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06/04/2023 | FRANCE | N°21MA01407

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 06 avril 2023, 21MA01407


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association pour la défense de l'environnement rural (ADER) a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 18 avril 2018 par lequel le maire de Barbentane a délivré à M. B... un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment lié à l'activité équestre.

Par un jugement n° 1809714 du 1er février 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 avril 2021, l'associat

ion pour la défense de l'environnement rural, représentée par Me Troncin, demande à la cour :

1°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association pour la défense de l'environnement rural (ADER) a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 18 avril 2018 par lequel le maire de Barbentane a délivré à M. B... un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment lié à l'activité équestre.

Par un jugement n° 1809714 du 1er février 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 avril 2021, l'association pour la défense de l'environnement rural, représentée par Me Troncin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er février 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Barbentane du 18 avril 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Barbentane et de M. B... la somme de 3 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le permis litigieux est entaché d'un vice de procédure en l'absence de consultation de la commission départementale mentionnée à l'article L. 111-5 du code de l'urbanisme ;

- le dossier de demande de permis de construire présente un caractère insuffisant au regard des articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme et les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation à cet égard ;

- le terrain d'assiette est situé en dehors des parties urbanisées de la commune et le projet litigieux n'est pas nécessaire à l'activité agricole au sens de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme ;

- le projet litigieux méconnaît l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme ;

- il ne respecte pas l'article L. 110-1 du code de l'environnement ;

- le maire de Barbentane a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 août 2021, la commune de Barbentane, représentée par Me Guin et Me Héquet, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 800 euros soit mise à la charge de l'association pour la défense de l'environnement rural au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'association requérante ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir à l'encontre du permis de construire en litige ;

- les moyens invoqués par l'association requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a déposé, le 22 décembre 2017, une demande de permis de construire en vue de l'édification d'un manège équestre d'une surface de plancher de 2 403 mètres carrés et équipé d'une toiture photovoltaïque sur un terrain cadastré section BZ nos 45 et 49, situé route de Terrefort sur le territoire de la commune de Barbentane, lequel n'était alors couvert par aucun document local d'urbanisme. Par un arrêté du 18 avril 2018, le maire de Barbentane a, au vu notamment d'un avis conforme tacite émis par le préfet des Bouches-du-Rhône, délivré le permis de construire ainsi sollicité. L'association pour la défense de l'environnement rural relève appel du jugement du 1er février 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

2. Il ressort de l'article 2 des statuts de l'association pour la défense de l'environnement rural qu'elle a pour objet de " maintenir la qualité de la vie rurale " et de " mettre en œuvre les actions contre les personnes physiques ou morales ne respectant pas les règles en matière d'urbanisme et d'environnement ", plus particulièrement dans le département des Bouches-du-Rhône. Ce même article 2, qui précise que l'association œuvre en faveur de la protection " des paysages et du cadre de vie ", et en particulier dans les " zones classées et protégées ", indique que la réalisation de ces objectifs se traduit par la lutte contre " les violations des règles d'urbanisme " ainsi que par la mise en œuvre d'une " action pour la sauvegarde de ses intérêts dans le domaine de l'environnement, de l'aménagement harmonieux et équilibré du territoire et de l'urbanisme ". Le projet de M. B... consiste en l'édification d'un vaste bâtiment destiné à recevoir du public sur un terrain situé à proximité du massif de la Montagnette, lequel est concerné par une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique. L'association requérante, qui est agréée pour la protection de l'environnement en vertu de l'article L. 141-1 du code de l'environnement et mène ses actions essentiellement dans le secteur du massif de la Montagnette, justifie, au regard de son objet social, d'un intérêt pour demander l'annulation du permis de construire en litige.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

3. Aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune ". L'article L. 111-4 du même code dispose que : " Peuvent toutefois être autorisés en dehors des parties urbanisées de la commune : (...) / 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole (...) ; / 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que, dans les communes dépourvues de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, la règle de constructibilité limitée n'autorise, en dehors des parties urbanisées de la commune, que les constructions et installations nécessaires, notamment, à l'exploitation agricole. Ce lien de nécessité, qui doit faire l'objet d'un examen au cas par cas, s'apprécie entre, d'une part, la nature et le fonctionnement des activités de l'exploitation agricole et, d'autre part, la destination de la construction ou de l'installation projetée. Il s'ensuit que la seule qualité d'exploitant agricole du pétitionnaire ne suffit pas à caractériser un tel lien.

