la suite d'une visite du 30 mars 2015 que Mme B... ne satisfait pas à ses obligations administratives dès lors qu'elle n'envoie pas les fiches de déclaration d'accueil des enfants au département. Ce rapport a été suivi d'un avertissement le 22 avril 2015, et des observations similaires ont été réitérées notamment dans des rapports du 11 octobre 2018 et du 12 décembre 2018. Une visite inopinée effectuée le 11 juin 2019 relève que Mme B... n'a pas signalé le départ d'un enfant et l'arrivée d'un nouvel enfant, et conclut ainsi que celle-ci ne respecte toujours pas ses obligations de déclaration d'enfants accueillis, ce qu'admet d'ailleurs la requérante dans son recours gracieux formé le 7 août 2019 tout en affirmant qu'elle informait verbalement sa référente de la présence d'enfants à son domicile.

9. Il ressort également des pièces du dossier que Mme B... n'entretient pas de bonnes relations avec le personnel du service de la protection maternelle et infantile et refuse l'accompagnement et le suivi par ce même service. Dans son rapport faisant suite à la visite du 10 juin 2015, sa référente notait déjà que son comportement n'était pas adapté en ce qu'elle n'acceptait pas les remarques et devenait agressive et haussait le ton en présence des enfants accueillis. Un rapport du 11 octobre 2018 rédigé à la suite d'une nouvelle visite de sa référente relève que l'accueil de Mme B... est très insatisfaisant et inadapté à son égard. Un nouvel avertissement a été prononcé le 30 octobre 2018, mettant en évidence, parmi les manquements relevés, des difficultés à la communication et au dialogue. Le rapport du 11 juin 2019 mentionne à nouveau son manque de coopération et des rapports parfois tendus voire agressifs avec le personnel du service de la protection maternelle et infantile. Si la requérante fait valoir que le retrait de son agrément s'explique uniquement par les relations conflictuelles entretenues avec sa référente, il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du 12 décembre 2018, que cette dernière n'hésite pas à formuler des appréciations positives, soulignant d'ailleurs les efforts accomplis depuis le dernier avertissement. En outre, le rapport d'évaluation du 11 juin 2019, qui a abouti au retrait de l'agrément, a été établi en collaboration avec une autre personne, présente en sa qualité de puéricultrice au cours de la visite, ce qui n'est pas sérieusement remis en cause par l'appelante qui affirme sans l'établir que celle-ci n'aurait effectué aucune visite du logement.

10. Par suite, et alors même que son attitude éducative vis-à-vis des enfants n'est pas remise en cause par la décision litigieuse et que des attestations favorables de parents d'enfants sont produites, la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a pu, sans commettre d'erreur de droit ni prononcer une mesure disproportionnée, estimer que les manquements répétés en méconnaissance des dispositions précitées du code de l'action sociale et des familles justifiaient le retrait de l'agrément d'assistante maternelle dont Mme B... bénéficiait.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du département des Bouches-du-Rhône, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au département des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, où siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la cour,

- M. Mahmouti, premier conseiller,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 juin 2023.

2

N° 21MA04490


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA04490
Date de la décision : 02/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

04-02 Aide sociale. - Différentes formes d'aide sociale.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : MOULIN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-06-02;21ma04490 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award