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30/03/2023 | FRANCE | N°21MA02060

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 30 mars 2023, 21MA02060


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle demeure assujettie au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1704917 du 26 mars 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 31 mai 2021, le 7 décembre 2021 et

le 7 mars 2022, Mme A..., représentée par Me Rieutord, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle demeure assujettie au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1704917 du 26 mars 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 31 mai 2021, le 7 décembre 2021 et le 7 mars 2022, Mme A..., représentée par Me Rieutord, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 26 mars 2021 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;

3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure de taxation d'office a été irrégulièrement mise en œuvre ;

- la proposition de rectification du 5 août 2013 ne lui a pas été régulièrement notifiée ;

- l'administration ne lui a pas communiqué la proposition de rectification, la privant ainsi des garanties résultant de l'indication des conséquences financières et de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

- c'est à tort que les virements provenant de M. B..., son concubin, ont été regardés comme des revenus d'origine indéterminée ;

- les chèques de 1 400 et 1 550 euros encaissés le 6 janvier et le 18 janvier 2010, ainsi que les chèques de 600, 10 000 et 600 euros encaissés le 6 janvier, le 5 mars et le 6 décembre 2010, correspondant à des sommes débitées du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans les écritures de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Marino, ne sont pas imposables ;

- la somme de 18 000 euros portée au crédit de son compte bancaire le 25 janvier 2010, qui correspond à un prêt à la consommation, n'est pas imposable ;

- elle aurait dû bénéficier d'une demi-part supplémentaire de quotient familial dès lors qu'elle vit seule et assume la charge de son fils ;

- l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré n'est pas fondée.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 octobre 2021, le 10 février 2022 et le 7 juin 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2010 et 2011, à l'issue duquel l'administration fiscale l'a assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant de rehaussements correspondant à des revenus fonciers et de la taxation d'office de revenus d'origine indéterminée. Mme A... relève appel du jugement du 26 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt auxquels elle demeure assujettie au titre des années 2010 et 2011 à l'issue de l'admission partielle de sa réclamation préalable, et des pénalités correspondantes.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ". Aux termes de cet article L. 16 : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, notamment lorsque le total des montants crédités sur ses relevés de compte représente au moins le double de ses revenus déclarés (...) ". Aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " (...) Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite ".

3. Mme A..., en se bornant à produire la copie de lettres datées du 22 juillet 2013, qu'elle aurait envoyées à l'administration en réponse aux mises en demeure qui lui ont été adressées sur le fondement de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, ne démontre pas que l'administration aurait effectivement reçu ces compléments de réponse. Par conséquent, elle n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait irrégulièrement mis en œuvre la procédure de taxation d'office prévue par l'article L. 69 du même livre.

4. En deuxième lieu, il incombe à l'administration d'établir que la proposition de rectification est parvenue en temps utile au contribuable. En cas de retour à l'expéditeur du pli recommandé contenant le document, le contribuable ne peut être regardé comme l'ayant reçu que s'il est notamment établi qu'il a été avisé, par la délivrance d'un avis de passage, de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste dont il relève. Cette preuve peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve.

5. La proposition de rectification du 5 août 2013 adressée à Mme A... a été envoyée à son domicile le 9 août 2013. Le pli correspondant, présenté à l'adresse de ce domicile le 10 août 2013 ainsi que l'attestent les mentions de l'accusé de réception indiquant " présenté/avisé le : 10 août 2013 ", a été retourné à l'administration avec la mention " pli avisé et non réclamé ". Ces éléments, d'ailleurs confirmés par une attestation établie par les services postaux, sont suffisamment clairs, précis et concordants pour établir que Mme A... a été régulièrement avisée, dès le 10 août 2013, de ce que le pli litigieux était à sa disposition au bureau de poste dont elle relève, lequel est mentionné sur l'accusé de réception produit au dossier, alors même que, contrairement à ce qu'exige l'instruction postale du 6 septembre 1990, le préposé n'aurait pas reporté le motif de non-distribution sur le pli postal, mention qui ne revêt pas en l'espèce de caractère substantiel, et que l'adresse mentionnée sur l'enveloppe a été rayée. La requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir que la proposition de rectification ne lui a pas été régulièrement notifiée.

6. En troisième lieu, Mme A..., qui n'allègue ni n'établit avoir demandé à l'administration de lui communiquer une copie de la proposition de rectification du 5 août 2013, ne peut utilement soutenir qu'en s'abstenant de lui communiquer une telle copie, l'administration l'aurait privée des garanties résultant de l'indication des conséquences financières du contrôle et de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.

