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06/04/2023 | FRANCE | N°21MA00222

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 06 avril 2023, 21MA00222


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la délibération du 4 octobre 2018 par laquelle le conseil municipal de Mougins a déclaré d'intérêt général le projet dénommé " Campus Sport-Santé " et approuvé la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme communal avec ce projet, ainsi que la décision du 17 décembre 2018 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1900830 du 12 novembre 2020, le tribunal administr

atif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mém...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la délibération du 4 octobre 2018 par laquelle le conseil municipal de Mougins a déclaré d'intérêt général le projet dénommé " Campus Sport-Santé " et approuvé la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme communal avec ce projet, ainsi que la décision du 17 décembre 2018 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1900830 du 12 novembre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 8 janvier 2021 et le 3 février 2022, l'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières, représentée par Me Maria, doit être regardée comme demandant à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 12 novembre 2020 ;

2°) d'annuler la délibération du 4 octobre 2018 et la décision du 17 décembre 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mougins la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges ont commis une dénaturation des faits ainsi qu'une erreur de droit ;

- le tribunal aurait dû joindre ses demandes enregistrées sous le n° 1900830 et le n° 1901266 ;

- la délibération n° 2018-75 approuvant le principe de la vente de diverses parcelles, qui a été prise pour l'application de la délibération en litige, est entachée de plusieurs illégalités ;

- l'opération litigieuse ne relevait pas de la procédure de mise en compatibilité du plan local d'urbanisme ;

- la délibération attaquée a été prise en méconnaissance du 2° de l'article L. 153-54 du code de l'urbanisme ;

- la délibération attaquée est entachée d'une " erreur manifeste d'appréciation " dès lors que le projet n'est pas conforme à l'intérêt général, ni en cohérence avec le parti d'aménagement de la commune ;

- la délibération attaquée est entachée d'un " détournement de procédure ".

Par des mémoires en défense enregistrés le 7 septembre 2021 et le 4 avril 2022, la commune de Mougins, représentée par Me Grech, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 7 000 euros soit mise à la charge de l'association requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable dès lors qu'elle ne respecte pas les exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, faute de comporter des moyens d'appel ;

- les deux instances engagées par l'association requérante ne présentent pas un lien suffisant de nature à justifier une jonction ;

- les moyens invoqués par l'association requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- les observations de Me Filippi, représentant l'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières, et celles de Me Grech, représentant la commune de Mougins.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération n° 2018-086 du 4 octobre 2018, le conseil municipal de Mougins a approuvé la déclaration de projet n° 1, emportant mise en compatibilité du plan local d'urbanisme communal, afin de permettre la réalisation d'un projet dénommé " Campus Sport-Santé " au sein du domaine du Pigeonnier situé dans le quartier du Font de l'Orme. Le recours gracieux formé à l'encontre de cette délibération par l'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières a été expressément rejeté par une décision du maire de Mougins du 17 décembre 2018. L'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières relève appel du jugement du 12 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération du 4 octobre 2018 et de cette décision du 17 décembre 2018.

Sur la demande de jonction :

2. Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge administratif dispose, sans jamais y être tenu, de la faculté de joindre deux ou plusieurs affaires. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de joindre la requête visée ci-dessus avec la requête de l'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières enregistrée sous le n° 21MA00221.

Sur la régularité du jugement :

3. En premier lieu, l'absence de jonction est, par elle-même, insusceptible d'avoir un effet sur la régularité de la décision rendue et ne peut, par suite, être contestée en tant que telle devant le juge d'appel. Par suite, les premiers juges n'ont pas entaché la procédure juridictionnelle d'irrégularité en ne procédant pas à la jonction des demandes de l'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières enregistrées sous le n° 1900830 et le n° 1901266 au greffe du tribunal.

4. En second lieu, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, l'association requérante ne peut utilement se prévaloir, pour demander l'annulation du jugement attaqué, de la dénaturation des faits et de l'erreur de droit commises, selon elle, par les premiers juges.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. En premier lieu, l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale.

6. Il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de Mougins a, par une délibération n° 2018-075 du 4 octobre 2018, approuvé le principe de la vente de diverses parcelles situées au lieu-dit " B... ", ainsi que la constitution de servitudes de passage, afin de permettre l'aménagement de l'accès au site du projet dénommé " Campus Sport-Santé ". Contrairement à ce qui est soutenu, la délibération en litige, qui approuve la déclaration de projet n° 1, valant mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de Mougins, pour la réalisation de ce futur campus, n'a pas été prise pour l'application de la délibération n° 2018-075 du 4 octobre 2018, laquelle n'en constitue pas la base légale. Par ailleurs, ces deux délibérations ne s'inscrivent pas dans le cadre d'une même opération complexe. Il suit de là que les moyens tirés de l'illégalité, par voie d'exception, de la délibération n° 2018-075 du 4 octobre 2018 ne peuvent être utilement invoqués à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la délibération en litige.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 300-6 du code de l'urbanisme : " (...) les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement, se prononcer, par une déclaration de projet, sur l'intérêt général d'une action ou d'une opération d'aménagement au sens du présent livre ou de la réalisation d'un programme de construction. Les articles (...) L. 153-54 à L. 153-59 sont applicables sauf si la déclaration de projet adoptée par l'Etat, un de ses établissements publics, un département ou une région a pour effet de porter atteinte à l'économie générale du projet d'aménagement et de développement durables du schéma de cohérence territoriale et, en l'absence de schéma de cohérence territoriale, du plan local d'urbanisme (...) ". Les dispositions des articles L. 153-54 à L. 153-59 du même code organisent la procédure de mise en compatibilité du plan local d'urbanisme avec une opération d'utilité publique ou d'intérêt général.

