Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association syndicale libre Giroval Sud a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 29 août 2017 par lequel le maire de la commune de Roquefort-les-Pins s'est opposé à la déclaration préalable qu'elle avait déposée le 1er août 2012 en vue de l'installation de deux portails destinés à fermer le lotissement qu'elle gère.
Par un jugement n° 1705730 du 3 février 2021, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 29 août 2017 et a enjoint au maire de Roquefort-les-Pins de prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable déposée par l'association syndicale libre Giroval Sud dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 29 mars 2021, la commune de Roquefort-les-Pins, représentée par Me Plenot, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 3 février 2021 ;
2°) de rejeter la demande de l'association syndicale libre Giroval Sud devant le tribunal administratif de Nice ;
3°) de mettre à la charge de l'association syndicale libre Giroval Sud la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif a pris en considération des éléments postérieurs à l'arrêté contesté ;
- le motif retenu par l'arrêté contesté tiré de ce que les travaux projetés ne prévoient pas la construction d'un local pour la collecte des ordures ménagères en bordure de voie publique commis n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;
- le tribunal administratif ne pouvait régulièrement lui enjoindre de prendre une décision dans un sens déterminé ;
- en édictant le 25 février 2021 un arrêté de non-opposition à la déclaration préalable déposée par l'association syndicale libre Giroval Sud, le maire de Roquefort-les-Pins a exécuté l'injonction prononcée par le jugement attaqué.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 mai 2021, l'association syndicale libre Giroval Sud, représentée par Me Fiorentino, demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête de la commune de Roquefort-les-Pins ;
2°) par la voie de l'appel incident :
- de réformer le jugement attaqué en tant qu'il a fixé à 1 mois le délai imparti au maire de Roquefort-les-Pins pour prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable déposée par l'association syndicale libre Giroval Sud ;
- de ramener à 3 jours ce délai ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Roquefort-les-Pins la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par la commune de Roquefort-les-Pins ne sont pas fondés ;
- l'attitude du maire de Roquefort-les-Pins est dilatoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me Gray, représentant la commune de Roquefort-les-Pins, et de Me Fiorentino, représentant l'association syndicale libre Giroval Sud.
Considérant ce qui suit :
1. L'association syndicale libre Giroval Sud a déposé en mairie de Roquefort-les-Pins une déclaration préalable, reçue le 1er août 2012, en vue de l'installation de deux portails destinés à fermer le lotissement qu'elle gère, dénommé domaine Giroval sud. Par un arrêté du 26 octobre 2012, le maire de Roquefort-les-Pins s'est opposé à cette déclaration préalable. Par un jugement du 15 juin 2017, devenu définitif, le tribunal administratif de Nice a annulé cet arrêté. Par un arrêté du 29 août 2017, le maire a, à nouveau, fait opposition à cette même déclaration préalable. La commune de Roquefort-les-Pins relève appel du jugement du 3 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé ce second arrêté et a enjoint au maire de Roquefort-les-Pins de prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable déposée par l'association syndicale libre Giroval Sud dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard. Par la voie de l'appel incident, cette association demande la réformation du jugement en tant qu'il a fixé ce délai à un mois.
Sur la légalité de l'arrêté du 29 août 2017 :
2. Pour s'opposer, par l'arrêté contesté du 29 août 2017, à la déclaration préalable déposée par l'association syndicale libre Giroval Sud, le maire de Roquefort-les-Pins s'est fondé, d'une part, sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, d'autre part, sur la circonstance que le projet ne prévoyait pas de local poubelle en bordure de voie publique.
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Aux termes de l'article L. 562-4 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan d'occupation des sols, conformément à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme (...) ".
4. Les prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, destinées notamment à assurer la sécurité des personnes et des biens exposés à certains risques naturels et valant servitude d'utilité publique, s'imposent directement aux déclarations préalables à la réalisation de travaux, sans que l'autorité administrative soit tenue de les reprendre dans une décision de non-opposition. L'autorité compétente pour s'opposer à la déclaration préalable peut aussi, si elle estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise et du projet pour lequel la déclaration préalable est déposée, y compris d'éléments déjà connus lors de l'élaboration du plan de prévention des risques naturels, que les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique le justifient, s'opposer, sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, à une déclaration préalable, alors même que le plan n'aurait pas classé le terrain d'assiette du projet en zone à risques ni prévu de prescriptions particulières qui lui soient applicables.
5. Il ressort des pièces du dossier que le projet envisagé ne se situe pas, contrairement à ce qu'indique l'arrêté en litige, en zone B1a (danger modéré à prescription spéciale) du plan de prévention des risques naturels prévisibles d'incendie de forêt (PPRIF) de la commune mais en zone B2 (danger faible). Par suite, cet arrêté est entaché d'une erreur de fait, ainsi que l'ont relevé les premiers juges et comme la commune de Roquefort-les-Pins ne le conteste pas.