Sur le bien-fondé des impositions :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Il appartient à Mme A..., régulièrement taxée d'office à raison de revenus d'origine indéterminée sur le fondement de l'article L. 69 du même livre, d'apporter la preuve de l'exagération des impositions litigieuses.

8. D'une part, les virements provenant de son concubin, M. B..., portés au crédit du compte bancaire de Mme A... pour des montants totaux respectifs de 181 750 euros en 2010 et de 17 300 euros en 2011, ne sauraient être regardés comme des virements de compte à compte en raison de la procuration dont M. B... dispose sur le compte bancaire, dès lors que ce compte est ouvert au seul nom de Mme A.... La circonstance que d'autres sommes ont été virées depuis ce compte au bénéfice de M. B... ne permet pas davantage de démontrer que les sommes en cause ne seraient pas imposables. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a taxé d'office les sommes en litige en tant que revenus d'origine indéterminée.

9. D'autre part, si Mme A... soutient désormais que les chèques de 1 400 et 1 550 euros encaissés le 6 janvier et le 18 janvier 2010 sur le compte joint dont elle est titulaire avec M. B... correspondent à des sommes débitées du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans les écritures de l'EURL Marino, et doivent ainsi être regardées comme des virements de compte à compte, la seule production devant la Cour d'un extrait du compte courant d'associé ne permet pas de justifier de la réalité des flux financiers. Par ailleurs, si la requérante soutient qu'il en va de même des chèques de 600, 10 000 et 600 euros encaissés le 6 janvier, le 5 mars et le 6 décembre 2010 sur le compte bancaire sur lequel M. B... dispose d'une procuration, ce compte est ouvert au seul nom de Mme A..., ainsi qu'il a été dit précédemment. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a taxé d'office les sommes en litige en tant que revenus d'origine indéterminée.

10. Enfin, l'administration a imposé en tant que revenu d'origine indéterminée une somme de 18 000 euros correspondant à un chèque porté le 25 janvier 2010 au crédit du compte bancaire de Mme A.... Si cette dernière soutient que cette somme correspond à un prêt à la consommation, la seule production de documents relatifs à un prêt consenti à M. B... est insuffisante pour démontrer le caractère non imposable de la somme en litige. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a taxé d'office cette somme en tant que revenu d'origine indéterminée.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 193 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions de l'article 196 B, le revenu imposable est pour le calcul de l'impôt sur le revenu, divisé en un certain nombre de parts, fixé conformément à l'article 194, d'après la situation et les charges de famille du contribuable (...) ". Aux termes de cet article 194 : " I. Le nombre de parts à prendre en considération pour la division du revenu imposable prévue à l'article 193 est déterminé conformément aux dispositions suivantes : / Célibataire ou divorcé ayant un enfant à charge = 1,5. / (...) II. Pour l'imposition des contribuables célibataires ou divorcés qui vivent seuls, le nombre de parts prévu au I est augmenté de 0,5 lorsqu'ils supportent à titre exclusif ou principal la charge d'au moins un enfant (...) ".

12. Il résulte de la proposition de rectification du 5 août 2013 que l'administration fiscale a considéré, pour le calcul de l'impôt dû, que Mme A... bénéficiait de 1,5 parts de quotient familial et il est constant que l'intéressée n'a pas fait mention, dans ses déclarations de revenus, de sa qualité de parent isolé. L'administration était dès lors fondée à retenir 1,5 parts de quotient familial pour le calcul des impositions en litige. En se bornant à soutenir qu'elle supporterait à titre exclusif la charge de son fils, sans le démontrer par la seule production de relevés bancaires, et alors qu'elle indique elle-même entretenir avec M. B..., qui est le père de l'enfant, des relations notoires de concubinage, et que ce dernier a également déclaré cet enfant à charge, la requérante n'établit pas qu'elle remplissait les conditions prévues par le II de l'article 194 du code général des impôts pour bénéficier de la majoration de quotient familial.

Sur les pénalités :

13. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ".

14. Pour justifier l'application de la majoration pour manquement délibéré, l'administration fait état des importantes omissions en matière de revenus fonciers, correspondant à des loyers encaissés et non déclarés, et des sommes figurant au crédit des comptes bancaires de la requérante au titre des deux années en litige, sans qu'aucune justification sérieuse de la nature de ces sommes n'ait été apportée, et du montant particulièrement important des revenus omis au titre des deux années considérées. Par suite, elle justifie le caractère délibéré de l'insuffisance de déclaration et donc l'application de la majoration pour manquement délibéré.

15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

16. En premier lieu, la présente affaire n'a donné lieu à aucun dépens. Par suite, les conclusions présentées par Mme A... sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

17. En second lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme A... la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2023, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mars 2023.

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N° 21MA02060


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