8. Il ressort des pièces du dossier que le projet dénommé " Campus Sport-Santé " prévoit notamment l'édification, au sein du domaine du Pigeonnier dont une partie non négligeable doit être conservée en espaces naturels, d'équipements sportifs ainsi que de trois immeubles d'habitation, dont un comportant des logements locatifs sociaux. Ce projet vise en particulier à permettre le développement de la pratique sportive en association avec des acteurs du secteur de la santé et à proposer, outre une offre diversifiée de logements, de nouvelles activités économiques liées au domaine de la santé, à l'hébergement hôtelier ainsi qu'à la restauration. L'opération d'aménagement en cause, qui répond à plusieurs objectifs énoncés dans le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Mougins, entre dans le champ de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme. L'association requérante n'établit pas, en tout état de cause, que la déclaration de projet approuvée par la délibération en litige pourrait avoir pour effet de porter atteinte à l'économie générale de ce projet d'aménagement et de développement durables. Dans ces conditions, le moyen, au demeurant non assorti de précisions suffisantes, tiré de ce que la réalisation de l'opération litigieuse ne relevait pas de la procédure de mise en compatibilité prévue par les articles L. 153-54 et suivants du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 153-54 du code de l'urbanisme : " Une opération faisant l'objet (...) d'une déclaration de projet, et qui n'est pas compatible avec les dispositions d'un plan local d'urbanisme ne peut intervenir que si : (...) / 2° Les dispositions proposées pour assurer la mise en compatibilité du plan ont fait l'objet d'un examen conjoint de l'Etat, de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ou de la commune et des personnes publiques associées mentionnées aux articles L. 132-7 et L. 132-9 (...) ".

10. Il ressort des pièces du dossier, et il est d'ailleurs constant, que le président du conseil régional et le président de l'établissement public chargé de l'élaboration du SCOT'Ouest ont été convoqués à la réunion des personnes publiques associées prévue le 12 mars 2018 à Mougins en vue de l'examen conjoint prévu par les dispositions citées au point précédent. D'une part, si l'association requérante soutient qu'il n'est pas établi qu'une " information circonstanciée sur le projet et ses implications " ait été délivrée à ces deux autorités, elle ne se prévaut à cet égard d'aucune disposition législative ou réglementaire et ne conteste d'ailleurs pas que le " projet de déclaration de projet n° 1 " a été mis à disposition des deux personnes publiques associées en cause " sous format numérique ", ainsi que l'indiquent les courriers de convocation versés aux débats par la commune de Mougins. D'autre part, la circonstance que ces deux autorités, dûment invitées par le maire de Mougins à participer à la réunion organisée conformément aux exigences du 2° de l'article L. 153-54 du code de l'urbanisme, n'ont pas participé à cette réunion n'est pas de nature à entacher la procédure d'irrégularité.

11. En quatrième lieu, pour l'application des dispositions du code de l'urbanisme citées ci-dessus, il appartient à l'autorité compétente d'établir, de manière précise et circonstanciée, sous l'entier contrôle du juge, l'intérêt général qui s'attache à la réalisation de la construction ou de l'opération à l'origine de la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme, au regard notamment des objectifs économiques, sociaux et urbanistiques poursuivis par la collectivité publique intéressée.

12. Si l'association requérante persiste à soutenir que l'opération litigieuse ne répond pas à un intérêt général, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit au point 11 du jugement attaqué.

13. En cinquième lieu, le moyen tiré de ce que l'opération ayant justifié la déclaration de projet n° 1 et la mise en compatibilité litigieuse du plan local d'urbanisme de Mougins ne serait pas cohérente avec le parti d'aménagement de la commune, au regard en particulier des " grands objectifs " n° 2 et n° 3 du projet d'aménagement et de développement durables de ce plan, n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

14. En sixième et dernier lieu, l'existence d'un détournement de procédure ou de pouvoir n'est aucunement établie, alors que l'opération litigieuse répond à un intérêt général comme l'ont relevé les premiers juges.

15. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Mougins ni de faire droit à la demande de communication de pièces présentée par l'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de la commune de Mougins, laquelle n'est pas la partie perdante dans la présente instance. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Mougins au titre des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières est rejetée.

Article 2 : L'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières versera une somme de 1 500 euros à la commune de Mougins au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Comité de défense de Mougins - Les Campelières et à la commune de Mougins.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. Quenette, premier conseiller,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.

2

N° 21MA00222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA00222
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU). - Légalité des plans. - Modification et révision des plans.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : CABINET MARIA - RISTORI-MARIA

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-04-06;21ma00222 ?
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