5. Pour vérifier que la construction ou l'installation projetée est nécessaire à une exploitation agricole, l'autorité administrative compétente doit s'assurer au préalable, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la réalité de cette exploitation agricole, laquelle est caractérisée par l'exercice effectif d'une activité agricole d'une consistance suffisante.

6. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est situé en dehors des parties urbanisées de la commune de Barbentane, dont le territoire n'était régi par aucun document local d'urbanisme à la date de l'arrêté contesté. Si M. B..., qui est affilié à la mutuelle sociale agricole en qualité de chef d'exploitation depuis le 1er janvier 1999, a joint à sa demande de permis de construire une " notice agricole " faisant état de la présence de soixante-cinq chevaux au sein du centre équestre qu'il exploite et indiquant que le bâtiment projeté vise à permettre le développement des activités de ce centre équestre, ni les éléments joints à cette demande, ni les autres pièces du dossier ne font apparaître que l'intéressé exerçait, à la date de l'arrêté contesté, une activité d'élevage de chevaux d'une consistance suffisante. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un projet viable d'exploitation agricole, orientée notamment vers l'élevage d'équidés, était envisagé par le pétitionnaire à cette même date. A cet égard, si la commune de Barbentane fait valoir que le bâtiment projeté doit être destiné à l'hébergement, au débourrage et au dressage des chevaux, au développement des activités de reproduction et d'élevage des poulains, ainsi qu'au stockage de la paille, du foin et des autres produits nécessaires à l'élevage des chevaux, ces allégations d'ordre général ne sont corroborées ni par le dossier de demande de permis de construire qui ne comporte pas de telles précisions, ni par les autres éléments versés aux débats. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le bâtiment projeté, destiné à la pratique de l'équitation et permettant l'accueil du public à l'occasion de manifestations ou de compétitions, était, à la date de l'arrêté contesté, nécessaire à une exploitation agricole au sens et pour l'application des dispositions citées ci-dessus du 2° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme. Enfin, si la commune de Barbentane fait valoir que le projet litigieux pouvait être autorisé en dehors des parties urbanisées dès lors qu'il est incompatible avec le voisinage des zones habitées au sens des dispositions du 3° du même article L. 111-4, elle n'assortit pas ses allégations sur ce point de précisions suffisantes, relatives notamment aux caractéristiques du projet de M. B..., permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, et alors que le projet en cause ne relève d'aucune des autres exceptions à la règle de constructibilité limitée prévues par cet article L. 111-4, l'association requérante est fondée à soutenir que le permis de construire en litige a été délivré en méconnaissance des dispositions citées au point 3.

7. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature à entraîner l'annulation de l'arrêté contesté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que l'association pour la défense de l'environnement rural est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Barbentane du 18 avril 2018 et à demander l'annulation de ce jugement et de cet arrêté.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'association pour la défense de l'environnement rural qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Barbentane une somme de 1 500 euros à verser à l'association requérante sur le même fondement. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit au surplus des conclusions présentées par l'association pour la défense de l'environnement rural sur le fondement de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er février 2021 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du maire de Barbentane du 18 avril 2018 est annulé.

Article 3 : La commune de Barbentane versera une somme de 1 500 euros à l'association pour la défense de l'environnement rural au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association pour la défense de l'environnement rural, à la commune de Barbentane, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ainsi qu'à M. C... B....

Copie en sera transmise au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Tarascon.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. Quenette, premier conseiller,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.

2

N° 21MA01407

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01407
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation nationale.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : TRONCIN

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-04-06;21ma01407 ?
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