6. Le lotissement domaine Giroval sud, qui comporte 31 lots bâtis, est compris dans la partie est d'une zone d'habitat pavillonnaire que borde un espace forestier. Si celui-ci est classé en zone rouge du PPRIF, une zone B1a d'une largeur de 58 à 70 mètres s'interpose entre le lotissement et cet espace forestier. En outre, deux poteaux d'incendie normalisés sont implantés à l'intérieur du périmètre du lotissement en vue de la défense contre le risque d'incendie. L'avis émis le 1er août 2017 par le service départemental d'incendie et de secours, auquel se réfère l'arrêté contesté, mentionne la présence de deux barrières inamovibles installées aux deux autres accès du lotissement qui a pour effet de gêner la progression des engins de lutte contre l'incendie en les obligeant à faire des détours pour défendre le quartier concerné en cas d'incendie de forêt. Ce service a cependant précisé par la suite, le 20 octobre 2017, d'une part, que le projet lui-même était conforme à la réglementation, sous réserve que les portails prévus soient conformes aux prescriptions figurant à l'annexe 5 du PPRIF, d'autre part, que les deux barrières précitées étaient antérieures à l'entrée en vigueur de ce plan, ce qui ne préjugeait pas de leur mise en conformité ultérieure aux prescriptions de cette annexe ou de leur transformation en barrières de défense des forêts contre les incendies (DFCI). Or, il résulte tant du formulaire CERFA de déclaration que de la pièce complémentaire transmise au service instructeur suite à une demande du 14 août 2012 que, conformément aux prescriptions énoncées à l'annexe 5 du PPRIF, les portails automatiques projetés présentent une largeur de 4 mètres, supérieure à la largeur minimale de 3 mètres, et qu'ils sont équipés d'un système de déverrouillage extérieur par clé polycoise utilisable par les sapeurs-pompiers. Au demeurant, le SDIS avait émis le 27 août 2012 et le 8 janvier 2013, un avis favorable au projet au motif que celui-ci ne réduisait pas la défense du secteur contre l'incendie. Dans ces conditions, en s'opposant à la déclaration préalable déposée par l'association syndicale libre Giroval Sud sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le maire de Roquefort-les-Pins a entaché l'arrêté du 29 août 2017 d'une erreur d'appréciation, ainsi que l'a considéré le tribunal administratif de Nice.
7. En second lieu, le maire de Roquefort-les-Pins a constaté dans son arrêté que le projet ne prévoyait pas de local poubelle en bordure de voie publique et accessible par les véhicules de collecte, permettant le remisage des bacs en nombre suffisant. Il a estimé que le ramassage des ordures ménagères ne pouvait s'effectuer à l'intérieur des propriétés privées dès lors qu'une telle opération impliquait l'engament de dépenses publiques dans l'intérêt de personnes privées. Un tel motif est étranger aux considérations d'urbanisme, comme l'a jugé le tribunal administratif. Le maire a donc commis une erreur de droit en se fondant sur ce motif.
8. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas de l'avis émis le 3 octobre 2012 par la communauté d'agglomération de Sophia-Antipolis, chargée de la gestion du service public de ramassage des ordures ménagères, que la création d'un local poubelle en bordure de voie publique serait nécessaire pour assurer le respect des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors que les travaux de pose des portails litigieux ne sont pas de nature à porter atteinte à la salubrité publique. Dans ces conditions, l'arrêté attaqué est entaché d'illégalité sur ce point.
Sur l'injonction prononcée par le tribunal administratif :
9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol ou l'opposition à une déclaration de travaux régies par le présent code a fait l'objet d'une annulation juridictionnelle, la demande d'autorisation ou la déclaration confirmée par l'intéressé ne peut faire l'objet d'un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à la date d'intervention de la décision annulée sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire. ".
10. Lorsqu'une juridiction, à la suite de l'annulation d'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol, fait droit à des conclusions aux fins d'injonction sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, ces conclusions du requérant doivent être regardées comme confirmant sa demande initiale. Par suite, la condition posée par l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme imposant que la demande ou la déclaration soit confirmée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire doit être regardée comme remplie lorsque la juridiction enjoint à l'autorité administrative de délivrer l'autorisation d'urbanisme sollicitée. Par ailleurs, lorsque le juge annule un refus d'autorisation ou une opposition à une déclaration après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux prescriptions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation ou de prendre une décision de non-opposition. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée, qui, eu égard aux dispositions précitées de l'article L. 600-2 demeurent applicables à la demande, interdisent de l'accueillir pour un motif que l'administration n'a pas relevé, ou que, par suite d'un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date du jugement y fait obstacle.
11. Aucun motif invoqué par la commune, tant dans sa décision initiale, qu'à l'occasion de la présente instance, n'est de nature à justifier la décision d'opposition contestée. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction qu'un motif que l'administration n'a pas relevé ou qu'un changement dans la situation de droit ou de fait du projet en litige ferait obstacle à l'édiction d'une décision de non-opposition. Dans ces conditions, la commune de Roquefort-les-Pins n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif ne pouvait régulièrement lui enjoindre de prendre une décision dans un sens déterminé.
12. En second lieu, la circonstance, alléguée par l'association syndicale libre Giroval Sud, que l'attitude du maire de Roquefort-les-Pins serait dilatoire, ne rend pas excessif le délai d'un mois imparti à cette autorité par le tribunal administratif de Nice pour prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable déposée par l'association.
13. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Roquefort-les-Pins n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 29 août 2017. L'association syndicale libre Giroval Sud n'est pas davantage fondée à soutenir que le délai d'un mois imparti au maire de Roquefort-les-Pins pour prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable déposée par l'association est excessif.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association syndicale libre Giroval Sud qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Roquefort-les-Pins demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Roquefort-les-Pins une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'association syndicale libre Giroval Sud et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la commune de Roquefort-les-Pins et les conclusions de l'association syndicale libre Giroval Sud présentées par la voie de l'appel incident sont rejetées.
Article 2 : La commune de Roquefort-les-Pins versera à l'association syndicale libre Giroval Sud une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Roquefort-les-Pins et à l'association syndicale libre Giroval Sud.
Délibéré après l'audience du 27 avril 2023, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Quenette, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mai 2023.
N° 21MA01231 2
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